mercredi 29 juin 2016

Comment j'ai sauvé la planète



Comment j'ai sauvé la planète
L'écologie appliquée à la vie quotidienne
Sophie Caillat
Pocket, 2016


Comme chacun sait, notre planète est mal partie si on continue ainsi. L'auteur a donc décidé de tester pour nous quelques solutions, entraînant sa famille parfois rétive à ses expériences, heureusement pas toujours de longue durée. Le vélo, le bio, le tri, la naturel, la douche plutôt que le bain, la gourde au lieu de l'eau minérale, la Ressourcerie, la Mooncup, le vegan, la lombricompostage, les couches lavables, le bicarbonate de soude, etc. Avec des flops, mais pas que et je pense qu'elle a gardé quelques changements.

Avec humour, elle décrit donc ses expériences, les discussions avec sa famille, ses rencontres avec les responsables de divers mouvements.

Elle habite Paris (mais heureusement réalise qu'en province ne garder que le vélo, ça peut être un peu raide pour aller travailler). Mon problème c'est qu'on passe d'une idée (excellente) à l'autre et même si c'est bien détaillé on ne sait plus trop quoi décider, tellement le problème est vaste! A moins de revenir sur un chapitre précis selon ses besoins ou envies du moment?

Je retiens quand même ce qui m'avait impressionnée dans Zéro déchet, à savoir que "ne pas produire de déchets est une bien meilleure idée que les recycler" (dans ma petite ville, à part les bacs et la déchetterie, chacun fait comme il veut dans sa poubelle, de toute façon on paie la même somme!)(et ce n'est pas toujours aisé de comprendre tous ces sigles)  et tenter de supprimer l'emballage au maximum.

"Parfois je me dis que si la collectivité veut me motiver, il y a un moyen assez efficace : l'argent. Ainsi la consigne du verre s'est longtemps avérée très utile pour le collecter." Rien que lutter contre les emballages, c'est du boulot, je le ressens quotidiennement!

lundi 27 juin 2016

A room with a view

A room with a view
E.M. Forster
Penguin Classics, 1978
Paru en 1908


Petit drame à la pension Bertolini, où séjournent plusieurs touristes anglais, parmi lesquels Lucy et sa cousine (et chaperon) Miss Bartlett : leur chambre n'a pas vue sur l'Arno! Les Emerson père et fils se feraient un plaisir d'échanger leurs chambres (avec vue) contre les leurs, mais cela est -il convenable?

Voilà encore Lucy, sans son Baedeker (situation épouvantable, non?), visitant une église, et bien troublée. "Of course, it contained frescoes by Giotto, in the presence of whose tactile values she was capable of feeling what was proper. But who was to tell her which they were? She walked about disdainfully, unwilling to be enthousiastic over monuments of uncertain autorship or date."

Mais il ne s'agit pas seulement de se moquer (gentiment) des touristes à l'étranger: lors d'une sortie au environs de Florence, est-ce la vue magnifique, le chaud soleil, les fleurs violettes environnant Lucy, voilà que George Emerson l'embrasse... Shocking!

De retour en Angleterre, Lucy se retrouve fiancée avec Cecil. "Quand je pense à vous c'est toujours comme dans une pièce. Que c'est drôle!" "A sa surprise, il sembla ennuyé. "Un salon, je vous prie? Sans vue? " "Oui, sans vue, j'imagine. Pourquoi pas?" "Je préférerais que vous m'associiez avec l'air libre."

Lucy la jeune fille bien élevée qui devrait éviter l'excès de Beethoven est tiraillée, à son insu. "Ah, how beautiful the Weald looked! The hills stood out above its radiance, as Fiesole stands above the Toscan plain, and the South Downs, if pn chose, were the mountains of Carrara. She might be forgetting her Italy, but she was noticing more things in her England One could play a new game with the view, and try to find in its unnumerable folds some town or village that would do for Florence. Ah how beautiful the Weald looked!"
Patatras, George récidive! Même causes, mêmes effets...

Franchement, ce roman fut une vraie découverte pour moi. C'est plein d'humour so british, au départ je me croyais chez Barbara Pym (ne manquaient même pas les ecclésiastiques). Forster installe les petits détails permettant au lecteur de réaliser le ressenti de ses personnages, j'ai aussi noté comment Lucy est sensible à la musique, à la nature, aux changements de saison. Les dialogues sont parfaits. Et puis quel bonheur d'évoluer en première partie dans la lumière florentine... Je n'en resterai pas là avec Forster, lu il y a très longtemps, sans souvenirs notables, bizarrement.

