Ta mémoire,
petit monde
Alain Foix
Gallimard, Haute enfance, 2005
Voici le sixième maillon de la chaîne des livres, choisi par Stephie.
Les premières lignes:
" Prenons un petit monde au hasard dans la rue. Tenez, dans Pointe-à-Pitre, sur le trottoir de la rue Barbès. Il sort tout juste de l'école et fixe le caniveau. Dans le ruisseau, son bateau de papier. Au bout de la rue, un bâtiment immense. Sa coque de noix va droit dessus. Un géant blanc posé sur l'eau et qui écrase la ville de majesté. Le Colombie, comme c'est écrit dessus, pousse un long hurlement et arrête le temps. La ville est suspendue et le monde médusé. C'est la terre qu'on déchire, le géant se délivre. Une lente déchirure, mouvement inexorable, et la mer s'y engouffre. Un gouffre de vertige, d'un bleu à s'y noyer. Et le monde rapetisse à mesure qu'il s'éloigne. Le bateau de papier a mouillé l'encre bleue. Le vent l'a renversé, l'enfant l'a oublié. Bientôt c'est le grand jour où il verra le monde du pont du Colombie. "
Alain Foix évoque son enfance à la Guadeloupe de façon impressionniste; comme dans la réalité de la mémoire lointaine, ses souvenirs se mélangent, se poursuivent, tourbillonnent, ce qui donne une première partie où il vaut mieux se laisser emporter par sa prose poétique rythmée comme une danse.
"L'écrit m'était venu d'une main se posant sur la mienne, d'une voix douce, des cheveux sur ma nuque, d'un parfum qui caresse. La jeune fille aux yeux verts? Je ne sais plus. Elle avait pris son temps. Me revient une danse dont j'apprenais les pas, où j'étais enlacé. Je me souviens de traces, d'entrelacs et de noeuds comme de longs cheveux bleus. J'apprenais à écrire comme on apprend les tresses. Un jour elle me lâcha et ma main dansa seule sur le blanc du papier de la claire fontaine. Elle laissa derrière elle des traces et des volutes, des pleins et des déliés, un joli sillon bleu."
Ensuite Le Colombie l'a emporté à la métropole, en un froid mois de novembre 1962, et c'est la découverte d'une cité de la banlieue parisienne, des clans, du racisme, de l'amitié, du collège, du sport, de sa place entre deux mondes. Evocation des années 60, la télévision noir et blanc, les courses de moto, la vision du noir dans les bandes dessinées d'époque (très intéressant!). Choix de sa destinée, arrivée de la maturité.
Un très beau livre, magnifiquement écrit, que je suis ravie d'avoir découvert!
Les avis de Fashion, Leiloona, Yueyin , Isil, Levraoueg, Armande,
Alain Foix
Gallimard, Haute enfance, 2005
Voici le sixième maillon de la chaîne des livres, choisi par Stephie.
Les premières lignes:
" Prenons un petit monde au hasard dans la rue. Tenez, dans Pointe-à-Pitre, sur le trottoir de la rue Barbès. Il sort tout juste de l'école et fixe le caniveau. Dans le ruisseau, son bateau de papier. Au bout de la rue, un bâtiment immense. Sa coque de noix va droit dessus. Un géant blanc posé sur l'eau et qui écrase la ville de majesté. Le Colombie, comme c'est écrit dessus, pousse un long hurlement et arrête le temps. La ville est suspendue et le monde médusé. C'est la terre qu'on déchire, le géant se délivre. Une lente déchirure, mouvement inexorable, et la mer s'y engouffre. Un gouffre de vertige, d'un bleu à s'y noyer. Et le monde rapetisse à mesure qu'il s'éloigne. Le bateau de papier a mouillé l'encre bleue. Le vent l'a renversé, l'enfant l'a oublié. Bientôt c'est le grand jour où il verra le monde du pont du Colombie. "
Alain Foix évoque son enfance à la Guadeloupe de façon impressionniste; comme dans la réalité de la mémoire lointaine, ses souvenirs se mélangent, se poursuivent, tourbillonnent, ce qui donne une première partie où il vaut mieux se laisser emporter par sa prose poétique rythmée comme une danse.
"L'écrit m'était venu d'une main se posant sur la mienne, d'une voix douce, des cheveux sur ma nuque, d'un parfum qui caresse. La jeune fille aux yeux verts? Je ne sais plus. Elle avait pris son temps. Me revient une danse dont j'apprenais les pas, où j'étais enlacé. Je me souviens de traces, d'entrelacs et de noeuds comme de longs cheveux bleus. J'apprenais à écrire comme on apprend les tresses. Un jour elle me lâcha et ma main dansa seule sur le blanc du papier de la claire fontaine. Elle laissa derrière elle des traces et des volutes, des pleins et des déliés, un joli sillon bleu."
Ensuite Le Colombie l'a emporté à la métropole, en un froid mois de novembre 1962, et c'est la découverte d'une cité de la banlieue parisienne, des clans, du racisme, de l'amitié, du collège, du sport, de sa place entre deux mondes. Evocation des années 60, la télévision noir et blanc, les courses de moto, la vision du noir dans les bandes dessinées d'époque (très intéressant!). Choix de sa destinée, arrivée de la maturité.
Un très beau livre, magnifiquement écrit, que je suis ravie d'avoir découvert!
Les avis de Fashion, Leiloona, Yueyin , Isil, Levraoueg, Armande,
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Ys
Il y a 4 ans
Leiloona
Il y a 4 ans
Armande
Il y a 4 ans
Marie
Il y a 4 ans
A_girl_from_earth
Il y a 4 ans
Stephie
Il y a 4 ans
Florinette
Il y a 4 ans
Géraldine
Il y a 4 ans
levraoueg
Il y a 4 ans
Mango
Il y a 4 ans
keisha
Il y a 4 ans
Isil
Il y a 4 ans
keisha
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Gio
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keisha
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sybilline
Il y a 4 ans
keisha
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calypso
Il y a 4 ans
keisha
Il y a 4 ans
Restling
Il y a 4 ans
keisha
Il y a 4 ans
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