vendredi 30 novembre 2012

Rouge-Gorge / Le sauveur

Rouge-Gorge
Jo Nesbø
folio policier, 2007
Traduit du norvégien par Alex Fouillet

Harry Hole, le retour.
"Un grand type entra rapidement. (...) Cet homme portait une veste de costume un peu trop petite, un jean noir et de grosses Dr. Martens de la même couleur. Les cheveux coupés hypercourt et la silhouette mince et athlétique indiquaient un début de trentaine. Mais les yeux injectés de sang, les poches qui apparaissaient dessous et la peau pâle parsemée de fins vaisseaux qui s'étendaient ça et là en petits deltas rouges allaient plutôt vers la cinquantaine.
- Inspecteur Harry Hole? (...)
- Oui."

Harry, oui, et ses problèmes d'alcool. Il faut dire qu'il lui tombe des malheurs sur le paletot, mais quand même. Sa collègue et amie Ellen s'attache à le faire décrocher.
Mais Harry est surtout un excellent policier qui ne lâche rien, avec sûrement des journées de trente heures (il va rencontrer l'amour, et bosser moins). Il est censé surveiller les milieux néo-nazis de Norvège mais son flair le conduit à se demander à quelle fin un fusil hyper rare et hyper efficace a été introduit en douce dans le pays.
Parallèlement une vieille histoire est racontée, lors du siège de Léningrad où des volontaires norvégiens combattaient sous uniforme allemand, puis à Vienne en 1944. Histoire qui va avoir des conséquences à l'époque actuelle.

Le lecteur a souvent une petite avance sur Harry Hole, même si Nesbo sait bien l'embrouiller. Ce roman appartient à la catégorie "ne se lâche pas", son découpage joue avec les nerfs, les héros récurrents sont sympathiques, sauf quelques ripoux qu'on aimerait dénoncer à Harry (dans quel volume tout sera-t-il clair pour lui?)(ah, dans le suivant, que je n'ai pas lu) et surtout on découvre tout un pan d'histoire norvégienne pas très glorieuse entre 1940 et 1945.

Les avis chez Babelio


 600 pages avec Harry Hole, ça ne suffit pas, j'ai donc enchaîné avec :

Le sauveur
Jo Nesbø
folio policier, 2009
Traduit du norvégien par Alex Fouillet

Dans les semaines précédant Noël, le thermomètre descend largement sous zéro, et à Oslo l'Armée du Salut a de quoi s'occuper avec les réfugiés, les pauvres, les SDF, drogués ou pas. Lors d'un de ses concerts de rue, un de ses membres est abattu par un tueur qui réalise un peu tard qu'il s'est trompé de cible et qu'il lui faut reprendre le travail... Une course démarre entre police et tueur, Harry Hole et ses collègues devant protéger la victime potentielle et retrouver le tueur. Surtout que le mobile n'est pas facile à découvrir.

A nouveau un polar haletant, plein de surprises, au suspense sans faille, avec un Harry Hole lui aussi surprenant parfois.

"Le doute est l'ombre de la foi. Si on n'a pas la capacité de douter, on ne peut pas être croyant. C'est comme le courage, ça, inspecteur principal. Si on n'a pas la capacité d'avoir peur, on ne peut pas être courageux."

Des avis chez babelio

Pour la lecture suivante, j'attendrai quand même un peu...
 Dans l'ordre chronologique:
1 ) L'homme chauve-souris (en Australie)
2 ) Les cafards (en Thaïlande)

puis en Norvège :
3 ) Rouge-Gorge
4 ) Rue Sans-Souci
5 ) L'étoile du diable
6 ) Le Sauveur
7 ) Le Bonhomme de neige

8 ) Le Léopard
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Challenge Polars Thrillers chez Liliba

mercredi 28 novembre 2012

Bref, ils ont besoin d'un orthophoniste

Bref, ils ont besoin d'un orthophoniste
Gaëlle Pingault
Quadrature, 2012




En allant sur le blog de l'auteur, vous pourrez découvrir quelques textes et surtout la genèse de ce recueil : une belle histoire! Gaëlle Pingault est orthophoniste, magnifique métier qu'elle présente avec passion.

