vendredi 30 décembre 2016

L'heure du bilan?

Celles (pas d'hommes je crois) qui me connaissent sur Goodreads savent que je lis vraiment beaucoup et que je ne parle pas de tout sur ce blog (manquent bien des BD et autres romans ou non fictions, non que je ne les aie pas aimés, mais pfff, flemme d'écrire un billet)(à moins d'en concocter parlant rapidement de plusieurs lectures? à voir). Cela dépasse largement 200 (mais d'autres lectrices boxent dans la même catégorie) et correspond à une avidité déjà présente avant le blog. Donc sans rapport avec activité professionnelle, vacances, sorties diverses. Une seule constante : pas de télévision (et pas de p'tiots). Notons juste 79 auteurs féminins (pas mal, tiens! car je ne le fais pas exprès) , 56 BD ou romans graphiques et 52 non fictions.

Cette année j'ai eu envie de fouiner dans la catégorie coups de cœurs du blog, récente ou pas, en sélectionnant ce qui mérite (à mon avis) un coup de projecteur supplémentaire.

Catégorie 'vous n'en entendrez plus parler ici parce que je pense avoir lu tout ce qui est paru ou traduit en français'
Wallace Stegner  La montagne en sucre    Angle d'équilibre   Le goût sucré des pommes sauvages  La vie obstinée    Lettres pour le monde sauvage     En lieu sûr
Edward Abbey   Un fou ordinaire    Le feu sur la montagne    Le gang de la clé à molette  Désert solitaire 
  Le retour du gang de la clé à molette     Seuls sont les indomptés


Catégorie 'livres de la rentrée littéraire qu'on n'a pas assez vus sur les blogs'
Anatomie d'un soldat , Double nationalité , Marcher droit, tourner en rond, Watership Down, Une singularité nue (je m'arrête à 5)

  • Catégorie 'livre moins récent mais genre grande claque à lire absolument'
  • Défaite des maîtres et possesseurs de Vincent Message

Catégorie 'l'auteur a du talent, de l'humour, du sérieux, se renouvelle, en plus en vrai c'est un type bien, il se lance dans des rêves impossibles mais qu'il commence déjà à bien réaliser, et j'ai lu tous ses romans'

  • Liste forcément non exhaustive, et partiale.

Il me reste à vous souhaiter un beau passage de 2016 à 2017 (pfff, l'auteur de Watership Down vient de décéder, ça attriste), et une année 2017 un peu plus 'peace and love' dans le monde (on peut rêver - et commencer autour de soi)

mais c'est pas gagné, rien qu'avec mes chats...

mardi 27 décembre 2016

Du vent

Du vent
Xavier Hanotte
Belfond, 2016


Le billet de Yv m'avait convaincue, surtout que je gardais un excellent souvenir de Ours toujours, du même Hanotte. L'Irrégulière a confirmé mon intuition.

Tout d'abord je ne peux qu'admirer le travail du concepteur de la couverture, absolument raccord avec le contenu, et sans trop en dire.

Tout en occupant un travail de correcteur dans une administration bruxelloise, Jérôme Walque écrit des romans, du solide, pas forcément dans l'air du temps. Mais il est doté d'un vieil ami, Jérémie, à qui il ne peut refuser de l'aide. Alors tout en poursuivant son projet de biographie romancée de Marcus Aemilius Lepidus (dit Lepide), membre d'un triumvirat romain avec Antoine et Octave, il se lance -sous la signature de Jérémie- dans l'écriture d'un roman différent, où le lieutenant Bénédicte Gardier tombe dans un guet-apens et se retrouve expertement ficelée.

L'on pourrait penser qu'un roman contenant des romans en cours d'écriture n'a rien de nouveau (tout en restant une bonne idée), sauf qu'avec l'arrivée d'un couple de petits escrocs mystérieux et d'un non moins étrange policier, l'affaire se corse, les narrations se répondent, et le pauvre Jérôme (et le lecteur) se trouve embringué dans une folle histoire.

Dire que voilà un roman bien ficelé serait un poil attendu, mais demeure la vérité. Je me suis follement amusée avec les aventures de Jérôme et Bénédicte, l'histoire de Lépide demeurant d'un classicisme moins débridé, forcément, et méditation sur le pouvoir et la vie.

Allez, des extraits

"Je ris.
'Le pouvoir, Octave, c'est du vent!'
Il ferme les yeux, pose sa tête en sueur sur un coussin de brocart.
' Le vent, Lépide, souffle où il veut.'
D'un geste las, il me congédie.
Le triumvirat a vécu.
Devant la tente, je respire enfin. Le poids qui m'écrasait les épaules depuis si longtemps s'est envolé. Il me semble voir un aigle tournoyer très haut, là-bas, dans le soleil."

"Selon lui [Jérémie], tout écrivain digne de ce nom devait suivre sa pente naturelle et sacrifier la sécurité au profit de l'audace créatrice. Au lieu de peaufiner en amateur, avec une maniaquerie de miniaturiste, ses gros romans tellement étrangers à l'air du temps, pourquoi Jérôme ne se lançait-il pas dans la grande foire d'empoigne du monde littéraire, où vie quotidienne et écriture se mêlaient dans une exaltante étreinte?
De son côté, Jérôme s'attristait de voir Jérémie donner aux imprimeurs une succession de produits semi-finis, de plus en plus ressemblants sinon redondants, en tout cas bien inférieurs à ce dont il le pensait capable - même si, en son for intérieur, il lui arrivait de douter que son ami pût encore concocter autre chose que les bluettes sentimentales dont il s'était fait, sous son vrai nom, le fournisseur patenté et satisfait."

vendredi 23 décembre 2016

Le goût des livres

Noël approche, alors belle fête, chers visiteurs

et je vous présente un petit livre sur notre passion commune.
Non, il ne s'agit pas du blog d'Aifelle, mais d'un titre de la collection Le goût de chez Mercure de France. Collection que je découvre, d'ailleurs.

Le goût des livres
Textes choisis et présentés par Olivier Bessard-Banquy
Mercure de France, 2016


Quarante textes assez courts (une à trois pages), chacun précédé d'une brève présentation de son auteur (ce qui se révèle utile quand il s'agit d'un inconnu) et suivi d'un commentaire souvent malicieux du compilateur desdits textes, voilà de quoi ravir l'amateur de livres sur les livres! L'on y croise les livres, biens sûr, les bouquinistes, les libraires, les bibliophiles et bibliomanes, leurs femmes éventuelles, et bien sûr, les lecteurs.
J'y ai retrouvé deux passages de l'excellent Librairies, corps et âmes et l'un tiré de Des bibliothèques pleines de fantômes, de Jacques Bonnet.

Idéal pour lire en picorant, une ou deux minutes par ci par là.

