La maison vide


 La maison vide

Laurent Mauvignier

Minuit, 2025



Que raconter d'original sur ce roman maousse costaud en effet? Je connaissais l'écriture de Mauvignier, façon torrent, avec Histoires de la nuit, qui m'avait laissée quasi essoufflée, heureusement que je ne ronge plus mes ongles. Là on retrouve les phrases à incises, virgules, relatives, etc., bref de longues phrases. Qu'on se le dise : longues phrases mais pas comme chez Proust non plus. Il faut juste savoir se laisser entraîner (j'ai dit torrent?) et tout se passe très bien. Parfois quelques clairières, des échanges de paroles, puis on continue la narration, dense sur la page.

L'auteur s'attaque à une histoire de ses ancêtres, la reconstituant, la reconstruisant, reconnaissant prendre des libertés, mais dans le bon sens.(cf page 45) . Au prologue, Marie-Ernestine et Jules, avec le bébé Marguerite, sera l'une des rares photos de Marguerite échappées à une destruction volontaire. Qui? Pourquoi?

Et l'on démarre ensuite avec du classique, pour l'histoire, pas l'écriture on l'aura compris. Marie-Ernestine, fille de propriétaires terriens assez aisés dans la Touraine dont est issu l'auteur, est envoyée étudier dans une institution religieuse, où elle est méprisée par les petites bourgeoises locales. Son talent pour le piano la laisse rêver de sortir d'un destin tout tracé, mais elle n'y échappera pas et sera mariée par son père à Firmin, pas forcément le plus mauvais, mais bon, un homme de l'époque, quoi.

Je ne vais pas tout raconter, au fil du temps l'on réalise par exemple que la mère de Marie-Augustine, dite préposée aux confitures, savait amener son mari à des décisions, mine de rien, et a bien pris l'affaire en mains lors de l'absence des hommes partis au front. Mais on reste dans une époque où les filles n'avaient pas la main sur leur destin, et Marguerite, la grand'mère de l'auteur, encore moins, en dépit de ses velléités de mener sa barque. Ses erreurs se paieront.

Mais ce qui est formidable dans ce livre, ce sont les pages où souffle l'Histoire, on n'oubliera pas la description des combats de la Grande guerre, leur horreur, et aussi la permission de Jules. On sort là d'une histoire familiale personnelle pour atteindre la grande Histoire, de personnages aux destins finalement retrouvables ailleurs, mais voilà, le talent de Mauvignier transcende le tout. 

Avis babelio, bibliosurf, nicole

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