Des histoires très courtes présentent des enfants, adultes et personnes âgées qui, bref, ont besoin d'un orthophoniste. Dyslexie, autisme, des dys pas sympa du tout à vivre, rééducation après opération ou AVC, l'éventail des interventions d'un orthophoniste est vaste (une vingtaine recensés) et j'avoue une totale découverte de certains exemples. Les histoires sont fictives, sauf une. Toutes sont porteuses d'espoir. L'humour n'est jamais absent.

Mais Gaëlle Pingault écrit aussi des nouvelles, là il s'agit de son troisième recueil, et entre deux textes plus "professionnels" intervient Laure, une drôle de fille mal dans sa peau mais qui se soigne.
"Ma bonne fée a encore dû rater un truc dans la distribution des machins à joyeux grelots et à pompons heureux au-dessus du berceau à ma naissance. A se demander si j'ai vraiment une bonne fée ou si les réductions d'effectif des fonctionnaires étaient déjà à la mode à l'époque. Optimiste, moi, zéro patate." Une désespérée marrante, quoi.

Lecture hautement recommandable, qu'on ait besoin ou pas d'un orthophoniste.

Merci à l'éditeur. Toujours des bouquins fort soignés.

lundi 26 novembre 2012

Théorème vivant

Théorème vivant
Cédric Villani
Grasset, 2012


Avertissement liminaire: Ce bouquin contient de vrais gros morceaux de mathématiques à l'intérieur. Vous êtes prévenus des conséquences éventuelles! (lire ici )

Qui est Cédric Villani (à part un intello, comme disent les gamins d'aujourd'hui)? Quand même une grosse tête, qui se shoote aux mathématiques de très haut niveau et a obtenu en 2010 la médaille Fields, l'équivalent du Nobel pour les maths, ceci pour "his proofs of nonlinear Landau dumping and convergence to equilibrium for the Boltzman equation".

Costume trois pièces, lavallière, chaîne de montre et araignée broche, voilà pour le look. Mais ce passionné veut et sait aussi partager.

photo prise sur l'excellent article de blog75
Et le livre, alors? D'abord ce n'est pas de la vulgarisation, vous n'en sortirez pas en ayant tout compris sur l'amortissement Landau, l'équation de Boltzmann et autres amusements qui furent le quotidien de notre homme durant de longs mois. Mais vous aurez une petite idée de la façon dont avance une recherche en mathématiques ("Comment ça, tout n'a pas été démontré?" Vous exclamez-vous. "Les mathématiques ne sont pas un truc poussiéreux?")

Cedric Villani raconte la genèse d'une recherche, les longs mois de tâtonnements, de fourvoiements, d'éclairs de génie pour se tirer d'affaire, ses échanges avec son collaborateur Clément Mouhot (et les mails!), ses discussions avec des collègues qui éclairent le terrain, jusqu'à la publication d'un article bien dodu dans une prestigieuse revue mathématique.

Nous suivons aussi (un peu) la vie de famille de l'auteur, particulièrement à Princeton, eh oui comme Gödel (cf La déesse des petites victoires) mais en moins tourmenté heureusement.

Ce qui m'a frappée est le fait que le chercheur n'est pas isolé, - bossant des années puis offrant au monde "la" démonstration attendue depuis des décennie voire des siècles (même si certains fonctionnent ainsi)- mais qu'au contraire ce sont des mois et des mois de contacts nombreux, de présentation à la critique des travaux quasiment "en l'état", de remise de l'ouvrage sur le métier, avant, enfin, d'aboutir.

En plus d'une narration "normale", Cédric Villani a choisi d'insérer dans son livre des mails avec son collaborateur, des passages 100% maths (l'imprimeur a dû s'amuser) d'une beauté indéniable à mes yeux, mais que je n'ai même pas cherché à comprendre, des poèmes, des chansons, des portraits de mathématiciens, et quelques rappels classiques (vous pouvez toujours vous amuser avec le Problème de Syracuse, à la portée de tous, et encore non prouvé - j'dis ça, j'dis rien).

Finalement, il faut se laisser prendre par la main quand la forêt matheuse devient touffue et s'amuser du côté surréaliste de certains dialogues
"Alors attends, déjà, comment tu fais avec le bête transport libre?
- Boh, avec la solution explicite, ça doit le faire, attends, on va essayer de retrouver.
(...)
- On décompose la solution selon les répliques du tore... on change de variables dans chaque morceau... il y a un jacobien qui sort, tu utilises la régularité Lipschitz... et finalement tu trouves une convergence en un sur t. C'est lent mais ça sonne bien.
- Quoi, alors, t'as pas de régularisation... la convergence est obtenue moyenne... moyenne...
- Mais alors il faudrait voir si ça peut pas aider pour le dumping Landau!
Je suis bluffé. Trois secondes de silence. Vague sentiment de quelque chose d'important."