Un mois anglais se terminant magnifiquement!





vendredi 24 juin 2016

Brillante

Brillante
Stéphanie Dupays
Mercure de France, 2016




Rien qu'à voir les chaussures sur la couverture, je savais que le monde de ce roman n'était pas le mien! ("La bride lui cisaille les chevilles, la cambrure distend à l'excès le cou-de-pied, une crampe au mollet lui coupe la respiration.") Seulement, quand on travaille chez Nutribel, tout compte!!! Après de belles études, classes préparatoires, puis La bonne grande Ecole, Claire a décroché le job qu'elle voulait, qu'elle méritait; elle aime se rendre au bureau, elle aime l'ambiance, elle se donne à fond. Avec Valentin, son compagnon, ils forment un beau couple, tout roule, tout baigne.

Son milieu parental est provincial et simple, sa sœur, plus artiste, la moque gentiment de ses tics de langage marqués par le monde de l'entreprise. Mais Claire est heureuse de sa belle vie brillante de jeune femme brillante.
Pourtant insidieusement, au bureau, tout change pour elle, les dos se tournent, elle est placardisée.

Coup de chapeau à Stéphanie Dupays pour ce court roman sur un monde qu'elle doit bien connaître pour en décrire la violence sous-jacente. Sa langue est précise, incisive, elle décortique et ausculte. On en sort estomaqué et un poil effrayé. Glaçant.

"Le DRH lui demande pourquoi elle a inscrit 'Littérature' dans la case Loisir de son CV. Claire désamorce immédiatement la présomption d'intellectualisme car dans l’entreprise s'adonner à une activité aussi inutile que la lecture vous classe dans la catégorie des intellectuels non assimilables à la chaîne de production : 'La narration est au cœur du marketing. Les consommateurs n'achètent pas du soda, de la lessive, ils achètent une belle histoire.' Claire a visé juste. Elle sourit, tentant de reproduire la décontraction des gens qui n'ont rien à cacher."

Les avis de cathulu, motspourmots, le petit carré jaune, sophielit, joelle, cuné,

mercredi 22 juin 2016

Stingray shuffle

Stingray shuffle
Tim Dorsey
Rivages/Noir, 2008
Traduit par Jean Pêcheux



Amateurs d'histoires bien carrées, raisonnables, logiques : passez votre chemin. Amateurs de jolies histoires bien proprettes, idem. Amateurs d'histoires bourrées d'amour et de trucs bien sucrés : pareil.

Amateurs de barré, de grand n'importe quoi, de rebondissements farfelus, d'horribles détails parfois, de grands dingues limite psychopathe, de débiles de tout poids : signez ici!

Le gros de l'histoire, si on peut parler d'histoire, se passe en Floride. Oui, comme chez Hiassen; il semble donc que cet état génère les trucs barges. Bref.

Serge A. Storms est un dingue de trains (et si encore il n'y avait que ce doux passe-temps), pour l'heure lui et son pote Lenny sont à bord d'une Cadillac rose et à la poursuite d'une mallette contenant cinq millions de dollars, mallette actuellement entre les mains de Paul et Jethro (qui sentent bien que les propriétaires vont chercher à la récupérer).
Ajoutons un club de lecture composé de cinq quinquagénaires, fan absolues de Ralph Krunkelton, auteur de The Stingray Shuffle. Plutôt un mauvais roman paraît-il, dont la courbe des ventes désespérément plate vient de remonter, pas à cause des lecteurs mais des amateurs de la drogue dissimulée à l'intérieur par des trafiquants, et vendue en librairie (logique).
Ah oui, forcément, puisque drogue, le Cartel de Mierda, dirigé par M. Grande (le seul à utiliser une pancarte avec ce nom à l'accueil dans les arrivées des aéroports)(discret, quoi). Plus des russes très très bêtes et très très méchants (ou l'inverse), un ou deux Caribéens, et j'en passe...

Cela turbine à 1000 à l'heure, les dialogues sont fous , tout ce petit monde (sauf les morts entre temps) vont se retrouver dans le même train...

"Je n'arrive même pas à croire que tu n'aies pas fini Stingray  Shuffle, dit Rebecca.
- J'étais occupée, répondit Sam.
- Quand tu verras ce qui arrive aux cinq millions de dollars, tu n'y croiras même pas.
- Me raconte pas!"

