vendredi 29 juillet 2016

Ils savent tout de vous

Ils savent tout de vous
Mindreader
Iain Levison
Liana Levi, 2015
Traduit par Fanchita Gonzalez Batlle

Snowe est un flic de base sans signe particulier, jusqu'au jour où il s'aperçoit qu'il lit dans les pensées. Bien pratique pour détecter les mensonges de suspects, gagner du temps et l'admiration de ses chefs, mais gênant de connaître à longueur de journée la vie intérieure de ses collègues. Même pour draguer, ce n'est pas forcément un plus.

Ailleurs aux Etats Unis, Brooks Denny attend la mort dans le couloir de la mort, amassant une jolie somme au poker, bien aidé par sa lecture dans les pensées, eh oui, lui aussi, sauf qu'il a atteint un niveau supérieur. Son talent aiderait bien la mystérieuse Terry, bossant pour une mystérieuse organisation (le FBI), dont les pensées ne peuvent être lues par Denny (et c'est bien dommage). Bien évidemment, sinon il n'y aurait pas de roman, Denny accepte de se rendre à New York, et rien ne se passe comme prévu.

Que voilà un roman fascinant! Je garantis qu'il ne se lâche pas! Iain Levison domine parfaitement une narration sans temps morts et aux nombreux rebondissements. Il a bien tiré parti de cette idée de télépathie, sans tomber dans l'excès, montrant par ailleurs que certaines personnes très observatrices en savent beaucoup sur nous sans lire dans les pensées... De l'humour, du suspense, un seul défaut : trop court!(232 pages)

Les avis de clara, cuné,

mercredi 27 juillet 2016

Hélène

Hélène
Raymonde Vincent
Collection voyage immobile Christian Pirot

Achevé d'imprimer le 13 novembre 1991 d'après le manuscrit original conservé à la BM de La Châtre (Indre)(hé oui!)


Cela m'étonnerait fort que vous connaissiez le nom de Raymonde Vincent. Née en 1908 à Luant (près de Châteauroux), dans une famille de cultivateurs, à 17 ans elle monte à Paris, rencontre Albert Béguin (écrivain, critique et éditeur suisse) qu'elle épouse en 1929. Elle s'intéresse à la peinture, la musique, le théâtre, écrit des romans dont Campagne (prix Femina 1937) et Hélène, paru après sa mort en 1985 à Saint-Chartier (oui, pas loin de Nohant). Il était donc normal que je m'intéresse à une Berrichonne pur jus, en toute objectivité tout de même (si ç'avait été illisible j'aurais laissé).

Une biographie par Rolland Hénault, intitulée Raymonde Vincent, Chrétienne et libertaire, est parue en 2006. Je l'avais oublié, mais ce titre parfait permet de comprendre l'importance de la foi (je ne dirais pas la religion,cela va au-delà de simples habitudes) chez Hélène, ses parents et son parrain. Attention, pas de pages imbuvables, les mots grâce et mysticisme seraient appropriés, c'est présenté avec profondeur et sentiment, tandis que certaines religieuses en prennent pour leur grade.
Un autre écueil évité par Raymonde Vincent, c'est le côté 'roman du terroir'. Bien sûr la campagne et ses labeurs est présente, et c'est intéressant de voir évoluer le coin (près de Levroux, dans le roman) et la vie rurale, ne serait-ce qu'avec le passage des charrettes aux automobiles prisées par un des personnages.
Plutôt autobiographique (mais pas que), le roman démarre avant le mariage des parents d'Hélène, dans une ambiance presque conte de fées. Orpheline avant ses 20 ans, Hélène est élève dans une institution catholique, puis, ses dons artistiques étant évidents, part à Paris où elle rencontre le succès, ainsi que le grand amour. Voué à ne pas durer, on le sait rapidement.

