Me voici
Here I am
Jonathan Safran Foer
Editions de l'Olivier, 2017
Traduit par Stéphane Roques
En abordant ce pavé de 740 pages, le lecteur qui connaît (un peu) l'auteur se doute qu'il y aura du copieux et du non linéaire, et que l'effort demandé sera récompensé.
Pour aller vite, disons qu'il s'agit d'une histoire de famille. Celle de Jacob et Julia Bloch, avec leurs trois fils Sam, Max et Benjy (sans oublier le chien Argos, l'Odyssée me poursuit!), les parents de Jacob, et son grand père Isaac, dont le passé est résumé dans l'éblouissante première page du roman. Passé, présent (Sam doit faire sa bar-mitsva mais il y a un petit hic) et futur (oui, l'histoire se déroule de nos jours, avec un événement imaginaire, et courtes ouvertures sur vingt ans après). Le tout avec une extraordinaire fluidité.
Le couple Julia-Jacob est en train d'exploser, en dépit de la famille qu'ils ont formée. Le lecteur omniscient ou presque se dit qu'il suffirait de si peu pour que... Les deux sont (ou essaient d'être) de bons parents et de superbes passages sur l'amour parsèment le roman.
J'ai parlé de bar-mitswa, la religion juive et Israël forment un arrière plan (voire premier plan à certains moments) incontournable. C'est absolument intéressant et intelligent, et même émouvant (j'ai aimé le discours du rabbin à l'enterrement). D'ailleurs le titre 'Me voici' reprend la réponse d'Abraham à trois reprises quand il se prépare à sacrifier son fils Isaac (là c'est un passage de la Genèse)(page 144 dans le roman).
Ajoutons des cousins israéliens en visite, un Second Life ou même genre (au fait, ça existe encore, Second Life?), des pages inénarrables sur IKEA (vers page 714), et plein plein de passages qui font mouche. Je ne dis pas qu'on ne ressente pas le besoin de souffler parfois, mais un dialogue vif (oui il y a beaucoup de dialogues, ça aide!), une réflexion percutante arrivent, et on est repris...
"Nous vivons dans le monde, songea Jacob. Cette pensée semblait toujours s'imposer en général en contrepoids du mot idéalement. Idéalement, nous ferions des sandwichs dans des foyers pour sans-abri chaque week-end, nous apprendrions à jouer d'un instrument à un âge avancé, et cesserions de considérer qu'être parvenu à la moitié de sa vie, c'est avoir un âge avance, et nous utiliserions d'autres ressources mentales que Google, et d'autres ressources physique qu'Amazon, et supprimerions définitivement les macaronis au cheddar de notre régime alimentaire, et consacrerions au moins un quart du temps et de l'attention qu'ils méritent à nos proches vieillissants, et ne mettrions jamais un enfant devant un écran. Mais nous vivons dans le monde, et dans le monde il y a l'entraînement de foot, l'orthophoniste, les courses, les devoirs, le maintien d'une maison dans un état à peu près propre, l'argent, les humeurs, la fatigue,et puis nous ne sommes que des êtres humains, et les êtres humains non seulement ont besoin de petits moments où ils lisent le journal en buvant leur café, voient leurs amis, font une pause, mais ils les méritent, ces petits moments, également, si bien que aussi belle que osit cette idée, nous n'avons aucune chance de la mettre en pratique. C'est nécessaire, mais nous n'en avons pas la capacité."
En cherchant pour cet article, j'ai découvert que l'auteur est séparé de son épouse Nicole Krauss. Non mais quoi!
L'avis de cuné ( passé hors de mes radars, mais je me rattrape)
Here I am
Jonathan Safran Foer
Editions de l'Olivier, 2017
Traduit par Stéphane Roques
En abordant ce pavé de 740 pages, le lecteur qui connaît (un peu) l'auteur se doute qu'il y aura du copieux et du non linéaire, et que l'effort demandé sera récompensé.
Pour aller vite, disons qu'il s'agit d'une histoire de famille. Celle de Jacob et Julia Bloch, avec leurs trois fils Sam, Max et Benjy (sans oublier le chien Argos, l'Odyssée me poursuit!), les parents de Jacob, et son grand père Isaac, dont le passé est résumé dans l'éblouissante première page du roman. Passé, présent (Sam doit faire sa bar-mitsva mais il y a un petit hic) et futur (oui, l'histoire se déroule de nos jours, avec un événement imaginaire, et courtes ouvertures sur vingt ans après). Le tout avec une extraordinaire fluidité.
