Comment j'ai vidé la maison de mes parents
Lydia Flem
La librairie du XXIé siècle
Seuil, 2004
Blabla préliminaire
Pour attaquer franchement cette lecture, il aura sans doute fallu que j'aie commencé à vider la maison de mes parents. En trichant un peu, puisque ma mère y habite encore et s'est bien prise au jeu du vide armoires et cartons (j'ai noté une petite résistance en ce qui concerne la vaisselle mais je ne désespère pas de la convaincre de ranger ailleurs celle qui ne sert jamais ou presque). A son instigation les manteaux de ma grand-mère (décédée il y a plus de trente ans!) ont enfin quitté la maison. Prochainement : les jouets d'enfants!
Dernièrement en vidant/rangeant j'ai retrouvé des objets (sans valeur autre que sentimentale) fabriqués par mon père, dont un avec mon nom dessus, que je me suis donc approprié!
Deux citations de Roz Chast sur un sujet similaire
"Un de mes amis a une excellente règle pour ce qui est de vider la maison de vos parents: si vous ne pensez pas que vos enfants le voudront, ne le prenez pas."
et
"Ce n'est pas par hasard que la plupart des pubs visent les gens de 20 et 30 ans; non seulement ils sont beaucoup plus mignons que leurs aînés ; ... mais en plus ils risquent moins d'avoir vécu l'épreuve formatrice de trier les affaires de leurs parents décédés ; une fois que vous serez passés par là, vous ne verrez plus jamais vos affaires à vous de la même manière."
Respirons donc un grand coup et abordons (enfin) le livre de Lydia Flem.
Fille unique, Lydia Flem vient de perdre sa mère, suivant de quelques mois son père. La voilà héritière et face à l'obligation de vider la maison.
"Je suis pour les donations et contre les héritages. Il faudrait toujours faire un testament, désigner nommément ce que l'on souhaite léguer et à qui on le destine. (...) J'héritais, j'aurais aimé recevoir."
Il semblerait en effet que la voilà face à des objets qu'on ne lui avait jamais confiés sans la mettre en garde (ou dire non).
Impossible non plus de tout garder. "Pour chaque objet, chaque meuble, chaque vêtement, chaque papier, il n'y avait que quatre directions, comme à la croisée des chemins la rose des vents : garder, offrir, vendre ou jeter." Et choisir la catégorie. Faut-il fourrer les papiers dans un sac et les brûler sans les lire? Que risque-t-on de découvrir? Lydia Flem revient brièvement sur le passé de sa famille, certains disparus dans les camps, elle découvre des papiers visiblement mis de côté pour qu’elle les trouve et les garde. Elle trouve des trucs jamais jetés (ses biberons!).
Elle choisit de garder quelques lettres."Retrouver un morceau de papier couvert de leurs calligraphies réveillait la nostalgie. L'écriture, comme la voix, est une émanation du corps. Mais la voix s'éteint, la graphie reste."
Parfois "j'en voulais à mes parents de n'avoir pas pensé à faire eux-mêmes ce grand nettoyage."
Ne pouvant trouver d'acquéreur à prix raisonnable pour les meubles, elle préfère les donner. "le plaisir de donner était sans ambivalence." Quant aux vêtements de sa mère, faits mains avec du chic, elle a la chance de trouver une amie qui saura les porter exactement comme rêvé.
N'ayez pas crainte de lire ce bel essai ou témoignage, oui il y a des deux, car Lydia Flem explore aussi notre inconscient, ce n'est pas plombant du tout. Chacun a eu ou aura son expérience personnelle. Je ne saurais trop vous conseiller, d’ailleurs, de penser à vider votre propre maison en préparation (non, ça ne vous tuera pas!). Hélas cela n'empêchera pas la douleur du deuil pour ceux qui restent. Mais il en auront moins à jeter. Pourtant conserver, comme les parents de Lydia Flem, se comprend avec leur histoire personnelle, leur jeunesse marquée d'exils et de disparitions.
L'avis de Anne, cette année aux manettes du mois belge.
Lydia Flem
La librairie du XXIé siècle
Seuil, 2004
Blabla préliminaire
Pour attaquer franchement cette lecture, il aura sans doute fallu que j'aie commencé à vider la maison de mes parents. En trichant un peu, puisque ma mère y habite encore et s'est bien prise au jeu du vide armoires et cartons (j'ai noté une petite résistance en ce qui concerne la vaisselle mais je ne désespère pas de la convaincre de ranger ailleurs celle qui ne sert jamais ou presque). A son instigation les manteaux de ma grand-mère (décédée il y a plus de trente ans!) ont enfin quitté la maison. Prochainement : les jouets d'enfants!
