Générosité
Richard Powers
le cherche midi, lot49, 2011
Enfin un roman de Richard Powers, dans la collection Lot49 à laquelle le printemps a apporté une nouvelle tenue...
"Si nous pouvons empêcher ce qui nous fait du mal, pourquoi ne pas promouvoir ce qui nous fait du bien?" Existe-t-il un "gêne du bonheur"? Thassa Amzwar le possède-t'elle?"Etincelante comme un gigantesque marronnier en plein soleil", elle est l'allégresse personnifiée. Originaire de Kabylie, où son père a été assassiné, elle a émigré au Canada après le décès de sa mère, puis démarré des études à Chicago. Là elle fait connaissance de Russell Stone, son professeur et de Candace Weld, psychologue de l'université. Solide sur son socle de bonheur, elle va rencontrer un généticien intéressé par sa particularité, participer à un talk show (cet Oona show en évoque d'autres...).
Au delà des interrogations sur la recherche en génétique et ses dérives possibles, Powers met en lumière l'influence grandissante des medias, d'internet, ainsi que le caractère illusoire et passager des nouvelles ou rumeurs qui passionnent le public.
Impossible, vraiment, de communiquer sur cette lecture sans la dénaturer. C'est Richard Powers, et pour ceux qui ne connaissent pas, sachez qu'il n'est pas homme à trancher, mais à présenter, questionner, pousser le lecteur dans ses retranchements. Le moindre paragraphe peut se révéler motif à réflexion sans fin, la moindre phrase peut receler des comparaisons ou raccourcis déconcertants. Mais, éblouissant, léger, il passe et entraîne vers d'autres chemins. Tirant son lecteur vers le haut, il n'hésite pas à agrémenter ses phrases d'expressions scientifiques transfigurées par une écriture dense, très dense, prenante. Il virevolte, laissant parfois sur sa faim, mais réussit quand même à rendre ses personnages attachants.
Je ne prétends pas avoir tout saisi, je pourrais parler aussi d'écriture et de fiction, sorte de fil rouge du roman, jusqu'à l'éblouissante dernière page...
Les références à peine esquissées à des événements plus ou moins récents peuvent transformer la lecture des romans de Powers en un bel entraînement neuronal ... qui en vaut la peine. Au détour d'un paragraphe, lecteur, sois vigilant, voici un voyage en avion Etats Unis-France:
"Très loin sous ses pieds, à une distance qu'elle ne sera pas capable d'estimer, quelque chose de la taille d'un continent glissera vers l'ouest. La surface en contrebas, étendue de blanc ininterrompu à peine quelques années plus tôt, sera semée de tavelures et piquée de bleu."
Un extrait (page 60)
"Mais qui sont ses amours de fiction? Il a d'abord éprouvé une vague et précoce convoitise pour Jo March. Puis Emma Woodhouse a suscité en lui un impérieux besoin d'amitié: il voulait lui passer des billets amusants pendant les cours d'initiation à le biologie qui se donnent à jamais dans la classe de l'esprit. Avec Dorothea Brooke, il a fait de longues parties de campagne, bivouaquant souvent avec elle sous les étoiles sans jamais rien toucher que ses lèvres. Beaucoup plus tard, il s'est bien amusé avec Odette, puis plus du tout. Il a tenté de protéger Daisy Miller mais a échoué lamentablement. Il a essayé de désirer Daisy Buchanan, mais n'a réussi qu'à la faire geindre à force de la secouer.
Emma Bovary lui a flanqué la trouille de sa vie. Chaque fois qu'ils se trouvaient réunis dans la même pièce, il pâlissait dans son coin, en proie à d'illicites ardeurs. Avec Anna Arkadievna, il a eu une histoire pleine de lettres insensées, d'entrevues téméraires et de rencontres volées : maintes fois, et jusqu'à l'excès, elle est venue se dresser devant lui, en plein midi, aux moments les plus opportuns de son existence trop prosaïque. Lily Bart l'a épouvanté sur deux continents, mais, au bout du compte, il aurait fait n'importe quoi pour elle- si elle le lui avait demandé. Comme les auteurs canoniques de la littérature mondiale, Russell Stone nourrissait un penchant immodéré pour les jolies suicidées."
Richard Powers est évidemment un auteur à lire absolument. Voir aussi Le temps où nous chantions, La chambre aux échos , L'ombre en fuite.
Entretien avec l'auteur sur fluctuat.net,
L'avis de Cuné, (mon billet étant programmé, je lis le sien maintenant, courez-y!)
Merci à l'éditeur et à Solène Perronno, deux ans sans Powers, ce fut long!