Moi aussi, je ne dis plus rien.

D'après les spécialistes reconnus (actu du noir, encore du noir) ce ne serait pas le meilleur de l'auteur. Je sais donc ce qu'il me reste à faire!

Les avis de Encore du noir,

lundi 20 juin 2016

Le convalescent

Le convalescent
Jessica Anthony
le cherche midi, lot 49, 2016
Traduit par Pierre Demarty
(je me demande si le cherche midi n'est pas le seul éditeur à faire figurer le nom du traducteur sur la couverture - Claro n'y est sans doute pas étranger)



"Il faut voir les choses en face : la plupart des Virginiens ne cherchent pas à interagir socialement avec des petits bonhommes poilus qui ne parlent pas, arborent une barbe hirsute et poisseuse et un pull Dysneyland." (rose et sale, le pull)

Rovar Akos Pfliegman, au moins, ne se fait aucune illusion sur ses possibilités d'intégration... Sa famille (toute décédée à l'heure qu'il est) est d'origine hongroise, et il vit au milieu d'un champ, dans un ancien bus scolaire pourri et délabré, vendant de la viande à des prix défiant toute concurrence (on saura pourquoi). Ses seuls 'amis' : Marjorie, un brin d'herbe, et Madame Kipfer, une blatte.
La rencontre avec le Docteur Monica, pédiatre proposant de soigner ses maux, va changer sa vie.

"Je suis le dernier descendant d'une des lignées les plus misérables de toute l'histoire de l'humanité."

Mille cent onze ans plus tôt, en Europe centrale, les hongrois commencent à faire parler d'eux, et à leurs franges, une onzième tribu, celle des Pliegman. Sales, repoussants, muets et bouchers (tiens tiens). Histoire contée façon mythes et légendes.

Après une ouverture intrigante (les deux premières pages sont extraordinaires et réussies), alternent plus ou moins les deux époques, celle au tournant du premier millénaire ayant failli me faire décrocher page 50, mais j'aurais eu tort, puisque qu'ensuite j'ai dévoré le tout!

Complètement décalé et invraisemblable, mais passionnant. Là dedans se trouve la fascinante aventure des Pfliegman, avec le dernier millénaire couvert en quatre pages prodigieuses (318-320), des Subdivisionnistes, une secrétaire médicale peu amène, un accident de voiture, un supermarché, tout un monde foisonnant dans l'Amérique actuelle. Drôle et triste à la fois. Jusqu'à la fin inattendue et terriblement belle, finalement. Faut que je lise Kafka, maintenant.

A la fin, j'ai pu réaliser comment l'auteur a construit son roman (l'accident de voiture, par exemple), distillant aussi les petits détails entre les parties (page 289, mille ans plus tôt, Szeretlek trouve une longue herbe, une blatte et une chenille, et j'en passe...)

Un brillant premier roman, comme savent nous en offrir les auteurs d'outre Atlantique (oui, en France aussi, je sais!)

vendredi 17 juin 2016

The Professor

The Professor
Charlotte Brontë
Penguin Classics, 1989


Incroyable! J'ai lu tous les romans de Charlotte Brontë! Jane Eyre (avant blog), Shirley, et Villette. The Professor est un roman posthume (1857), quoique écrit avant les autres, mais refusé à plusieurs reprises... Je crois qu'on l'a accusé d'être une oeuvre moins aboutie, mais ce n'était pas l'avis de Charlotte Brontë, quand même la meilleure juge de l'affaire.

Comme dans Villette, une partie de l'action se déroule à Bruxelles, dans une école de jeunes filles. Mais là le héros est un jeune homme, William Crimsworth, ayant refusé le sort le guettant en Angleterre (pasteur, mari d'un cousine ou clerc dans une usine) et tentant l'aventure en Belgique. D'abord professeur dans une école de garçons, avec succès, il est appelé dans l'école de filles voisine, où il remarque ou est remarqué par diverses jeunes femmes...

Petits coeurs romantiques, passez votre chemin! Crimsworth semble toujours sur la retenue, l'examen ; il décrit ses méthodes d'enseignement, quelques types d'élèves (très intéressant). Il trouvera une âme soeur, oui, mais surtout il fera son chemin par ses propres moyens et sa seule énergie ou presque.

