Comme les amours
Los enamoramientos
Javier Marias
Gallimard, 2013
Traduction Anne-Marie Geninet
Un roman repéré dans les listes de la rentrée littéraire, et hop, emprunté, et hop, lu. J'aime Javier Marias, son étudiant d'Oxford, son univers, bref, ce billet ne sera pas objectif.
Madrid, de nos jours. Maria est éditrice (de courts passages hilarants sur "ses" auteurs, j'en redemanderais, mais le propos du livre était ailleurs) et prend son petit déjeuner dans une cafeteria où elle observe un couple tellement remarquable qu'elle le nomme le Couple Parfait. Jusqu'au jour où elle ne le voit plus et apprend que Miguel, le mari, a été assassiné par un déséquilibré. Plusieurs mois plus tard, elle se présente à Luisa, la veuve, encore sous le choc, qui lui parle sans contrainte de sa douleur. Chez elle, Luisa fait connaissance de Javier Diaz-Varela, et leur relation deviendra intime, même si l'intérêt de Javier pour Luisa ne lui laisse guère d'espoir.
Comme je n'avais pas lu la quatrième de couverture (en gros la même que le résumé précédent)(et qui en dit bien moins que l'article du dernier Lire, brillant, mais quel besoin de presque tout dévoiler?), je me suis laissée happer par cette prose si fluide, où se mêlent harmonieusement descriptions, pensées, dialogues réels ou imaginaires, pensées et réflexions des personnages. Sans savoir où Javier Marias allait mener son lecteur (quel bonheur!) j'ai découvert en prime une étude du Colonel Chabert et des Trois Mousquetaires vus sous l'angle des morts qui feraient mieux de ne pas revenir...
Javier Maria, dont j'ai déjà lu deux romans, a bien sûr son talent personnel, mais pour expliquer le plaisir que j'ai eu à découvrir ces Enamoramientos, je pourrais évoquer Zweig pour l'histoire impossible à lâcher filant dans des directions inattendues, et pour les fines réflexions psychologiques. Ainsi que Proust quand il digresse sur le ressenti de Maria étendu à tout être, particulièrement les femmes, décortiquant le fonctionnement profond de chacun, au point que comme pour Proust je devais m'exclamer "oh que c'est bien vu, que c'est cependant original".
"Il est un autre inconvénient à pâtir d'un malheur : pour qui l'éprouve, ses effets durent beaucoup plus que ne dure la patience des êtres disposés à l'écouter et à l'accompagner, l'inconditionnalité qui se teinte de monotonie ne résiste guère.Et ainsi, tôt ou tard, la personne triste reste seule alors qu'elle n'a pas encore terminé son deuil ou qu'on ne la laisse plus parler de ce qui est encore son seul monde, parce que ce monde d'angoisse finit par être insupportable et qu'il fait fuir.Elle s'aperçoit que pour autrui n'importe quel malheur a sa date de péremption sociale, que personne n'est fait pour contempler la peine, que ce spectacle n'est tolérable que durant un bref laps de temps, tandis qu'il porte en lui déchirement et commotion et une certaine possibilité d'agir en protagonistes pour ceux qui regardent et assistent, et qui se sentent indispensables, sauveurs, utiles. Mais en constatant que rien ne change et que la personne affectée n'avance ni n'émerge, ils se sentent superflus et dévalorisés, en sont presque offensés et s'en éloignent."
"Quand on est amoureux, ou plus précisément quand une femme l'est, surtout dans ces débuts où l'état amoureux possède encore l'attrait de la révélation, nous sommes généralement disposées à prendre à coeur n'importe quel sujet qui intéresse ou dont nous parle celui que nous aimons. Pas seulement à feindre l'intérêt pour lui être agréable, le conquérir ou asseoir notre fragile position, cela va de soi, mais à lui prêter une véritable attention et à nous laisser contaminer réellement par tout ce qu'il ressentira et transmettra, enthousiasme, aversion, sympathie, crainte, préoccupation et même obsession. ... ..."
Alors Marias, ça passe ou ça casse, j'en conviens; mais franchement j'en redemande!
Des avis chez Mélopée,
Los enamoramientos
Javier Marias
Gallimard, 2013
Traduction Anne-Marie Geninet
Un roman repéré dans les listes de la rentrée littéraire, et hop, emprunté, et hop, lu. J'aime Javier Marias, son étudiant d'Oxford, son univers, bref, ce billet ne sera pas objectif.
Madrid, de nos jours. Maria est éditrice (de courts passages hilarants sur "ses" auteurs, j'en redemanderais, mais le propos du livre était ailleurs) et prend son petit déjeuner dans une cafeteria où elle observe un couple tellement remarquable qu'elle le nomme le Couple Parfait. Jusqu'au jour où elle ne le voit plus et apprend que Miguel, le mari, a été assassiné par un déséquilibré. Plusieurs mois plus tard, elle se présente à Luisa, la veuve, encore sous le choc, qui lui parle sans contrainte de sa douleur. Chez elle, Luisa fait connaissance de Javier Diaz-Varela, et leur relation deviendra intime, même si l'intérêt de Javier pour Luisa ne lui laisse guère d'espoir.
