Dominique
Eugène Fromentin
Pourquoi cette lecture? Pour le mois belge (avril) j'ai prévu de lire Ce que Dominique n'a pas su de Jacqueline Harpman, qui semble reprendre les personnages du roman de Fromentin. Et comme je ne suis pas à un classique près...
Première surprise : Le roman (hélas entreposé en magasin de la bibliothèque, fut édité par Larousse en 1933, et recèle en l'ouvrant une feuille de 'Prix' que les plus jeunes ne peuvent connaître. République française, ville de Neuilly sur Seine, Ecole communale de, Année scolaire 1936-1937, 5è prix de la mention très bien (?), mérité par l'élève W. Roger, cours complémentaire 1ère année., le 17 juillet 1937.
Le jeune W Roger l'a-t-il lu à l'époque? Comment ce livre est-il arrivé là. Mystère.
Deuxième surprise: Mais c'est très bien écrit! A tel point que j'ai vérifié si je n'avais pas un alexandrin caché là sous la prose. Doux balancements des phrases, parfois accélération qui frappe la vue et le coeur. Et puis ce fantastique chapitre trois, la description des saisons dans cette campagne si bien connue de Fromentin, les oiseaux, les travaux des champs... Jusqu'au bout la finesse du style m'a charmée. On n'écrit plus guère ainsi, mais qu'est-ce que ça fait du bien!
Troisième surprise, en lisant (ensuite!) la préface : Fromentin a vécu en Afrique du nord durant pas mal de temps, en a ramené des souvenirs, à la fois en romans et en tableaux. car il est peintre, je l'ai découvert!
Passons (enfin) au roman. Assez classiquement, l'histoire de Dominique est un long flash back enchâssé dans un récit où le narrateur présente le Dominique actuel, leur amitié grandissante, et les confidences de celui-ci. "Vous pourrez témoigner que vous avez vu un homme heureux." Revenu dans sa région natale, en famille, respecté de tous, en gros, gentleman farmer.
Mais de longues années de souffrance, quand, une fois quittée sa campagne bien-aimée et élève au lycée, il fait connaissance d'Olivier, devenu rapidement son ami, et de ses cousines Madeleine et Julie. Il tombe amoureux fou de Madeleine, amour sans espoir puisque celle-ci épousera sans trop tarder un autre homme.
Jusque là Fromentin a beaucoup puisé dans sa vie, il a pris quelques arrangements mais c'est globalement autobiographique. Ensuite, non, semble-t-il. Il part à Paris, aime toujours Madeleine, souffre toujours, écrit des poèmes ou des essais.
C'est vraiment la beauté des pages écrites par Fromentin qui fait passer ce type d'histoire d'amour impossible! On peut trouver quelques imprudences chez Madeleine, une froideur chez le mari, un manque de décision chez Dominique, mais heureusement Fromentin sait varier les situations, introduire deux trois autres personnages intéressants, laisser Julie dans un mystère parfois dévoilé (voyons ce que fera Harpman), et éviter l'exacerbation romantique qui m'avait fatiguée dans Les Hauts de Hurlevent. A lire ou relire, bien sûr.
Eugène Fromentin
Pourquoi cette lecture? Pour le mois belge (avril) j'ai prévu de lire Ce que Dominique n'a pas su de Jacqueline Harpman, qui semble reprendre les personnages du roman de Fromentin. Et comme je ne suis pas à un classique près...
Première surprise : Le roman (hélas entreposé en magasin de la bibliothèque, fut édité par Larousse en 1933, et recèle en l'ouvrant une feuille de 'Prix' que les plus jeunes ne peuvent connaître. République française, ville de Neuilly sur Seine, Ecole communale de, Année scolaire 1936-1937, 5è prix de la mention très bien (?), mérité par l'élève W. Roger, cours complémentaire 1ère année., le 17 juillet 1937.
Le jeune W Roger l'a-t-il lu à l'époque? Comment ce livre est-il arrivé là. Mystère.
Deuxième surprise: Mais c'est très bien écrit! A tel point que j'ai vérifié si je n'avais pas un alexandrin caché là sous la prose. Doux balancements des phrases, parfois accélération qui frappe la vue et le coeur. Et puis ce fantastique chapitre trois, la description des saisons dans cette campagne si bien connue de Fromentin, les oiseaux, les travaux des champs... Jusqu'au bout la finesse du style m'a charmée. On n'écrit plus guère ainsi, mais qu'est-ce que ça fait du bien!
Troisième surprise, en lisant (ensuite!) la préface : Fromentin a vécu en Afrique du nord durant pas mal de temps, en a ramené des souvenirs, à la fois en romans et en tableaux. car il est peintre, je l'ai découvert!
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Chasse au faucon en Algérie - La curée, vers 1863, musée d'Orsay,Paris. |
Mais de longues années de souffrance, quand, une fois quittée sa campagne bien-aimée et élève au lycée, il fait connaissance d'Olivier, devenu rapidement son ami, et de ses cousines Madeleine et Julie. Il tombe amoureux fou de Madeleine, amour sans espoir puisque celle-ci épousera sans trop tarder un autre homme.
Jusque là Fromentin a beaucoup puisé dans sa vie, il a pris quelques arrangements mais c'est globalement autobiographique. Ensuite, non, semble-t-il. Il part à Paris, aime toujours Madeleine, souffre toujours, écrit des poèmes ou des essais.
C'est vraiment la beauté des pages écrites par Fromentin qui fait passer ce type d'histoire d'amour impossible! On peut trouver quelques imprudences chez Madeleine, une froideur chez le mari, un manque de décision chez Dominique, mais heureusement Fromentin sait varier les situations, introduire deux trois autres personnages intéressants, laisser Julie dans un mystère parfois dévoilé (voyons ce que fera Harpman), et éviter l'exacerbation romantique qui m'avait fatiguée dans Les Hauts de Hurlevent. A lire ou relire, bien sûr.
Commentaires
Mais Dominique est très très beau comme roman...
Je suis ravie qu'il t'ait laissé un si bon souvenir (et n'hésite pas à le relire)
Bon weekend.
Bon, en tout cas j'apprécie moins les traces de thé ou de café laissés sur les pages des livres empruntés... Ou de suivre grâce aux pliures les endroits où le lecteur a fait une pause... ^_^
Pour Harpman, j'en ai deux sur les étagères.A lire pour avril. Et un Quiriny.
"L'exacerbation romantique" des Hauts de Hurlevent est morbide, certes, mais pas gratuite.. C'est écrit par une jeune fille qui va mourir, qui n'a vu que la mort autour d'elle et s'il y a exacerbation, à mon avis, c'est celle qui conduit au désespoir voire à la folie. Cela n'a rien d'une pose romantique. On ne peut qu'être morbide lorsque l'on a vécu les épreuves et les souffrances d'Emily depuis son plus jeune âge.
Les soeurs d'Emily ont exactement le même arrière plan, mais leurs romans sont plus posés (même s'il y a des passages où l'héroïne a beaucoup d'imagination ^_^) Bon, après, c'est peut-être Emily.
Merci autant pour le souvenir que vous faites remonter et votre compte-rendu intéressant. Je relirais volontiers Fromentin.
"De mon temps" on avait aussi des "prix", pas si beaux, mais j'en ai gardé.