jeudi 30 juillet 2015

La revanche de Kevin

La revanche de Kevin
Iegor Gran
P.O.L., 2015

Kevin H. (on ne connaîtra pas son nom) travaille à la radio (pardon, la Radio) plutôt dans le commercial, d'ailleurs, et s'est toujours senti moqué/ostracisé/regardé de haut à cause de son prénom, considéré comme indiquant une extraction populaire. Le prénom comme marqueur social? Le prénom entravant un avenir professionnel? Déjà que certains étudient la corrélation entre prénom et mention au bac...

Sous le pseudo d'Alexandre Janus-Smith il court les salons du livre, se présentant comme lecteur dans une grande maison d'éditions. L'auteur appâté ne verra jamais de contrat. Sa dernière victime: François-René Pradel.

Un événement tragique viendra changer la face de l'histoire, qui prendra des chemins inattendus et réjouissants pour le lecteur. J'ai dévoré ce roman, y voyant surtout -et avec délectation- une vision des milieux éditoriaux et intellectuels. A l'autre bout du spectre, le personnage de la mère de Charlotte est une vraie réussite. Tout comme le roman, pour faire court, avec ses rebondissements (et ses notes de bas de page) !

Les avis de Clara (moi aussi, lu d'une traite!)

lundi 27 juillet 2015

Zéro déchet

Zéro déchet
Zero waste home: The ultimate guide to simplifying your life by reducing your waste
Béa Johnson
les arènes, 2013
Traduction Laure Motet


Béa Johnson est d'origine française; installée aux Etats Unis avec son mari Scott et ses deux fils, après des années de vie 'à l'américaine' (consommation, gaspillage, grande maison, etc) elle est passée au 'zéro déchet', disons plutôt à la réduction maximale des déchets.
Sa méthode en toutes circonstances (et je dis bien toutes, puisqu'elle parle de la cuisine et les provisions, la salle de bains, les produits de toilette,  la chambre, les vêtements, le ménage, le bureau, les enfants, les fêtes, les cadeaux, etc.)(y compris les animaux domestiques, la contraception et le papier toilette -je passe certains détails) se décline en cinq étapes, dans cet ordre:
Refuser, Réduire, Réutiliser, Recycler, Composter.
Recycler ne vient qu'en avant dernier car si on applique bien les trois premiers, il n'y a pas grand chose à recycler.

Je vous laisse les liens en fin de billet pour en savoir plus.

Ce livre se lit agréablement, parfois en ouvrant les yeux bien grands; il n'est pas exempt de répétitions, mais cela contribue à sa clarté et à sa compréhension. Franchement, tellement de domaines sont abordés, rien n'est laissé de côté...
L'auteur explique honnêtement certains de ses essais infructueux, n'oblige absolument pas qui que ce soit à l'imiter, elle suggère fortement, ses armes étant (et je la crois) les économies réalisées, le gain de temps et la meilleure santé. Très pratique, elle donne des recettes pour fabriquer, recycler, et surtout éviter que les 'déchets' entrent dans la maison.
Est-ce réalisable? Elle y est arrivée! Usant sans doute d'une grande force de persuasion auprès des voisins et connaissances, ainsi qu'en magasin. Est-ce dangereux? Non, plutôt meilleur pour la santé, et elle reconnaît qu'entre le zéro déchet à fond et soigner un gamin malade, elle a vite fait de choisir les médicaments adéquats et rapides (et avec emballage) plutôt qu'un remplacement plus écolo fait maison.