Comme je n'avais pas lu la quatrième de couverture (en gros la même que le résumé précédent)(et qui en dit bien moins que l'article du dernier Lire, brillant, mais quel besoin de presque tout dévoiler?), je me suis laissée happer par cette prose si fluide, où se mêlent harmonieusement descriptions, pensées, dialogues réels ou imaginaires, pensées et réflexions des personnages. Sans savoir où Javier Marias allait mener son lecteur (quel bonheur!) j'ai découvert en prime une étude du Colonel Chabert et des Trois Mousquetaires vus sous l'angle des morts qui feraient mieux de ne pas revenir...
Javier Maria, dont j'ai déjà lu deux romans, a bien sûr son talent personnel, mais pour expliquer le plaisir que j'ai eu à découvrir ces Enamoramientos, je pourrais évoquer Zweig pour l'histoire impossible à lâcher filant dans des directions inattendues, et pour les fines réflexions psychologiques. Ainsi que Proust quand il digresse sur le ressenti de Maria étendu à tout être, particulièrement les femmes, décortiquant le fonctionnement profond de chacun, au point que comme pour Proust je devais m'exclamer "oh que c'est bien vu, que c'est cependant original".
"Il est un autre inconvénient à pâtir d'un malheur : pour qui l'éprouve, ses effets durent beaucoup plus que ne dure la patience des êtres disposés à l'écouter et à l'accompagner, l'inconditionnalité qui se teinte de monotonie ne résiste guère.Et ainsi, tôt ou tard, la personne triste reste seule alors qu'elle n'a pas encore terminé son deuil ou qu'on ne la laisse plus parler de ce qui est encore son seul monde, parce que ce monde d'angoisse finit par être insupportable et qu'il fait fuir.Elle s'aperçoit que pour autrui n'importe quel malheur a sa date de péremption sociale, que personne n'est fait pour contempler la peine, que ce spectacle n'est tolérable que durant un bref laps de temps, tandis qu'il porte en lui déchirement et commotion et une certaine possibilité d'agir en protagonistes pour ceux qui regardent et assistent, et qui se sentent indispensables, sauveurs, utiles. Mais en constatant que rien ne change et que la personne affectée n'avance ni n'émerge, ils se sentent superflus et dévalorisés, en sont presque offensés et s'en éloignent."
"Quand on est amoureux, ou plus précisément quand une femme l'est, surtout dans ces débuts où l'état amoureux possède encore l'attrait de la révélation, nous sommes généralement disposées à prendre à coeur n'importe quel sujet qui intéresse ou dont nous parle celui que nous aimons. Pas seulement à feindre l'intérêt pour lui être agréable, le conquérir ou asseoir notre fragile position, cela va de soi, mais à lui prêter une véritable attention et à nous laisser contaminer réellement par tout ce qu'il ressentira et transmettra, enthousiasme, aversion, sympathie, crainte, préoccupation et même obsession. ... ..."
Alors Marias, ça passe ou ça casse, j'en conviens; mais franchement j'en redemande!
Des avis chez Mélopée,
À tenter, donc... si tu cites Zweig, il y a des chances que ça passe pour moi!
RépondreSupprimerJ'adore Zweig (mais tu l'avais deviné!)
SupprimerChez moi ça casse .. je me suis beaucoup ennuyée dans le seul que j'ai lu de lui, je ne suis pas prête à recommencer.
RépondreSupprimerSnif. J'ai pourtant recopié de longues citations. Ce roman ci est peut être (je dis peut être) moins voué à l'abandon?
SupprimerIl est dans la liste d'envies, j'espère que ce sera une bonne surprise!
RépondreSupprimerC'est son dernier!
SupprimerComme Aifelle je n'ai pas un bon souvenir d'un roman de l'auteur
RépondreSupprimerPourtant tu me fais bien envie là et je vais peut être bien me laisser faire
Je sens que c'est mal parti. Mais celui-ci est peut être l'occasion d'une découverte?
SupprimerIl m'a tapé dans l’œil celui-là, espérons que ma bibliothèque l'achètera...
RépondreSupprimerMa bibli l'a acheté (elle en a acheté plein que j'avais noté, la vie est belle)
Supprimerun libraire de chez Dialogues est fan de cet auteur ! il tente de me convaincre mais jz fais de la résistance. Pourquoi d'ailleurs?
RépondreSupprimerBen j'sais pas. D'après les passages cités, tu peux voir qu'on n'est pas dans le découpé menu menu de certains auteurs. J'aime beaucoup!
SupprimerDis à ton librairie que je suis fan aussi (mais loin de Brest)
Pourquoi pas? Rien lu de lui encore!
RépondreSupprimerCe dernier roman est peut être l'occasion de le découvrir?
SupprimerProust et Zweig penchés sur le berceau de ce roman... Bigre! Tu fais fort! Difficile de faire la fine bouche...
RépondreSupprimerJ'ai des arguments, et en plus c'est vrai!
SupprimerVisiblement, pour toi, c'est passé.
