The making of Toro
Mark Sundeen
Gallmeister, collection Americana, 2010
Traduit par Laura Derajinski
C'est, si j'ai bien compris, l'histoire d'un type qui a écrit "La fauconnerie en s'amusant', "un texte triomphal, baigné d’une sauce au lyrisme enfantin et frit à la poêle du cynisme" d'après lui et "Quand les faucons de LaFrance battent maladroitement des ailes vers un coucher de soleil mal rendu, le lecteur aimerait que les oiseaux ne retrouvent jamais le chemin de leur nid", selon une critique. Bref, un artiste incompris, mais à un stade de déni difficile à saisir.
"Avec chagrin, j'ai dû admettre que je n'étais pas à la hauteur en tant que personnage principal de mes propres livres. Si je voulais que l'auteur de mon histoire passe à la postérité aux côtés d'Hemingway et de Jack London, il fallait que le l'invente. Il me ressemblerait un peu, bien sûr mais en moins intello et en moins surprotégé. Un homme du peuple, pour le peuple. L'Homme des Masses. Il serait coriace mais cosmopolite, à la fois américain et européen, un moule vide à remplir de mes expériences courageuses.
Il s'appellerait Travis LaFrance."
C'est donc sous ce pseudonyme qu'il enchaîne les rencontres ratées, les râteaux amoureux, les bêtises et les boulots peu glamour. Il réussit tout de même à obtenir une avance pour écrire un roman sur les corridas. Il n'y connaît évidemment rien, mais à la fin le lecteur en saura beaucoup sur les corridas au Mexique et les corridas portugaises en Californie. Mais rien en Espagne, pas les moyens.
Toro, le livre est donc sorti (sans succès, bien sûr) et maintenant Travis LaFrance en raconte le making of, et le moins que l'on puisse dire est qu'il y a un bel écart entre la réalité et le livre. Ce qui fait tout le sel du roman de Mark Sundeen, le lecteur suivant d'un œil amusé ce type qui se la raconte de bout en bout.
"En arrachant les draps au doux parfum citronné tandis qu'un filet de fumée s'élève dune cigarette solitaire dans le cendrier, Travis possédera soudain les clés de cette élégante féminité européenne tandis que la beauté slovaque cédera à la force indéniable d'une superpuissance mondiale." La réalité, évidemment, c'est que Hannah va rentrer retrouver son fiancé.
C'est drôle, un peu poignant tout de même, et emprunt d'une jolie nostalgie quand Travis se remémore un passage de son enfance. Pas mal du tout.
Je ne résiste pas au plaisir de partager la couverture originale (y' a du lourd!)
http://livre.fnac.com/a9826365/Inconnus-The-Making-of-Toro |