Jean Rouaud, adoubé depuis peu auteur chouchou, a d'abord proposé à ses lecteurs une série de cinq livres (courts) sur sa famille, dans un style disons sinueux et maîtrisé (amateurs de phrases de trois mots, ça va vous changer!), et moi qui fuis les histoires de familles là je suis accro! En quelques semaines, c'était lu (plus deux autres hors série).
Des hommes illustres
Jean Rouaud
Minuit, 1993
Je poursuis ma découverte de Jean Rouaud, à rebours, cette fois il est encore chez Minuit, flirte avec la fiction (plus tard dans ses écrits il donnera le véritable nom de sa petite ville), mais encore il s'agit de son père, décédé rapidement le lendemain de noël 1963, alors que l'auteur était encore gamin.
Un père voyageur de commerce, s'esquintant le dos à trimbaler de lourdes valises ou récupérer des pierres pour une future oeuvre dans le jardin, ceci dans de mythiques voitures des années 50. La seconde partie présente un 'grand jeune homme', durant la seconde guerre mondiale, sa fuite du STO, sa cache en ferme, son parcours dans la résistance, sa rencontre avec sa future épouse.
Question écriture, c'est moins chamboulé et vagabond que dans ses livres à venir, on distingue paragraphes et chapitres, mais l'écriture de Rouaud est bien reconnaissable, et les dernières pages, sous un bombardement à Nantes, sont proprement hallucinantes et laissent sans souffle. Septembre 1943.
"Peut-être dans ces conditions eût-il aimé la banquise, cette mer tangible, maîtrisée, qui emprisonne dans ses strates de neige accumulée au fil des siècles des piles d'annales fossiles -mais la dernière glaciation remonte à trop longtemps en Loire-Inférieure."
"Le massif armoricain s'élevait alors à plus de cinq mille mètres, dinosaure avant les dinosaures, tropical avant les tropiques, car un climat chaud et humide régnait sur ces premières terres.Quand on vante les charmes du passé, on oublie toujours de rappeler cette phase polynésienne de la Bretagne. Or si vous êtes peintre à Pont-Aven, cela peut vous économiser un inutile voyage aux Touamotu. "
Voir chez babelio, lecture écriture
Voici ensuite le premier livre de Jean Rouaud, qui lui valut une récompense méritée.
Les champs d'honneur
Jean Rouaud
Minuit, Goncourt 1990
La famille de Jean Rouaud ne m'est plus inconnue. Pourquoi donc, alors que je fuis comme la peste tous ces récits autofictionnels où s'étalent différents drames et maladies d'un parent, enfant, grand-parent, frère, etc., lis-je avec délectation ces évocations d'une France des années 50 / 60, dans l'encore appelée Loire Inférieure, avec ses commerçants et petit peuple laborieux, d'une vie familiale comme tant d'autres, traversée de petits bonheurs et tragédies comme tant d'autres? Le secret est sans doute dans le regard tendre et amusé de l'auteur, où soufflent les vents mauvais de deux guerres mondiales, mais aussi dans ces grandes envolées sur les pluies (et dans ce département il y a à dire!), ou la 2 CV du grand père. bref, un petit monde transcendé par l'écriture.
Voici le troisième de l'auteur, même si finalement l'ordre pas pas d'importance (et pas de couvertures, on a compris l'idée, chez minuit c'est sobriété)
Le monde à peu près
Jean Rouaud
Minuit, 1996
Ce monde à peu près serait le monde d'un myope sévère, avec des passages grandioses pleins d'autodérision mais de réalisme sur le monde vu par un myope. Avantages désavantages au football, au ping pong, au visionnage d'un film, etc. Souvenirs d'adolescence dans un internat des années 60, amitié avec un certain Gyf, premières amours pas très réussies, vie estudiantine, AG et défilés décrits avec une ironie subtile. Et toujours ces détails dans les descriptions (poteaux du terrain de foot, lampe à l'ancienne) qui font marcher ma machine à souvenirs...
