Dans le faisceau des vivants
Valérie Zénatti
Editions de l'Olivier, 2019
Aharon Appelfeld est mort le 4 janvier 2018 et Valérie Zenatti l'apprend dans le taxi qui l'emmène à Orly, en route pour le retrouver - trop tard- à l'hôpital. Elle évoque longuement sa découverte de l'auteur, ses rencontres avec lui, son travail de traductrice, de ses romans, ou en interview. Elle visionne des vidéos. Elle est en deuil, comme pour un père, et dans la seconde partie du livre elle se rend à Czernowitz (Tchernivtsi aujourd'hui, en Ukraine), le jour anniversaire de la naissance d'Appelfeld, près de cette ville, le 16 février 1932). Se laissant porter par le hasard, puis choisissant de se rendre au bord du fleuve, non sans avoir vécu la veille une drôle d'expérience de sidération.
Un livre qui permet de mieux connaître Aharon Appelfeld (avoir lu au moins un de ses livres -c'est mon cas- ça aide quand même) et Valérie Zenatti.
Des passages permettant de saisir en partie la belle richesse de cet essai:
"Lorsque j'écris mes propres livres, je vis pendant plusieurs mois avec ceux que l'on appelle mes personnages, ils accomplissent leur travail de transformation intérieure, ils cherchent en moi une raison de vivre en éclairant quelques zones d'ombre sur leur passage et quand le livre est achevé, laissant derrière eux un sillage d'espoir fragile - d'autres les aimeront peu-être. Tandis que lorsque je traduis ses livres, ses personnages entrent en moi, pas à pas, et une fois la traduction terminée, ils ne me quittent plus, ils font partie de moi." VZ
"Avant de partager la même langue, avant que l'hébreu soit conquis au terme d'un combat où chaque mot introuvable était un désarroi amer et chaque mot correctement employé un soulagement, avant cela nous avons partagé le silence hébété des 'nouveaux immigrants'. Puis nous nous sommes mis à parler cette langue dans laquelle nous n'avions pas vécu, c'est-à-dire une langue dans laquelle nous n'avions pas découvert le monde ni été aimés, dans laquelle nous n’avions pas souffert non plus, et surtout dans laquelle n'étaient pas inscrits les silences de l'enfance. Nous nous sommes glissés dans l'hébreu comme dans des draps rugueux, dans une hospitalité qui créait grossièrement mais sûrement un espace inviolable par le passé, dont on pouvait se donner l'illusion qu'il n'avait pas eu lieu. Le merveilleux oubli avait aussi permis la renaissance." VZ
"Je me sens chez moi en Europe. Mes parents parlaient français et ils seraient malheureux aujourd'hui de voir que je ne le parle pas. C'étaient des gens laïcs, ils n'allaient jamais à la synagogue mais le jour de Kippour ils fermaient les volets et lisaient A la recherche du temps perdu." AA
Les avis de Aifelle, Sylire, Laure,
Valérie Zénatti
Editions de l'Olivier, 2019
Aharon Appelfeld est mort le 4 janvier 2018 et Valérie Zenatti l'apprend dans le taxi qui l'emmène à Orly, en route pour le retrouver - trop tard- à l'hôpital. Elle évoque longuement sa découverte de l'auteur, ses rencontres avec lui, son travail de traductrice, de ses romans, ou en interview. Elle visionne des vidéos. Elle est en deuil, comme pour un père, et dans la seconde partie du livre elle se rend à Czernowitz (Tchernivtsi aujourd'hui, en Ukraine), le jour anniversaire de la naissance d'Appelfeld, près de cette ville, le 16 février 1932). Se laissant porter par le hasard, puis choisissant de se rendre au bord du fleuve, non sans avoir vécu la veille une drôle d'expérience de sidération.
Un livre qui permet de mieux connaître Aharon Appelfeld (avoir lu au moins un de ses livres -c'est mon cas- ça aide quand même) et Valérie Zenatti.
Des passages permettant de saisir en partie la belle richesse de cet essai:
"Lorsque j'écris mes propres livres, je vis pendant plusieurs mois avec ceux que l'on appelle mes personnages, ils accomplissent leur travail de transformation intérieure, ils cherchent en moi une raison de vivre en éclairant quelques zones d'ombre sur leur passage et quand le livre est achevé, laissant derrière eux un sillage d'espoir fragile - d'autres les aimeront peu-être. Tandis que lorsque je traduis ses livres, ses personnages entrent en moi, pas à pas, et une fois la traduction terminée, ils ne me quittent plus, ils font partie de moi." VZ
"Avant de partager la même langue, avant que l'hébreu soit conquis au terme d'un combat où chaque mot introuvable était un désarroi amer et chaque mot correctement employé un soulagement, avant cela nous avons partagé le silence hébété des 'nouveaux immigrants'. Puis nous nous sommes mis à parler cette langue dans laquelle nous n'avions pas vécu, c'est-à-dire une langue dans laquelle nous n'avions pas découvert le monde ni été aimés, dans laquelle nous n’avions pas souffert non plus, et surtout dans laquelle n'étaient pas inscrits les silences de l'enfance. Nous nous sommes glissés dans l'hébreu comme dans des draps rugueux, dans une hospitalité qui créait grossièrement mais sûrement un espace inviolable par le passé, dont on pouvait se donner l'illusion qu'il n'avait pas eu lieu. Le merveilleux oubli avait aussi permis la renaissance." VZ
"Je me sens chez moi en Europe. Mes parents parlaient français et ils seraient malheureux aujourd'hui de voir que je ne le parle pas. C'étaient des gens laïcs, ils n'allaient jamais à la synagogue mais le jour de Kippour ils fermaient les volets et lisaient A la recherche du temps perdu." AA
Les avis de Aifelle, Sylire, Laure,
Commentaires
Mais là, c'est fort intéressant, ce 'dialogue', et plein d'extraits sont à noter!