Richard Powers
le cherche midi, lot49, 2011
Enfin un roman de Richard Powers, dans la collection Lot49 à laquelle le printemps a apporté une nouvelle tenue...
"Si nous pouvons empêcher ce qui nous fait du mal, pourquoi ne pas promouvoir ce qui nous fait du bien?" Existe-t-il un "gêne du bonheur"? Thassa Amzwar le possède-t'elle?"Etincelante comme un gigantesque marronnier en plein soleil", elle est l'allégresse personnifiée. Originaire de Kabylie, où son père a été assassiné, elle a émigré au Canada après le décès de sa mère, puis démarré des études à Chicago. Là elle fait connaissance de Russell Stone, son professeur et de Candace Weld, psychologue de l'université. Solide sur son socle de bonheur, elle va rencontrer un généticien intéressé par sa particularité, participer à un talk show (cet Oona show en évoque d'autres...).
Au delà des interrogations sur la recherche en génétique et ses dérives possibles, Powers met en lumière l'influence grandissante des medias, d'internet, ainsi que le caractère illusoire et passager des nouvelles ou rumeurs qui passionnent le public.
Impossible, vraiment, de communiquer sur cette lecture sans la dénaturer. C'est Richard Powers, et pour ceux qui ne connaissent pas, sachez qu'il n'est pas homme à trancher, mais à présenter, questionner, pousser le lecteur dans ses retranchements. Le moindre paragraphe peut se révéler motif à réflexion sans fin, la moindre phrase peut receler des comparaisons ou raccourcis déconcertants. Mais, éblouissant, léger, il passe et entraîne vers d'autres chemins. Tirant son lecteur vers le haut, il n'hésite pas à agrémenter ses phrases d'expressions scientifiques transfigurées par une écriture dense, très dense, prenante. Il virevolte, laissant parfois sur sa faim, mais réussit quand même à rendre ses personnages attachants.
Je ne prétends pas avoir tout saisi, je pourrais parler aussi d'écriture et de fiction, sorte de fil rouge du roman, jusqu'à l'éblouissante dernière page...
Les références à peine esquissées à des événements plus ou moins récents peuvent transformer la lecture des romans de Powers en un bel entraînement neuronal ... qui en vaut la peine. Au détour d'un paragraphe, lecteur, sois vigilant, voici un voyage en avion Etats Unis-France:
"Très loin sous ses pieds, à une distance qu'elle ne sera pas capable d'estimer, quelque chose de la taille d'un continent glissera vers l'ouest. La surface en contrebas, étendue de blanc ininterrompu à peine quelques années plus tôt, sera semée de tavelures et piquée de bleu."
Un extrait (page 60)
"Mais qui sont ses amours de fiction? Il a d'abord éprouvé une vague et précoce convoitise pour Jo March. Puis Emma Woodhouse a suscité en lui un impérieux besoin d'amitié: il voulait lui passer des billets amusants pendant les cours d'initiation à le biologie qui se donnent à jamais dans la classe de l'esprit. Avec Dorothea Brooke, il a fait de longues parties de campagne, bivouaquant souvent avec elle sous les étoiles sans jamais rien toucher que ses lèvres. Beaucoup plus tard, il s'est bien amusé avec Odette, puis plus du tout. Il a tenté de protéger Daisy Miller mais a échoué lamentablement. Il a essayé de désirer Daisy Buchanan, mais n'a réussi qu'à la faire geindre à force de la secouer.
Emma Bovary lui a flanqué la trouille de sa vie. Chaque fois qu'ils se trouvaient réunis dans la même pièce, il pâlissait dans son coin, en proie à d'illicites ardeurs. Avec Anna Arkadievna, il a eu une histoire pleine de lettres insensées, d'entrevues téméraires et de rencontres volées : maintes fois, et jusqu'à l'excès, elle est venue se dresser devant lui, en plein midi, aux moments les plus opportuns de son existence trop prosaïque. Lily Bart l'a épouvanté sur deux continents, mais, au bout du compte, il aurait fait n'importe quoi pour elle- si elle le lui avait demandé. Comme les auteurs canoniques de la littérature mondiale, Russell Stone nourrissait un penchant immodéré pour les jolies suicidées."
Richard Powers est évidemment un auteur à lire absolument. Voir aussi Le temps où nous chantions, La chambre aux échos , L'ombre en fuite.
Entretien avec l'auteur sur fluctuat.net,
L'avis de Cuné, (mon billet étant programmé, je lis le sien maintenant, courez-y!)
Merci à l'éditeur et à Solène Perronno, deux ans sans Powers, ce fut long!
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mango
Il y a 2 ans
cathulu
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La Pyrénéenne
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Choco
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Chocoah
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Choco
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Choco
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Karine:)
Il y a 2 ans
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