Que voit-on quand on lit?
What we see when we read, 2014
Une phénoménologie avec illustrations
Peter Mendelsund
Robert laffont, 2015
Traduit par Odile Demange
L'auteur est directeur artistique chez Albert A. Knopf et Pantheon Books, également pianiste classique, et vit à New York.
"La mémoire est faite d'imaginaire; l'imaginaire fait de mémoire."
Nous lisons des romans, nous lisons (peut-être) Anna Karénine, Moby Dick, Voyage au phare, Jane Eyre, Madame Bovary, Le bruit et la fureur, Ulysse, A la recherche du temps perdu (mais point n'est besoin ici de les avoir lus); nous avons conscience que quelque chose se passe dans notre tête, mais quoi? Nous nous représentons Anna Karénine, mais Tolstoï en dit peu, alors ce que nous voyons d'elle est-il semblable à ce que voit un autre lecteur? L'abondance de détails permet-elle de mieux 'voir'? Quelle est la part de l'imagination? De la mémoire?
"On ne devrait voir d'adaptation filmée d'un livre qu'on aime qu'après avoir pris en compte, très soigneusement, que la distribution du film a de fortes chances de remplacer définitivement les personnages du livre dans notre esprit. C'est un risque parfaitement réel."
Par exemple pour moi maintenant Autant en emporte le vent, ce sont ces deux là:
"Certains lecteurs ont-ils une imagination plus précise que d'autres? Ou l'imagination qui accompagne la lecture est-elle une ressource dont nous sommes universellement et uniformément dotés?"
"Les livres nous autorisent certaines libertés - nous sommes libres d'être mentalement actifs en lisant; nous participons pleinement à la création (à l'imagination ) d'un récit."
Quand nous lisons une histoire se déroulant en un lieu inconnu, nous nous accrochons à notre connu. Pour l'auteur la maison d'été des Ramsay ressemble à celle louée par sa famille au Cape Cod. "Nous exilons, rapatrions les personnages dans des pays que nous connaissons mieux."
J'ajouterai qu'il peut exister une expérience intéressante à la relecture d'un roman après avoir visité le lieu où cela se déroule (ou même sans. Quand je relis j'imagine parfois autrement les lieux, ou semblablement, j'ignore pourquoi. Vous êtes semblables ou c'est moi seule?)
"Les images que nous 'voyons' en lisant sont personnelles: ce que nous ne voyons pas, c'est ce que l'auteur a imaginé en écrivant tel ou tel livre. Autrement dit: tout récit est destiné à être transposé; traduit par l'imagination. traduit par des associations. Il est nôtre."
"Lire un roman ne revient-il pas à mettre en scène une sorte de pièce de théâtre privée? "
Pour terminer (provisoirement), sachez que je n'ai pas épuisé toutes les richesses de ce livre original...
What we see when we read, 2014
Une phénoménologie avec illustrations
Peter Mendelsund
Robert laffont, 2015
Traduit par Odile Demange
L'auteur est directeur artistique chez Albert A. Knopf et Pantheon Books, également pianiste classique, et vit à New York.
"La mémoire est faite d'imaginaire; l'imaginaire fait de mémoire."
Nous lisons des romans, nous lisons (peut-être) Anna Karénine, Moby Dick, Voyage au phare, Jane Eyre, Madame Bovary, Le bruit et la fureur, Ulysse, A la recherche du temps perdu (mais point n'est besoin ici de les avoir lus); nous avons conscience que quelque chose se passe dans notre tête, mais quoi? Nous nous représentons Anna Karénine, mais Tolstoï en dit peu, alors ce que nous voyons d'elle est-il semblable à ce que voit un autre lecteur? L'abondance de détails permet-elle de mieux 'voir'? Quelle est la part de l'imagination? De la mémoire?
"On ne devrait voir d'adaptation filmée d'un livre qu'on aime qu'après avoir pris en compte, très soigneusement, que la distribution du film a de fortes chances de remplacer définitivement les personnages du livre dans notre esprit. C'est un risque parfaitement réel."
Par exemple pour moi maintenant Autant en emporte le vent, ce sont ces deux là:
"Certains lecteurs ont-ils une imagination plus précise que d'autres? Ou l'imagination qui accompagne la lecture est-elle une ressource dont nous sommes universellement et uniformément dotés?"
"Les livres nous autorisent certaines libertés - nous sommes libres d'être mentalement actifs en lisant; nous participons pleinement à la création (à l'imagination ) d'un récit."
Quand nous lisons une histoire se déroulant en un lieu inconnu, nous nous accrochons à notre connu. Pour l'auteur la maison d'été des Ramsay ressemble à celle louée par sa famille au Cape Cod. "Nous exilons, rapatrions les personnages dans des pays que nous connaissons mieux."