Je me suis lancée dans cette lecture sans rien savoir, et ai quasi continuellement été étonnée des choix de l'auteur pour son personnage. C'est intrigant, peut-être agaçant, mais extrêmement intéressant. Hunsden, dont on fait la connaissance au début, et qui pousse Crimworth à fuir son triste sort, apparaît et réapparaît, mystérieuse personnalité. Bref, plein de détails dérangeants pour un lecteur amateur d'histoires plus confortables, et je comprends que cela ait pu gêner. Personnellement, cela contribue à me pousser à conseiller cette lecture.

Aucune difficulté majeure à lire en VO. Certains dialogues sont en français (traduits pour le lecteur anglophone) et prouvent une maîtrise de cette langue par Charlotte Brontë, qui, rappelons-le, vécut elle aussi à Bruxelles!

L'une des réussites du roman demeure la description de l'évolution de Frances, c'est fin et subtil, c'est d'ailleurs finalement l'une des caractéristiques du roman.

Si on veut s'amuser à lire entre les lignes, l'on trouve une vision de la Belgique et surtout des flamands que j'espère datée, pour Crimsworth Angleterre et protestantisme sont supérieurs à tout* ... Allez, je cite juste un "I was not then sensible of the horrors of the Belgian accent".

Les avis de Mark et Marcel La bouteille à la mer, Le chat du Cheshire, lecture/écriture, où claudialucia donne plein d'*exemples de passages xénophobes et intolérants..., Tania,

Edit : oups, c'est dans le mois anglais...

mercredi 15 juin 2016

L'homme qui brûlait d'être Dieu

L'homme qui brûlait d'être Dieu
Jean-Michel Riou
Flammarion, 2016


A priori (j'ai des a priori, oui), ce roman entrait dans la catégorie 'pas pour moi, ça'. Déjà, le titre! Puis sur la couverture 'Qui percera le plus grand secret de tous les temps?'.
Après 460 pages dévorées avec passion, j'avoue que je m'étais finalement trompée.

Pour aller vite, disons que la myrrhe offerte par les rois mages il y a deux millénaires posséderait des propriétés de guérison encore plus fortes que celles de la myrrhe 'basique', bien connues depuis fort longtemps. Un reliquaire contenant les cadeaux des rois mages (or, encens et myrrhe) se trouve au Mont Athos et fut récemment exposé en Russie (avec un succès phénoménal)

L'auteur imagine donc qu'une partie de cette myrrhe fut volée dans le monastère grec, parvint entre les mains d'un certain Malthus de Retz à la fin du 18ème siècle et servit à la belle guérison du marin Simon Le Floch, lequel , en contrepartie, devrait aider Malthus de Retz à ramener du Yémen (l'Arabie Heureuse) une belle quantité de cette mirifique myrrhe.

Une fois que j'ai eu décidé de ne plus me préoccuper de la vraisemblance de cette histoire de myrrhe bi-millénaire (même s'il demeure exact que la myrrhe a des qualités), je me suis retrouvée très vite dans une fabuleuse aventure! Qui plus est, fort bien racontée! Et j'ai beaucoup beaucoup aimé.

Un bon vrai roman d'aventures, donc! Avec navigations hasardeuses, pirates, naufrages, voyage en Egypte et au Yémen, le tout au début du 19ème siècle, entre périodes révolutionnaire et napoléonienne. Espionnage, attaques de bandits, etc.

Plusieurs narrateurs se succèdent: Joseph Cordier, armateur nantais, honnête et pragmatique, Simon Le Floch, jeune capitaine rêvant d'amours et d'aventures, attaché aux notions d'honneur et de respect de la vie humaine, Esther Stanhope, jeune anglaise volontaire et décidée, rêvant d'orient et Malthus de Retz, pas du tout étouffé par les scrupules... L'écriture est fluide et agréable, je l'ai signalé, et cependant elle permet finement de différencier les quatre narrateurs.

Un merveilleux voyage à travers la Méditerranée, puis en felouque, une plongée dans les quartiers, souks et ruelles du Caire, honnêtement, j'étais dans l'ambiance de cet orient qui fit et fait rêver... (cf Boussole de Mathias Enard...)