Dernièrement en vidant/rangeant j'ai retrouvé des objets (sans valeur autre que sentimentale) fabriqués par mon père, dont un avec mon nom dessus, que je me suis donc approprié!
Deux citations de Roz Chast sur un sujet similaire
"Un de mes amis a une excellente règle pour ce qui est de vider la maison de vos parents: si vous ne pensez pas que vos enfants le voudront, ne le prenez pas."
et
"Ce n'est pas par hasard que la plupart des pubs visent les gens de 20 et 30 ans; non seulement ils sont beaucoup plus mignons que leurs aînés ; ... mais en plus ils risquent moins d'avoir vécu l'épreuve formatrice de trier les affaires de leurs parents décédés ; une fois que vous serez passés par là, vous ne verrez plus jamais vos affaires à vous de la même manière."
Respirons donc un grand coup et abordons (enfin) le livre de Lydia Flem.
Fille unique, Lydia Flem vient de perdre sa mère, suivant de quelques mois son père. La voilà héritière et face à l'obligation de vider la maison.
"Je suis pour les donations et contre les héritages. Il faudrait toujours faire un testament, désigner nommément ce que l'on souhaite léguer et à qui on le destine. (...) J'héritais, j'aurais aimé recevoir."
Il semblerait en effet que la voilà face à des objets qu'on ne lui avait jamais confiés sans la mettre en garde (ou dire non).
Impossible non plus de tout garder. "Pour chaque objet, chaque meuble, chaque vêtement, chaque papier, il n'y avait que quatre directions, comme à la croisée des chemins la rose des vents : garder, offrir, vendre ou jeter." Et choisir la catégorie. Faut-il fourrer les papiers dans un sac et les brûler sans les lire? Que risque-t-on de découvrir? Lydia Flem revient brièvement sur le passé de sa famille, certains disparus dans les camps, elle découvre des papiers visiblement mis de côté pour qu’elle les trouve et les garde. Elle trouve des trucs jamais jetés (ses biberons!).
Elle choisit de garder quelques lettres."Retrouver un morceau de papier couvert de leurs calligraphies réveillait la nostalgie. L'écriture, comme la voix, est une émanation du corps. Mais la voix s'éteint, la graphie reste."
Parfois "j'en voulais à mes parents de n'avoir pas pensé à faire eux-mêmes ce grand nettoyage."
Ne pouvant trouver d'acquéreur à prix raisonnable pour les meubles, elle préfère les donner. "le plaisir de donner était sans ambivalence." Quant aux vêtements de sa mère, faits mains avec du chic, elle a la chance de trouver une amie qui saura les porter exactement comme rêvé.
N'ayez pas crainte de lire ce bel essai ou témoignage, oui il y a des deux, car Lydia Flem explore aussi notre inconscient, ce n'est pas plombant du tout. Chacun a eu ou aura son expérience personnelle. Je ne saurais trop vous conseiller, d’ailleurs, de penser à vider votre propre maison en préparation (non, ça ne vous tuera pas!). Hélas cela n'empêchera pas la douleur du deuil pour ceux qui restent. Mais il en auront moins à jeter. Pourtant conserver, comme les parents de Lydia Flem, se comprend avec leur histoire personnelle, leur jeunesse marquée d'exils et de disparitions.
L'avis de Anne, cette année aux manettes du mois belge.
Commentaires
Cela fait du bien, n'est-ce pas? Puisque tu as déjà fait le chemin, je n'insiste pas pour cette lecture, mais je t'assure qu'elle m'a intéressée mais pas chamboulée (donc c'était le bon moment ^_^)
Chacun a ses expériences personnelles avec les parents, et cela nous renvoie à notre propre vieillesse. Pa facile, mais ne pas se voiler la face.
Oui, le livre m'intéresse, peut-être qu'il m'aidera à mieux gérer mes travers !
Tu pourrais déjà récupérer (avec leur accord) les objets qui t'ont appartenu (jouets, vêtements, etc. et décider quoi en faire)
Trier avec une maman encore là, oui, c'est bien mieux. La plupart du temps on s'interroge 'mais qu'est-ce que c'est que ce truc?' 'on en fait quoi?' 'mais si, souviens-toi!'
L'auteur aurait aimé avoir des indications, des dons avant le décès de ses parent, plutôt que se retrouver face à des objets en nombre...