Vais-je me lancer dans l'aventure?
Cette lecture est tout de même l'occasion de réfléchir à notre mode de vie et nos pratiques. Avons-nous vraiment besoin de tel objet? Avons-nous besoin d'en avoir deux? Avons-nous besoin de neuf quand cela existe d'occasion? Ne vaut-il pas mieux choisir le solide et réparable?
Ne peut-on pas refuser certains emballages?  Il existe sans doute des magasins 'de vrac' mais sinon à y réfléchir ce matin encore j'aurais pu dire non à l'emballage plastique de mon pain. Béa Johnson fait ses courses en apportant ses bocaux ou ses sacs en tissu (tiens tiens, à la boulangerie je pourrais) et je suppose qu'elle a dû convaincre les magasins qu'elle fréquente. Mais le fait est, y-a-t-il vraiment besoin de tout emballer pour ensuite déballer et jeter le contenant?
Côté cadeaux, ne peut-on choisir une expérience/sortie qui laissera de forts souvenirs plutôt qu'un truc qui prendra la poussière?

Je la suivrais donc déjà dans la première phase : refuser. J'ai déjà commencé en refusant les kg de prospectus dans la boîte aux lettres (facile!) et en utilisant un panier (en osier de chez nous fabriqué/vendu par les 'gens du voyage') pour certaines courses.
Pour réduire, je peux vous dire qu'après avoir vécu un déménagement ré emménagement à cause de travaux à l'intérieur d'une maison, on trie, on jette, on donne! Et ce n'est pas terminé. Sans aller jusqu'au style dépouillé de la maison de Béa Johnson, mais c'est tellement plus facile de faire le ménage!
Emmaüs du coin a été ravi de voir arriver des objets (imprimante, radios, livres) en parfait état!
Pour réutiliser... oui, mais en essayant d'éviter les objets de la catégorie "ça peut", vous savez , "ça peut servir", et qu'on entasse.
Je  note aussi la possibilité d'échanger ou louer sa maison...

Conclusion : une bonne base de réflexion et éventuellement de changements...

Allez, pour la route, l'art du furoshiki qui consiste à emballer dans une étoffe.

On en parle ici 
Le blog de l'auteur (en anglais, mais avec des photos)
Le blog Action écolo (en français!)
Une suisse a tenté l'expérience
Noël et le zéro déchet (je constate que j'avais déjà eu l'idée de décorer une de mes plantes et pour me passer de sapin!)

jeudi 23 juillet 2015

La nature en bord de chemin (aujourd'hui et hier)

La nature en bord de chemin
Marc Giraud
Photographies Fabrice Cahez et Marc Giraud
delachaux et niestlé, 2013



Quoique bien consciente qu'avec ce titre je vais laisser 'en bord de chemin' quelques lecteurs (euh, beaucoup), je me permets d'insister: ce livre est une pépite! Même si la nature n'est pas votre créneau de lecture, vous trouverez dans cet ouvrage de quoi vous régaler, tranquillement, bribe par bribe.

Du texte informatif, souvent non dénué d'humour, et beaucoup beaucoup de (belles) photos, pour des plantes et bestioles 'bien de chez nous' qui méritent toute notre attention et notre admiration, en dépit d'un profil zéro exotisme. N'hésitez pas à feuilleter (lien plus bas). L'on parcourt une année à la campagne, souhaitant que ces splendeurs perdurent (mais ce n'est pas gagné, hélas)

Par exemple, la pie-grièche se fait traiter de serial-killer des bocages.
En cas de piqûre d'ortie, frotter la partie atteinte avec des feuilles de plantain.
Le plantain ne pousse jamais bien loin des orties, comme c'est pratique
'Quasiment tous les mammifères (sauf l'homme) ont un miroir dans l'oeil qui réfléchit la lumière. La lumière passe donc deux fois dans leurs yeux, et ils passent tous mieux que nous dans l'obscurité. Ce miroir fait briller leur regard dans les phares ou dans les lampes.'

Quant aux ronces, mais qu'elles sont utiles!!! Couvrant le sol, elles le protègent de l'érosion. Elles empêchent les herbivores de grignoter les jeunes pousses d'arbres. Elles abritent des insectes, et les mûres sont le régal des oiseaux et mammifères (y compris l'homme). Vous ne les regarderez plus de la même façon!!!