Des personnages réels : Lady Stanhope
https://fr.wikipedia.org/wiki/Esther_Stanhope
et Carsten Niebuhr
Carte du Yémen
https://fr.wikipedia.org/wiki/Carsten_Niebuhr

lundi 13 juin 2016

Les diamants Eustace

Les diamants Eustace
Anthony Trollope
Albin Michel, 1992
Traduit par Denise Getzler


Si mes recherches en bibli number one ne m'avaient pas mise sur la route de cet exemplaire, j'aurais pu emprunter The Eustace Diamonds en VO en bibli number two, mais on me pardonnera car la bête fait dans les 700 pages. De toute façon je pourrai m'user les yeux sur les Barchester Towers en VO un jour ou l'autre car mon objectif est de lire tout ce qui me tombe sous la main. Les diamants Eustace sont le troisième volume de la série Palliser (mais l'ordre semble peu importer) après Peut-on lui pardonner et Phineas Finn.

Une héroïne sympathique mais pas nunuche en la personne de Lucy Morris, gouvernante sans fortune, bourrée de belles qualités mais ne se laissant quand même pas faire, amoureuse fidèle de Franck Greystock (et elle a bien du mérite), voilà de quoi faire briller les yeux de toute lectrice un poil romantique (oui, vous, allez, avouez) espérant durant 700 pages que l'amour triomphera.

Mais la grande réussite du roman, c'est l'autre héroïne, Lizzie Greystock (cousine de Frank), intelligente, rusée, manipulatrice, menteuse, naïve parfois, un vrai bonheur! Veuve très vite de Lord Eustace, sans gros chagrin d'ailleurs, là voici dotée de soupirants attirés par sa beauté ou ses rentes, allez savoir. Il faut dire qu'elle sait amener les confidences amoureuses en véritable experte, et sans scrupules. Se prétendant propriétaire du magnifique collier Eustace que son époux lui aurait donné selon ses dires (pas de témoin), elle refuse obstinément de le rendre, en dépit de discussions parfois obscures menées par avocats et avoués. Le collier vaut dix mille livres de l'époque (de quoi vivre de ses rentes) et suscite bien des convoitises. D'ailleurs obstinée est une belle description de Lizzie, passant son temps à demander conseil (avec j'imagine battements de cils) mais n'en faisant qu'à sa tête, jouant aussi les faibles femmes.
Bref, un chouette personne qu'on aime détester ou plaindre car elle est maligne. Elle se bat avec le peu d'armes laissées aux femmes à l'époque.
Je la verrais bien en Marylin, celle de Diamonds are a girl's best friend...

La parution en feuilleton, comme d'habitude, a un côté positif puisqu'elle oblige à des rebondissements, mais parfois à des rappels inutiles pour le lecteur face au pavé complet. Ceci étant, la plume souvent ironique de Trollope est un plaisir, ses descriptions de personnages sont un régal, les fameux diamants bougent pas mal pour des objets inanimés, le suspense est mené jusqu'au bout, et voilà qu'il annonce 'Lizzie le retour' dans un prochain roman.

Mois anglais, of course, chez cryssilda  et lou

jeudi 9 juin 2016

La quiche fatale / Remède de cheval

Ces romans parus dans les années 90 en Angleterre ont été adaptés en série à la télévision anglaise et les deux premiers viennent de paraître de notre côté du Channel !

Bien dans l'ambiance ? Le thé est prêt? La confiture avec les scones sur la table ornée du napperon?

La quiche fatale
The quiche of death
M.C. Beaton
Albin Michel , 2016
Traduit par Esther Ménévis

Où le lecteur fait connaissance avec Agatha Raisin, en retraite anticipée : elle vient de vendre son agence de relations publiques londonienne pour s'installer dans un petit village des Costswolds.
Cherchant à s'insérer dans la vie du coin, elle participe à un concours et propose une quiche aux épinards (achetée à Londres, la dame n'est pas fine cuisinière). Vexée de n'avoir pas gagné (de toute façon le résultat est truqué) elle laisse sa quiche sur place. La nuit même, un habitant du village, ayant récupéré sa quiche, meurt empoisonné.
Tout laisse à penser qu'il s'agit d'un accident, mais Agatha se met en tête que non. La voilà posant des questions à tout va, et s'attirant des ennuis...

Remède de cheval
The vicious vet
M.C. Beaton
Albin Michel, 2016
Traduit par Esther Ménévis

A croire que le village tranquille ne le sera plus jamais! Cette fois un vétérinaire décède dans des circonstances pas si suspectes, mais Agatha Raisin ne va pas laisser passer l'occasion de mener l'enquête, surtout qu'un séduisant voisin l'accompagne...