Présentation de l'éditeur :
Jadis objet de luxe, aujourd’hui le livre se prête, se corne, se met dans une poche, se donne, se jette… Il délasse, il enseigne, permet, avec Tocqueville, de comprendre le fonctionnement de la démocratie ou, avec Proust, de plonger dans les arcanes de la jalousie. L'essor du numérique peut-il vraiment mettre un terme au règne de ce très bel objet, matériel sinon sensuel ? Le livre est un monde en soi : du papier, une reliure, des odeurs. Les écrivains sont les premiers à le reconnaître et à lui tresser des lauriers. Lecteur occasionnel ou boulimique, chacun satisfait son goût des livres à sa manière. Lorsque ce goût devient excessif, il peut même conduire à la bibliomanie, à l'obsession, à l'achat compulsif, à la folie. Des bibliophiles aux bibliotoqués, balade parmi les livres en compagnie de Paul Valéry, Albert Cim, Jules Lemaître, Charles Nodier, Gustave Flaubert, Jules Janin, Alain Nadaud, Jean-Jacques Brochier, Philippe Meyer, Éric Chevillard, Jacques Bonnet, François Bon et bien d’autres...

mercredi 21 décembre 2016

Anatomie d'un soldat

Anatomie d'un soldat
Harry Parker
Christian Bourgois, 2016
Traduit par Christine Laferrière


Voilà semble-t-il l'exemple parfait de roman noyé sous les parutions de la rentrée, dont - à ma connaissance- les blogs ont peu parlé, et qui se révèle formidable! (merci aux deux blogs cités en fin de billet, car sans vous...)(merci aussi à la bibli)

Peut-être le sujet n'est-il pas très attirant a priori. La guerre, les soldats, un pays lointain. Chaud et poussiéreux, où les soldats britanniques envoyés là-bas risquent la mort à chaque sortie. Mais aussi des habitants tâchant de continuer à vivre en espérant un avenir moins mouvementé (mention spéciale à Kushan Hhan) et d'autres considérant les étrangers 'infidèles' comme des cibles à éliminer. Un pays jamais nommé, mais ces cerfs volants évoquent-ils l'Afghanistan?

Sur le terrain, la tension est palpable, le danger rode à chaque pas, d'ailleurs le héros, le capitaine Tom Barnes, va sauter sur une mine artisanale et sera rapatrié en Angleterre.

Mais, et j'aurais dû en parler d'entrée, ce qui donne son originalité au roman, ce sont les quarante-cinq objets racontant l'histoire, pas toujours chronologiquement : le garrot sauvant la vie de Tom, une balle anonyme, un béret, une arme, une mine même, une simple bicyclette, un tapis, un lit, un sac à main, un miroir, une prothèse, une photo, une scie (et une goutte d'eau!)... Ces objets sans sentiments, forcément, ne sont ni aveugles ni sourds, et donnent à connaître des humains attachants par leurs gestes et surtout leurs dialogues.

C'est absolument passionnant; l'auteur a vécu la plus grande partie de ce qu'il raconte, mais je garantis qu'il ne tombe pas dans le pathos. L'émotion existe, mais pas de violons sirupeux là-dedans.

"Si nous ne pouvons pas faire confiance, alors nous n'avons rien, s'est-il dit".

Je me tâte, coup de coeur ou pas? Hum, disons oh que oui!

Les avis de Jérôme, clara,

Et encore une pépite pour challenge Lire sous la contrainte

lundi 19 décembre 2016

Oui mon commandant

Oui mon commandant
Amadou Hampâté Bâ
Actes sud, 1994


A la fin de Amkoullel, l'enfant peul, l'on quittait Amadou Hampâté Bâ, âgé de 22 ans et affecté en Haute-Volta (Burkina-Faso) avec le titre d’'écrivain temporaire essentiellement précaire et révocable'. Autant dire le bas de l'échelle  parmi les fonctionnaires de l'administration coloniale.

Ce deuxième volume s'étend sur une dizaine d'années, au cours desquelles l'auteur occupera différents postes dans la sous-région, et sera donc un témoin incomparable du fonctionnement de l'administration et des rapports parfois tendus avec les autorités traditionnelles. Anecdotes amusantes ou plus tragiques, et surtout portraits de commandants de cercle ou gouverneurs, certains justes et honnêtes, d'autres plus difficiles à côtoyer. La population n'hésitait pas à les affubler souvent de surnoms savoureux.

L'auteur demeure assez réservé sur sa vie personnelle, suivant en cela les habitudes peuls. Il va se marier avec une cousine (mariage arrangé et plutôt heureux) et prendra une seconde épouse à l'insu de son plein gré (si!). Rien que ces deux mariages en disent beaucoup sur lui et les traditions. Obéissance aux parents, respect à la fois des traditions et des anciens, voilà qui contribue à entériner des décisions non prises par lui au départ.

Auparavant il emmagasinait dans sa mémoire les contes et traditions entendues dans son enfance, mais à partir du voyage vers son premier poste il commence à noter par écrit, rencontrant, interrogeant, ne ratant aucune occasion, et acceptant l'aide de ses amis éloignés géographiquement.

Un rare portrait de lui au départ, alors qu'un griot veut chanter ses louanges (l'auteur explique bien aussi ce qu'est un griot)
"C'est une 'oreille rouge', un Peul, un homme ni blanc ni noir."
"Il est jeune. Il vient seulement d'être nommé, mais sa mère semble aisée; elle a dû lui donner une bonne provision d'argent. Il aime écouter les épopées. Il sait lire le Coran et n'est pas licencieux. Il n'est pas distant, mais c'est un Peul..."

Ses différentes fonctions lui permettent d'observer mais aussi parfois d'aplanit des difficultés et d'éviter que des situations ne s'enveniment.

La fin du livre est presque consacrée à l'enseignement de son maître Tierno Bokar, "enseignements d'amour et de tolérance".

Après un rapide parcours historique, il peut donner son avis sur la colonisation (et post colonisation). Il reconnait l'intérêt du français comme "langue de communication universelle", mais n'oublions pas que les Africains connaissent en général plusieurs langues autres que le français ou l'anglais, leur permettant de communiquer, et
"Les règles qui président aux échanges internationaux restent les mêmes dans les grandes lignes : acheter le moins cher possible les matières premières, et revendre le plus cher possible les produits manufacturés."

J'ai adoré aussi retrouver des expressions encore utilisées de nos jours, comme 'Comment va ton étranger' ou 'demander la route'.

Je participe encore au challenge Lire sous la contrainte
et  Lire le monde

vendredi 16 décembre 2016

Double nationalité

Double nationalité
Nina Yargekov
POL, 2016



Pourquoi avoir emprunté ce (gros-près de 700 pages) roman à la bibliothèque?
Réponse : l'intrigante quatrième de couverture! (parce que je ne connais pas son auteur, et je n'ai pas l'impression de l'avoir vu sur les blogs que je fréquente, donc là impression de future totale découverte)(et ça fait du bien)

Vous vous réveillez dans un aéroport.
Vous ne savez pas qui vous êtes ni où vous allez. 
Vous avez dans votre sac deux passeports et une lingette rince-doigts.
Vous portez un diadème scintillant et vous êtes maquillée comme une voiture volée.
Vous connaissez par coeur toutes les chansons d’Enrico Macias.
Vous êtes une fille rationnelle.
Que faites-vous ?

Maintenant, après quelques jours de lecture effrénée, je découvre que plein de journalistes en ont parlé et qu'il a obtenu le prix de Flore. Et que l'auteur a 36 ans et est d'origine hongroise.

Bon, là, maintenant, si vous voulez vivre la même expérience que moi, foncez sur ce roman!!!
Si vous voulez en savoir un peu plus, continuez, je vais essayer de ne pas tout raconter non plus.