J'ai aimé ce roman complètement hors des modes, avec une histoire d'amour délicatement racontée. C'est fin, doux, subtil, vaporeux parfois. Les deux mondes, urbain mondain, et rural sont bien évoqués, sans manichéisme. Raymonde Vincent mérite de ne pas être oubliée.

lundi 25 juillet 2016

La planète des sages

La planète des sages
Encyclopédie mondiale des philosophes et des philosophies (tome 1)
Jul et Charles Pépin
Dargaud, 2011


"Yes we kant! "

Comme bien des gens j'ai officiellement arrêté la philosophie au lycée après un an en Terminale et une note pas si mauvaise au bac (je n'en suis pas encore revenue), mais le rayon philosophie de ma bibliothèque perso est quand même un peu rempli (plutôt PAL d'ailleurs)

Alors quand on m'a proposé une approche abordable avec à droite Charles Pépin pour un digest sur un auteur et surtout à gauche une planche de Jul relative au même auteur, j'ai dit à mon bibliothécaire 'tope là!, c'est vendu!'

La philosophie demeure la philosophie, quand même, mais là c'est plus digeste (ne pas excéder plus de trois ou quatre philosophes à la suite, non plus).
Après Descartes tentant de monter une étagère Ikea (suivre bêtement la notice sans trop penser), voici Montaigne sur un site de rencontres.
et Voltaire
Une façon agréable de réviser les bases de la philosophie. Et on m'a annoncé un tome 2.
Que voici.

Nouvelle encyclopédie mondiale des philosophes et des philosophies
La planète des sages 2
Mêmes auteurs, même éditeur


Même principe. Même humour. Même façon plaisante de présenter les idées d'un philosophe.


jeudi 21 juillet 2016

Le grand n'importe quoi

Le grand n'importe quoi
J.M. Erre
Buchet Chastel, 2016



Avec un titre pareil, ceux qui connaissent J.M. Erre se disent : "enfin il avoue!". Car ses romans précédents ont déjà un joyeux  côté foutraque -parfaitement maîtrisé cependant- et ce nouvel opus ne dépare pas l'ensemble. Avec comme à l'ordinaire du fond sérieux, cette fois la science fiction, domaine cher à son coeur, on le sent. Kafka et Beckett en référence, ça calme les récalcitrants.

Faut-il vraiment raconter l'histoire? Allez, il y a de la soucoupe volante, des extra-terrestres, des culturistes, deux auteurs de science fiction, deux piliers de bar. Unité de lieu : un village perdu. Unité de temps? Heu, oui, un peu trop quand même (je n'en dirai pas plus)
Les amateurs se réjouiront de la présence du nombre quarante-deux, de toute façon les clins d’œil aux oeuvres de SF sont nombreux.
Comme d'habitude, l'auteur manie l'humour (jamais méchant) et un poil brindzingue, et sait embarquer le lecteur complice.

"Le réconfort est proche, pensa Arthur avec cette adorable naïveté qu'on trouve chez les personnages qui ignorent qu'ils reste encore plus de deux cents pages à leur histoire."
"Le patron lança sur Arthur son torchon bactériologique, puis prit en même temps une bouteille et un air menaçant. face au danger du zeugma, Arthur ne put que s'incliner."
"Il fallait faire quelque chose, sauf qu ni Arthur ni Lucas n'étaient des personnages de films américains qui déjouent les invasions de l'espace tous les trois jours, une Budweiser dans une main et l'autre dans l'épaisse tignasse rouquine de leur petit garçon à la voix de doublage insupportable;"

Et si vous voulez en savoir plus, un petit bilan à mi chemin, merci l'auteur:
"Après avoir déambulé dans un village perdu en costume d'homme-araignée parce qu'il avait vomi sur sa fiancée, il avait rencontré des extraterrestres qui avaient enlevé Alain Delon, il avait failli se faire exorciser par une vieille folle avant de s'habiller en prêtre pour prendre en stop sur son vélo la maire du village aux mains baladeuses. Pour couronner le tout il était poursuivi par des culturistes costumés et courait le risque à tout moment de se prendre un coup de fusil."

Les avis de mes imaginaires, cathulu, clara, le bibliophare,

lundi 18 juillet 2016

Le secret de la manufacture des chaussettes inusables

Le secret de la manufacture des chaussettes inusables
The truth according to us
Annie Barrows
NiL, 2015
Traduit par Claire Allain et Dominique Haas


Allez, si Annie Barrows n'avait pas co écrit Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates, roman que j'ai bien aimé, aurait-on traduit ainsi le titre d'origine? Ou bien surfe-t-on sur la vague des titres à rallonge? Quoiqu'il en soit, cette manufacture existe quand même dans le roman...

