Le coeur ne cède pas


 Le coeur ne cède pas

Grégoire Bouillier

Flammarion, 2022

Prix André Malraux 2022


Lectrice, lecteur tenace, amateur d'OLNI , ce livre est pour toi! Il était en lice pour plusieurs prix, dont le Goncourt, et fort bien accueilli par la critique, mais ... plus de 900 pages ça rend frileux. Hé oui, c'est là son défaut, à ce bouquin. Sa lecture prend du temps, la bête ne peut se glisser dans un sac, ou alors valise à roulettes?, en tout cas je l'ai lu assise sur mon canapé, dans ma maison peu chauffée, accompagnée parfois d'un chat qui n'en avait cure de ce pavé et réclamait des gratouillis.

Oui, je digresse, mais après tout c'est normal, c'est comme lire Jaenada et ne point user ensuite de parenthèses : c'est impossible. Il n'est d'ailleurs pas étonnant que le nom de Jaenada apparaisse, car l'auteur est parti d'un fait divers (non criminel) et s'est lancé dans une enquête vertigineuse, avec l'aide d'un couple fictif d'enquêteurs, BMore et son assistante Penny, lequel couple fournit au lecteur des moments souvent barrés et jubilatoires. Sans trop divulgâcher je peux dire que Jaenada fait une apparition courte et décisive dans le bouquin!

Ainsi que Fabcaro d'ailleurs, expérience réussie après une fascinante description (non, je n'en dis pas trop)

L'auteur en 1986 avait appris à la radio l'histoire de Marcelle Pichon, mannequin chez Fath, qui s'était laissée mourir de faim dans son appartement, tenant le journal de son agonie, et dont le corps ne fut découvert que dix mois après. Des décennies plus tard, il veut savoir le pourquoi du comment, bravant les difficultés.

"La chasse au trésor est elle-même le trésor! Quoi que nous trouvions à la fin, c'est le chemin y menant qui lui donne de la valeur."

En 900 pages (re-oui!) le lecteur parfois étourdi suivra les pas des enquêteurs, leurs découvertes, leurs culs-de-sac, le tout en période Covid et ses documents temporairement inaccessibles. Tout ou presque sera exploré, un éclair de lucidité empêchant parfois l'auteur de creuser plus loin dans une généalogie. car, l'ai-je signalé, une saine autodérision enveloppe le tout.

De plus c'est un livre bourré d'informations souvent sans trop de rapport serré avec l'histoire, avouons-le, mais fichtre, pourquoi refuser ? D'où la longueur, forcément, mais ne garder que le strict minimum aurait été moins gouleyant, et puis ça fait pour moi partie du côté vertigineux (je me répète) du livre.

"Les livres servent aussi à en faire lire d'autres, ce n'est pas vous qui allez dire le contraire."

Bref, on a aussi une (passionnante) enquête avec rebondissements.

Par ailleurs l'histoire de l'auteur, des recherches sur ses parents et grands parents arrivent, des coïncidences avec celle de Marcelle, bref, on est quasi submergé. Jusqu'à la toute fin et la dernière photo. Mais c'est dingue!

En conclusion : en fait il faut se lancer et après 100 pages environ on est bien dedans, pas question d'arrêter. Mais il faut le bon moment, c'est sûr.

Avis babelio, bibliosurf, et celui de Cannetille, que je découvre et en a fait un coup de coeur, 

Et le site chez Bmore & Investigations (si!) et le dossier Marcelle Pichon.

Je ne peux résister à vous raconter que:

Ce livre est dangereux puisqu'au cours de ma lecture je l'ai posé pour fouiner dans les archives mariages et autres de Paris et du 76. Me voilà partie sur les traces de ma famille maternelle...

Incroyable : j'écris ce billet en écoutant la radio : le film Jeanne Dielman  de Chantal Ackerman vient d'être désigné meilleur film de tous les temps par l'institut britannique du cinéma Sight and Sound. Et figurez vous qu'un passage du livre raconte ce film, cherchant à reconstituer la vie de Marcelle Pichon.

