Marcher droit, tourner en rond
Emmanuel Venet
Verdier, 2016
Si cela continue, il va falloir que je présente mes plus plates excuses aux romans contemporains français accusés par mes services de mille maux; OK, avec Verdier peu de risques, mais peuchère, belle surprise avec ce roman que je qualifierais de jubilatoire en dépit d'un fond plus triste.
Aux funérailles de Marguerite, à cent ans moins une semaine (dommage, pas de repas et fête), son petit-fils commente longuement (en 122 pages) le discours de Madame Vauquelin. Il est de bon ton de ne dire que du bien des gens en ces circonstances, mais là il fait défiler dans sa tête toutes les erreurs et inexactitudes énoncées sur Marguerite. Ce petit-fils est atteint du syndrome d'Asperger, et à quarante-cinq ans est plus ou moins toléré par sa famille, fréquentant d'ailleurs peu de personnes à l'extérieur d'icelle.
"Le syndrome d'Asperger, atypie du développement appartenant au spectre de l'autisme et qui ressemble à l'idée que je me fais du surhomme nietzschéen, me rend asociognosique, c'est-à-dire incapable de me plier à l'arbitraire des conventions sociales et d'admettre le caractère foncièrement relatif de l'honnêteté."
Dans le cadre du roman, voilà donc un héros interpellant le lecteur avec toutes les vérités sur sa famille, et il y en a, des mensonges, des faits tus ou refusés...
Même en ce qui concerne ses relations (ou manque de relations) avec Sophie Lachenal, son unique amour, il ne cache rien, et atteint à une lucidité pathétique.
On le sent seul, peinant à convaincre ses proches de s'intéresser à ses passions:
"J'aime les catastrophes aériennes* parce qu'elles répondent toujours à une logique précise qu'on peut découvrir d'après des indices parfois ténus; et j'aime le scrabble parce qu'il ravale à l'arrière plan la question du sens des mots et permet de faire autant de points avec 'asphyxie' qu'avec 'oxygène'."
*Incroyable coïncidence? Dans le livre que je lis en parallèle, Yaak, Montana, il est aussi fait allusion à la catastrophe des Canaries. Mais tout lecteur connaît ces coïncidences.
L'amour de la vérité et de l'honnêteté du personnage permet de tout dévoiler ou presque de l'histoire familiale (et c'est croquignolet), mais aussi d'aborder du plus sérieux, non?
"On nous serine à plus grande échelle qu'il nous faut à la fois abattre les dictatures et vndre au tyran des armes pour équilibrer notre balance commerciale; produire plus de voitures et diminuer les émissions de gaz d'échappement; supprimer les fonctionnaires et améliorer le service public; restreindre la pêche et manger plus de poisson; préserver les ressources en eau douce et saloper les aquifères au gaz de schiste."
Les avis de Cécile, clara
Emmanuel Venet
Verdier, 2016
Si cela continue, il va falloir que je présente mes plus plates excuses aux romans contemporains français accusés par mes services de mille maux; OK, avec Verdier peu de risques, mais peuchère, belle surprise avec ce roman que je qualifierais de jubilatoire en dépit d'un fond plus triste.
Aux funérailles de Marguerite, à cent ans moins une semaine (dommage, pas de repas et fête), son petit-fils commente longuement (en 122 pages) le discours de Madame Vauquelin. Il est de bon ton de ne dire que du bien des gens en ces circonstances, mais là il fait défiler dans sa tête toutes les erreurs et inexactitudes énoncées sur Marguerite. Ce petit-fils est atteint du syndrome d'Asperger, et à quarante-cinq ans est plus ou moins toléré par sa famille, fréquentant d'ailleurs peu de personnes à l'extérieur d'icelle.
"Le syndrome d'Asperger, atypie du développement appartenant au spectre de l'autisme et qui ressemble à l'idée que je me fais du surhomme nietzschéen, me rend asociognosique, c'est-à-dire incapable de me plier à l'arbitraire des conventions sociales et d'admettre le caractère foncièrement relatif de l'honnêteté."
Dans le cadre du roman, voilà donc un héros interpellant le lecteur avec toutes les vérités sur sa famille, et il y en a, des mensonges, des faits tus ou refusés...
Même en ce qui concerne ses relations (ou manque de relations) avec Sophie Lachenal, son unique amour, il ne cache rien, et atteint à une lucidité pathétique.
On le sent seul, peinant à convaincre ses proches de s'intéresser à ses passions:
"J'aime les catastrophes aériennes* parce qu'elles répondent toujours à une logique précise qu'on peut découvrir d'après des indices parfois ténus; et j'aime le scrabble parce qu'il ravale à l'arrière plan la question du sens des mots et permet de faire autant de points avec 'asphyxie' qu'avec 'oxygène'."
*Incroyable coïncidence? Dans le livre que je lis en parallèle, Yaak, Montana, il est aussi fait allusion à la catastrophe des Canaries. Mais tout lecteur connaît ces coïncidences.
L'amour de la vérité et de l'honnêteté du personnage permet de tout dévoiler ou presque de l'histoire familiale (et c'est croquignolet), mais aussi d'aborder du plus sérieux, non?
"On nous serine à plus grande échelle qu'il nous faut à la fois abattre les dictatures et vndre au tyran des armes pour équilibrer notre balance commerciale; produire plus de voitures et diminuer les émissions de gaz d'échappement; supprimer les fonctionnaires et améliorer le service public; restreindre la pêche et manger plus de poisson; préserver les ressources en eau douce et saloper les aquifères au gaz de schiste."
Les avis de Cécile, clara
Commentaires
Ce Verdier est parfaitement lisible cette fois et, tu n'as pas remarqué, jubilatoire (non mais quoi)
Bon weekend.
Hé bien alors, bonne lecture!
De plus je sens que ce roman te plairait, pour ma part j'ai déjà emprunté un de ses livres précédents...
Mais tu as un libraire de goût, il faut l'écouter.