Ronce-Rose
Eric Chevillard
Les éditions de Minuit, 2017
Ronce-Rose est une petite fille dont le lecteur lit le journal de bord au fur et à mesure.
"J'ai repris ma marche dans la ville, comme si je sortais de mon carnet pour continuer l'histoire en vrai, debout dans une phrase nouvelle qui va je ne sais où et que je ne pourrai écrire que quand je serai arrivée au bout."
Elle vit avec Mâchefer (son père, sans doute), lequel se livre à des activités mystérieuses (pour elle) avec son ami Bruce. Un jour Mâchefer ne revient pas, elle part à sa recherche. Son univers se réduisait à peu, Scorbella la très vieille dame, et un voisin unijambiste, maintenant elle va explorer le monde.
"Quand je marche derrière lui [le voisin]c'est la jambe droite qui lui manque mais quand on se croise, c'est la gauche. Je ne m'en étonne plus. Je pense qu'il a plus de pouvoirs que Scorbella pour danser comme ça d'un pied sur l'autre avec une seule jambe. Ou alors il alterne pour reposer celle qui porte tout son poids, peut-être.
J'aimerais bien savoir comment ça lui est arrivé. (...) Mâchefer me déconseille de le lui demander. Ce serait indiscret, d'après lui. Et si je lui parle alors de la jambe qu'il a encore? Mâchefer hoche la tête pour dire non plus. Pourtant là, je ne vois pas ce qu'il y aurait d'indiscret puisqu'il l'exhibe, franchement, s'il se vexe pour ça! Quand je le rencontre en tout cas, je fais bien attention à ne regarder que la jambe qu'il a encore pour ne pas le mettre mal à l'aise.
En même temps, je sais comment c'est fait, une jambe qu'on a encore, assez vite ça ne m'intéresse plus de la regarder et quand mes yeux se détournent d'elle, inévitablement je tombe dans le trou d'à côté, le trou de la jambe qui manque, je perds pied dedans moi aussi."
Sur 140 pages se déroule la quête de la petite, pleine de fraîcheur et d'imagination, à vue d'enfant, mais toujours claire pour l'adulte lecteur qui, lui, en sait plus. Poétique, tragique, avec ce petit décalage déjà aimé dans l'Autofictif du même auteur.
"Ce n'est pas tellement le problème du jambon, j'ai encore de l'avenir, la truie qui cherche ses neuf petits en couinant comme une truie qui a perdu ses neuf petits les trouvera dans notre congélateur. Ils sont en tranches, je préfère la prévenir. Je ne sais pas comment ça se passe, en cas de découverte brutale, si domine vraiment la joie des retrouvailles."
Bon, c'est Chevillard, vous l'aurez compris... Je me lirais bien un autre Autofictif, maintenant...
Eric Chevillard
Les éditions de Minuit, 2017
Ronce-Rose est une petite fille dont le lecteur lit le journal de bord au fur et à mesure.
"J'ai repris ma marche dans la ville, comme si je sortais de mon carnet pour continuer l'histoire en vrai, debout dans une phrase nouvelle qui va je ne sais où et que je ne pourrai écrire que quand je serai arrivée au bout."
Elle vit avec Mâchefer (son père, sans doute), lequel se livre à des activités mystérieuses (pour elle) avec son ami Bruce. Un jour Mâchefer ne revient pas, elle part à sa recherche. Son univers se réduisait à peu, Scorbella la très vieille dame, et un voisin unijambiste, maintenant elle va explorer le monde.
"Quand je marche derrière lui [le voisin]c'est la jambe droite qui lui manque mais quand on se croise, c'est la gauche. Je ne m'en étonne plus. Je pense qu'il a plus de pouvoirs que Scorbella pour danser comme ça d'un pied sur l'autre avec une seule jambe. Ou alors il alterne pour reposer celle qui porte tout son poids, peut-être.
J'aimerais bien savoir comment ça lui est arrivé. (...) Mâchefer me déconseille de le lui demander. Ce serait indiscret, d'après lui. Et si je lui parle alors de la jambe qu'il a encore? Mâchefer hoche la tête pour dire non plus. Pourtant là, je ne vois pas ce qu'il y aurait d'indiscret puisqu'il l'exhibe, franchement, s'il se vexe pour ça! Quand je le rencontre en tout cas, je fais bien attention à ne regarder que la jambe qu'il a encore pour ne pas le mettre mal à l'aise.
En même temps, je sais comment c'est fait, une jambe qu'on a encore, assez vite ça ne m'intéresse plus de la regarder et quand mes yeux se détournent d'elle, inévitablement je tombe dans le trou d'à côté, le trou de la jambe qui manque, je perds pied dedans moi aussi."
Sur 140 pages se déroule la quête de la petite, pleine de fraîcheur et d'imagination, à vue d'enfant, mais toujours claire pour l'adulte lecteur qui, lui, en sait plus. Poétique, tragique, avec ce petit décalage déjà aimé dans l'Autofictif du même auteur.
"Ce n'est pas tellement le problème du jambon, j'ai encore de l'avenir, la truie qui cherche ses neuf petits en couinant comme une truie qui a perdu ses neuf petits les trouvera dans notre congélateur. Ils sont en tranches, je préfère la prévenir. Je ne sais pas comment ça se passe, en cas de découverte brutale, si domine vraiment la joie des retrouvailles."
Bon, c'est Chevillard, vous l'aurez compris... Je me lirais bien un autre Autofictif, maintenant...
Commentaires
Et oui oui oui j'ai regardé les Durrell !!!!!
Ah les Durrell! J'espère que c'était aussi bien que les livres (quelle merveille cette série de récits)
J'essaie d'en lire de temps en temps, cela fait du bien.
Bref, je reconnais que parfois dans L'Autifictif certaines pensées peuvent laisser du côté de la route, mais globalement j'aime beaucoup ce qu'il écrit, un poil décalé et barré comme j'aime, sans exclure un bon regard vigilant. A essayer!