Une présentation, une vidéo, des extraits ici 
L'avis de mediapart
L'auteur en parle sur son blog.
Sur Babelio.

vendredi 23 novembre 2012

Certaines n'avaient jamais vu la mer / Home

Certaines n'avaient jamais vu la mer
Julie Otsuka
Phébus, 2012


56 critiques recensées sur Babelio, quel besoin d'en ajouter une? Voilà bien le problème des romans encensés par tous ou presque, l'envie d'en parler ou même de les lire peut nous quitter rapidement. Heureusement les qualités (et la brièveté, 140 pages) du roman sont telles qu'il fut vite dévoré!

Qui savait (avant parution de ce livre) qu'au début du 20ème siècle de nombreuses japonaises quittèrent leur pays pour un avenir qu'elles espéraient meilleur, en épousant un américain (d’origine japonaise)? On les appelait picture brides. Julie Otsuka utilise le nous narratif, réussissant à évoquer une multitude de destins à la fois semblables et différents. Rêves et désillusions, du travail, beaucoup de travail, les rapports avec les blancs, la vie de famille, l'abandon des traditions par la nouvelle génération, parfois leur réussite. Puis après l'entrée en guerre des États-Unis en 1941, les suspicions et l'envoi des familles en camp éloignés de la côte pacifique.
De fait, ce roman pourrait aussi décrire d'autres immigrations, d'autres suspicions sur une catégorie d'individus, d'autres injustices.
Foisonnant et lumineux roman, à lire, bien sûr!

 Pour Home de Toni Morrison, 57 critiques sur Babelio! J'en parlerai donc dans le même billet, catégorisé "tout le monde en parle mais ce n'est pas une raison pour ne pas le lire". Surtout que c'était l'occasion de découvrir l'auteur avec une texte assez court.


Home
Toni Morrison
Christian Bourgois, 2012
Traduit par Christine Laferrière



En peu de pages Toni Morrison a réussi à en dire tant! La guerre de Corée, les séquelles chez Frank Money (ouh l'histoire de la petite Coréenne),  la condition des noirs américains dans les années 50 et 30 aussi. Oui, mieux vaut entrer chez les blancs par la porte de derrière, faire attention où on s'assied. Pourtant des pages réchauffent le cœur, heureusement (les femmes de Lotus aidant Cee à guérir et grandir).

"Je ne vais nulle part. C'est ici qu'est ma place."

En refermant le roman, trop court ou pas selon les avis, on s'aperçoit que les détails se sont mis en place. Et je ressens l'envie de lire d'autres titres (des idées?), peut être même en version originale, ça doit valoir le coup, car l'écriture est marquante.

mercredi 21 novembre 2012

Demain, demain


Demain, demain
Nanterre, bidonville de la folie
1962-1966
Laurent Maffre
suivi de 127, rue de la Garenne
raconté par Monique Hervo
Actes sud BD/arte éditions, 2012






"Le bidonville, rue de la Garenne, dit La folie, le plus vaste -21 hectares- et le plus insalubre des bidonvilles de Nanterre, se situait sur les terrains de l’établissement public pour l'aménagement de la Défense (l'EPAD). Comme d'autres bidonvilles de Nanterre, (...), il était relégué aux portes de Paris.
En 1962, environ1500 ouvriers "célibataires" et quelques 300 familles y habitaient, sans électricité et sans eau courante. Pour tous, il n'y avait qu'une seule fontaine et une seule adresse administrative : le 127, rue de la Garenne."

Au travers de la vie d'une famille algérienne fictive et de leurs voisins et amis français, un document dessiné en noir et blanc montrant sobrement et efficacement ce qu'était la vie dans ce bidonville. Insalubrité, froid, humidité, boue, corvée d'eau, maladie, incendies meurtriers parfois, démolitions par "les bleus" si on s'avisait de réparer trop solidement, mais aussi solidarité, fêtes, jeux à l'école, une sortie à la mer, espoir d'en sortir.
Leur rêve : avoir une vraie maison, mais ils ne sont pas du tout prioritaires!

En supplément, photos et "journal" de Monique Hervo.

A lire, percutant!

Des planches ici.