Et voici le dernier de cinq constituant un ensemble (oui, oui, il me reste le numéro 4, Pour vos cadeaux)
Sur la scène comme au ciel
Jean Rouaud
Minuit, 1999
Le numéro 4, donc, intitulé Pour vos cadeaux, devrait parler de la mère de l'auteur, désormais décédée. Un livre écrit APRES ce décès. Comment l'aurait-elle pris, si elle avait pu le lire? L'auteur imagine justement quel aurait été son avis, ses critiques, ses corrections. Voilà l'idée. Ne pas imaginer de grand déballage, la famille n'est pas de ce genre là. C'est l'émotion qui souvent vous envahit, c'est la pudeur de l'auteur que l'on respecte. Magnifique livre, qui clôt le pentalogie.
"Après avoir beaucoup abusé de vous, de votre temps de vie, je vous rends à vous-mêmes, mes familiers illustres, je vous laisse en paix."
Et donc,
Pour vos cadeaux
Jean Rouaud
Minuit, 1998
Sa mère est décédée, alors Rouaud peut en parler, dans un hommage tout en retenue et quand même objectivité. Ou comment sublimer une vie comme bien d'autres, non exempte de tragédies mais sans doute de vrais bonheurs.
Challenge de Phildes
Des hommes illustres
Jean Rouaud
Minuit, 1993
Je poursuis ma découverte de Jean Rouaud, à rebours, cette fois il est encore chez Minuit, flirte avec la fiction (plus tard dans ses écrits il donnera le véritable nom de sa petite ville), mais encore il s'agit de son père, décédé rapidement le lendemain de noël 1963, alors que l'auteur était encore gamin.
Un père voyageur de commerce, s'esquintant le dos à trimbaler de lourdes valises ou récupérer des pierres pour une future oeuvre dans le jardin, ceci dans de mythiques voitures des années 50. La seconde partie présente un 'grand jeune homme', durant la seconde guerre mondiale, sa fuite du STO, sa cache en ferme, son parcours dans la résistance, sa rencontre avec sa future épouse.
Question écriture, c'est moins chamboulé et vagabond que dans ses livres à venir, on distingue paragraphes et chapitres, mais l'écriture de Rouaud est bien reconnaissable, et les dernières pages, sous un bombardement à Nantes, sont proprement hallucinantes et laissent sans souffle. Septembre 1943.
"Peut-être dans ces conditions eût-il aimé la banquise, cette mer tangible, maîtrisée, qui emprisonne dans ses strates de neige accumulée au fil des siècles des piles d'annales fossiles -mais la dernière glaciation remonte à trop longtemps en Loire-Inférieure."
"Le massif armoricain s'élevait alors à plus de cinq mille mètres, dinosaure avant les dinosaures, tropical avant les tropiques, car un climat chaud et humide régnait sur ces premières terres.Quand on vante les charmes du passé, on oublie toujours de rappeler cette phase polynésienne de la Bretagne. Or si vous êtes peintre à Pont-Aven, cela peut vous économiser un inutile voyage aux Touamotu. "
Voir chez babelio, lecture écriture
Voici ensuite le premier livre de Jean Rouaud, qui lui valut une récompense méritée.
Les champs d'honneur
Jean Rouaud
Minuit, Goncourt 1990
La famille de Jean Rouaud ne m'est plus inconnue. Pourquoi donc, alors que je fuis comme la peste tous ces récits autofictionnels où s'étalent différents drames et maladies d'un parent, enfant, grand-parent, frère, etc., lis-je avec délectation ces évocations d'une France des années 50 / 60, dans l'encore appelée Loire Inférieure, avec ses commerçants et petit peuple laborieux, d'une vie familiale comme tant d'autres, traversée de petits bonheurs et tragédies comme tant d'autres? Le secret est sans doute dans le regard tendre et amusé de l'auteur, où soufflent les vents mauvais de deux guerres mondiales, mais aussi dans ces grandes envolées sur les pluies (et dans ce département il y a à dire!), ou la 2 CV du grand père. bref, un petit monde transcendé par l'écriture.