Mon avis global : une série pleine d'humour et de peps. Les premiers pas d'Agatha à Carsely sont racontés avec justesse, y compris l'ennui ressenti là et son envie d'en partir. Une héroïne pas forcément très sympathique au départ, méprisant un poil les bouseux du coin, jurant et buvant à l'occasion, très entière, mais insensiblement elle évoluera, sous l'influence de la charmante femme du pasteur et les conseils du jeune policier local qui n'est absolument dupe de rien et la perce à jour.

C'est léger et charmant, il faut juste se laisser prendre au jeu et le lecteur passe un très agréable moment. J'ai beaucoup aimé et ces deux livres ont été dévorés (la suite?).

Une lecture parfaite pour le mois anglais! Campagne anglaise, cette fois.
Blogspot ou quoi? On me menace de je ne sais quoi si je place une image venant de Albin Michel (un comble!) ou autres sites. Donc, pas de couvertures.

mercredi 8 juin 2016

Anniversaire et fleurs! (ça tombe bien)

OK, blogounet a 8 ans aujourd'hui. On va fêter ça en ne lésinant pas sur les fleurs, puisque lundi dernier j'ai visité (en l'excellente compagnie de Gwen) Chaumont sur Loire et son festival des jardins. Après 10 jours sans soleil, ce fut du bonheur concentré. Il a fallu prévoir un itinéraire hors crue du Cher, mais je maîtrise les routes locales.

On a marché tranquillement pendant plusieurs heures sans s'en apercevoir, c'est magnifique, inventif, odorant, parfois ludique, ça fait réfléchir, on en prend plein les yeux.
Sortie hautement recommandée si vous passez dans le coin!

Thème du festival des jardins : Jardins du siècle à venir. (on peut cliquer sur les photos pour agrandir et mieux voir)

"Jardin et maison se rapprochent et ne font plus qu'un"



 Petit aperçu du château dans le lointain
 "Face à la montée des eaux, un homme refuse de fuir le désastre qui a englouti sa maison"

"La nature au cœur de la maison"


 Encore le château
 "Quand un fragment intersidéral tombe sur Chaumont et fertilise étrangement le sol"

 Petit jardin

Là je ne sais plus trop, mais c'est pas mal!
 
"Maison jardin"
salle à manger

entre végétation et reflet, on s'y perd

 Coin tranquille

 Le parc est habité par de multiples bestioles (bruyantes parfois)
 "Que vienne la pluie" "jardins flottants, réponse joyeuse à l'adversité climatique"

une autre...
 Après on passe dans une autre partie du parc
Yu Kongjian
 Puis une autre...
Chris Drury

on veut la même pour lire dehors!

Le cairn d'Andy Goldsworthy

François Méchain

recyclage... (El Anatsui)

Cornelia Konrads

lundi 6 juin 2016

Passagère de l'arctique

Passagère de l'arctique
En kayak dans le passage du nord ouest
Anne Quéméré
locus solus, 2016


Anne Quéméré (oui, c'est une bretonne, question suivante?) est une sacrée baroudeuse sur mer, genre traverser l'Atlantique et un bout du Pacifique en solitaire (à l'aviron ou kiteboat), puis en 2014 en kayak et en solitaire le passage du nord ouest, avec d'abord descente du fleuve Mackenzie d'Inuvik à Tuktoyaktuk.

Quézaco passage du nord-ouest? Hé bien du Pacifique à l'Atlantique (et réciproquement) là haut là haut dans le nord, oui, l'Arctique, les ours blancs, les Inuit. Le premier à avoir réussi cette navigation (à voile) c'est Admunsen début 20ème siècle (et il a mis trois ans). Beaucoup y ont laissé leur vie (ou une partie de leurs orteils...)
auteur : Par Secondary source: http://en.wikipedia.org/wiki/Image:Beaufort_Sea_and_disputed_waters.png, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=819933

Cette fois elle part avec Raphaël, un Suisse, et son kayak doté de panneaux solaires. Bien sûr ils ont prévu le voyage durant la période où les glaces ont fondu, ce qui n'est pas un gage de belles températures et de beau temps, d'ailleurs. L'aventure reste l'aventure. (Sans parler des nuées de moustiques voraces!)