Voir Les gridouillis, chez Mo,

lundi 19 novembre 2012

Dans les forêts de Sibérie

Dans les forêts de Sibérie
Sylvain Tesson
Gallimard, 2011


"Je suis au seuil d'un rêve vieux de sept ans. En 2003, je séjournai pour la première fois au bord du Baïkal. Marchant sur la grève, je découvris des cabanes régulièrement espacées, peuplées d'ermites étrangement heureux. L'idée de m'enfouir sous le couvert des futaies, seul, dans le silence, chemina en moi.Sept ans plus tard, m'y voilà."

Pourtant il a bien arpenté la Terre, surtout l'Asie.
Mais:
"Les hommes qui ressentent douloureusement la fuite du temps ne supportent pas la sédentarité. En mouvement, ils s'apaisent. Le défilement de l'espace leur donne l'illusion du ralentissement du temps, leur vie prend l'allure d'une danse de Saint-Guy. Ils s'agitent.
L'alternative, c'est l'ermitage."

On change, quoi.

Le voilà donc parti pour 6 mois dans une cabane de 3 mètres sur 3, sur la rive nord ouest du Baïkal. 700 km de long sur 80 de large, un kilomètre et demi de profondeur, 25 millions d'années, et l'hiver, 110 cm de glace.
Du matériel, de la nourriture, de la boisson, de la lecture (liste fournie ici pages 33-35). L'existence se réduit à une quinzaine d'activités. Cuisiner, couper le bois, lire, écrire, flâner, rêver, explorer les environs.
Les jours se suivent, semblables - ou pas. Le printemps arrive, le lac dégèle.

Un journal au jour le jour, pas toujours passionnant, mais bourré de réflexions intéressantes sur la vie, les paysages, les lectures, la vie...De l'humour et de l’auto dérision.  Une vie ponctuée de pas mal de visites car d'autres cabanes, à 30 ou 100 kilomètres de là, sont habitées par des russes. Thé, vodka (beaucoup de vodka), poisson. Discussions -ou silences. Deux petites chiennes viennent rejoindre sa cabane. Il observe les mésanges.

Au final, le récit d'une expérience, de la réalisation d'un rêve. Une bouffée d'oxygène.

A la fin:
"Sergueï me fait le plus beau compliment de mon existence: "Ta présence ici dissuade les braconniers. Tu auras sauvé quatre ou cinq ours."

Les avis chez babelio
dernièrement, kathel

vendredi 16 novembre 2012

Le chiffre des soeurs / Les ronces

Le chiffre des sœurs
Antoine Piazza
Editions du Rouergue, 2012



Il y a un mystère Piazza. Moi qui déteste en général ces romans trop inspirés par la vie d'un auteur, j'ai dévoré cette chronique façon puzzle à la chronologie vagabonde axée sur les quatre tantes de l'auteur, Annabelle, Armelle, Alice et Angèle. Le lecteur traverse un vingtième siècle et ses évolutions, particulièrement dans cette petite bourgeoisie. Oncles et neveux, gendres et beaux frères, grand-pères restent en arrière plan. Rien de sensationnel ne survient, pas de folie, d'inceste, de catastrophe, mais Piazza transforme la banalité grâce à son regard lucide et détaché. Non, on ne saura rien de ses états d'âme, de ses interventions. Son affection pour cette famille est palpable et il ne prend pas parti. Pourtant ces sœurs ont parfois leur caractère, leurs défauts et leurs manies!
A feuilleter les romans de Piazza, on peut hésiter : c'est dense, pas de dialogues pour aérer les pages. Mais une fois lancée dans une de ses (longues) phrases, je suis accrochée et l'élégance de la langue me berce et m’entraîne...

"Mon père, prenant livraison, dans la semaine qui suivit, d'une nouvelle voiture, fut étonné de ne pas voir, après l'interminable et minutieux examen qui exaspérait d'ordinaire le concessionnaire et les vendeurs réunis derrière lui et à l'issue duquel il il réglait le solde dû à la livraison, l'orifice ombilical et familier qui, au moment de prendre la route, le sauvait éventuellement de la paralysie ou de la pluie. En réalité, Renault avait depuis peu supprimé la manivelle ancestrale et sommaire et fait naître la voiture moderne, docile et exempte de pannes, et les lourds ahans des citadins congestionnés rejoignirent dans un vent archaïque et froid les cris de paysans poussant leurs bêtes."
photo ici

Les avis de Enfin livre! , sans connivence,   le cadran lunaire,   babelio,

Et je continue avec le même!