Voici le troisième de l'auteur, même si finalement l'ordre pas pas d'importance (et pas de couvertures, on a compris l'idée, chez minuit c'est sobriété)
Le monde à peu près
Jean Rouaud
Minuit, 1996
Ce monde à peu près serait le monde d'un myope sévère, avec des passages grandioses pleins d'autodérision mais de réalisme sur le monde vu par un myope. Avantages désavantages au football, au ping pong, au visionnage d'un film, etc. Souvenirs d'adolescence dans un internat des années 60, amitié avec un certain Gyf, premières amours pas très réussies, vie estudiantine, AG et défilés décrits avec une ironie subtile. Et toujours ces détails dans les descriptions (poteaux du terrain de foot, lampe à l'ancienne) qui font marcher ma machine à souvenirs...
Et voici le dernier de cinq constituant un ensemble (oui, oui, il me reste le numéro 4, Pour vos cadeaux)
Sur la scène comme au ciel
Jean Rouaud
Minuit, 1999
Le numéro 4, donc, intitulé Pour vos cadeaux, devrait parler de la mère de l'auteur, désormais décédée. Un livre écrit APRES ce décès. Comment l'aurait-elle pris, si elle avait pu le lire? L'auteur imagine justement quel aurait été son avis, ses critiques, ses corrections. Voilà l'idée. Ne pas imaginer de grand déballage, la famille n'est pas de ce genre là. C'est l'émotion qui souvent vous envahit, c'est la pudeur de l'auteur que l'on respecte. Magnifique livre, qui clôt le pentalogie.
"Après avoir beaucoup abusé de vous, de votre temps de vie, je vous rends à vous-mêmes, mes familiers illustres, je vous laisse en paix."
Et donc,
Pour vos cadeaux
Jean Rouaud
Minuit, 1998
Sa mère est décédée, alors Rouaud peut en parler, dans un hommage tout en retenue et quand même objectivité. Ou comment sublimer une vie comme bien d'autres, non exempte de tragédies mais sans doute de vrais bonheurs.
Challenge de Phildes
Tu deviens mono-maniaque là !! J'ai lu Kiosque avec grand plaisir (billet à venir) et j'avais découvert "les champs d'honneur" avec grand plaisir au moment de sa parution. Je compte continuer, mais plus doucement que toi.
RépondreSupprimerOups oui... Bon, ce sont des livres courts, quand même.
SupprimerJ'ai lu les 1, 2 et 4 et je les ai beaucoup aimés. J'apprécie la plume de l'auteur, longue, nourrie et attendrissante.
RépondreSupprimerTu en parles parfaitement! Tu peux découvrir ceux qui te manquent, tu sais.
SupprimerJ'ai lu ces cinq romans il y a longtemps, et j'avais adoré. La qualité de l'écriture Des champs d'honneur m'avait tellement séduite que, moi aussi, j'avais fait de cet auteur un "chouchou" et puis depuis, je n'ai plus rien lu de lui. Mais il me semble qu'il a eu un long moment de silence, non ? Mais ce qui est étonnant, c'est que d'ordinaire je fuis ce genre littéraire,centré sur lui et sa famille.
RépondreSupprimerOn est 100 % raccord! Pour l'écriture qui m'a emballée, et pour ces histoires de famille, mais là, c'est différent. Sans doute parce qu'il garde une certaine pudeur et pas mal d'autodérision. Et puis ce sont des gens 'comme tout le monde'.
SupprimerAh voilà une série pour mon challenge ! Merci et bonne soirée.
RépondreSupprimerTout à fait, je te l'ai signalé d'ailleurs.
Supprimerun grand auteur selon moi et un des rares auteurs récents que je relis toujours avec le même plaisir.
RépondreSupprimerHé oui. Un auteur contemporain qui passe la barre!
SupprimerAh toi quand tu aimes, tu enchaînes !^^ Je suis plus comme Aifelle, j'espace, je prends plus mon temps.