Pour feuilleter quelques pages :  ici

Pour celles et ceux qui sont encore là, je signale un bonbon british déniché dans les profondeurs du magasin de ma bibli, mais connu grâce à Folfaerie
Journal champêtre d'Edith Holden
Edith Holden
Blume Chêne, 1982
Traduction Florence Herbulot
'Reproduction en fac similé du journal de 1906 d'une jeune naturaliste, Edith Holden, qui nous décrit et nous dépeint la flore et la faune de la campagne anglaise au fil des saisons.'

Aquarelles, poèmes, descriptions, observations dans les chemins du Warwickshire, promenades à pied ou à bicyclette... Épatant!

Le mieux est de montrer des photos (cliquer pour agrandir)



Photos de pages ici aussi.

lundi 20 juillet 2015

Quinquennat

Quinquennat
Trilogie de l'Emprise II
Marc Dugain
Gallimard, 2015


Comme je le disais pour l'Emprise, ce roman parle de ce qui ne m'attire guère: la politique (et ses coups fourrés), les services secrets (et ses coups en douce), et les magouilles financières... Lecture détente, non?

Encore une fois, je l'avoue : je-n'ai-pas-lâché-ce-bouquin. Fascinée par la crédibilité de l'histoire où résonnent en écho des faits actuels, agacée de ne pouvoir poser un nom sur certains (et pourtant!), écœurée du cynisme de quelques politiques/journalistes/hommes d'affaires, soulagée de l'honnêteté et la ténacité de certains quand même, tendue à cause du danger menaçant ces derniers, épatée par une construction tout en  suspense, jubilant à la lecture de bien des passages, riant même parfois (jaune).

L'histoire? Launay est élu président de la République, suite à un 'sursaut républicain', face au candidat du Mouvement patriote. L'élimination de trois islamistes entre les deux tours a pu aider aussi...Mais chut!

Conseillé par une de ses proches collaboratrices, Launay prévoit d'organiser un référendum menant à une réforme constitutionnelle qui pourrait avoir de réels effets positifs, et aussi de rendre moins dangereux pour son avenir politique le Mouvement patriote et ses adversaires (dont certains dans son propre gouvernement).

Je suis d'accord, tout cela peut paraître assez peu attractif, mais croyez-moi, il y aurait encore beaucoup à dire, avec moult personnages et filouteries.  D'ailleurs je signale que ce fameux référendum sera repoussé à un troisième tome, qui je l'espère donnera enfin la réponse à quelques questions. Je souhaite que Monsieur Dugain y travaille sans relâche!

Quelques passages:
"En deux semaines, une nuée de collaborateurs de l'ancien régime allaient céder leur place à d'autres. (...) Les diplômes ont remplacé la naissance au bémol près que les titulaires des diplômes sont nés pour la plupart dans les mêmes milieux." (...)Bref, tout ce qui crée l'inertie française paraissait sur le point de se renouveler selon une version nationale du jeu de la chaise musicale, où l'on compte autant de chaises que de gens qui tournent autour."
"D'une beauté évidente, elle évoluait au milieu de la quarantaine sans inquiétude pour la suite."
"Les gens n'existent plus que par le bruit qu'ils font. (...) Le bruit généré par un individu est égal à la moyenne entre son QI et sa position sociale."

Question : les deux tomes sont-ils indépendants? Je pense que c'est comme chez Bello, on peut parfaitement suivre le II sans avoir lu le I puisque l'auteur y insère tous les éléments permettant de suivre, mais ce serait dommage de se priver du I.

vendredi 17 juillet 2015

Corée du nord : le retour!

D'abord avec Oh Yeong Jin, auteur sud coréen ayant passé un an et demi en Corée du nord.