Narration à la deuxième personne du pluriel, donc. L'on découvre que la jeune femme narratrice est trentenaire, possède deux passeports, l'un français l'autre yazige, est traductrice interprète et tente de retrouver qui elle est, quête identitaire menée au moyen d'un joyeux délire et d'une logique entraînante. Je préviens, c'est souvent un poil barré (comme j'aime), et très très efficace, parce que là l'on est amené à s'interroger sur ce qui fait qu'on est de telle ou telle nationalité à l'intérieur même, hein, pas juste un document d'identité. La narratrice fouine à fond, s'interroge, discute, argumente, c'est parfois fou, mais le lecteur, lui, est confronté à justement ces problèmes d'actualité sur la citoyenneté, la nationalité et l'immigration. Et en prend parfois la face. On se croit exempt de telles façons de penser ou de réagir, mais mais...en fouillant bien, hein?

Nul n'est épargné, ni les français ni les yaziges, et bien sûr pas l'héroïne. Qui finit en milieu de roman par partir sur sa terre non natale mais d'origine, retrouver sa famille, et là le vrai nom du pays est donné, c'est la France qui en change. Le tourbillon dans la tête continue, les points de vue s'affrontent et varient, je ne dis rien de la fin, très futée.

Voilà, je n'en ai pas trop dit; c'est drôle (oui, il y a eu pas mal de hyène hilare là-dedans, copyright Fanja), intelligent, pas toujours politiquement correct, passionnant en tout cas.

Quelques passages (mais je dois faire attention, sorti du contexte c'est souvent risqué tellement les idées déboulent et sont battues souvent en brèche après)

"Au vu de ce qui précède, il va sans dire que le statut de réfugié politique décroche haut la main la médaille d'or de la migration, juste devant les réfugiés de guerre (médaille d'argent) et les réfugiés climatiques (médaille de bronze). Bien sûr les migrants économiques en quête d’une vie meilleure demeurent les bienvenus, la France est grande et généreuse et son métissage est sa richesse et les personnes originaires de pays démocratiques et/ou en paix sont très intéressantes aussi, mais il n'y avait que trois places sur le podium, désolée."

"Ils sont comme ces hommes inconscients d'être des hommes, ah bon se promener en short à deux heures du matin sans avoir peur sans surveiller qui vient en face sans guetter le moindre bruit ne serait pas une expérience universellement partageable vraiment je suis étonné je ne comprends pas.Quand on est une femme on sait qu'on l'est.On s'en rend compte tout le temps."

Je passe hélas sur les aventures de la peluche bilingue Petitetaupe et du basilic poméranien, mais croyez-moi, cette fille est parfois sévèrement fêlée...

"Habituellement on pense une fille une identité, avec des racines sagement rangées dans le pot patriotique. Mais vous c'est différent. Parce que vous, il y a une plante et deux pots et plein de racines dans tous les sens, vous êtes superposée, complexe et rhizomique, bizarre, libre et inclassable, vous n'êtes ni déracinée ni replantée, ni infidèle ni déloyale, les deux pays sont inscrits en vous et vous êtes inscrite dans les deux pays, vous vous affranchissez des clivages binaires, vous échappez aux petites boîtes"

L'avis de diacritik (qui n'en dit pas trop non plus)(les journalistes nombreux racontent tout ou presque comme d'hab', mais leurs écrits sont enthousiastes et bien faits)

mercredi 14 décembre 2016

Carnets photographiques Terres authentiques

Carnets photographiques
Philippe Decressac
Collection Terres authentiques
Tohubohu, 2016



Quand on m'a proposé en SP un coffret sur le Québec, l'Islande et la Laponie, je n'ai pas réfléchi trop longtemps (rappel : mes dernières vacances en Islande et Groenland, et rêves arctiques toujours, le grand nord, les ours blancs, les aurores boréales, tout ça...)

Présentation de l'auteur
"Photographe passionné, arpenteur inlassable des espaces encore sauvages, Philippe Decressac comme Ansel Adams, s’est concentré sur la photo de nature. Depuis près de 30 ans qu’il parcourt les grands espaces terrestres et sous-marins, il témoigne d’une nature encore spectaculaire mais de plus en plus menacée par le cancer de la pollution.“Terres authentiques” est son septième ouvrage."
 (j'ai appris aussi qu'il est et fut cadre dirigeant dans différents grands groupes)

En lien le site de l'éditeur, avec une bande annonce très bien faite qui en dira beaucoup plus! Et mieux.

Mon humble avis : le genre de livres à effet wahou incontournable. Plein les yeux!

J'a commencé par la Laponie, ses grands espaces paraissant peu accueillants, mais à présence humaine bien intégrée.
Puis l'Islande, où j'ai retrouvé les magnifiques étendues, ainsi que des photos d'oiseaux qui m'ont fait baver d'envie (oui faut de la patience et du matériel, mais ces oiseaux sont observables, je confirme)
Et puis le Québec, que je ne connais pas (encore), le plus coloré des trois, grâce aux forêts en automne, pour terminer dans le grand nord, avec le roi du coin : l'ours blanc!
"L'ours blanc est aussi beau que redoutable. Il ne craint rien ni personne et ne voit en vous qu'un repas potentiel. L'approche doit donc se faire avec une bonne distance de sécurité et un guide armé. Des jumelles et des objectifs à très fort grossissement sont dons indispensables pour capter ces moments de pure magie."

En chipotant, on pourrait demander plus de texte, de cartes et d'explications techniques, mais c'est sûr qu'on sortirait de la ligne des carnets photographiques. Après tout, rêver sur des photos toutes plus réussies les unes que les autres, c'est l'objectif (et en restant au chaud)

lundi 12 décembre 2016

Amkoullel, l'enfant peul

Amkoullel, l'enfant peul
Amadou Hampâté Bâ
Babel, 2013





Un peu sur l'auteur : Né en 1900 ou 1901 à Bandiagara au Mali, décédé en 1991 à Abidjan, solide défenseur de la tradition orale africaine, collaborateur de Théodore Monod, membre du conseil exécutif de l'UNESCO. Plus de détails facilement sur internet.

Amkoullel, l'enfant peul, est le premier volume de ses Mémoires, couvrant ses vingt premières années, et situées en gros dans les actuels Mali et Burkina Faso.
http://lobidecouvertes.wifeo.com/7-jours-burkina-faso-mali.php
Mais on n'a pas vraiment besoin de carte, juste savoir que certains déplacements se font en bateau sur le fleuve Niger. D'ailleurs les gens bougent énormément, n'hésitant pas à parcourir des centaines de kilomètres, en bateau, donc, mais aussi en train, et bien sûr à pied, accompagnés ou pas de bétail, en caravane généralement.