RépondreSupprimerC'est le troisième que je lis de l'auteur...
SupprimerWaouh! ton avis me donne très envie d'essayer. J'étais tentée par ce roman, je n'ai jamais lu cet auteur et ce que tu en dis est très tentant.
RépondreSupprimerJ'espère que tu le trouveras facilement, alors!
SupprimerJe cherchais chez qui je l'avais noté déjà, et heureusement que tu mets des liens en bas de billets car c'était bien chez Mélopée.^_^ Bon, j'en ferai ma rentrée littéraire perso 2014.;) ou 15...
RépondreSupprimerIl me semblait l'avoir aussi vu ailleurs, mais non, rien trouvé...
Supprimer2016, tant qu'à faire.
C'est un auteur que je ne connais pas mais que tu me donnes très très envie de découvrir... As-tu un titre à conseiller pour commencer ?
RépondreSupprimerÉtant données les réactions qu'il suscite quant à certains de ses autres romans, peut être vaut-il mieux commencer par ce Comme les amours, qui m'a l'air plus consensuel?
SupprimerIl me tente beaucoup beaucoup...
RépondreSupprimerOh que tu as raison... Il se lit vite car c'est tellement bien écrit!
SupprimerPour l'instant, je n'ai encore rien lu de cet auteur mais il est sur ma liste des auteurs que je souhaite beaucoup découvrir...
RépondreSupprimerJe pense que ce titre est idéal pour se faire une idée (d'autres titres paraissent moins consensuels)
SupprimerJ'aime bien tes passages surtout le premier mais je n'arrive pas à me faire une idée du livre, je ne sais pas pourquoi!
RépondreSupprimerLuocine
Merci! Hélas le second est tronqué, car ça se prolonge un peu...
SupprimerFigure toi que c'est un roman qui ne va absolument pas dans la direction que l'on aurait pensé, avec les personnages que l'on aurait pensé. Et ça j'aime bien.
Je vois que tu as craqué ! Mmmmm.
RépondreSupprimerJ'aime cet auteur, jusqu'ici!
SupprimerJ'essayerai peut-être en bibli, car ma seule tentative avec cet auteur ne m'a pas emballée.
RépondreSupprimerJe sens que ce titre pourrait plaire même à ceux qui ont eu des difficultés avant avec l'auteur...
SupprimerC'est marrant mais j'ai peur qu'avec moi ça casse...
RépondreSupprimerÉcoute, le seul moyen de le savoir c'est de tenter!
SupprimerAvec moi ça passe mais je n'ai pas lu celui-là! Encore un à découvrir!
RépondreSupprimerC'est son dernier, une réussite, et cette fois c'est restreint dans un lieu et peu de temps.
SupprimerSi tu invoques Zweig, on ne peut que laisser sa chance à ce roman :)
RépondreSupprimerJ'utilise tous les arguments! ^_^
SupprimerConnais pas du tout, mais tu m'as donné envie de tenter :)
RépondreSupprimerUn auteur qui peut déconcerter, mais avec ce titre je pense que ça pourrait aller... Tente l'aventure!
SupprimerRien que la couverture donne envie.
RépondreSupprimerN'est-ce pas? Et pour une fois ma bibli n'a pas enlevé la couverture pour laisser juste la neutre de Gallimard...
SupprimerJe suis en train de le lire, et pour l'instant j'aime...
RépondreSupprimerChic! J'espère que tu seras ravie jusqu'au bout!
SupprimerJe ne connais pas Javier Marias mais j'aime les références dont tu parles, je note je note ! Un conseil pour choisir le premier que je lirai ?
RépondreSupprimerJe dirais ce Comme les amours, qui m'a l'air assez classique quand même, avec unité de lieu, et restreint dans le temps. Marias est capable de déconcerter ses lecteurs dans d'autres romans (dont je raffole, mais pas tout le monde!)
SupprimerZweig et Proust ! Belles références !
RépondreSupprimerLa maison ne fait pas dans le détail, quand on aime, on est généreux... ^_^
SupprimerQuelle flamme ! Je le note, tu me fais rêver avec ce billet.
RépondreSupprimerJ'aime l'auteur, son écriture, son côté parfois baroque (surtout dans ses précédents romans), son humour quasi anglais...
SupprimerJ'ai découvert Javier Marias avec ce titre, et j'ai aimé. L'univers est très particulier, l'auteur nous perd un peu avec ses digressions, mais elles sont souvent d'une justesse rmarquable. Je relirai certainement cet auteur, même si je laisserai passer un peu de temps :-) Je trouve Zweig moins redondant dans son voyage dans l'âme humaine (et féminine) :-)
RépondreSupprimerFigure toi que je suis en train de lire un autre roman de cet auteur! Toujours cette écriture à digressions, ces longues phrases engluant le lecteur, mais j'adore!
SupprimerZweig (un chouchou) est plus classique!
Longues phrases engluant le lecteur, c'est tout à fait ça ! En tous cas tu en parles très bien, c'est grâce à ton billet que je l'ai pris à la bibli :-)
SupprimerMais j'adore être une petite mouche perdue dans sa prose... ^_^
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