J'ajouterai qu'il peut exister une expérience intéressante à la relecture d'un roman après avoir visité le lieu où cela se déroule (ou même sans. Quand je relis j'imagine parfois autrement les lieux, ou semblablement, j'ignore pourquoi. Vous êtes semblables ou c'est moi seule?)
"Les images que nous 'voyons' en lisant sont personnelles: ce que nous ne voyons pas, c'est ce que l'auteur a imaginé en écrivant tel ou tel livre. Autrement dit: tout récit est destiné à être transposé; traduit par l'imagination. traduit par des associations. Il est nôtre."
"Lire un roman ne revient-il pas à mettre en scène une sorte de pièce de théâtre privée? "
Pour terminer (provisoirement), sachez que je n'ai pas épuisé toutes les richesses de ce livre original...
Ce livre, au demeurant magnifique, pose de bonnes questions sur nos habitudes de lecture (et de relecture).
RépondreSupprimerUne découverte en librairie, et hop, en mains... et tout de suite lu en plus! Actuellement je lis un livre sur la relecture (on n'en sort pas, mais quel bonheur!
SupprimerIl y a des adaptations cinéma ou télé que je refuse absolument de voir, tellement j'ai une idée précise du personnage (exemple : Wallander). Et quand je commencer par un film et que je lis après, quelque chose est faussé dès le départ, "on" a imaginé pour moi et le résultat n'est en général pas terrible. En brref, un livre futé si je comprend bien.
RépondreSupprimerA mon goût, tant qu'à faire, il vaut mieux lire d'abord un livre, l'adaptation c'est après. Je vois toujours Darcy en Colin Firth (ce qui n'est pas désagréable, a-hum), mais j'ignore bien à quoi il ressemblait lors de ma première lecture...)
SupprimerUn livre futé et inclassable, finalement.
Je ne sais pas ce que vaut le bouquin mais le sujet est particulièrement intéressant. Je note la référence du livre pour le feuilleter chez mon libraire...
RépondreSupprimerIl vient de sortir je pense, donc doit pouvoir se feuilleter...
SupprimerBigrement intéressant ! Suis comme Aifelle : j'évite certaines adaptations (beaucoup, même) pour ne pas mettre en péril l'image que j'ai des personnages, des lieux, de l'atmosphère. ça me fait penser à Bello qui dit qu'il y autant de romans que de lecteurs...
RépondreSupprimerBello a raison (encore une fois... ^_^)
SupprimerJe vais peu au cinéma, vois peu d'adaptations en fait, c'est aussi bien, surtout quand je veux relire...
Intéressant mais les adaptations ciné et télé avaient déjà suscité ce genre de réflexions aussi on est évidemment d'accord avec ce qu'il dit ! Je me souviens de ma réaction en voyant ma 1ère adaptation (les oiseaux se cachent pour mourir), j'avais été déçue au départ et puis après je m'étais habituée (j'avais genre 10 ans.. j'ai lu bcp de livres pour "grands" à cet âge-là, je les piquais chez ma mamie)
RépondreSupprimerJe partage ton avis sur Scarlett et Rhett mais pas sur Darcy ;-) Je n'ai pas du tout aimé cette adaptation, Darcy c'est Matthew Macfadyen m'enfin !! LOL
Le livre a l'air plus intéressant avec ce "portrait-robot" et c'est amusant de voir que certains se refusent à voir toute adaptation.
Et puis ça me fait penser à ce cher Jerome (pas le nôtre, hein) je parle de mon romancier préféré, Salinger, qui a interdit toute adaptation télé ou ciné de son Catcher in the rye (l'attrape-coeurs), laissant donc aux lecteurs leur propre imaginaire pour le personnage d'Holden Caulfield ! J'imagine qu'à sa sortie, on lui prêtait le visage de James Dean et maintenant celui de Bieber ! Oh non please !!
J'ai lu Les oiseaux se cachent pour mourir (mais pas vu l'adaptation), à un âge adulte. On ne se méfie pas assez quand on envoie les enfants chez leurs grands parents, ils y font des découvertes! (bon moi c'étaient les voyages de Gulliver et Les veillées des chaumières... ^_^ chez les uns, et Colette et Kästner chez les autres)
SupprimerOh désolation totale, en plus il pleut, ma journée est fichue : Darcy c'est Colin Firth, na. Je précise que j'ai vu les deux adaptations. Je me souviens quand je fréquentais un forum où deux camps existaient, selon l'adaptation...