Hampaté Bâ est issu de familles importantes, toucouleurs ou peuls, ayant  à diverses époques puissance et richesse. Mais la roue peut vite tourner. L'on croisera dans ce livre divers personnages dont la bonne fortune ne durera pas, sombrant dans la misère ou peut-être un apparent déclassement. car dans cette Afrique là, les classes sont importantes, même si "Il est plus honteux d'être ingrat que d'être garçon boucher".
Prenons l'exemple de Tidjani, père de l'auteur (plus exactement le deuxième mari de sa mère, mais qui l'a pris comme son fils aîné, au grand dam de sa propre famille)(le père, nommé Hampâté est décédé quand l'enfant avait 3 ans)
"Il n'avait pas seulement appris, dans son jeune âge, à manier pelle, pioche, hache et houe de cultivateur, il n'était pas seulement un tireur émérite et un cavalier expert, il savait aussi, chose plus inattendue pour le lecteur européen, coudre et broder à la manière des métis arabes de Tombouctou. Dans les pays ouest-africains situés au sud du Sahara, les nobles toucouleurs et peuls n’avaient pas le droit de pratiquer les travaux manuels propres aux castes artisanales (forgeronnerie, tissage, cordonnerie, travail du bois, etc.) mais il leur était permis de broder et de vendre leur travail. Tierno Bokar lui-même était un remarquable brodeur. Plus tard j'apprendrai moi aussi cet art et il m'arrivera de broder à la main de magnifiques boubous qui, aujourd'hui, seraient hors de prix!"

https://fr.pinterest.com/explore/boubou-africain-homme-947385650675/
Pour ceux qui ne le savent pas, un peul se doit d'avoir au moins quelques têtes de bétail.Le grand père maternel de l'auteur ayant tout abandonné pour suivre l'enseignement  d'un grand maître de confrérie islamique, refuse richesse et pouvoir car "à un peul qui a abandonné ses troupeaux, on ne peut rien donner qui vaille davantage."

Amadou Hampaté Bâ commence par raconter les histoires de ses grands parents et parents, là surtout ne pas lâcher prise, et ne pas s'inquiéter si tout se mélange un peu, car on retombe toujours sur ses pieds et la compréhension est aisée. Mais en Afrique, une famille ce n'est pas les parents et les enfants, les oncles et tantes comptent et parfois plus, y compris les amis des parents, etc. Sans parler de la polygamie et des remariages. Cependant dans ce livre de souvenirs le gamin est toujours sous la protection d'une adulte et la concession abrite beaucoup de monde.

"J'étais encore trop petit pour qu'on puisse me porter dans le dos à la manière des femmes africaines. Ma mère se procura une grande calebasse, la bourra de linges et d'étoffes douces et chaudes, et m'y coucha comme dans un berceau. Ma 'servante-mère' Niélé posa la calebasse sur sa tête et nous primes la route." Le petit a 41 jours, et il s'agit de le présenter à sa grand mère, qui a suivi ses troupeaux en transhumance à 70 kilomètres de là.

L'une des figures inoubliables sera celle de Kadidja, la mère de l'auteur, femme intelligente et tenace, quittant tout pour retrouver son mari emprisonné, habile et active commerçante. Mais gare : chez les peuls on doit obéir à sa mère, impossible de transiger, et, jeune homme, Hampaté Bâ s'y pliera, acceptant qu'un changement d'orientation ne lui a pas apporté de mal. Pas question pour une mère non plus de montrer ses sentiments à l'égard de ses enfants en public, cependant la séparation entre mère et jeune homme à la fin du volume est une des plus belles pages sur l'amour entre mère et fils (tout en retenue!).

Mais avant cela, le livre offre un témoignage remarquable sur les associations d'enfants d'âges équivalents, les waaldé (en langue peul), extrêmement codifiées, copiant le monde adulte.
"Certains lecteurs occidentaux s'étonneront peut-être que des gamins d'une moyenne d'âge de dix à douze ans puissent tenir des réunions de façon aussi réglementaire et en tenant un tel langage. C'est que tout ce que nous faisions tendait à imiter le comportement des adultes, et depuis notre âge le plus tendre le milieu dans lequel nous baignions était celui du verbe. Il ne se tenait pas de réunion, de palabre ni d'assemblée de justice (sauf les assemblées de guerre ou les réunions des sociétés secrètes) sans que nous y assistions, à condition de rester tranquilles et silencieux. Le langage d'alors était fleuri, exubérant, chargé d'images évocatrices, et les enfants, qui n'avaient ni leurs oreilles ni leur langue dans leur poche, n'avaient aucune peine à le reproduire;(...) La vie des enfants dans les association d'âge constituait, en fait, un véritable apprentissage de la vie collective et des responsabilités, sous le regard discret mais vigilant des aînés qui en assuraient le parrainage."
Plus loin, en avançant en âge, l'association doit "faire face aux obligations traditionnelles d'entraide dévolues aux jeunes de la communauté : aide au crépissage des maisons, aides diverses aux personnes âgées et isolées, etc."

Alors, enfance idyllique? Pas vraiment, avec son lot de décès, de déplacements forcés, mais globalement le jeune Amadou s'en tire bien, avec de bons camarades n'hésitant pas à chaparder ou jouer les galopins...

Mais ce Mali de l'époque était un Mali colonial. C'est le moment de parler des Blancs- Blancs (les blancs-Noirs sont les africains européanisés), baptisés 'peaux allumées' car devenant rouges lorsqu'ils étaient contrariés. Nos héros connaîtront différentes sortes de commandants, ayant tout pouvoir, mais en usant avec plus ou moins de discernement.

Justement en parallèle à l'école coranique où l’enfant apprenait par coeur le Coran sans le comprendre, Hampaté Ba fut obligé de fréquenter l'école primaire de Bandiagara, et donc d'abord d'apprendre à parler le français. Sans grosse difficulté, sa mémoire étant exercée avec l'école coranique, et le fait que la plupart des enfants africains étaient déjà polyglottes, grâce aux nombreuses communautés ethniques cohabitant dans la même ville, alors le français en plus, c'était aisé.[note : même maintenant un Africain parle souvent plusieurs langues]
J'ai découvert avec étonnement la méthode de l'instituteur, qui ne traduisait rien en langue locale, et demandait à l'élève de dire tout haut ses gestes et actions au moment même, par exemple 'le maître m'a dit de ... je me lève, je vais au tableau, etc."Je trouve cette méthode vraiment intéressante (et c'était il y a un siècle!)

Arrive la guerre de 14-18 et là on recrute! La solde des soldats indigènes est la moitié de celle de leurs homologues français, de même les pensions.
"L'un des effets majeurs, quoique peu connu, de la guerre de 1914 a été de provoquer la première grande rupture dans la transmission orale des connaissances traditionnelles." A cause des morts, des vagues d'exode. Le "mythe de l'homme blanc en tant qu'être invincible et sans défauts" en a aussi pris un coup, au retour des combattants du front.

Au travers de ces pages, on découvre aussi le jeune garçon avide d'écouter les contes et histoires traditionnels, jusqu'à prendre la décision de les noter; ce qui deviendra l'oeuvre importance de sa vie.

Je ne peux terminer sans signaler la façon extraordinaire qu' Hampaté Ba de présenter les événements et personnages, tâchant de mettre en valeur ce que chacun a de positif (sans passer forcément sous silence le négatif, mais essayant de garder une balance).
"Les deux héros s'étaient comportés  à la manière de nos chevaliers africains d'antan, qui savaient se battre atrocement mais ne se déshonoraient jamais, car pour eux la dignité de leur ennemi était aussi précieuse que la leur."
"Tidjani Tall avait compris que la terreur n'assied pas l'autorité sur une base solide et que le meilleur moyen d'assurer la paix dans le pays reposait plutôt sur le pardon et le respect de la vie des autres, de leurs biens et de leurs coutumes."

