Retourner dans l'obscure vallée
Volver al oscuro valle
Santiago Gamboa
Métailié, 2017
Traduit par François Gaudry
Avec ce roman au titre issu d'une citation de William Blake (L'homme devrait travailler et s'attrister, apprendre, oublier et retourner dans l'obscure vallée d'où il est venu pour reprendre sa tâche), Santiago Gamboa fait montre de sa virtuosité habituelle pour tisser les fils de plusieurs histoires:
Appelé urgemment à Madrid, le narrateur, écrivain, ex-consul, bref ayant pas mal de points communs avec Gamboa, trouve une ville en état de siège suite à une prise d'otages à ambassade d'Irlande par Boko Haram.
Manuela Beltran confie à une psychologue les détails de sa vie mal engagée dès l'enfance, mais illuminée par la poésie âpre qu'elle écrit.
Un mystérieux argentin se pensant fils du pape, violent et un peu fêlé, narre cela au 'consul'.
Et comme le consul est fasciné par Rimbaud, à ses yeux le plus grand poète français, ses carnets passionnants à lire donnent à connaître quelle fut sa vie.
Mais où veut-il nous mener? Question au départ, vite rejetée en arrière plan, et puis les réponses arrivent, tout est bien ficelé, oui, même Rimbaud se justifie là-dedans, tous les personnages aussi, et même le titre. Très fort!
Nous sommes dans notre monde actuel, avec attentats, migrants en Méditerranée, trafiquants de drogue, particulièrement la Colombie et les FARC. Avec parfois une impression de léger décalage. Des passages difficiles, je préviens, mais justifiés pleinement.
"Crier dans ce sacro-saint téléphone portable paraissait un passe-temps national, peut-être pour tenir à tout prix à distance un ennuyeux silence, comme si se taire mettait en danger l'existence même et était une façon de se soumettre ou de boiter, et qu'imposer son bavardage et ses propos stupides aux autres était un nouveau droit de l'homme. Le silence est-il démodé, caduc, aboli?"
"Le niveau sonore des journaux télévisés et des émissions de débats baissa et la vie reprit son cours normal. (...) les experts eurent bientôt de nouvelles affaires urgentes à se mettre sous la dent : les blessures des footballeurs préférés du monde occidental ou la romance de la décennie entre un prix Nobel de littérature et une femme de la jet-set, quand ils étaient d'humeur frivole, ou les embarcations africaines qui continuaient de partir la nuit et chaviraient en haute mer avec des centaines de passagers livrés à l'abîme, quand ils optaient pour des sujets plus tragiques. Et bien sûr, les scandales financiers, toujours à portée de main, ou les aspirations à l'indépendance de régions européennes qui voulaient se séparer de leurs frères pauvres."
Volver al oscuro valle
Santiago Gamboa
Métailié, 2017
Traduit par François Gaudry
Avec ce roman au titre issu d'une citation de William Blake (L'homme devrait travailler et s'attrister, apprendre, oublier et retourner dans l'obscure vallée d'où il est venu pour reprendre sa tâche), Santiago Gamboa fait montre de sa virtuosité habituelle pour tisser les fils de plusieurs histoires:
Appelé urgemment à Madrid, le narrateur, écrivain, ex-consul, bref ayant pas mal de points communs avec Gamboa, trouve une ville en état de siège suite à une prise d'otages à ambassade d'Irlande par Boko Haram.
Manuela Beltran confie à une psychologue les détails de sa vie mal engagée dès l'enfance, mais illuminée par la poésie âpre qu'elle écrit.
Un mystérieux argentin se pensant fils du pape, violent et un peu fêlé, narre cela au 'consul'.
Et comme le consul est fasciné par Rimbaud, à ses yeux le plus grand poète français, ses carnets passionnants à lire donnent à connaître quelle fut sa vie.
Mais où veut-il nous mener? Question au départ, vite rejetée en arrière plan, et puis les réponses arrivent, tout est bien ficelé, oui, même Rimbaud se justifie là-dedans, tous les personnages aussi, et même le titre. Très fort!
Nous sommes dans notre monde actuel, avec attentats, migrants en Méditerranée, trafiquants de drogue, particulièrement la Colombie et les FARC. Avec parfois une impression de léger décalage. Des passages difficiles, je préviens, mais justifiés pleinement.
"Crier dans ce sacro-saint téléphone portable paraissait un passe-temps national, peut-être pour tenir à tout prix à distance un ennuyeux silence, comme si se taire mettait en danger l'existence même et était une façon de se soumettre ou de boiter, et qu'imposer son bavardage et ses propos stupides aux autres était un nouveau droit de l'homme. Le silence est-il démodé, caduc, aboli?"
"Le niveau sonore des journaux télévisés et des émissions de débats baissa et la vie reprit son cours normal. (...) les experts eurent bientôt de nouvelles affaires urgentes à se mettre sous la dent : les blessures des footballeurs préférés du monde occidental ou la romance de la décennie entre un prix Nobel de littérature et une femme de la jet-set, quand ils étaient d'humeur frivole, ou les embarcations africaines qui continuaient de partir la nuit et chaviraient en haute mer avec des centaines de passagers livrés à l'abîme, quand ils optaient pour des sujets plus tragiques. Et bien sûr, les scandales financiers, toujours à portée de main, ou les aspirations à l'indépendance de régions européennes qui voulaient se séparer de leurs frères pauvres."
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