Anne Quéméré ne se contente pas de raconter leur équipée, elle évoque aussi celle de 2014, et sait présenter les populations locales, confrontées depuis quelques décennies à une modernité détruisant leur mode de vie ancestral et leur culture. Certains se battent pour la défense de la langue. Pas facile facile, la langue (pages 71 et suivantes, Minaudier adorerait)

Un livre court (trop court?) avec plein de photos, mais bon, c'est un choix  je suppose. De toute façon, après Rêves arctiques, faut me nourrir!
Une bonne introduction pour tous à ce monde fascinant.

Le site de l'auteur, auteur à rencontrer dans l'ouest (de la France)(petits veinards) et avec plein de détails passionnants!!!

Merci à babelio

vendredi 3 juin 2016

Some tame gazelle / Excellent women

Je continue dans mon projet 'lire tout Barbara Pym', en VO si possible, tout en essayant de ne pas tout dévorer trop vite (addictif, vraiment). L'on sait déjà que la dame fait dans l'observation fine des caractères, l'humour subtil, la tasse de thé à tout moment, bref la britisherie comme on aime (ou pas, chacun ses goûts)

Some tame gazelle
Barbara Pym
Virago Press, 2009
Paru en 1950

Belinda et Hariett sont deux soeurs célibataires quinquagénaires vivant dans un petit village anglais. Hariett, pimpante, coquette, un peu ronde, s'intéresse en tout bien tout honneur aux jeunes vicaires desservant la paroisse (échange nourriture spirituelle contre nourriture temporelle), refuse comme d'habitude la demande en mariage d'un comte italien voisin. Belinda, elle, vit tranquillement et plutôt sereinement sur son histoire d'amour (unilatérale) de 30 ans d'âge avec l'archidiacre du village, marié à Agatha. Elle lui demeure loyale, en dépit des défauts dudit archidiacre, aux sermons soporifiques ponctués de citations poétiques.
Quelques visiteurs (masculins), un séjour à l'étranger pour Agatha, fourniront quelques événements inattendus et amusants pour le lecteur.

"And finally, who would change a comfortable life of spinsterhood in a country parish, which always had its pale curate to be cherished, for the unknow trials of matrimony?" (et finalement qui échangerait une confortable existence de célibataire dans une paroisse de campagne, avec toujours un diacre pâlichon à chouchouter, contre les ennuis inconnus du mariage?)

Beaucoup de clergé dans ces romans, mais il n'y a pas besoin de s'y connaître pour sentir toute la gentille moquerie émanant de la description d'un dimanche matin à l'église ou d'une séance diapos d'un évêque missionnaire en Afrique. Evêque un peu décevant mais "Perhaps he doesn't have all his goods in the shop window." (celle là je l'adore, traduction perso Peut-être n'a-t-il pas toutes ses marchandises en vitrine)

Les avis d'Urgonthe,

Puis j'ai attaqué et englouti le suivant chronologiquement paru

Excellent women
Barbara Pym
Virago Press, 2008
Paru en 1952


Cette fois direction Londres, un Londres juste après la guerre (l'église fréquentée par l'héroïne a été en partie détruite par un bombardement, et les réunions se déroulent dans une aile; un pot de confitures paraît un beau cadeau (restrictions?)).

Cette fois l'histoire est racontée à la première personne par Mildred Lathbury.
"I suppose an unmaried woman just other thirty, who lives alone and had no apparent ties, must expect to find herself involved or interested in other's people business, and if she is also a clergyman's daughter then one might really say that there is no hope for her." (Je suppose qu'une femme trentenaire non mariée, vivant seule et sans liens apparents, doit s'attendre à se trouver impliquée ou intéressée dans les affaires des autres,et si elle est aussi la fille d'un clergyman, alors on peut réellement dire qu'il n'y a aucun espoir pour elle)(traduction perso à l'arrache)

Mildred mène donc une vie tranquille, ponctuée par les fêtes religieuses, les ventes de charité, les bazars, la décoration florale de l'église, etc., bref les activités autour de l'église et le papotage avec les paroissiens, et surtout le Père Julian Malory et sa soeur. Julian est encore épousable, mais semble appartenir à l'espèce de ceux qui ne se marient pas.
Par ailleurs le couple Napier s'installe dans l'appartement en dessous du sien, lui est vraiment attirant, elle est anthropologue, et voilà un nouvel univers à découvrir et fréquenter.