Dans Mission Pyong Yang, Oh Kong-Sik, le personnage, est un auteur sud coréen envoyé à Pyongyang pour une mission de collaboration et d'échange. Les informations concernent la vie citadine (incluant une petite intrigue amoureuse d'un collègue nord coréen timide). Dessins en couleur. Je préviens, il faut se faire au graphisme, surtout les têtes, mais l'intérêt de la BD permet de ne plus s'en soucier.

Le visiteur du sud, tomes 1 et 2 (le journal de Monsieur Oh en Corée du nord)(éditions flblb)
Le narrateur travaille dans un chantier sur la côte est de la Corée du nord. Les courtes histoires (une à trois pages, noir et blanc) sont entrecoupées d'informations telles 'importer des objets en Corée du nord', 'les transports en commun', 'les médias en Corée du nord' , informations assez neutres (le livre date d'une époque où les deux Corée avaient plus d'échanges).

Oh Yeong Jin a de l'humour, y compris de l'autodérision; on sent un regard parfois étonné et souvent attristé sur ces Coréens dont il parle la langue (il existe quelques différences causant des quiproquos) mais on sent qu'il y va tout doux, c'était l'époque d'un meilleur dialogue entre les deux Corée, donc pas question de compromettre le processus.


Bien sûr il n'était pas question de laisser de côté Pyongyang, de Guy Delisle (paru chez L'association), cette fois seul, pour deux mois de travail sur des films d'animation, c'est sous-traité en Asie maintenant... J'y ai retrouvé l'atmosphère de On a marché dans Pyongyang, les guides et traducteurs omniprésents, l'électricité défaillante et les soirées entre expats. Au culot, il prête 1984 à son traducteur...

J'apprends par ailleurs que l'adaptation de la BD en film ne se fera pas... Voir blog de Guy Delisle.

lundi 13 juillet 2015

100% bio


Gagarine ou le rêve russe de l'espace
Yves Gauthier
Ginkgo, 2015

"Il y a quelque chose de symbolique dans  le parcours et la biographie de Gagarine. C'est une parcelle de la biographie de notre pays. Un fils de paysan qui a enduré les jours terribles de l'occupation fasciste. Un apprenti d'une école industrielle. Un ouvrier. Un étudiant. Un pilote aéro-club. Un aviateur. Des milliers et des milliers de garçons de son âge sont passés par là.C'est le chemin de notre génération..."

C'est Hermann Titov qui parle. Doublure de Gagarine, il ne sera pas le premier à voler dans l'espace le 12 avril 1961, mais le deuxième, en août. Hé oui, il n'y avait qu'une place dans le Vostok 1 ... Le choix de Gagarine symbolisait déjà bien ce qu'était l'Union soviétique...

Au départ, lire l'histoire de Gagarine, ça ne m'attirait pas plus que ça. Mais dès les premières pages, j'étais ferrée. Que de détails nouveaux et passionnants, quelle évocation de la vie en URSS au 20ème siècle. Gagarine, fils de paysan né en 1934, a bénéficié des possibilités offertes par son pays pour étudier et réaliser un rêve.
Mais avant lui, existaient des scientifiques et inventeurs, tels Tsiolkovski et surtout Korolev, sans doute le père 'spirituel' de Gagarine, n'ayant pas échappé au Goulag. N'oublions pas les politiques, qui dans les années 50-60 se devaient de gagner la course avec les USA! Le 'reportage'de Gagarine dans l'espace ne sera déclassifié qu'en 1991.
Module de descente de Vostok.
Incroyable quand même cette épopée! L'on apprend qu'en fait le risque d'échec du premier vol était de 56%... (calculé bien bien après) Mais franchement, imaginez-vous dans ce premier vol, bloqué dans le scaphandre, en vol automatisé, et pour revenir sur terre, siège éjectable et parachute... Finalement il est descendu sur la Sibérie, comme calculé...

