Le voyant d'Etampes
Abel Quentin
Les éditions de l'Observatoire, 2021
Quan on vit dans une (très) petite ville loin de Paris, on s'intéresse fort peu (voire pas du tout)(et à condition d'en avoir entendu parler) à ces notions de woke (éveillé), cancel culture, appropriation culturelle. Mais heureusement ce roman ne parle pas que de cela ou en tout cas il le fait au travers d'un exemple, celui de Jean Roscoff, professeur d'université parisienne à la retraite, pas vraiment héros flamboyant : sa femme a divorcé (il espère pourtant), il a des problèmes d'alcool, un bouquin écrit dans les années 90 sur les époux Rosenberg est tombé au mauvais moment. Bref, la lose. La compagne de sa fille est droit dans ses bottes sur les droits des femmes et des minorités, d'entrée elle est hostile face à ce mâle blanc, et pas la peine de se targuer d'un passé à SOS Racisme dans les années 80.
Le voilà qui ressort des placards une idée abandonnée des décennies plus tôt, parler d'un poète américain, Robert Willow, mort 'emplatané' en 1960. Ayant eu des soucis avec le Maccarthysme il s'est installé en France, a fréquenté les clubs de jazz et les existentialistes. Ecrivant en anglais, puis en français, et là des poèmes d'influence médiévale, Villon, tout ça. Un type intéressant, quoi, non dénué de talent.
Le livre paraît, c'est sûr que parler d'un obscur poète des années 50 n'est pas garantie de gros succès, Jean le sait, mais il a été touché par Willow, son itinéraire, son œuvre.
Mais patatras!!! Il n'a pas accordé une importance primordiale au fait que Willow est noir, insistant plutôt sur ses opinions communistes, car Roscoff a enseigné cette branche de l'histoire.
C'est le début d'accusations sur les réseaux sociaux, dans les magazines, ses défenseurs ne sont pas forcément fréquentables, bref ça se n'arrête pas, il se débat sans pouvoir éclaircir la situation, reconnaissant son erreur initiale mais rien à faire, la situation se dégrade.
Un anti-héros ai-je lu, oui, pas antipathique, plutôt paumé devant ce déferlement d'hostilité qu'il n'avait pas vu venir.
En conclusion : un roman fort intéressant, des thèmes dans l'air du temps, exposés plus subtilement qu'on ne le craindrait, et étonnamment de l'humour et du sens de la formule. L'histoire de Robert Willow seule aurait déjà donné un roman intéressant. Je recommande cette lecture!
Les avis de Nicole, Delphine, la petite liste, sandrion,
avis babelio, bibliosurf,
Commentaires
Je trouve que la trame du roman a un lien avec La Tache de Philip Roth. Ça ne me dit pas plus que ça, je passe mon tour.
Cancel culture dénonce et ostracise des comportements considérés comme inadmissibles. (merci wiki)
Ce voyant d'Etampes réussit un joli numéro d'équilibrisme.
Ah oui, cette maison d'éditions? Oui, des romans pas mal!
https://la-petite-liste.blogspot.com/search/label/Le%20Voyant%20d%27%C3%89tampes
Je suis un peu ambivalente à l'égard de ce livre, je trouve Jonathan Coe drôle quand il aborde le sujet dans son dernier livre parce qu'il le fait sans paternalisme. J'ai envie de lire le Roth sur le sujet. Mais rien que le fait qu'un type comme Beigbeder ait porté ce roman aux nues me refroidit.
Bonne soirée.
La bonne nouvelle c'est un titre de Roth et un nouveau roman de Coe!!!
J'ignorais que Beigbeder en avait parlé (tu vois la grotte où je vis ^_^)