RépondreSupprimerPfff, tu n'as même pas commencé. Kiosque est bien.
SupprimerAh oui, non mais je parle en général, quel que soit l'auteur.;)
SupprimerJ'avoue avoir tendance à revenir vite aux auteurs préférés. Mais parfois je sors de la zone de confort.
SupprimerJ'aime beaucoup Rouaud aussi. Un très grand écrivain, selon moi. Je n'ai pas encore lu Kiosque mais c'est pour bientôt. Il en a écrit d'autres dont on n'a peu parlé : L'invention de l'auteur, L'imitation du bonheur, La femme promise, ... des chroniques aussi. Vraiment, un auteur qui a des choses à dire !
RépondreSupprimerBon dimanche.
Patience, je vais en parler... L'imitation du bonheur et La désincarnation sont dans mes brouillons déjà. L'invention de l'auteur, j'en ai parlé. Oui, tous excellents!
SupprimerLa femme promise? Ha connais pas.
Eh bien, quelle série ! Je ne me souviens plus si j'ai lu Les champs d'honneur... pour les autres, je suis certaine que non. Bref, pourquoi ne l'ai-je jamais lu ?
RépondreSupprimerOui, pourquoi? Remarque, j'ai démarré très tard aussi.
SupprimerJ'ai lu Les champs d'honneur, que j'avais beaucoup aimé. Mais bizarrement je ne l'ai plus jamais relu, sans doute parce que les histoires de famille c'est pas trop mon truc.... Il faudrait que je retente, d'autant qu'on doit trouver tous ses livres en bibliothèque.
RépondreSupprimerOui, retente, Kiosque par exemple, où Paris est plus présent, et moins la 'famille'. Mais la famille de Rouaud ne me dérange pas.
SupprimerJ'ai l'impression de n'avoir jamais lu cet auteur... On dirait que c'est une lacune ;-)
RépondreSupprimerIl faut au moins essayer. Je pense que ça te plairait.
Supprimerj'avais beaucoup aimé Les champs d'honneur et Les hommes illustres. Après avoir écouté l'auteur lors d'un festival à Saint Malo, j'avoue que j'ai fait un blocage tant le monsieur m'a semblé imbu de lui même ... Je n'ai plus eu du tout envie de lire son histoire familiale !
RépondreSupprimerOups c'est ça le risque! Heureusement je ne le connais pas.
Supprimerah oui, un nouveau chouchou, carrément... J'ai lu Les champs d'honneur à sa sortie et il m'en reste un épouvantable souvenir mais je dois l'avoir lu trop jeune!
RépondreSupprimerPeut-être faut-il un peu d'années pour apprécier ce genre de souvenirs (où il ne se passe finalement pas beaucoup de choses extraordinaires -mais pour l'ordinaire, c'est fort)
SupprimerSinon, je galère avec overblog pour laisser des commentaires.
Je n'avais lu que Les champs d'honneur, qui ne m'avait pas plu. Sans doute devrais-je les lire dans l'ordre.
RépondreSupprimerJe ne crois pas que ça arrange beaucoup les choses; j'ai lu dans le désordre, et avec plaisir. Ou alors lis Kiosque, autobiographique mais plus centré à Paris.
SupprimerJ'en ai lu aucun, mais moi aussi lorsque j'aime un écrivain j'y vais à fond dans la découverte de son œuvre. (Goran : https://deslivresetdesfilms.com)
RépondreSupprimerOups, quelqu'un qui me comprend!!!
SupprimerJe n'ai lu que "les champs d'honneur" et ça date un peu à présent mais je me souviens encore qu'il m'avait profondément touchée. Il faudrait donc que je le relise, je me demande bien pourquoi que je l'avais oublié...
RépondreSupprimerLes champs d'honneur débutent une 'série' que j'ai d'ailleurs lue dans le désordre (présent billet). Actuellement j'ai une autre série en cours. Et ça me plait toujours!
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