Cerise sur le gâteau, l'écriture est agréable, avec un poil d'humour distancié parfois (il en faut, avec cette URSS de l'époque!), et le récit alterne un peu de détails techniques, juste pour comprendre, et l'histoire elle-même, comportant des documents et témoignages, en faisant la part parfois de la raideur de l'officiel...



Moi, Alexandre John Emile Yersin
Journal apocryphe
Daniel Bernard
Ginkgo, éditions Neige, 2015

Dans ce journal apocryphe, prétendument retrouvé à la mort de Yersin par son domestique à Nha Trang (Vietnam), Daniel Bernard, petit-fils de Noël Bernard, qui succéda à Yersin à la tête de l'Institut Pasteur de Saïgon, relate les faits saillants de la vie du découvreur du bacille de la peste et évoque un personnage assez discret et modeste tout en imaginant ses réflexions et pensées personnelles. Il s'appuie, dit la quatrième de couverture, sur des archives familiales et une biographie écrite par Noël Bernard. Cela se lit comme un roman, et est complété par des photos appartenant à l'auteur. J'aurais sans doute aimé en savoir plus sur ses recherches scientifiques ou ses explorations en Asie du Sud-Est, mais cela peut se trouver ailleurs, c'est sûr, et en une centaine de pages j'ai déjà eu pas mal d'informations.

vendredi 10 juillet 2015

Lila

Lila
Marilynne Robinson
Actes sud, 2015
Traduit par Simon Baril



Etats-Unis, années  20-30. Période du Krach. Des vagabonds sur les chemins des états du Midwest, qui seront bientôt en proie à la stérile poussière. Doll, l'une de ces errants vivotant de travaux agricoles, a pris en pitié une gamine maladive, crasseuse et délaissée par sa famille. " L'enfant était là, sous l'auvent, recroquevillée dans l'obscurité pour se protéger du froid, presque endormie après avoir pleuré toutes les larmes de son corps. Même si elle avait eu la force de continuer à brailler, les autres ne l'auraient pas entendue, et c'était sans doute mieux pour elle." Doll lui offre un nom, Lila, amour, protection et une année à l'école où elle apprend à lire et à écrire.
Des années plus tard, Lila a épousé le vieux pasteur de la petite ville de Gilead et attend un enfant.

Contrairement à la quatrième de couverture qui donne bien plus de détails révélés ensuite dans le récit, je me limite volontairement aux faits connus après une petite vingtaine de pages, le quasi reste du roman (357 pages) étant le développement. Déjà je sens l'inquiétude monter, 'mais cela va être ennuyeux!' Justement non, car aux manettes se tient Marylinne Robinson, jouant habilement des périodes, distillant les informations et usant d'une écriture remarquablement aisée et fluide. Petit à petit émerge la totalité de la vie de Lila (et une partie du possible futur?),  au présent vivant dans la sécurité de l'amour du vieux pasteur Ames (il doit avoir dans les 60-70 ans) mais songeant toujours à sa vie d'avant, précaire et libre. Elle pose des questions à son époux, honnête croyant n'ayant pas toujours les réponses. Lila arrive à mêler des versets de l'ancien testament à sa vie passée, s'éclairant mutuellement. J'ajouterai que l'histoire entre Lila et ce pasteur baigne dans une atmosphère à la fois de sensualité et de délicatesse.

"Gilead était ce genre de ville où les chiens dormaient au milieu de la route pour profiter du soleil, puis de la chaleur qui persistait après la tombée de la nuit, et les rares voitures devaient s'arrêter et klaxonner jusqu'à ce que ces bêtes daignent se lever pour les laisser passer. (...) Gilead, c'était à peine une ville. Où que vous vous trouviez, vous entendiez le froissement des feuilles de maïs, tant les champs étaient proches, et si grand était le silence. 'Tu te plairas ici, murmura-telle à l'enfant. Au moins pendant un moment.' "

Lila est le dernier volume d'une trilogie commencée avec Gilead, prix Pulitzer 2005 (Le pasteur Ames s'y adressait à son fils, à naître dans 'Lila') et poursuivie avec Chez nous, plus axée sur le pasteur Boughton ami de Ames, et qui m'avait tellement plu que je me suis précipitée sur 'Lila' dès que possible! Je pense que les trois romans sont indépendants, même s'ils se déroulent à Gilead (petite ville de l'Iowa). Un auteur qui mérite le détour, sans paillettes accrocheuses, mais sans difficultés de lecture.