Les avis de Gangoueus,

Ce livre ira parfaitement dans Lire le monde


et le challenge Lire sous la contrainte puisque le titre commence par une voyelle (ou )

vendredi 9 décembre 2016

Alex au pays des chiffres

Alex au pays des chiffres
Une plongée dans l'univers des mathématiques
Alex Bellos
Alex's adventures in Numberland, 2010
Champs Sciences, Flammarion 2015
Traduit par Anatole Muchnik



Au moment de démarrer ce billet, je suis prête à parier que je vais réveiller chez certains de mes charmants visiteurs des souvenirs horribles (enfin, chez ceux qui n'auront pas cliqué à toute main sur 'quitter')

Et pourtant, ce livre est génial et garanti sans prise de tête (on peut toujours zapper un passage délicat), bourré d'informations connues ou moins connues (oui, même moi j'ai appris plein de faits délectables) et évidemment non sans humour (l'auteur est anglais).
Auteur qui a donné de sa personne, voyageant, rencontrant des scientifiques, et même se livrant à une expérience en achetant du pain.

Ne nous leurrons pas, ça va parler de mathématiques, et beaucoup beaucoup. Mais tout doucement d'abord, avec le chapitre zéro où l'on découvre les Munduruku au fin fond de l'Amazonie, qui ne connaissent pas plus de cinq nombres et se débrouillent très bien ainsi. (Au cas où vous rêveriez d'habiter là-bas, il y a risque de manger de la grosse fourmi). S'ensuivent des recherches menées avec des neurobiologistes. Passionnant.

Puis au chapitre 1 suivant (oui, si on n'a pas de logique ici, alors où?), on compte, d'accord, mais comment compter, et après tout quelle base utilise-t-on? La base 10 pour nous, sans trop y penser, mais l'informatique repose sur un langage composé de 0 et de 1 (binaire). Ce chapitre propose tout un grand passage sur le boulier, en particulier les concours de vitesse au Japon, et j'étais scotchée!

Le chapitre 2 fera redécouvrir Pythagore à ceux qui l'auraient oublié, et, à mon grand étonnement, j'ai découvert que "l'origami se situe à la pointe des mathématiques", avec des applications dans l'industrie!

Toujours là? Bien.

Le classique chapitre sur le zéro conduit à découvrir les 'mathématiques védiques' et des méthodes de multiplication. Y compris retrouver ses tables de multiplication en utilisant mains et doigts... (on ne parle pas de la méthode dite per gelosia, qui passionnait mes petits loulous à une époque)

A propos de petits loulous, une activité qui souvent marchait bien consistait à leur faire mesurer (à l'arrache souvent) le 'tour' d'un objet cylindrique et son diamètre, diviser l'un par l'autre (à la calculatrice, je ne veux pas être accusée de maltraitance sur mineurs) et ... oui, il y a du pi la-dedans! Comme je l'ai entendu (en buvant du petit lait) 'mais madame, ils l'ont fait exprès?'.
La recherche au cours des siècles des chiffres de pi après la virgule est une véritable quête.

J'en termine avec les petits loulous, qui se voyaient proposer au premier cours (après en avoir terminé avec la bureaucratie dudit premier cours) un petit apéritif (que je vous invite à goûter)(allez y, je ne saurai même pas si vous avez besoin d'une calculatrice)
Choisissez un nombre de trois chiffres (le premier et le dernier doivent avoir au moins une différence de 2), inversez-le, soustrayez le plus petit au plus grand.
Vous obtenez un nombre de trois chiffres, alors, pareil, on l'inverse, et on lui ajoute cet inverse;
Et (tadam!) je sais combien vous trouvez!
Mais comment est-ce possible? Il existe une explication, mais pour cela il va falloir mettre les mains dans le cambouis, et les lettres! (horresco referens!)

Le chapitre 5 voit donc apparaître les x, les logarithmes, et pour les nostalgiques assez âgés pour s'en souvenir, les tables de logs et les règles à calcul (oui, il y a eu une vie avant les calculatrices)
"Voilà plus de trente ans que la règle à calcul a disparu, et cela rend d'autant plus surprenant le constat qu'il se trouve dans le monde moderne un milieu où son usage reste courant : celui des pilotes d'avion. La règle à calcul du pilote, de forme circulaire, s'appelle 'calculateur de navigation' et mesure la vitesse, la distance, le temps, la consommation de carburant, la température et la densité de l'air. Il faut impérativement en connaître le maniement pour décrocher son brevet de pilote.(...) Cette exigence répond au fait que tout pilote doit savoir opérer sur de petits avions sans ordinateur de bord."

Le moment est venu de souffler un peu avec le chapitre 6 où l'on va jouer (un peu). Sudokus, tangrams, taquins, etc.

Je passe vite sur les suites, les nombres premiers, le nombre d'or (là aussi une anecdote avec mes loulous mais je file), pour attaquer le chapitre 9 et le hasard. Attendez-vous à être bousculés dans vos intuitions, et sachez que les casinos et les loteries gagent toujours à la fin, les machines sont ainsi programmées...(sauf si un matheux s'en mêle, mais je ne dévoilerai rien)
Encore une expérience sympa si vous avez 23 personnes sous la main (une classe, c'est bien). A votre avis, combien y a-t-il de 'chances' que deux soient nées le même jours de l'année? (le dit jour n'est pas fixé). Hé bien, plus d'une sur deux, étonnant, non? (je vous passe l'explication)

Puis arrivent les statistiques, là où l'auteur achète ses baguettes et le pèse, histoire de vérifier une 'loi normale'. Un poil technique, mais au détour d'une page j'ai découvert qu'existaient des gens (dont je fais partie, ouf!) qui visualisent "automatiquement et involontairement les nombres sous forme de cartographie mentale"

Dans le dernier chapitre, où les infinis et les géométries non euclidiennes demandent de s'accrocher un peu quand même, on rencontre une matheuse, Daina,  créant des ouvrages au crochet pour voir à quoi peuvent ressembler des plans hyperboliques. ("Le Pringle est une pomme chips à surface hyperbolique", et là on sent que l'auteur est pédagogue, mais on en cherche une sans bords)
Daina a donc crocheté sa surface."J'ai ressenti un petit frisson à l'idée que j'avais produit de mes mains une chose dont les ordinateurs n'étaient pas capables."(hé oui, les ordis, il leur faut des formules, et là, pas moyen d'en avoir!)
"Daina n'aurait probablement jamais songé au crochet hyperbolique si elle avait été un homme, et cela confère à ses inventions une réelle particularité dans l'histoire culturelle des mathématiques, où les femmes ont longtemps été sous-représentées."

Conclusion : si on sort de sa zone de confort, pour 10 euros, on a droit à une remise en forme de matière grise!