Barbara Pym est toujours géniale, la vie de son héroïne pourrait sembler bien ennuyeuse, mais le roman ne l'est pas du tout, il y a toujours ces petites piques et réflexions assez caustiques - ou réalistes ou mélancoliques, qui font sourire ou devenir un peu triste, c'est selon.

Un petit suspense, beaucoup de possibilités entre les personnages, encore une réussite.

"They've moved me to a new office and I don't like it at all. Different pigeons come to the windows." (L'on m'a donné un nouveau bureau et je n'aime pas ça du tout. Ce sont des pigeons différents qui viennent aux fenêtres)(William leur donne à manger)

Au détour d'un paragraphe, enfin, Mildred, l'excellente femme, se pose la question impliquant beaucoup plus  "Did we really need a cup of tea? (...) I began to realise that my question had struck at something deep and fundamental."

Bien évidemment parfait pour le mois anglais!

mercredi 1 juin 2016

Nouveau monde

Nouveau monde
Hunting Mister Heartbreak: A discovery of America
Jonathan Raban
Voyageurs Payot, 1993
Traduit par Jacques Chabert
Thomas Cook Travel Book Award, 1991



D'accord, ce n'est pas un perdreau de l'année, ce bouquin, et j'ignore totalement comment ce titre s'est faufilé dans ma liste à emprunter à la bibli, mais franchement c'est de la lecture comme j'aime. Et maintenant j'ai envie de lire ses autres titres.

Prêts pour découvrir l'Amérique? Jonathan Raban sait prendre son temps et commence par s'y rendre comme passager d'un porte container d'équipage britannique légèrement malmené par un cyclone nommé Hélène, traversée qui sera pour lui l'occasion d'évoquer ces immigrants européens du début du 20ème siècle.
"Des femmes à bord, c'est toujours mauvais, évidemment, dit Vince. Le lapin, c'est mauvais. Les curés, c'est mauvais. Jusqu'à présent je n'ai jamais rien entendu dire sur les écrivains.
-  Les écrivains, c'est mauvais.
-  Je suppose que tout ça, c'est une aubaine pour vous : des ouragans, du brouillard, des problèmes de moteur... Chapitre trois : 'Brouillard sur le Grand Banc'... Dommage que la saison des icebergs soit passée, je pense que vous auriez volontiers ajouté quelques icebergs dans le tableau.
-  A dire la vérité, j'espérais un naufrage. L'attitude héroïque du lieutenant... ce genre de choses.
- Ouais, grogna Vince, la tête dans le capot du radar. Le Titanic a coulé pas très loin d'ici...juste au sud du Grand Banc."

Le ton est donné : ironie british décontractée, mais informations sérieuses.

Un séjour à New York lui donne l'occasion de décortiquer l'histoire et le fonctionnement de Macy's, ainsi que présenter les 'Aériens'(ceux qui vivent dans leurs appartements, et roulent en taxi) et les Street People (SDF, en gros).

Puis direction sud, l'Alabama, où il loue carrément une maison près d'un lac à Guntersville, 6491 habitants. Une ville wet, c'est-à-dire où l'on accepte l'alcool, ce qui n'est pas le cas de toutes les villes, encore dry. Il adopte une chienne, on l'appelle John, il commence à prendre l'accent traînant du sud... Toujours amusant, bien sûr, mais son analyse sur le sud profond est intéressante.

Craignant de s'encroûter là, il prend l'avion vers Seattle, où aux dernières nouvelles il vit encore. S'attachant beaucoup à décrire la minorité d'origine coréenne.

Le livre se termine par une balade dans les Keys, au sud de la Floride, où il loue un bateau et se renseigne sur le trafic de drogue (dangereux, ça, comme enquête).

Si vous aimez Bryson, vous allez adorer Raban, c'est sûr! L'humour tient plus de l'understatement, il passe sans doute bien plus de temps à chaque endroit, mais c'est tout aussi recommandable. Une incursion dans les Etats Unis qui ne me semble pas avoir tellement pris de rides!

L'auteur (site de l'éditeur) : Jonathan Raban, né en 1942 en Angleterre, critique, romancier et grand voyageur, est aujourd'hui tenu pour l'un des espoirs les plus prometteurs de la littérature anglaise. Il vit aujourd'hui à Seattle.

Voilà une lecture épatante qui ouvrira le mois anglais (si!) toujours vivant grâce à cryssilda  et lou. Différents logos existent, mais celui-ci me convient parfaitement.