Les ronces
Antoine Piazza
Editions du Rouergue, 2006


Toujours dans l'autobiographie distanciée, après sa famille dans Le chiffre des sœurs, son séjour en Afrique dans La route de Tassiga, (quoique Roman fleuve flirtait avec la SF), l'auteur évoque maintenant ses sept années comme instituteur dans un village isolé du Haut-Languedoc, dans les années 80, époque charnière de la vie du village, puisque l'école fermera, et il partira à Sète.
Piazza se livre un peu plus, dans ses façons pas toujours acceptées de faire la classe, ses balades à pied dans la région, sa vie de famille, la poésie gardée par son père dans son portefeuille, et ses premiers pas d’écrivain aux manuscrits refusés.
Mais l'essentiel du livre vaut pour la description de figures du village au fil du temps, le maire, les familles de ses élèves, les gens du cru, les rapportés (comme on dit par chez moi), les exilés de retour au pays natal. C'est croqué sans méchanceté, avec précision, un brin de nostalgie, un grand sens de l'observation, et toujours une écriture ample non dénuée de souffle.

Les avis de Wodka, l'antre des mots, Le bibiophare,

mercredi 14 novembre 2012

A nous deux, Paris

A nous deux, Paris
J.P. Nishi
Editions Philippe Picquier, 2012



Encore une fois (soupirs) merci à A girl from earth pour ses tentations autour du Japon.



Taku Nishimura, alias J.P. Nishi, est un japonais trentenaire ne parlant pas français (au début du moins), arrivé à Paris "parce que passionné de BD française". Dans son pays, il est mangaka, à Paris il travaille dans une épicerie japonaise.

Avec une dose élevée d'autodérision il raconte sa découverte des mœurs parisiennes (et françaises aussi) , sans oublier de croquer son ami italien aux nombreuses conquêtes féminines, son collègue malgache et ses amies japonaises parfois "carriéristes de l'amour".

Il découvre les bretelles de soutien-gorge et les décolletés des françaises, les bisous et les codes de ces bisous si peu japonais, les billets de 500 euros impossibles à dépenser -ou presque, les soldes, les vélib's, les voisins de sa chambre de bonne, et même l'amour -ou presque. Les critères de beauté sont bien différents aussi, mais je m'étonne qu'il mélange au départ les différents asiatiques rencontrés.

Paris vu par les yeux d'un Japonais faussement naïf, un joli aller-retour France-Japon, finalement, et de l'humour.

Les avis de Journal du Japon, colimasson, le dolmen, marie,
Encore un pour le challenge de Catherine

lundi 12 novembre 2012

Pêche en eau trouble

Pêche en eau trouble
Carl Hiaasen
10/18, 2004
Double Whammy, traduit par Yves Sarda


Pas de panique! Ce polar déjanté est garanti sans descriptions oiseuses de pêche à la mouche. On n'est pas dans le Montana, d'abord, mais en Floride, et on y pêche le bass, bestiole pas chichiteuse, résistante, prolifique. Sauf que même dans ces conditions là, certains trichent lors des concours où l'on peut quand même gagner 4x4, bateau et espèces; et ça, Dennis Gault n'aime pas. Il engage donc pour enquêter en douce R.J. Decker, qui mettra les pieds dans des histoires plus glauques que le fond boueux des lacs.

L'enquête va se dérouler dans des lieux "jamais à court de gnôle ni de crétinerie", "où la corruption le disputait à l'aridité et que les bizarres notions d'intégration raciale, de droit légitime à un logement décent et d'égalité des droits civiques n’avaient pas atteinte." Ajoutons Skink, une sorte d'ermite un brin givré, Jim Tile, le flic de la route noir et costaud, et Charlie Weeb, propriétaire à la fois d'un Église et d'une chaîne de télévision, organisateur de miracles et de concours de pêche, et promoteur immobilier.

Le lecteur est gagnant sur tous les plans. Une bonne intrigue bien ficelée avec joli final, des passages réjouissants (mais certains sont vraiment complètement barjes!) et une dénonciation du tourisme de masse pollueur, en Floride en particulier (mais imaginez juste certains coins de l'Espagne).
J'ai tellement aimé que j'ai acheté un autre de ses polars, affaire à suivre!