Lire sous la contrainte

mercredi 7 décembre 2016

Mr. North

Mr. North
Theophilus North, 1973
Thornton Wilder
Belfond, 2016
Traduit par Eric Chédaille



Allez, j'avoue tout de suite : ce roman fait partie de mes préférés depuis longtemps, et là , a-hum, c'est la troisième fois que je le lis, et j'ai saisi l'occasion de sa parution nouvelle pour le mettre en lumière. Oui, je sais, il y a tant de beaux roman à découvrir, alors pourquoi relire, hein? Pour savoir si le charme opère toujours? Pour passer encore du temps avec un vieil ami qui ne vous déçoit pas?

L'auteur, d'abord: né en 1897 dans le Wisconsin, il passe son enfance en chine et en Californie, a remporté trois Pulitzer et un National Book Award, et est décédé en 1975 dans le Connecticut. Il a écrit le scénario de L'ombre d'un doute (Hitchcock)

Le roman, ensuite:
En 1926, un jeune homme arrive à Newport (Rhode Island)(et hop pour un challenge états américains). Il vient de démissionner de l'enseignement, aspire à souffler quelque peu et finalement son temps d'armée à Newport quelques années auparavant lui a laissé de bons souvenirs de cette ville.
Originaire du Wisconsin (bien des éléments de la biographie de Wilder se retrouvent chez le narrateur!) et diplômé de Yale, Theophilus North doit gagner sa vie. Pour cela, il propose des cours de tennis aux enfants, ainsi que de diverses langues. Aux adultes, ce sera la lecture à domicile.
Toutes ces activités l'amènent à fréquenter différents milieux de Newport, des grandes familles riches et snobs à justement le petit peuple du personnel de maison, en passant par toutes les 'cités' de Newport, selon sa propre classification.

"Nous nous trouvons dans une petite province extra-territoriale, plus soucieuse des barrières sociales que ne l'était Versailles."

Notre jeune homme a des principes, garder un peu de liberté d'abord, et surtout observer une grande discrétion. Cette dernière qualité lui vaudra la confiance de bien des habitants rencontrés, et il se retrouvera à devoir conseiller, tirer d'affaire, bref, intervenir peu ou prou dans leur vie. La grande variété des histoires ainsi narrées est un des grands plaisirs de ce roman, ainsi que l'écriture fluide et élégante (bonne traduction, pour ce que j'en sais). Des moments plein d'humour, d'autres plus émouvants (ah l'histoire de Mino "Je n'ai jamais supporté de voir une expression d'accablement sur le visage d'une mère italienne").

Mais toutes ces histoires parlent-elles de personnages rencontrés par l'auteur?
"L'imagination se nourrit du souvenir. Si tel est leur désir, souvenir et imagination peuvent s'associer pour mettre en scène un bal des gens d maison, voire pour écrire un livre."

Les avis de Albertine, sharon,

lundi 5 décembre 2016

Une chasse au pouvoir

Une chasse au pouvoir
Chronique politique d'un village de France
Marie Desmartis
Anacharsis, 2012
Collection Les ethnographiques



Pourquoi ce livre? Ma bibli proposait quatre ou cinq livres de l'éditeur, choisi en décembre par Tête de lecture comme éditeur du mois, et ce titre était prometteur, voilà c'est tout.

De 2001 à 2006, Marie Desmartis a mené à Olignac (nom fictif donné au petit village landais concerné) une enquête/recherche dans le cadre de ses études. Elle connaissait déjà le village, dans lequel les élections municipales de 2001 avaient donné lieu à des surprises, puis à des réactions plus violentes (incendies). Elle va s'intéresser de plus près à l'histoire landaise, l'évolution d'une économie agro pastorale à une économie basée sur les plantations de pins, ainsi qu'aux changements dans la population d'Olignac durant les dernières décennies, qui pourraient aussi expliquer l'arrivée surprise (y compris la sienne!) à la mairie de Madame Fortier et son action en dépit de son peu de soutien à l'époque.
Elle assiste aux conseils municipaux, fréquentant surtout à son grand regret l'équipe municipale plus que les adversaires du maire.

Grâce sans doute à son "écriture subtile et entraînante", dixit dans la préface Alban Bensa, ce livre se lit 'comme un roman' et qui plus est un passionnant roman (parfois je devais me dire 'mais ce n'est pas un roman, le village et les habitants existent réellement!'). L'auteur reste centrée sur le village et, comme elle l'annonce dans son avant-propos, reconnaît qu’elle va forcément interagir sur le terrain, de par sa présence même. Préface et Avant-propos sont extrêmement intéressants, mais, comment dire, ont plus recours au jargon et sont moins fluides.
J'ai donc appris sur une discipline quasi inconnue de mes services, avec ses problèmes et ses limites, sur ce coin des Landes aussi, sur la politique locale et ses arcanes. Je recommande.

Un avis ici vraiment parfait!

L'occasion de découvrir l'éditeur du mois proposé par Tête de lecture (il existe un blog fait exprès!)

Et en plus je participe (encore!) au Lire sous la contrainte 

vendredi 2 décembre 2016

La ferme de cousine Judith

La ferme de cousine Judith
Cold Comfort Farm, 1932
Stella Gibbons
Belfond, 2016
Traduit par Iris Catella et Marie-Thérèse Baudron


Flora Poste est une toute jeune fraîche orpheline de dix-neuf ans, de peu de moyens financiers, et elle décide d'utiliser sa petite rente à loger chez un de ses nombreux cousins. Elle choisit les Starkadder, ceux de la ferme de Froid Accueil. (Tous les noms ou presque dans le roman sont de ce genre, et j'aurais préféré que l'on gardât le titre originel, au lieu d'une cousine Judith finalement à l'arrière plan, mais bon, ne chipotons pas).
Une ferme sombre, sale, une grand mère autoritaire et invisible, une cousine Judith dépressive, des cousins rustiques (ah Seth et Ruben!), la barque paraît chargée, mais le ton parodique, l'exagération plaisante, la fantaisie du tout emporte l'adhésion et l'on s'amuse beaucoup à suivre Flora dans ses tentatives de mettre de l'ordre là-dedans. Car Flora aime l'ordre, et au départ elle intervient dans ce but, et aussi pour s'amuser.

Les intellectuels londoniens et les nobliaux locaux ont aussi droit à leurs petits coups de griffe, mais le ton du roman n'est pas à la méchanceté, plutôt à la gentillesse. J'ai pris le tout comme une parodie (en plus d'une histoire que l'on ne lâche pas, avec sourire permanent!) et même un pastiche (ah le fameux secret de la grand mère et de la famille en général!)

Un roman un poil débridé et léger, qui fait du bien.

Merci aux éditions Belfond pour cette collection vintage et ses pépites.

Les avis de Jérôme , A girl (lu en VO)(oui, ce téléphone avec écran!), Hélène,

mercredi 30 novembre 2016

Le cornet acoustique

Le cornet acoustique
The ear trumpet (The hearing trumpet?)
Leonora Carrington
Flammarion, 1974
traduit par Henri Parisot


Leonora Carrington (1917, Angleterre-2011, Mexique) était totalement inconnue de mes services lorsque Fanja a fait part de son enthousiasme pour The hearing Trumpet (son billet) La dame est à la fois romancière et peintre, et a eu une vie bien remplie, voir wikipedia. Quant au roman...D'après la préface une seule copie en existait, que le préfacier remit à un conseiller culturel, et qui fut définitivement égarée. Mais! Des années plus tard l'auteur retrouva une autre copie, l'envoya au traducteur, justement, et le roman fut traduit et parut en français avant même l'anglais.

