Celle que vous croyez
Camille Laurens
Gallimard, 2016
Bon, littérature française contemporaine, d'accord, mais billets enthousiasmants d'autre part, alors le mieux était de voir ça de plus près. Moins de vingt-quatre heures plus tard, bilan, pffff, ah quand même, mais où suis-je?!
Claire a quarante-huit ans, un amant de trente-six ans, Jo, et comme il ne paraît pas très attaché à elle, elle a l'idée de créer un faux profil Facebook avec le même prénom Claire, mais pas le même nom, et devient une jeune femme brune de vingt-quatre ans, demandant à être amie avec Christophe, ami (dans la vraie vie) de Jo. Histoire de suivre ce Jo qui veut l'ignorer. Mais Christophe tombe amoureux de la nouvelle Claire, bien embarrassée, et alors... Comme Claire s'adresse à Marc, médecin dans un hôpital et fait référence à un drame, on sent que cela ne s'est pas bien terminé, mais quoi qui comment?
Ceux qui ont lu ce roman savent que tout comme l'auteur, je ne dis pas tout et qu'il en reste beaucoup à découvrir. Rebondissements, jeux avec le lecteur, changements d'angle, élargissement du point de vue, jusqu'à cette Camille Morand (Laurens?) de la dernière page, quel bonheur que ce roman intelligent!
La première partie contient le long lamento de Claire sur la situation des femmes vieillissantes par rapport à celle des hommes. Transparentes en vieillissant (mais, Claire, pourquoi vouloir être toujours visibles? pour qui? pour quoi?)(cette façon de tout considérer par rapport aux hommes...). Mal acceptées quand la différence d'âge dans un couple est dans un sens et pas l'autre (elle cite un exemple connu où ça marche quand même, et puis les choses évoluent un peu, non?)(quoique, Claire, pour les enfants, il y a un âge limite pour les femmes)(mais si un homme râle qu'on le prenne pour le grand père de ses enfants, qu'il assume!). D'après Claire, et elle s'en plaint, passé quarante-cinq ans une femme devrait "se retirer progressivement du monde vivant, s'arracher du corps l'épine du désir" (ah bon, Claire, tu ne regardes pas autour de toi, je pourrais t'en raconter sur une de mes copines, et toujours cette façon de tout faire tourner autour d'un homme...)(tu es une personne!). Bref, au fur et à mesure on sent bien quand même que tout cela cache autre chose, Christophe parait "inadapté" (page 50)
Soit. Claire est un personnage du roman qui dit ce qu'elle pense, elle. En plus elle souffre.
"Sortir du champ quand ça ne cadre pas. Sortir du cadre.
D'un autre côté, ici je suis encadrée. Il y a des bords ici. Je suis tout le temps sur la photo.
Vous êtes chargé de m'encadrer, c'est ça, Marc? De me recadrer plutôt? Et si moi je ne peux pas vous encadrer, qu'est-ce qu'on fait?"
Voilà un exemple de passages qui m'agacent aussi...
Heureusement on est passé un peu à autre chose... disons plutôt un autre point de vue...
Mais ensuite franchement, que c'est inattendu! Et ça fonctionne ainsi jusqu'au bout. Avec en prime des réflexions telles
"Nous sommes tous des romanciers en puissance. Nous inventons tous notre vie. La différence c'est que moi, cette vie que j'invente, je la vis. Et que, comme toute créature, elle échappe à son créateur. Tu vas dire, si tu es mal luné, que je ne la vis que pour pouvoir l'écrire, que la vie n'est qu'un prétexte à l'écriture. Mais c'est tout le contraire. La vie m'échappe, elle me détruit, écrire n'est qu'une manière d'y survivre - la seule manière. Je ne vis pas pour écrire, j'écris pour survivre à la vie. Je me sauve. Se faire un roman, c'est se bâtir un asile."
"Quelle peine est vraiment perdue, me disais-je, si elle aboutit à un livre?"
Ensuite seulement je me suis renseignée sur l'auteur, elle est de l'âge de Claire et ne semble pas rechigner à l'autofiction. Mais quand c'est bien fait... Pas sûr cependant que son écriture m'agrée toujours, trop 'fabriqué' parfois..
Les avis de motspourmots (qui cite le même passage, je viens de le découvrir!),clara, Antigone , Cathulu. Cuné. l’Irrégulière, Papillon, luocine,
Camille Laurens
Gallimard, 2016
Bon, littérature française contemporaine, d'accord, mais billets enthousiasmants d'autre part, alors le mieux était de voir ça de plus près. Moins de vingt-quatre heures plus tard, bilan, pffff, ah quand même, mais où suis-je?!
Claire a quarante-huit ans, un amant de trente-six ans, Jo, et comme il ne paraît pas très attaché à elle, elle a l'idée de créer un faux profil Facebook avec le même prénom Claire, mais pas le même nom, et devient une jeune femme brune de vingt-quatre ans, demandant à être amie avec Christophe, ami (dans la vraie vie) de Jo. Histoire de suivre ce Jo qui veut l'ignorer. Mais Christophe tombe amoureux de la nouvelle Claire, bien embarrassée, et alors... Comme Claire s'adresse à Marc, médecin dans un hôpital et fait référence à un drame, on sent que cela ne s'est pas bien terminé, mais quoi qui comment?
Ceux qui ont lu ce roman savent que tout comme l'auteur, je ne dis pas tout et qu'il en reste beaucoup à découvrir. Rebondissements, jeux avec le lecteur, changements d'angle, élargissement du point de vue, jusqu'à cette Camille Morand (Laurens?) de la dernière page, quel bonheur que ce roman intelligent!