Salnger, j'avoue un jeté/abandonné page 40, sans doute dû à la traduction je pense. Ou à mon âge tro pavancé. bref je m'amuse parce que je suis en train de lire un bouquin sur la relecture, et L'attrape-coeurs est beaucoup relu paraît-il. (Bieber? M'enfin)
je suis entièrement d'accord avec ce que tu dis , et l'exemple que tu as pris est particulièrement frappant , je n'aime pas trop les adaptations au cinéma de mes livres préférés. Mon petit monde intérieur se sent lésé de quelque chose.
RépondreSupprimerMon petit monde intérieur, comme le tien, est riche et coloré...^_^
SupprimerIndéniablement original ais je ne suis pas certain pour autant d'y trouver mon compte.
RépondreSupprimerAh bon? je parierais que si. J'aime bien ce genre de réflexions (mais il faut dire que je lis toujours ou presque avec le cerveau en mode observation)(je me laisse rarement aller, pfff)
SupprimerMais si, le premier Mardi c'est permis ;-)
SupprimerGné? ^_^
Supprimerj'hésite souvent à regarder les adaptations ciné des livres que j'ai lus j'y retrouve rarement mes propres images ! J'aime bien me faire mon propre cinéma !
RépondreSupprimerQuand on lit, on est metteur en scène, scénariste (un peu), chef déco, etc.
SupprimerC'est un point de départ passionnant, et exactement pour la raison que tu dis, je ne regarde quasiment jamais l'adaptation des livres que j'ai aimés.
RépondreSupprimerSi on ne les a pas aimés, finalement c'est moins grave, on dirait, mais si on les a aimés (et qu'on est susceptibles de les relire) mieux vaut ne pas s'occuper des adaptations...
SupprimerEn ce moment, je lis un roman historique (1870) je ne peux pas m'empêcher d'imaginer le paysage à l'époque, mais bizarrement je le vois plutôt en noir et blanc... j'imagine des cartes postales ou des vieilles photos que l'auteur a dû compulser pour écrire le voyage de ses personnages.
RépondreSupprimerBref, ce livre m'intéresse !
Ah ta remarque est énormément intéressante! Les photos de cette époque sont plutôt en noir et blanc, alors on imagine en noir et blanc. Affaire à creuser.
Supprimerça a l'air super intéressant !
RépondreSupprimerCe l'est! Feuilleté, acheté et lu quasiment dans la foulée!
Supprimerrelectures, adaptations au cinéma, tout cela est bien intéressant. J'ai pris en grippe les adaptations de Donna Léone à la télé (pourtant ce n'est pas Tolstoï!)
RépondreSupprimerNon, ce n'est pas Tolstoï, mais personnellement j'ai dans la tête comment se présente le logement du commissaire, plus mes propres images de Venise... alors je te comprends.
SupprimerC'est un truc qui me parle beaucoup beaucoup ! De manière générale, je fuis les les adaptations ciné, je préfère garder MON image du roman et des perso. Mais bon, j'essaie de m'assouplir un peu sur le sujet. Pour Autant en Emporte le Vent, c'est un peu différent, car j'ai vu le film avant de lire le livre. Ma mère aimait beaucoup, et j'ai du le voir avec elle 5 ou 6 fois, avant de lire le roman lui-même au lycée.
RépondreSupprimerDans le même ordre d'idée, je déteste les rééditions en poche qui choisissent une affiche ciné ou photo d'une adaptation ciné, pour illustrer la couverture : c'est comme si on m'imposait un cadre de lecture.
Et sinon, il faut que je remonte le fil de ton blog pour voir s'il n'y aurait pas encore quelque matière à visiter mon libraire :)
Bonne soirée !
Comme j'ai lu Autant en emporte le vent avant de voir le film, pas de souci pour moi (mais je l'ai relu, bien sûr, et en VO même). Je déteste aussi les photos cinéma sur les couvertures (et les bandeaux en général). Mais on est cernés, je parle plus bas de la couverture d'Anna Karénine en poche, il s'agit d'un tableau.
SupprimerVoilà pourquoi je préfère la lecture au cinéma. Ces images qui sont uniques et personnelles, différentes d'un lecteur à l'autre, l'imagination qui travaille et qui fabrique lieux et personnages à partir de multiples éléments. C'est tellement plus riche et passionnant que la passivité du cinéma.
RépondreSupprimerPour une 'grande' oeuvre, peut-on adapter? Je n'ai rien vu sur A la recherche du temps perdu (ah, si, une partie en BD, pas mal faite d'ailleurs). On a tous notre petit écran dans la tête...
SupprimerUne thématique irrésistible pour moi, le type de réflexions auxquelles je ne résiste pas puisque c'est complètement au coeur de notre activité de lecteur ! Mon bouclier ne fait pas le poids pour le coup. Gros aargh mais il saura se montrer ferme dans les prochains jours (craquage à la bib' en plus).