Commentaires

  1. Ah tu le défends bien mais 900 pages, ça ne va pas se caser comme ça face à une PAL déjà bien fournies en pavés qui attendent leur tout depuis un moment.^^ J'ai bien noté l'appel de l'OLNI en tout cas.^^ Peut-être si mes co-lectrices habituelles veulent bien se lancer dedans, ça activera les choses.;)

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    1. Il est tombé au moment où je n'avais pas vraiment d'autres emprunts bibli, ça aide! Le dernier tiers s'est casé en deux jours. Vraiment une grosse lecture, avec possibilité de passer vite sur une page si on sait le faire.

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  2. Je viens de le terminer et j'ai adoré. Je suis émerveillée par cet OLNi et par le talent de l'auteur qui réussit à tirer plein de fils de cette vieille histoire, tout en tenant sans faillir son lecteur en haleine. Il aurait vraiment mérité un prix !

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    1. Tu confirmes que nos goûts demeurent liés. ^_^ Pour les prix, il en a eu pour des bouquins précédents, là il en a eu un, mais pour les prix 'principaux' on peut penser que les jurés étaient réticents à le proposer aux lecteurs (ou ne l'avaient pas terminé, or il faut tout lire pour réaliser le projet). P Assouline, le Masque et la Plume, par exemple, sont positifs.
      Je vois bien quelques blogs qui pourraient se lancer.^_^

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  3. Jusqu'ici, je n'étais pas tentée par ce roman, mais je vais le noter et essayer de ne pas l'oublier pour le caser le moment opportun ! ;-)

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    1. Regarde qui est tombé dans la marmite!!! Le moment opportun, c'est la bonne expression, ne panique pas.

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  4. Un roman foisonnant, malicieux et intelligent qui m'a occupé tout le mois dernier. Un énoooorme coup de cœur. Je ne connaissais pas son auteur (enfin, je le connaissais sans le savoir sous les initiales G.B. à travers le travail de Sophie Calle et son fameux Prenez soin de vous) et je n'ai d'autre envie d'aller me plonger dans un autre de ses pavés.

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    1. Exact, le nom de Sophie Calle apparaît dans le livre (mais qu'est-ce qui n'apparaît pas? ^_^).
      Réjouis pas, l'homme a déjà fourni d'autres pavés!!!
      (et j'attends ton avis détaillé...)

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  5. malgré ou cause ses 900 pages ce billet me tente beaucoup ! mais je serai encore plus tentée si tu n'avais pas peur de le divulgâcher moi j'aime que l'on me raconte et connaître par coeur ou presque un livre ne m'empêche jamais de relire s'il en vaut la peine.

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    1. Je savais que j'allais alerter les curieux! Bah l'histoire est connue, celle de ce mannequin, il n'y a rien à divulgâcher, certains détails de l'enquête on les découvre, voilà. Ce n'est pas le genre de livre où on doit préserver le suspense (retrouveront ils le journal, par exemple, cela ne reste pas si important)(regarde une des citations)
      Ceci étant, c'est souvent palpitant, et je me suis pas mal amusée aussi.

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  6. Il faut vraiment être motivée pour un tel pavé!

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    1. Je l'étais, et comme j'avais le bon créneau temporel tranquille...

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  7. Tu peux aligner tous les arguments que tu veux, même les meilleurs, pour moi, 900 pages c'est niet !

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  8. Tu sais quoi : tu es arrivée à me convaincre de lire ces 900 pages.

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  9. Ce ne sont pas les 900 pages qui m'arrêtent mais plutôt le contenu qui a priori ne m'attire pas (c'est sûr que du coup, vu l'épaisseur je suis moins encline à tenter...)

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    1. Ah j'ai raté mon coup avec toi! ^_^ En fait je ne l'ai pas vraiment lu pour l'histoire, et ensuite c'est ce truc de fou qui m'a accrochée.

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  10. L'auteur est passé à La Grande Librairie, je ne dirai pas non à ce livre si je le trouve à la bibliothèque et qu'une page ou l'autre me retient.
    J'ai souri en apprenant que le film de Chantal Akerman était sur la plus haute marche de ce podium - elle en rit certainement la tête dans les étoiles - et me suis rappelé le festival des films de femmes où je l'ai vu à Bruxelles, une autre époque !

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    1. Ah je pourrais alors retrouver l'émission...
      Oui, ce film, une coïncidence parmi d'autres. Il a l'air assez particulier tout de même.

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  11. Je sais qu'il avait ses fans pour le Goncourt, mais je ne suis pas sûre que ce genre de littérature soit pour moi. Même pas tentée d'essayer en bibli. Et 900 pages, ça me paraît tout simplement insurmontable en ce moment. Je tourne plutôt autour de 200 !