C'est parfaitement le genre de roman dont un résumé ne donne pas vraiment une idée exacte. Marion Leatherby, 99 ans (en VO il paraît que c'est 92) vit avec sa famille, en bonne santé, mis à part une petite surdité, d'où le cadeau d'un cornet acoustique de la part de son amie Carmella. Ce qui lui permet d'entendre une conversation où elle apprend qu'elle gêne et sera placée dans un établissement pour personnes âgées. Son rêve de découvrir la Laponie semble compromis, puisque tout cela se déroule au Mexique.

Jusque là tout paraît normal, n'est-ce pas? Carmella est bien un poil fantasque, Marion a des opinions étonnantes parfois, mais l'histoire va plonger dans, quoi? le fantastique? je ne sais pas; le surréalisme? sans doute puisque l'oeuvre de Leonora Carrington est cataloguée ainsi... Un final avec loups-garous (ou loups?), le graal chez les Templiers, des trucs ésotériques auxquels je n'ai rien compris, peu importe, je me suis bien amusée, parfois c'est du vrai délire, mais factuel et sérieux. L'arrivée de Carmella vers la fin, ses idées baroques en général, ça vaut le déplacement! J'ajouterai l'histoire gouleyante de Dona Rosalinda en plein milieu (Fanja tout comme moi trouve cela fort 'Don Quichotte').
Une grande expérience de lecture, où pas grand chose n'est épargné au lecteur (même pas la neige au Mexique). Pour lecteurs ne craignant pas un poil de fantaisie, quand même.

"je suis sûre que ce serait très agréable et très salutaire pour les humains de n'être soumis à aucune autorité. Il leur faudrait penser par eux-mêmes au lieu que ce soit la publicité, le cinéma, la police et les parlements qui leur disent ce qu'il convient de faire et de penser."

http://next.liberation.fr/arts/2011/05/27/deces-de-leonora-carrington-l-ultime-surrealiste_738787
Dans sa maison à Mexico

lundi 28 novembre 2016

Play

Play

Πλανόδιος σαλπιγκτής, 1989

Mènis Koumandarèas
ginkgo éditeur, 2016
Traduit par Nicole Le Bris


L'auteur (parce que moi en tout cas je ne connaissais pas du tout) est grec (on s'en doute quand même), né en 1931 et mort (assassiné) en 2014. Meurtre résolu grâce à un indice trouvé dans son dernier roman. Voir ici (et aussi quelques renseignements sur l'auteur). Découvrir cela m'a complètement épatée!

Play, comme le savent les plus de 20 ans (?) est la touche sur laquelle appuyer pour utiliser un magnétophone. Envoyé par son journal, un jeune homme prend contact pour interviewer un écrivain célèbre dans son appartement athénien. Au fil des rencontres, s'établit une sorte de jeu entre les deux, questions biaisées, réponses évasives. L'écrivain, qui a tout de Koumandaréas, sans être le narrateur, parle de son oeuvre, ses influences, sa conception de la littérature, et bien sûr de sa vie (ce qu'il veut bien en dire).

"Ecrire c'est une vie de forçat qui ne te laisse jamais de repos." "Rien de plus funeste pour la littérature, rien de pire à lui conseiller, que l'asservissement à la réalité.Même une interview comme celle de ce soir doit nécessairement demander à l'imagination de quoi la rendre plus convaincante." "Ecrire dans sa langue, c'est comme l'entendre pour la première fois. Les mots les plus habituels se chargent fortement et sonnent comme vierges : sans cela un texte ne peut prendre corps." "La difficulté n'est pas de critiquer la société. Tu trouves ça tous les jours dans les journaux. Ecrire une histoire, c'est une autre paire de manches, comme en musique de composer une mélodie capable de marquer les mémoires."

Beaucoup d’ambiguïté dans ce court roman, puisque le narrateur, le 'je' n'est pas l'auteur, celui-ci étant l'interviewé (merci à l'auteur des notes, signalant les œuvres de Koumandarèas). Narrateur ayant des velléités d'écrire, qui sait? "Écris une nouvelle, disons par exemple: tu as rencontré un écrivain.(...) Écris donc sur nous, je te donne la permission."
Ce que le lecteur a en mains.

Un grand merci à l'éditeur (croisé de salon en salon)

Edit : oups, mais ce grec rentre dans Lire le monde chez tête de lecture!

vendredi 25 novembre 2016

Éloge de la pièce manquante

Éloge de la pièce manquante
Antoine Bello
Gallimard, 1998



Au cours de l'année 1995, l'on découvre cinq ou six cadavres amputés d'un membre, et portant sur eux un polaroid représentant le même membre d'une autre personne. La police pense bien sûr à un serial killer, les victimes ayant toutes un rapport avec le monde du puzzle.
Plus qu'une enquête classique, ce roman fait découvrir l'histoire du puzzle sur plusieurs décennies, et imagine l'existence de concours de puzzles de vitesse, au grand dam de la plus feutrée et déclinante société de puzzlologie et son inénarrable projet Gleaners.

"Le livre se compose de 48 pièces numérotées et indépendantes, qui toutes traitent à leur manière du thème de la pièce manquante. Certaines occupent deux lignes, la plus longue près de 30 pages, toutes contribuent également à l'efficacité de l'ensemble. Tous les genres littéraires sont représentés : essais, nouvelles, chroniques, lettres, bribes de roman, journal. Deux pièces se répondent ou renvoient à une troisième que le lecteur découvre bien plus tard; des personnages disparaissent soudainement puis resurgissent aussi soudainement deux cents pages plus loin."

Dans une jolie mise en abyme, Bello parle là de Eloge de la pièce manquante, d'un certain Batterson, avec une présentation peu ou prou idéale pour son propre roman. La pièce manquante d'un puzzle, cauchemar de tous les amateurs! Batterson (alias Bello bien sûr) choisit les Bantamolés pour asseoir ses propos sur la théorie des puzzles,et cette tribu (fictive) ayant découvert le principe du puzzle fort longtemps avant John  Spilsbury est l'occasion pour Bello d'un joyeux délire ethnographique.

Inutile d'en dire plus, ceux qui connaissent et aiment Bello (et n'ont pas encore lu cet opus) se jetteront dessus, histoire d'admirer in fine la parfaite adéquation entre forme et fond, le jeu avec le lecteur et la subtilité au second degré de bien des passages.

"On ne peut qu'être satisfait par la légère baisse des dépenses du premier trimestre, même si celle-ci est due pour partie à une panne de la photocopieuse."

Il s'agissait pour moi d'une relecture, bien des années après, et comme j'avais pratiquement tout oublié, le plaisir fut entier!

J'ai oublié les billets qui en parlent, il doit y en avoir un bon paquet, citons Le bouquineur, lecture écriture (Yspaddaden) , forcément Papillon,

Lire sous la contrainte (encore!)

mercredi 23 novembre 2016

Hôtel Universal

Hôtel Universal
Simona Sora
Belfond, 2016
Traduit par Laure Hinckel


L'auteur est roumaine, née en 1967, et Hôtel Universal est son premier roman.