La première partie contient le long lamento de Claire sur la situation des femmes vieillissantes par rapport à celle des hommes. Transparentes en vieillissant (mais, Claire, pourquoi vouloir être toujours visibles? pour qui? pour quoi?)(cette façon de tout considérer par rapport aux hommes...). Mal acceptées quand la différence d'âge dans un couple est dans un sens et pas l'autre (elle cite un exemple connu où ça marche quand même, et puis les choses évoluent un peu, non?)(quoique, Claire, pour les enfants, il y a un âge limite pour les femmes)(mais si un homme râle qu'on le prenne pour le grand père de ses enfants, qu'il assume!). D'après Claire, et elle s'en plaint, passé quarante-cinq ans une femme devrait "se retirer progressivement du monde vivant, s'arracher du corps l'épine du désir" (ah bon, Claire, tu ne regardes pas autour de toi, je pourrais t'en raconter sur une de mes copines, et toujours cette façon de tout faire tourner autour d'un homme...)(tu es une personne!). Bref, au fur et à mesure on sent bien quand même que tout cela cache autre chose, Christophe parait "inadapté" (page 50)
Soit. Claire est un personnage du roman qui dit ce qu'elle pense, elle. En plus elle souffre.
"Sortir du champ quand ça ne cadre pas. Sortir du cadre.
D'un autre côté, ici je suis encadrée. Il y a des bords ici. Je suis tout le temps sur la photo.
Vous êtes chargé de m'encadrer, c'est ça, Marc? De me recadrer plutôt? Et si moi je ne peux pas vous encadrer, qu'est-ce qu'on fait?"
Voilà un exemple de passages qui m'agacent aussi...
Heureusement on est passé un peu à autre chose... disons plutôt un autre point de vue...
Mais ensuite franchement, que c'est inattendu! Et ça fonctionne ainsi jusqu'au bout. Avec en prime des réflexions telles
"Nous sommes tous des romanciers en puissance. Nous inventons tous notre vie. La différence c'est que moi, cette vie que j'invente, je la vis. Et que, comme toute créature, elle échappe à son créateur. Tu vas dire, si tu es mal luné, que je ne la vis que pour pouvoir l'écrire, que la vie n'est qu'un prétexte à l'écriture. Mais c'est tout le contraire. La vie m'échappe, elle me détruit, écrire n'est qu'une manière d'y survivre - la seule manière. Je ne vis pas pour écrire, j'écris pour survivre à la vie. Je me sauve. Se faire un roman, c'est se bâtir un asile."
"Quelle peine est vraiment perdue, me disais-je, si elle aboutit à un livre?"
Ensuite seulement je me suis renseignée sur l'auteur, elle est de l'âge de Claire et ne semble pas rechigner à l'autofiction. Mais quand c'est bien fait... Pas sûr cependant que son écriture m'agrée toujours, trop 'fabriqué' parfois..
Les avis de motspourmots (qui cite le même passage, je viens de le découvrir!),clara, Antigone , Cathulu. Cuné. l’Irrégulière, Papillon, luocine,
Commentaires
L'écriture me paraît parfois trop travaillée, avec usage de jeux de mots agaçants (mais ça c'est le côté psy que je déteste).
Sinon, franchement, les femmes de 50 ans et plus : on n'est plus au 19ème siècle!!!
De plus, je trouve que ce qu'elle dit sur les femmes de plus cinquante ans est globalement vrai. Il suffit de regarder un homme face à un groupe de femmes de tous âges et d'étudier les échanges interpersonnels... Il y a de quoi s'amuser, vraiment, car ces messieurs sont finalement bien prévisibles :-))
Les messieurs, c'est la biologie, sont attirés vers la 'meilleure mère potentielle pour la conservation des gênes', je le crains... Ensuite, pour garantie des mêmes ententes générationnelles, c'est autre chose (pas besoin d'expliquer les clins d'oeil à de vieilles pubs, ou de vieux événements vécus)
Les femmes de plus de cinquante ans ont encore leur chance (ouaip, avec les messieurs de 70 ans? mauvaise langue je suis). Plus sérieusement , et j'en connais, certains messieurs se sentent bien avec des femmes de leur propre âge, et j'ai une amie, qui paraît moins que son âge, qui est encore bien courtisée...
Vaste débat, sans fin? Oui, on peut s'en amuser (je sens que tu es bien dans tes chaussures!)
Ce qu'elle dit du vieillissement et de la séduction ne me convainc pas, j'ai des exemples autour de moi (voir ma réponse à Margotte)
j'aime bien les thèmes abordés et si c'est bien construit alors je dis : oui.
Celle que vous croyez j'aime ce titre.
Bises
Je ne connaissais pas cette tendance à l'autofiction, et après tout, c'est son problème, à l'auteur, avec ses proches. Mais si on en fait abstraction, c'est vraiment un roman bien fichu.
Les anglo-saxons ont l'art d'inventer des tas d'histoires, c'est sûr!
Je te recommande cependant ce (court!) roman , car il y a des surprises!
Sinon, tu sais, c'est bien fichu!
Je te comprends parfaitement, moi je ne connais pas l'auteur et ses petites histoires, parfois dans la lecture son personnage m'agaçait fort, mais je suis obligée de saluer l'ensemble plutôt bien goupillé et que j'ai dévoré!