La avis de Mark et Marcel,

mercredi 8 juillet 2015

Joseph Kessel

Joseph Kessel
La vie jusqu'au bout
Marc Alaux
Transboréal, 2015
Collection Compagnons de route


Dans cette collection à la présentation vraiment soignée j'ai déjà découvert Antoine de Saint-Exupéry. Avec Marc Alaux, auteur de Sous les yourtes de Mongolie, je savais d'avance que la qualité d'écriture serait présente. Marc Alaux est tombé dans la marmite kesselienne grâce aux Cavaliers, lus et relus sous la yourte lors de voyages en Mongolie.
Seulement voilà, Kessel, je n'ai jamais lu. Même pas Le lion. Et puis j'ai découvert que je connaissais déjà quand même pas mal de choses sur lui, qui se révèle une incontournable figure du 20ème siècle.

Journaliste, oui, écrivain et académicien, mais oui! Oncle de Maurice Druon, mais oui, ça me revient. Le chant des Partisans, aussi, mais pour Belle de jour et l'Armée des ombres, je l'ignorais. En fait, il serait plus simple de dire où il n'est jamais allé et les métiers artistiques aux quels il n'a jamais touché!

Né russe (et en Amérique du sud!) en 1898 (et il existe deux dates!) il meurt en 1979 après une vie très active et sans crainte des excès. Quelle santé! Amitié virile plus qu'amours qui enchaînent, c'est son credo, et ses épouses successives ont dû composer avec cela. Mais passons, car lire cette courte biographie donne des étoiles dans les yeux à considérer les lieux du globe parcourus. Quelles époques, aussi!!! On court, pas le temps de s'arrêter, les nuits sont courtes, l'argent coule à flots, l'alcool aussi, steppes, déserts, océans traversés, combats aériens, guerres mondiales, reportages ... De quoi remplir dix vies!

"Mais est-il aventurier pour autant? Laissons-le répondre : 'Eux, mes compagnons des grands chemins, des ports, des guerres, des sables perdus et des bouges, ils avaient le courage, entier, terrible, de leurs exigences effrénées. Par leur truchement, je vivais celles que je n'osais, moi-même, affronter.' Il avoue ne pas être de leur trempe. S'il a la vitalité des aventuriers qu'il décrit, son besoin d'écrire l'empêche de basculer dans la stricte vie d'aventure en même temps qu'il lui permet de devenir une grande plume de l'aventure."

Grand voyageur. Joseph Kessel, à 69 ans, en Afghanistan, en 1967. L'académicien venait d'achever son épopée afghane "Les Cavaliers". Photo tirée du film "Kessel en route", d'Igor Barrière et de Michel Colomès. ©ORTF
Les avis de Chinouk 

lundi 6 juillet 2015

Pour un soir seulement

Pour un soir seulement
Journal(sexuel) d'une ex-petite moche
Thomas Raphaël
Flammarion, 2015


Tout juste trentenaires, les deux cousines Julie et Corail ont gardé de leurs années de collège une réputation de petite moche et petite grosse. Si Corail semble s'en être remise, Julie hélas se dévalorise, se protège sous une carapace bien costaude et surtout manie l'ironie et l'autodérision. Côté famille, ses parents sont divorcés, son père vit avec Vincent et sa mère avec un sinistre type père de trois ados. Côté cœur, son compte Meetic a un encéphalogramme plat, elle est amie avec Romain, son premier copain, et vient de rencontrer Jeremy, joueur de rugby qui prend au premier degré tout ce qu'elle dit mais chez qui il n'y a rien à photoshoper (Julie est graphiste)
Jusqu'au jour où l'on découvre un bel anévrisme dans son cerveau, dont la rupture peut survenir sans crier gare. Elle doit se faire opérer, mais l'opération comporte des risques certains. Elle annonce donc sur son compte Meetic 'pour un soir seulement' et le compte explose!