Allez, s'il ne s'agissait pas d'ajouter une (grosse) pierre au challenge pavé de l'été chez Brize, aurais-je lu les 616 pages ou bien me serais-je contentée comme (trop) souvent au bout de 100 voire 300 pages d'aller zieuter la fin et passer à un autre livre? Possible...

Allez, je suis sympa, je vous parle de l'histoire. A Macedonia, Virginie Occidentale, en 1938, l'été est très chaud, très moite. Le thé glacé coule à flot, l'alcool un peu moins visiblement (on est en zone alcool prohibé, mais on se débrouille). Bientôt doit être célébré le cent cinquantième anniversaire de la création de la ville. Moment choisi par une étrangère pour y arriver, en ville : Layla n'a pas eu le choix, fâchée avec son père fortuné, elle doit travailler, et participer au Federal Writers' Project pour écrire un livre sur la ville. Les avis vont forcément diverger, selon les interlocuteurs interrogés, source d'amusement pour le lecteur.

Car étonnamment ce roman aurait dû me plaire. De l'humour, de l'ironie, des personnages un peu foutraques, des échanges épistolaires, les points de vue de Willa et Jottie (oui, j'y arrive!), un mystère qui plane, la passé pesant, tout était en place pour un page turner, non?

Donc Layla loue une chambre chez les Romeyn, enfants ou petits enfants du fondateur de la fameuse manufacture, et fort désargentés maintenant. Jottie se dévoue depuis des années à toute la famille, Willa, 12 ans, commence à laisser traîner partout ses oreilles, à fouiner et ne plus se laisser considérer comme une gamine.

Comme je n'étais pas à 100% dans l'histoire, je me suis laissée agacer par des détails idiots : Hank le policier et Shank le directeur, Melle Beck (Layla) et Melle Betts la bibliothécaire, ces noms sont trop proches...

Alors, des longueurs? Le fameux passé trop long à s'éclairer un peu? Des plaisanteries tombant parfois à plat? Je m'en veux un peu, surtout que je sais que d'autres ont aimé... Alors si vous voulez un bon gros roman où l'on en apprend sur la vie d'une petite ville sous la chaleur, c'est parfait, ce côté là est extrêmement bien rendu.

Les avis de Laeti,

jeudi 14 juillet 2016

Vivre ses désirs, vite!

Vivre ses désirs, vite!
Sophie Cadalen
Bernadette Costa-Prades
Philippe Rey, 2016

Présentation de l'éditeur :
"Ah ! Le désir... Notre époque n'a que ce mot à la bouche, mais qu'entend-elle par là ? Une envie de café apporté par le séduisant George Clooney ? Le désir sexuel qui envahit les magazines dès que pointent les premiers rayons du soleil ? 
Le désir ici évoqué est cette énergie qui nous agite, nous enthousiasme, nous donne le sentiment d'être vivant. C'est lui qui nous rend créatif, inventif, audacieux dans tous les domaines. Il n'a rien à voir avec les objets de consommation, même s'il ne les condamne pas. Sa quête hante le bureau du psychanalyste, sans qu'il en soit attrapé : le désir n'est jamais figé. Sa grâce est d'être mobile, inattendu, sans cesse à conquérir. Autant de dimensions qui le font passionnant. Mais le désir nous effraie, nous craignons qu'il nous déborde, et nous nous employons à lui tenir les rênes serrées, comme s'il s'agissait d'un cheval fou.
Le but de ce livre est de nous aider à reconnaître la musique de notre désir et à décrypter nos peurs, nos freins conscients et inconscients qui le bâillonnent. De nombreux exemples nous éclaireront et des cas concrets nous permettront de surmonter les obstacles et de construire, à notre tour, un quotidien fait de liberté et d'épanouissement.
Cessons de remettre nos désirs à demain, la vie n'attend pas !"
Les auteurs : Sophie Cadalen est psychanalyste et écrivain. 
Bernadette Costa-Prades est journaliste, spécialisée en psychologie.
Mon ressenti de lecture :
"Si vous voulez repérer votre désir, traquez tous les 'il faut' pour vous demander : 'Dans le fond, de quoi ai-je réellement envie?' "
"Nous avons peur de suivre nos désirs car nous craignons de bousculer trop de choses dans notre vie."
Si j'avais suivi mon désir de faire à 100%, je n'aurais jamais terminé de lire ce livre et encore moins écrit ce billet (oui j'adore la contradiction interne). Je ne peux dire que je n'ai pas appris deux trois trucs (surtout un peu de notions de psychanalyse), réfléchi à d'autres, pris quelques idées, mais globalement ce livre m'a donné l'impression de lire -sans plus m'y intéresser que cela - les pages psychologie de mon quotidien habituel. 
Fort heureusement le tout se lit très aisément, illustré de quelques exemples, et évite les modes actuelles, en tout cas ne tombe pas dans certains travers du 'comment doit-on vivre'. Il fait appel à l'interrogation et la suggestion plus qu'à l'obligation.
Reste à m'interroger (quand même!) : refuserais-je d'écouter mes désirs? Camperais-je sur des positions quand certaines affirmations des auteurs m'ont un peu hérissée? Ou bien ai-je déjà -parfois- mis en pratique quelques idées du livre? Ne serait-ce que sur le plan professionnel j'ai quitté des cocons plus ou moins tranquilles et des chemins tracés (sans tenter de grandes aventures non plus!) et plusieurs fois remis en cause un chemin suivi -pour découvrir qu'il me convenait, finalement. Est-ce la raison pour laquelle ce livre ne m'a pas apporté grand chose? (et après tout doit-il apporter?) A vous peut-être?
L'avis de Gwen