Le couple Julia-Jacob est en train d'exploser, en dépit de la famille qu'ils ont formée. Le lecteur omniscient ou presque se dit qu'il suffirait de si peu pour que... Les deux sont (ou essaient d'être) de bons parents et de superbes passages sur l'amour parsèment le roman.
J'ai parlé de bar-mitswa, la religion juive et Israël forment un arrière plan (voire premier plan à certains moments) incontournable. C'est absolument intéressant et intelligent, et même émouvant (j'ai aimé le discours du rabbin à l'enterrement). D'ailleurs le titre 'Me voici' reprend la réponse d'Abraham à trois reprises quand il se prépare à sacrifier son fils Isaac (là c'est un passage de la Genèse)(page 144 dans le roman).
Ajoutons des cousins israéliens en visite, un Second Life ou même genre (au fait, ça existe encore, Second Life?), des pages inénarrables sur IKEA (vers page 714), et plein plein de passages qui font mouche. Je ne dis pas qu'on ne ressente pas le besoin de souffler parfois, mais un dialogue vif (oui il y a beaucoup de dialogues, ça aide!), une réflexion percutante arrivent, et on est repris...
"Nous vivons dans le monde, songea Jacob. Cette pensée semblait toujours s'imposer en général en contrepoids du mot idéalement. Idéalement, nous ferions des sandwichs dans des foyers pour sans-abri chaque week-end, nous apprendrions à jouer d'un instrument à un âge avancé, et cesserions de considérer qu'être parvenu à la moitié de sa vie, c'est avoir un âge avance, et nous utiliserions d'autres ressources mentales que Google, et d'autres ressources physique qu'Amazon, et supprimerions définitivement les macaronis au cheddar de notre régime alimentaire, et consacrerions au moins un quart du temps et de l'attention qu'ils méritent à nos proches vieillissants, et ne mettrions jamais un enfant devant un écran. Mais nous vivons dans le monde, et dans le monde il y a l'entraînement de foot, l'orthophoniste, les courses, les devoirs, le maintien d'une maison dans un état à peu près propre, l'argent, les humeurs, la fatigue,et puis nous ne sommes que des êtres humains, et les êtres humains non seulement ont besoin de petits moments où ils lisent le journal en buvant leur café, voient leurs amis, font une pause, mais ils les méritent, ces petits moments, également, si bien que aussi belle que osit cette idée, nous n'avons aucune chance de la mettre en pratique. C'est nécessaire, mais nous n'en avons pas la capacité."
En cherchant pour cet article, j'ai découvert que l'auteur est séparé de son épouse Nicole Krauss. Non mais quoi!
L'avis de cuné ( passé hors de mes radars, mais je me rattrape)
Il est séparé de Nicole Krauss ? Ah bon ! Je ne le savais pas, merci d'assurer la rubrique "Voici" ;-) Plus sérieusement, j'aimerais bien le lire, mais j'ai été très échaudée par ma première tentative avec "Tout est illuminé" ; je l'ai abandonné.
RépondreSupprimerJe n'ai pas lu Tout est illuminé. Je crains que son monde et sa façon d'écrire une histoire soient les mêmes... Ici cela peut te parler plus, on se concentre sur cette famille.
SupprimerC'est sûr qu'on peut se demander où il va, mais il faut lui faire confiance.Très très brillant et juste.
Rubrique voici : j'ai appris cela dans mes recherches pour la couverture ou des avis, bref je ne sais plus.^_^
Non mais quoi, en effet !
RépondreSupprimerTrès contente de lire ce chouette billet, je voudrais que tout le monde lise ce roman et en parle :)
Aaaaaaaaaaah j'avais omis ton billet, erreur réparée (on en va pas se gêner, on est 200% d'accord). J'espère que les lecteurs ne reculeront pas devant le nombre de pages.
Supprimerje fais une découverte : c'était le mari de Nicole Krauss
RépondreSupprimerbon je vais faire ma féministe enragée : je préfère la dame au monsieur
Bref, c'était, semble-t-il...
SupprimerLes deux sont très doués!
J'avais beaucoup aimé Extrêmement fort et incroyablement près, je l'avais attendu en poche, et je ferai sans doute pareil pour celui-ci !
RépondreSupprimerJe pense qu'il sera un jour en (gros) poche.
SupprimerJ'ai passé un super moment avec ce roman, je me suis parfois un peu perdue mais j'ai vraiment ri ! Intelligent et foisonnant !