Pauvre Julie, sympathique Julie, toujours tiraillée. Elle fait des efforts pour ne pas laisser parler son coeur et se contenter de rencontres d'un soir (la palme revient à Pierre et au chat Wifi)(il s'appelle Wifi car il passe par la fenêtre et c'est celui des voisins). Mais sous l'armure bat un petit coeur... Pourtant le temps passe, les risques de mourir augmentent. Se décidera-t-elle à l'opération?

Je n'ai pu bouder mon plaisir en découvrant Julie, ses amis, et les affreuses Audrey et Manon. Parfois c'est pathétique, on aimerait secouer Julie (mais pas trop fort, à cause de l'anévrisme) ou la prendre dans ses bras. Ses aventures amoureuses ne m'ont pas toutes emballées mais il existe des moments plus sérieux (comment le mariage de son père a pu avoir lieu) et plus tendres (la fin m'a scotchée). Ajoutons un petit revirement en cours de route (chut) et voilà une comédie romantique tout à fait originale et sympathique.

Les avis de Mylène,

vendredi 3 juillet 2015

Une vie après l'autre

Une vie après l'autre
Life after life
Kate Atkinson
Grasset, 2015
Traduction de Isabelle Caron


Deux citations juste pour ouvrir l'appétit!
"Elle dînait plus tard que d'habitude car elle venait de fêter sa retraite - c'était un peu comme assister à ses propres funérailles sauf qu'on pouvait rentrer chez soi après."
"Le beurre fut étalé sur le pain sans considération pour le dur labeur de la vache."

Ursula Todd est née plusieurs fois, mais à la même date, le 11 février 1910. Une fois elle meurt étranglée par le cordon ombilical, ensuite après quelques années, accidentellement. Chaque fois, son existence ayant quelque peu divergé, il suffisait de prendre un autre chemin, de moins s'attarder, de réagir autrement. Au fil de ces diverses vies, elle ressent parfois de l'effroi, une sorte de présage, un sentiment de déjà-vu, qui la poussent à agir. "Ursula continuait à avoir le sentiment qu'une partie de son avenir était aussi derrière elle, mais avait appris à garder de telles idées pour elle."

Cela pourrait n'être qu'un exercice (bien ficelé, au détail près) mais le lecteur suit fasciné la (les?) vie(s) d'Ursula et de sa famille, les parents, Hugh plein d'amour pour sa fille et Sylvie, la mère parfois incisive ("Tu excelles à être toi-même, dit Ursula, consciente que la remarque n'était pas nécessairement élogieuse. - C'est que j'ai des années de pratique"), le frère aîné Maurice assez détestable ("Il lui semblait que si on cherchait des arguments contre le mariage, l'existence de Maurice était le meilleur de tous"), sa soeur amie Pamela, et son préféré, Teddy. Une grand mère absente ("Adelaïde menaçait de mourir depuis plusieurs années, mais n'avait 'jamais tenu sa promesse', disait Sylvie) sans oublier la tante Izzie.

Plusieurs romans en un ? Peut-être (mais ça se termine toujours mal pour la pauvre Ursula, évidemment) jusqu'à une fin plus satisfaisante... Je retiendrai des passages fascinants au cours de la dernière guerre mondiale, à Londres, Berlin et la Bavière.Je retiendrai un ton inimitable (j'ai cité assez de passages, non?)