lundi 11 juillet 2016

Retour à Oakpine

Retour à Oakpine
Return to Oakpine
Ron Carlson
Gallmaeister, 2016
Traduit par Sophie Aslanides


Oakpine, son lycée, son équipe de football (américain), petite ville classique du fin fond du Wyoming où tout le monde se connaît et se souvient de vous depuis l'enfance, y compris ce que vous aimeriez avoir oublié.

Frank n'en a pas bougé, Craig y est revenu après quelques années; après un divorce, Mason réapparaît pour mettre en vente la maison de ses parents, puis découvre le bonheur du bon bricolage avec Craig. Jimmy, lui, effectue un dernier voyage : ayant connu le succès à New York comme écrivain, gravement malade, le voilà obligé de se réfugier chez ses parents pour y vivre ses dernières semaines. Ces quatre ex copains de lycée avaient aussi formé un groupe très très local et sans avenir, mais les guitares n'ont pas été jetées...

Un automne dans le Wyoming, où l'on suit ces amis, leurs compagnes, quelques jeunes aussi, voilà qui est simple, presque attendu; il n'y aura pas de grand drame, mais chacun va suivre le chemin qui lui est imparti, quelques nœuds vont se défaire, des décisions vont se prendre. Ces gens là vont devenir les amis du lecteur, tranquillement. Le lecteur devinera bien vite où l'on tend, mais quelle importance, puisque c'est là que le lecteur souhaite aller.

Les avis d'Aifelle (merci!!!) et claudialucia, Le bouquineur,

jeudi 7 juillet 2016

Retour au 87ème district

Je cite Jérôme (tu me permets) dans un commentaire récent:
"Je ne suis pas fan de polar mais McBain est bien plus qu'un auteur de polar."
Jérôme a TOUT compris!

"Lundi matin arriva.
Il arrive toujours.
Le lundi matin, on se réveille, on examine l'existence telle qu'elle se présente, et on trouve qu'elle se présente mal. Le lundi est comme ça, c'est la nature de la bête. Le lundi devrait être un commencement, quelque chose comme un nouvel an à la petite semaine. Mais pas du tout. Le lundi est invariablement un sale jour. On devrait interdire le lundi."

Si vous pensez "quézaco 87ème district", ma mission ce matin est toute trouvée... Parce qu'il est grand grand temps  que vous fassiez connaissance de la brigade du 87ème district dans la ville tentaculaire d'Isola imaginée par Ed McBain. Ecrits entre 1956 et 2005, les 53 romans en tout suivent la vie d'une brigade de policiers. Il n'est bien évidemment pas question de lire tous les romans d'affilée, un seul peut suffire au départ. Mais les aficionados (et ils sont nombreux !) savent qu' Omnibus s'est lancé dans la parution de la totalité (neuf bons gros volumes tenant parfaitement ouverts en main). J'ai déjà lu le 1( 87ème district : Du balai, Le sonneur, Le fourgue  Faites moi confiance Victime au choix Crédit illimité Souffler n'est pas tuer), voici le 2, et le 3 m'attend, en 2017?