Je n'ai pas cherché à en savoir plus sur l'Hôtel Universal avant de terminer ma lecture (mais la traductrice l'a fait à ma place et sur place, voir en fin de billet), j'ai donc poussé la porte directement et suivi Maïa, juste après les événements de 1989, dans sa chambre avec balcon au dernier étage. Maïa, infirmière, étudiante, mystérieuse, dont il est parlé à la troisième personne. En 1989 l'hôtel a été récupéré pour devenir une résidence d'étudiants. Hôtel construit au milieu du 19ème siècle, un peu mieux qu'un caravansérail, nommée alors auberge Teodoraki. Hôtel devenu vétuste, poussiéreux, assez labyrinthique.

S'exprimant à la première personne, tout en confectionnant sa fameuse confiture de roses, Maria raconte la saga familiale à sa petite fille Maïa, alors jeunette. Vasile Capça en est la figure principale, commerçant, voyageur, confiseur, dont les lettres seront recopiées par Maïa.

Présenté comme cela, je suis bien consciente que ça a l'air désordonné et l'auteur n'hésite pas à passer d'une période à l'autre, d'un personnage à l'autre, retours en arrière, révélation du futur. Mais, et c'est là que ce premier roman est prodigieusement bien maîtrisé, avec fluidité et un poil de baroque et de magique qui emporte le lecteur. Pas question de descriptions et d'ordre là-dedans, l'histoire se dessine petit à petit. Parfois conte des mille et une nuits, parfois enquête policière, parfois soirées arrosées, beaucoup de saveurs et d'odeurs traversent le roman.

L'épilogue et ses première, deuxième et troisièmes nuits, fournit au lecteur de nouvelles pistes de lecture, des retournements de points de vue. J'adore être surprise.

La traductrice à la recherche de l'Hôtel Universal, de nos jours. Avec photos!

Lire le monde


lundi 21 novembre 2016

A la recherche d'Alice

Merci babelio pour l'image
A la recherche d'Alice
Sophie Bassignac
Denoël, 2009


Vous avez sans doute tous vécu une descente d'escalier dans l'obscurité, quand on tâte du pied pour savoir s'il reste une marche, et voilà, le pied demeure à plat, ah bon on est en bas. C'est un peu l'effet ressenti au cour de cette lecture un poil déstabilisante, menant là où on ne s'y attend pas trop. De bout en bout passionnant. (même si je saisis moins la pirouette finale, mais peu importe)

Comment ça, Alice a disparu? Peut-être pas réellement. Mais qui est-elle en fait, qui lui a envoyé une lettre anonyme, qui lui chuchote dans l'oreille au cinéma, qui lui donne des rendez-vous sans y venir, qui l'a blessée avec un gros bloc de glace? L'inspecteur Picasso mène l'enquête, séduit de plus en plus par cette jeune femme blonde, guide conférencière au Louvre, épouse du souvent absent Vincent et mère de Charles et d'Iris. Mais aussi fantasque et imprévisible.

Alice et sa soeur Clothilde se tiennent à l'écart depuis des années de leurs parents, histoire de se protéger; la mère meurt, l'enterrement est l'occasion de connaître cette famille.

Dit comme cela, cela paraît banal, mais mon bonheur est surtout venu des petites notations au détour d'un paragraphe
"C'était une femme qui, 'à la différence de certaines', ne regardait pas son linge sécher."
"Alice se dit alors que si toute son enfance avait été heureuse comme ces soirs là, elle aurait été condamnée à la mélancolie, car elle ne savait pas qu'on pouvait avoir été heureux et continuer à l'âtre justement parce qu'on l'avait été."

Une découverte que je dois à Cuné (si!)(merci!) et m'a permis de découvrir l'auteur.  Les avis de Cathulu,

Où ce challenge Lire sous la contrainte s'avère un redoutable descendeur de PAL...

vendredi 18 novembre 2016

L'autre Paris

L'autre Paris
Okänd Paris, 1954
Ivar Lo-Johanssson
L'élan, 2016
Traduction (et remarquable préface) de Philippe Bouquet


Un auteur suédois inconnu, revenant à Paris dans les années 50, après un séjour en France vingt-cinq ans plus tôt? (A l'époque il avait travaillé comme tailleur de pierre à Rouen, ses œuvres sont visibles sur la cathédrale, oui, Aifelle...)

Durant ce second séjour, il est accompagné de Tore Johnson, photographe hélas plus trop abordable, regrette le préfacier, donc seule la photo de couverture donne une petite idée du livre qu'on aurait pu avoir entre les mains. Mais Internet veille au grain et je vous invite à sauter sur ce lien (exposition récente au Nordiska Musset)

Revenons à l'auteur. Né en 1901, mort en 1990, il a écrit sur les Statare, ouvriers agricoles suédois au statut proche du servage (1948), la Vieillesse, les Tziganes. Des 'pavés dans la mare' dit justement le traducteur.

Et le livre? (80 pages, hélas trop peu, tiens)
"Si je suis revenu à Paris, c'est pour y observer de près le monde de la pauvreté: les mendiants, les prostituées, les vieux dans leurs asiles et les miséreux dans leurs refuges. Paris vient de fêter ses deux mille ans. Moi, je ne dispose que d'un recul de vingt-cinq ans. Mais je suis à l'âge où l'on demande à ses vieilles connaissances : comment ça va? Ceux qui sont vraiment jeunes ne se posent jamais une pareille question. Il est évident qu'ils vont parfaitement bien."

Finalement, voilà un parfait résumé du contenu de ce merveilleux petit livre : l'auteur (et son photographe) s'intéressent aux mendiants, aux chiffonniers, aux prostituées, aux vieux dans les asiles, aux immigrés (qu'on n'appelait pas ainsi d'ailleurs), aux bistrots, aux alcooliques, aux quartiers d'artistes, et aux Halles. Et un cimetière pour les animaux.
Tombe de Barry, chien sauveteur
Les forts des Halles
"Leur histoire est vieille de plus de huit cents ans, puisqu’elle remonte à 1140, et ils constituent donc le plus ancien syndicat du monde . Ils détenaient le privilège du transfert des cadavres des rois de France à la basilique de Saint-Denis.Ce sont eux qui ont effectué la première grève de l'histoire, à l'occasion de l'enterrement de Charles VII. Ils déposèrent leur fardeau en cours de route et refusèrent de le reprendre tant qu'on ne leur aurait pas accordé une augmentation. Satisfaction leur fut donnée. On peut aussi les créditerd'avoir sauvé une partie des collections du Louvre lors des inondations de 1910."


https://fr.wikipedia.org/wiki/Halles_de_Paris

Lo-Johansson pose sur eux,  les humbles, les travailleurs, les oubliés, un regard plein d'empathie. Ce Paris des années 50 a bien sûr disparu en partie, ce livre le fait revivre avec bonheur.
Et, tiens, ça me donne une furieuse envie de (re)lire Henri Calet, ceux qui connaissent me comprendront.

Une des photos de Tore Johnson
http://www.nordiskamuseet.se/sites/default/files/public/pressbilder/nma.0073537_0.jpg

Un grand merci à ginkgo éditeur

Dans lire le monde (la Suède)