L'auteur : originaire de Floride, journaliste et auteur de romans (certains pour la jeunesse), se fait le défenseur des Everglades.

Des avis chez Babelio

Challenge Polars Thrillers chez Liliba

vendredi 9 novembre 2012

Une vie inachevée

Une vie inachevée
Mark Spragg
Gallmeister Totem, 2012



Dans un ranch du Wyoming (ouais, d'accord, je ne pouvais pas résister...) vivent Einar et Mitch, unis par une solide amitié depuis une guerre faite ensemble. Einar est veuf, son fils est mort à la vingtaine, et il traîne son deuil.
Arrivent un jour sans crier gare sa belle-fille Jean et sa petite fille Griff, n'ayant aucun autre endroit où aller et fuyant le compagnon de Jean qui la cogne aisément.
Einar déteste sa belle-fille et les accueille sans chaleur.
Sauf que Griff est une fillette très mature, débrouillarde et très attachante. Ce qui devait arriver arriva, petit à petit le grand père cède à son charme.

Une histoire sans grosses surprises, mais qui se lit avec beaucoup de plaisir et le cœur élargi, pour le duo Einar-Mitch, pour Griff, et pour l'ambiance d'Ishawooa, patelin paumé du Wyoming plus vrai que vrai, où tout le monde se connaît... Un mini suspense grâce à l'arrivée de Roy, l'ex de Jean qui veut la récupérer à tout prix, mais tout se terminera bien, même pour le grizzli (voui, il y a un grizzli).

Ce roman a été adapté au cinéma (included Robert Redford, Morgan Freeman et Jennifer Lopez). Il semble qu'il ait une suite, De flammes et d'argile, paru récemment chez Gallmeister. Noté.
Les avis de EmiLie, Phil, Abeille, Yv,

mercredi 7 novembre 2012

Passés imparfaits

Passés imparfaits
Patrick Dupuis
Editions Luce Wilquin, 2012
Collection Euphémie


Patrick Dupuis appartient à l'équipe de Quadrature, maison d'édition dédiée aux nouvelles, mais il en écrit aussi, parues chez Luce Wilquin, aussi un éditeur belge, que Minou a décidé de mettre en lumière. Pleins feux donc sur une petite maison moins connue, des auteurs plus rares, et des nouvelles. (Remarque futile : j'adore les couvertures!)

Comme le laisse entendre le titre (parfait), le passé des différents personnages ne l'a point été, en tout cas il a laissé des traces, infidélités et divorces (Dernier repas, Voisinage), arrestation (Retour), amitié défunte (Anna), et le présent, entre leurs mains, est l'occasion de décisions - ou pas. Pour du meilleur ou le statu quo. De l'humour (Mylena, Domicile conjugal), de la nostalgie (Le stylo), de la tristesse (Le buveur d'Orval), toute une gamme d’impressions. Peu de happy end tout de même (En mémoire du passé). Mais des gens comme tout le monde, pas de chutes catastrophiques, ça j'aime bien.
Les nouvelles sont courtes, sans doute un peu trop pour mon goût, mais on se glisse tout de suite dans une histoire souvent en demi-teinte.

Les avis de Cynthia,
Merci à l'éditeur et l'auteur.
Avis aux participantes de A la découverte des éditions Luce Wilquin : je fais voyager ce recueil

Grâce à Flo, j'ai eu en même temps l'occasion de découvrir

Nuageux à serein
Patrick Dupuis
Editions Luce Wilquin, 2009

 Chez Magali Duru, entretien avec Patrick Dupuis et présentation du recueil.

Beaucoup de couples, bien sûr, de tous âges d'ailleurs (La nouvelle), en cours de séparation (Adultère) ou de constitution (Appartements à louer), la vieillesse et ses aléas joliment vue dans Un train pour Bruxelles, l'immigration (Le bac à sable). Plus cruelles (Auto-stop, Le chiffre d'affaires du magasin), encore un éventail d'histoires parfois tendres, ouvertes sur l'espoir,"Nuageux à serein", quoi.

Deux jolis recueils soignés, bien écrits, à découvrir.

lundi 5 novembre 2012

La déesse des petites victoires

La déesse des petites victoires
Yannick Grannec
Anne Carrière, 2012



Plus d'un demi-siècle dans l'intimité d'un génie, ce n'est pas facile tous les jours. Adèle Gödel, maintenant une vieille femme malade, se souvient de sa jeunesse viennoise, sa rencontre avec le mathématicien Kurt Gödel, leur fuite aux États Unis au début des années quarante, leur vie à Princeton, où habitaient aussi les Oppenheimer, Einstein, et tant d'autres.
Dans sa chambre de maison de retraite, se présente la jeune Anna Roth, en mission pour récupérer les archives de Kurt Gödel.