RépondreSupprimerTout à fait, intelligent et foisonnant. J'attends ton billet, alors? (rien vu chez toi)
SupprimerLe nombre de pages me fait un peu reculé, en effet. A tord.
RépondreSupprimerPfff je ne te croyais pas si frileuse. ^_^
SupprimerJ'aime l'idée que l'on demande un effort au lecteur, ça change de tous ces livres où le prémâché est de rigueur.
RépondreSupprimerJe déteste le prémâché, l'attendu. Je suis actuellement dans un roman vraiment original dans son ton, tu parles, plus de 600 pages même pas découpées en chapitres, de longues phrases, et je m'amuse! (Ascension de Vincent Delecroix)
SupprimerJe l'ai mis dans ma liste au Père Noël... je me dis que je finirais bien l'année avec ce genre de bouquin :-)
RépondreSupprimerAh merci, bonne lecture. Ne crains pas le côté copieux.
SupprimerBien tentée de retrouver cet auteur !
RépondreSupprimerC'est vrai que son dernier roman remontait à loin.
SupprimerEncore un fameux pavé !
RépondreSupprimerJe ne connais pas du tout. Je me sens bien ignorant chez toi...
Bonne fin de semaine.
Courage! Et j'aurais pu mettre ce roman dans le challenge, avec le verbe être dans le titre anglais, mais mon, je ne vais pas discuter sinon on n'en finirait pas. ^_^
SupprimerJe note ! Le thème familial et ses digressions culturelles m'intéressent et j'aime bien l'extrait que tu as choisi.
RépondreSupprimerPour les digressions - ou vues comme telles si on veut- tu seras servie. Il existe plein de passages scotchants.
SupprimerJ'avais beaucoup aimé "Incroyablement fort et extrêmement près" et ai lu celui-ci à sa sortie : j'ai également bien aimé cette histoire inspirée de sa vie personnelle, malgré quelques longueurs ...
RépondreSupprimerChère mimi21 dont j'ignore l'identité ce matin, j'aurais aimé trouver votre avis!!!
SupprimerExtrêmement fort... est toujours dans ma PAL. Alors malgré ton billet très tentant, je vais attendre un peu (beaucoup?).
RépondreSupprimerOuais... Trop de livres à lire, quoi.
Supprimerje l'ai lu, je l'ai aimé, billet en cours :-)
RépondreSupprimer*sautille devant son écran*
SupprimerJ'attends! ^_^
Peut-être, peut-être...
RépondreSupprimerOui, oui...^_^
SupprimerOhlala cet auteur, je l'avais découvert à ses tous débuts, nous avions tous les deux la vingtaine (pfiou, le temps passe), j'étais en admiration, j'avais adoré son premier, beaucoup aimé son deuxième, et puis je l'ai un peu perdu de vue (comme beaucoup d'autres, les dégâts de la blogo, haha). Je renouerais bien avec son univers et son style, mais pfiou, 740 pages... Quand je mets une semaine en ce moment pour lire moins de 200 pages... Mais il faudrait que je le relise. Peut-être 2018.
RépondreSupprimerAu fait, il y a un autre Américain que j'aimerais bien caser en 2018, c'est Edgar Hilsenrath. Tu l'as déjà lu ? LC ?^^
Heu non jamais lu, c'est assez spécial on dirait (oui, je sais, l'assez spécial c'est mon créneau, soupirs), faut que je voie un titre qui passerait.
SupprimerJe confirme : Hilsenrath, c'est génial et complètement déglingue, sauf qu'il n'est pas américain mais allemand, je conseille fortement 'Fuck America '
SupprimerMerci de ta réponse, qui n'arrange pas la LAL...
Supprimer@papillon, mais oui tu as raison, j'ai du penser "américain" à cause de ce titre que tu recommandes justement ! C'est celui qu'on m'a fortement conseillé aussi. Bon, je me motive pour 2018 !!
SupprimerOn se motive, d'accord (je suis faible) mais si ça ne passe pas, j'abandonne!
SupprimerBon je ne voudrais pas que tu crois que je ne retiens de ton billet que la séparation des deux auteurs mais quand-même, quelle nouvelle!
RépondreSupprimerJe l'ai appris en cours de lecture, bon, ça n'a pas changé mon angle d'approche, mais mon petit coeur romantique a subi un choc.^_^
SupprimerIl serait temps que je découvre cet auteur... mais peut-être avec un de ses livres sorti en poche déjà ! Notamment son succès extrêmement fort... ?
RépondreSupprimerEn poche ou en bibli, tu as le choix! Il y a même une non fiction sur les animaux.
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