Chaque roman d'environ 120 pages peut se lire indépendamment, l'auteur présentant succinctement chacun des policiers de la brigade intervenant dans ladite histoire. Je viens d'engloutir 7 enquêtes et je confirme : c'est très addictif! Dès la première page, on est plongé dans l'ambiance. Ce peut être la belle description de la ville, personnage à part entière. Ou les dialogues. Ou le rythme sans faille. Ou les enquêtes en elles-mêmes. Ou les petites réflexions en passant, sur la conception du métier de flic ou la vie en général. Je l'ignore, mais à chaque fois ça fonctionne!

Cerise sur le gâteau quand on lit dans l'ordre de parution: les saisons s'écoulent, la vie aussi. Au départ du volume 1 l'inspecteur Carella n'est pas marié, au début du 2 sa femme est enceinte, à la fin du 2 les gamins marchent et parlent... Certains flics sont morts, etc.

Juste pour donner une idée de l'imagination de l'auteur, voici rapidement une présentation des 7 intrigues du volume.
Soupe aux poulets : Pendant que Carella tente de résoudre une histoire de suicide en pièce close, une femme prend en otage tous ses collègues de bureau, attendant son arrivée pour le descendre.
Pas d'avenir pour le futur : la sœur de Carella se marie, mais un mystérieux tueur embusqué suit la noce, objectif, se venger du marié.
Rançon sur un thème mineur : le fils d'un riche homme d'affaires est enlevé, mais en fait il y a erreur sur le gamin.
La main dans le sac : Où l'on trouve une main de cadavre dans un sac... Une histoire des plus terribles.
A la bonne heure : Plus drôle, une équipe de cambrioleurs.
Mourir pour mourir : Se déroule dans un quartier d'habitants originaires de Porto Rico, avec des gamins tentés par les caïds et les bandes. Plutôt noir.
Le dément à lunettes : un tueur descend quatre personnes dans une librairie, parmi lesquelles une proche d'un des inspecteurs.

(traducteurs : Louis Saurin, Philippe Aronson, Jean-François Merle, Sylvie Fontaine, Jean Charles Provost, , Claire Céra, Georges Monny)

"L'employé devait être en train d'additionner des chiffres, comme tous les employés de tous les guichets du monde chaque fois que l'on a besoin d'un renseignement. S'ils n'additionnent pas des chiffres, ils comptent des tickets, ou de l'argent, ou des timbres, ou leurs doigts de pied, mais il est inévitable qu'ils comptent quelque chose et sont bien trop occupés à compter pour s'intéresser à vous et à vos problèmes."

Faites moi confiance, c'est de l'incontournable, du pur nanan, du haut de gamme.
En plus ça me permet de décrocher l'entrée au challenge du Pavé de l'été chez Brize, avec 880 pages.


lundi 4 juillet 2016

Incontournables du polar

De l'autre côté de l'Atlantique paraissent ou ont paru des bouquins absolument parfaits en cas de panne de lecture, de week end pluvieux, de rendez-vous médical ou de long voyage. Les pages qui se tournent toutes seules...

Un must, un incontournable, c'est le 87ème district d'Ed McBain. Qui vaut bien un autre billet à lui tout seul!
Pour l'instant, voyons Connelly et Westlake.

Les dieux du verdict
The gods of guilt
Mickael Connelly
Calmann Lévy, 2015
Traduit par Robert Pépin


Lire Connelly c'est pour moi l'assurance d'une histoire sans temps morts, sans détails trop gore, quelques méchants, quelques gentils mais pas tant que ça, en tout cas cabossés. Cette fois pas d'Harry Bosch, alors c'est Mick Haller, son demi-frère, qui s'y colle. Avocat, il doit d'abord défendre son client (innocent ou pas) mais aussi enquêter pour le tirer d'affaire. Il me semble que c'est aux Etats-Unis que c'est ainsi, en France ce n'est pas le rôle de l'avocat. Ou je me trompe? Bref, j'en apprends plein sur le système américain, et Connelly est très pédagogue.
"C'est l'histoire des parties gauche et droite du cerveau. Les gens sont plus aimables avec ceux qui se trouvent à leur gauche." Ah bon?
Je reste donc fan.