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    1. Je n'ai pas suivi, disons que s'il avait eu le Goncourt, c'était mal parti pour les ventes... ^_^ Pourtant cela se lit sans encombres.
      Tu penses bien que les 200 pages, j'y ai recours aussi.

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  12. j'avoue que les 900 pages sont un frein pour moi aussi, il faudrait trouver le bon moment pour le caser !

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    1. J'ai avoué qu'il m'a aussi fallu me trouver au bon moment.

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  13. Je l'ai noté mais pas encore emprunté je veux prendre tout mon temps pour le lire sans être interrompu sans cesse et la période précédent Noël n'est pas favorable pour cela :) enfin, chez moi...du coup ce sera pour l'année prochaine ! C'est amusant cette coïncidence, tu entends parler d'un film dont il parle dans le livre :):) du coup tu vas être obligée d'aller le voir...

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    1. Merci de ta confiance. Au moins, on est à peu près sûr que le livre sera disponible, je ne vois pas une foule le réserver. ^_^
      Hé oui, les coïncidences...

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  14. Austist Reading vient de me le conseiller, ton billet arrive à point... convaincue. ( et puis, l'hiver, c'est la bonne saison pour les pavés :-))

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    1. En commentaire il m'a dit en avoir fait un énorme coup de coeur. Un jour j'aurais peut-être les détails, mais en tout cas il t'a bien conseillée!

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  15. 900 pages, je dis non, même si j'ai déjà lu une critique très positive sur un autre blog...

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  16. 900 pages ? Fabuleux ! J'aime les gros livres. J'ai mis celui-ci dans mon panier d'envies de la Médiathèque. Tous les exemplaires sont en prêt et la liste d'attente et longue, mais tant pis. Merci et bon week end.

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    1. Oui, préférer une médiathèque (sans risques) et on peut prolonger de toute façon. Des réflexions qui devraient vous intéresser, je n'ai pas tout dit, en particulier sur la couverture médiatique à l'époque, assez aléatoire.

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  17. Je crois que c'est le bon moment pour lire ce livre!

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  18. Oh bah non, je me sens obligée de noter, là !! Bon, j'attendrai la sortie poche. Comme je lis beaucoup dans les transports, et que j'ai déjà bien souffert en lisant "Kong", cet été...

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    1. Hum cet après midi j'ai flâné à la bibli, l'auteur a déjà écrit un roman en deux tomes, chacun d'environ 800 pages.
      Bref, j'ai emprunté 2666 de Bolano, soyons fous.

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    2. Oh, 2666 ! J'ai adoré (il faut dire que Bolano est mon auteur chouchou) mais oui, il est énooorme (dans tous les sens du terme). Je me souviens qu'à l'époque où je l'ai acheté, la jeune fille qui tenait la caisse de la librairie s'était exclamée en disant qu'elle n'avait jamais vu de livre aussi gros :)... Et j'avais profité de trajets en avion avec de longues escales pour en lire une bonne partie.

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    3. J'ignore si j'arriverai au bout, j'avais abandonné Les détectives sauvages... En tout cas, pour le mois latino, autant s'y prendre tôt.

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  19. Ce ne sont pas les 900 pages qui me font peur, mais tout cela me paraît un peu fouillis, trop de choses, c'est le ressenti que j'en ai. Pas trop difficile à suivre ? car j'ai des soucis de concentration en ce moment...

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    1. Pas difficile, on est entraîné dans un truc finalement parfois fou parfois émouvant. Un peu comme Jaenada, ça suit son chemin, on s'y retrouve.

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  20. Oui, c'est bien exactement ce que j'ai ressenti autodérision, côté vertigineux, un peu fou, digression, mais pour le syndrome de l'orangerie en plus court ! Passionnant ! J'ai pensé aussi à Jaenada forcément, (j'ai acheté son dernier livre La désinvolture mais pas encore lu...), le côté enquête, les digressions, l'intrusion de l'auteur dans le livre, l'autodérision, mais le tout passionnant.

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    1. @ claudia : j'en suis au point que si mes biblis ne bougent pas, je vais acheter ces deux (Bouillier Jaenada, exact, ils se ressemblant, pour notre plus grand bonheur) ou attendre les poches, bref, je scrute quand même.

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