RépondreSupprimerTu comprends pourquoi ce bouquin est passé de la case 'feuillette en librairie' à 'lire'. J'en ai repéré sur la littérature américaine, mais bon, j'ai résisté.
SupprimerLes craquages bib' ne comptent pas pareil. (c'est ma CB qui parle)
Un livre qui me paraît génial, les questions qu'il pose sont tellement justes, pertinentes. ET c'est vrai que tout récit est forcément "destiné à être transposé". C'est pourquoi j'aime la transposition au cinéma, par curiosité, pour voir ce qu'a vu le réalisateur puisque l'on ne peut pas voir ce que l'auteur a imaginé! Mais je ne suis pas obligé d'adhérer à sa vision donc cela ne dérange pas mon "petit monde intérieur". Et si je ne peux voir comme toi Rhet Butler et Scarlet autrement, je ne le regrette pas! C'est tout à fait satisfaisant!
RépondreSupprimerAh mais oui, j'espère que tu n'es pas gênée, en tant que responsable du Un livre/un film! Tu dois bien savoir que parfois une adaptation déçoit (et parfois elle magnifie le livre). On adhère ou pas, mais quand même les images s'impriment un peu dans le cerveau.
SupprimerClark Gable, ça ne me dérange pas. ^_^
Je voyais tout à fait Anna Karénine comme ça ! un livre qui semble passionnant !
RépondreSupprimerJ'ai du mal à ne pas la voir comme sur la couverture du livre de poche (un tableau de la galerie Tretiakov d'ailleurs)
SupprimerVoilà un sujet intéressant, en effet. (Déçue par Anna Karénine, je ne la voyait pas comme ça !)
RépondreSupprimerTolstoï ne la décrit pas si précisément, mais quand même elle est brune.
SupprimerBientôt noël chic on va pouvoir passer quelques commandes, celui là il me le faut peut être comprendrai-je enfin ce qui se passe quand je lis
RépondreSupprimerScarlett c'est définitivement Vivian Leigh évidement et Karen Blixen Meryl Streep
J'ignore si tu auras la réponse à toutes tes questions. Sans doute des pistes de réflexion et d'autres questions...
SupprimerJ'ai passé (trop) de temps en librairie récemment, mais il existe encore des livres qui me tentent!
On se fait des films en lisant et l'adaptation cinéma peut être moins bonne que notre propre vision... Autant, je peux lire un roman et voir le film tiré de ce bouquin après, autant l'inverse m'est difficile...
RépondreSupprimerEn général les lecteurs préfèrent lire d'abord! Pour Orgueil et Préjugés, heureusement l'adaptation TV dure 6 épisodes, on a donc quasiment tout le roman! Pour Bleak House, je n'ai pas retrouvé la poursuite dans l'avant fin, tellement meilleure chez Dickens!
SupprimerVoilà un livre original en effet, et plein de sel. Il me tente bien
RépondreSupprimerNoël approche...
SupprimerJ'aime beaucoup imaginer les personnages, les lieux, ... Je suis souvent déçu quand je regarde une adaptation cinématographique d'un roman. Ce n'est pas du tout comme je l'avais imaginé !
RépondreSupprimerHé oui... Lire fait plus travailler l'imagination, je pense.
SupprimerC'est bientot Noel mais si on pouvait eviter de charger la hotte.Je regarde si ma libraire l'a car je suis tenté.
RépondreSupprimerAvec près de 20 bouquins achetés récemment, je crois que Noël, c'est fait! Il suffit juste de se tenir à l'écart des librairies... Ou de donner des listes aux proches...
SupprimerVu à ma librairie; intéressée - encore plus après ton billet.
RépondreSupprimerAu moins tu connais une lectrice! Mais on n'a pas la réponse à toutes les questions, plus de questions que de réponses...
SupprimerC'est original comme sujet. Je n'aurai jamais eu l'idée de me tourner vers celui-ci. Et bien au moins maintenant je sais qu'il existe et en plus je pense que ça me plairait bien à lire.
RépondreSupprimerJ'ai (hélas?) le chic pour me diriger vers ce type de livres... ^_^
SupprimerLa réflexion est intéressante. Pourquoi pas si je tombe dessus.
RépondreSupprimerVoir une adaptation est un risque que parfois je ne prends pas... On va dire que plus j'ai aimé le livre moins je prends le risque de voir l'adaptation.
Pour certains romans, une adaptation ne gâte rien, pour d'autres,oui, les plus aimés, mieux vaut garder son petit monde secret?
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