Mort de trouille
The Scared Stiff
Donald Westlake
Payot, 2006
Traduit par Nathalie Beunat

Westlake est à son meilleur quand Dortmunder est présent, mais sinon tant pis, je prends! Imagination bien là, en tout cas.

Barry et Lola s'aiment très fort, mais ça ne remplit pas l'assiette, alors ils imaginent un accident au Guerrera, pays d'origine de Lola, aux cours duquel Barry mourrait (pas en vrai, hein!), histoire de toucher le versement d'une assurance vie. Tout est minutieusement mis au point, trop presque, il faut juste attendre que Lola touche le chèque, et que Barry se fasse discret (il doit réapparaître comme frère de Lola)

Mais, bien évidemment, rien ne se passe comme prévu, le pauvre Barry va vivre des aventures à rebondissements, avec Westlake pour tout orchestrer, on s'en doutait. Un bon point pour les dialogues qui souvent dérapent dans le grand n'importe quoi.

"J'avais été attaché, bâillonné, fourré dans un sac, j'avais des bleus partout, un mal de crâne épouvantable, j'étais étendu sur le sol au milieu de six sociopathes décidés à me tuer, mais on ne me frappait plus. Il n'y a pas de petite victoire sur l'absurdité."

Un avis chez lecture/écriture

vendredi 1 juillet 2016

Ultime partie

Ultime partie
Marc Dugain
Gallimard, 2016



Il n'était pas question de rater la lecture du dernier tome de la trilogie (je copie mes avis sur les deux premiers, L'emprise et Quinquennat (parus en poche) pensant su'ils ne contiennent pas trop de spoilers.

Mais voilà le problème : ne lire qu'Ultime partie serait dommage (bien que les rappels nécessaires aux p'tits nouveaux et aux anciens à mémoire courte soient habilement insérés) et je suis bien consciente qu'à imposer TROIS romans d'un coup, ça va hurler!

Dugain possède une écriture ciselée, dégraissée. Les chapitres courts s'intéressent aux différents protagonistes. Je ne dirai pas que se plonger dans les magouilles politico-économiques et les coups fourrés des barbouzes soit ma tasse de thé quotidienne, mais c'est tellement passionnant ici! Dugain arrive à donner à tous une touche d'humanité (pour certains, elle est très très cachée, j'avoue) et, ouf pour le lecteur sensible, à tirer d'affaire les personnages désireux de ne pas (ou plus) se salir les mains. Beaucoup de dynamisme dans la narration. Des problèmes éthiques finement exposés (hé oui, le tout noir tout blanc, pas toujours possible dans la vraie vie!). Tout citoyen peut s'y retrouver.

"Le pays aimait les rentrées. Rentrée politique, rentrée scolaire, rentrée sociale, rentrée littéraire, chaque année, un brouhaha artificiel entretenait l'illusion de la nouveauté, du renouveau, de la renaissance dans un conformisme cadenassé. Il faut dire que si la France aimait les rentrées fracassantes, elle aimait aussi les sorties discrètes qui s'effectuaient en sifflet à partir de début mai, à la faveur des jours fériés et d'une architecture calendaire qui relevait, dans sa conception des ponts, d'un mélange habile de génies civil et religieux."

Les avis de motspourmots,


L'emprise 
"Pourquoi vos parents vous ont-ils appelée Lorraine?
-J'imagine qu'ils ont réalisé qu'Alsace c'est un peu dur à porter pour une fille.
-Et votre nom de famille, K., ça vient d'où?
- Je ne sais pas. Un nom breton qui a perdu ses lettres."