Sans surprise, c'est d'abord pour découvrir la vie de Gödel que j'ai voulu lire ce roman. Un matheux assez complexe, déjà croisé dans Logicomics, une BD plutôt axée sur la vie de Bertrand Russell. Mission accomplie, même si je regrette qu'il n'y ait finalement pas assez de maths dans le roman. J'aurais aimé en savoir plus sur ses recherches, ses découvertes, les conséquences. Disons que c'est du tellement costaud qu'il ne valait sans doute mieux pas, et je sens que je dois être la seule à émettre ce bémol.

Kurt Gödel est présenté comme un "taiseux asocial", un peu paranoïaque parfois, souffrant de dépression, un peu ours, égocentrique, et j'en passe. Sa femme, qui n'aura pas d'enfant, lui servira d'infirmière et de mère. Même si Gödel avait une mère très possessive... On peut s'étonner qu'Adèle ait supporté Kurt tant d'années, puis accepter de considérer ce roman comme une histoire d'amour assez compliquée quand même.

Anna Roth traîne aussi quelques casseroles psychologiques derrière elle et on découvre sa crainte de connaître les mêmes tourments qu'Adèle dans sa vie sentimentale. Un personnage de roman, bien sûr, mais fallait-il cette résonance entre elle et Adèle? En tout cas l'évolution des relations Adèle-Anna, même prévisible, est passionnante.
Tout aussi intéressantes les parties consacrées à la vie des Gödel, avec une mention spéciale pour Einstein, un drôle de personnage, fort bien rendu.

Ne pas oublier de lire les notes en fin de roman, et la délicieuse Note de l'auteur, qui font la part entre vérité et fiction.

Un bon roman, bien écrit, fort agréable à lire, que j'ai dévoré sans problème. Yannick Grannec a réussi à rendre ses personnages attachants et à ne pas oublier les notes d'humour nécessaires.

"J'avais fondé ma vie sur une seule personne.Je ne sais toujours pas si c'était une preuve d'amour ou de bêtise absolue."

"- Que vais-je devenir, Adèle?
J'aurais tant voulu entendre un "nous". Ou poser cette question pour me soumettre à sa réponse."

Les avis sur Babelio

vendredi 2 novembre 2012

Les mâles sans cervelle font les meilleurs amants

Les mâles sans cervelle font les meilleurs amants
... et autres curiosités zoologiques
Marty Crump
Robert Laffont, 2008






Si vous êtes une jeune dame mante religieuse bien sous tous rapports, apprenez que "les mouvements copulatoires sont contrôlés par des tissus nerveux situés dans l'abdomen plutôt que par la tête.Chez certaines espèces, les mâles vont même s'accoupler plus efficacement une fois décapités. Pourquoi? Parce qu'il y a, dans la tête du mâle, un nerf qui l'empêche de copuler tant que l'étreinte n'est pas sûre. Si on enlève ce nerf, ce qui se produit quand la femelle lui arrache la tête, le contrôle nerveux disparaît. Résultat : une copulation à répétition."

Voilà donc l'explication du titre, petits coquinous ! Marty Crump, zoologiste, professeur à l'université de l'Arizona, raconte de façon vivante et claire les mille et une façons pour les bestioles d'arriver à leurs fins, à savoir, perpétuer ses propres gènes. Foin de tout romantisme!

Ensuite, arrivent les bébés. Qui va s'en occuper? Eh bien, le monde animal fait preuve de beaucoup d'imagination. Parfois le papa, en l'absence définitive de la maman... Mais j'avoue que l'histoire de la maman kangourou et ses deux sortes de lait maternel en simultané pour ses deux enfants de niveaux de développement différents, m'a laissée sans voix.

Suivent des chapitres sur nourriture, défense ou protection, et communication, et là aussi, que de surprises!

Un bouquin comme j'aime en lire de temps en temps, fort agréable à lire et  instructif, ce qui ne gâte rien. Si les aventures de Christian G. vous laissent dubitatives, venez découvrir qu'avec les animaux la réalité dépasse l'imagination.