Hélas Kate Atkinson a un défaut, elle n'est pas anglaise mais écossaise et ne pouvait sans doute figurer dans le mois anglais, me suis-je aperçue trop tard (mais de toute façon je voulais lire ce roman)
Edit du 3 juillet : il paraît que si (et en plus on continue en juillet)

Les avis de cuné, clara, cathulu, brize, kathel,

Et, grand événement dans ma vie de lectrice, ce roman est le premier lu sur liseuse! Liseuse kobo aimablement prêtée par ma médiathèque, et contenant des bouquins récents. Il semblerait que dans quelques mois on changera les titres proposés.
Après quelques tâtonnements et ronchonnements, j'ai apprivoisé la bête et me suis plongée dans la lecture comme si c'était un livre en papier, ce qui est quand même l'essentiel, non? Je ne dirais pas non à une liseuse, mais pour l'instant n'en vois pas l'obligation (pas de grand voyage en vue). Grand confort de lecture, petit poids (mais pas mini prix, ai-je vérifié)

mercredi 1 juillet 2015

Vers Compostelle

Vers Compostelle
Drôles de rencontres
Antoine Bertrandy
Transboreal, 2015, Collection Voyages en poche


Encore un récit de voyage à Compostelle? Comme je n'ai lu que celui de Rufin, je ne risquais pas l'overdose et de toute façon je fais totalement confiance à l'éditeur dans ses choix. Vous êtes prêts? Sacs bouclés? Bonnes chaussures? Bâton?

Antoine Bertrandy, à le lire, n'est pas un adepte de la randonnée et avant de partir parcourir le Camino Francés, de Saint-Jean-Pied-de Port à Compostelle, s'entraîne tout simplement à Paris. Un équipement correct, de bons conseils, et il quitte femme et enfant pour cinq semaines. Au fil des étapes il livre ses expériences, sans trop s’appesantir sur les paysages et les petits bobos, mais analysant honnêtement ses réactions et états d'esprit et surtout relatant les rencontres les plus frappantes, et il y en aura! Drôles de rencontres dixit l'intitulé, et c'est bien sous cet angle que le récit s'articule, vivant, agréable à lire, souvent amusant, parfois émouvant. Sur ce chemin il suffit de peu pour retrouver quelqu'un ou le perdre, en allant (volontairement ou non) plus ou moins vite, ou choisissant une autre auberge.

Déjà, en 1568...
Je vous invite à cheminer vous aussi et comme j'ai reçu deux exemplaires du livre, je vous l'envoie si vous êtes intéressés, il en vaut la peine et pas question de le laisser dormir sur une étagère!

Épilogue : "Il y a autant de pèlerinages que de pèlerins. J'ai emprunté le même chemin que beaucoup d'autres et je me suis arrêté dans des refuges où, chaque année, des milliers de marcheurs s'arrêtent aussi. Si chaque voyageur qui atteint Saint-jacques se mettait à écrire le récit de son voyage, il y en aurait plus de 200 000 par année. Pourtant aucune relation ne serait semblable à une autre. Certains privilégieraient probablement l'aspect spirituel ou religieux du voyage. D'autres mettraient l'accent sur l'aspect culturel et historique et sur l'importance patrimoniale que nous découvrons tout au long de notre progression. Mon voyage a été plus que tout autre chose, une chemin de rencontres.. Je me suis peu à peu ouvert aux autres et tous ces autres en se confiant à moi en retour m'ont ouvert à moi-même. Surtout, ils m'ont ouvert les yeux sur mes peurs et mes frilosités, m'ont mis à nu et m'ont fait accepter, sans le savoir, ma part de sordide, de laid, de sale, de mort. Ma part de tristesse, de colère et de haine.(...) L'essentiel est d'être parvenu à surmonter mes obstacles intérieurs jusqu'à atteindre le but ultime de ma marche, Santiago. Après quoi je peux revenir chez moi. Ni neuf, ni nouveau, mais plus fort. "

Pour info...
Les avis de Chinouk, saxaoul,