Philippe Launay est favori dans les sondages, qui le donnent gagnant à de futures primaires, et au second tour face au président sortant ou l'extrême droite. Son adversaire du même parti aimerait bien mettre la main sur quelques casseroles, Launay, lui, essaie d'avoir un tour d'avance, histoire de garder la main dans le jeu.
Blandine Habber, ancienne présidente du groupe Arlena, "fleuron de l'industrie nucléaire française", est en rapports avec un ingénieur syndicaliste du groupe, lequel disparaît mystérieusement;
Corti, directeur de la Direction centrale du renseignement intérieur, corse et amateur de nourritures roboratives, essaie de tout savoir sur tout, sans se laisser embobiner, et envoie Lorraine mener une enquête à la fois sur la disparition du syndicaliste et celle d'un voilier.

Par pitié, ne fuyez pas dès que vous  aurez lu les expressions "politique","services de renseignements", "groupe industriel". Ce bouquin se lit comme un thriller américain (un compliment) dont il possède l'efficacité tout en offrant une écriture de bon niveau.Souvent cynique, mais laissant une petite part à des moments plus tendres, il donne souvent l'impression au lecteur d'être une petite souris dans les chambres ou antichambres du pouvoir, et je n'ai pu m'empêcher de tenter de mettre une tête sur des noms fictifs, en vain la plupart du temps car Dugain se garde de donner trop de détails. Mais tous les rebondissements et les faits demeurent bien crédibles.

"Afin de financer des campagnes électorales avec des sommes prélevées sur des travaux d'adduction d'eau, d'assainissement, de chauffage collectif, de traitement des ordures ménagères, de transports scolaires et urbains, ils avaient corrompu un bon nombre d'élus locaux de tout bord et à tous les étages de la représentation territoriale, ce qui leur valait d'être craints sous couvert de respect et d'estime."

J'ai bien aimé aussi les petites remarques au détour d'une phrase
"Il n'avait pas atteint l'âge où l'on parle du temps pour engager une conversation."

Quinquennat
Comme je le disais pour l'Emprise, ce roman parle de ce qui ne m'attire guère: la politique (et ses coups fourrés), les services secrets (et ses coups en douce), et les magouilles financières... Lecture détente, non?

Encore une fois, je l'avoue : je-n'ai-pas-lâché-ce-bouquin. Fascinée par la crédibilité de l'histoire où résonnent en écho des faits actuels, agacée de ne pouvoir poser un nom sur certains (et pourtant!), écœurée du cynisme de quelques politiques/journalistes/hommes d'affaires, soulagée de l'honnêteté et la ténacité de certains quand même, tendue à cause du danger menaçant ces derniers, épatée par une construction tout en  suspense, jubilant à la lecture de bien des passages, riant même parfois (jaune).

L'histoire? Launay est élu président de la République, suite à un 'sursaut républicain', face au candidat du Mouvement patriote. L'élimination de trois islamistes entre les deux tours a pu aider aussi...Mais chut!

Conseillé par une de ses proches collaboratrices, Launay prévoit d'organiser un référendum menant à une réforme constitutionnelle qui pourrait avoir de réels effets positifs, et aussi de rendre moins dangereux pour son avenir politique le Mouvement patriote et ses adversaires (dont certains dans son propre gouvernement).

Je suis d'accord, tout cela peut paraître assez peu attractif, mais croyez-moi, il y aurait encore beaucoup à dire, avec moult personnages et filouteries.  D'ailleurs je signale que ce fameux référendum sera repoussé à un troisième tome, qui je l'espère donnera enfin la réponse à quelques questions. Je souhaite que Monsieur Dugain y travaille sans relâche!

Quelques passages:
"En deux semaines, une nuée de collaborateurs de l'ancien régime allaient céder leur place à d'autres. (...) Les diplômes ont remplacé la naissance au bémol près que les titulaires des diplômes sont nés pour la plupart dans les mêmes milieux." (...)Bref, tout ce qui crée l'inertie française paraissait sur le point de se renouveler selon une version nationale du jeu de la chaise musicale, où l'on compte autant de chaises que de gens qui tournent autour."
"D'une beauté évidente, elle évoluait au milieu de la quarantaine sans inquiétude pour la suite."
"Les gens n'existent plus que par le bruit qu'ils font. (...) Le bruit généré par un individu est égal à la moyenne entre son QI et sa position sociale."

Question : les deux tomes sont-ils indépendants? Je pense que c'est comme chez Bello, on peut parfaitement suivre le II sans avoir lu le I puisque l'auteur y insère tous les éléments permettant de suivre, mais ce serait dommage de se priver du I.