lundi 30 septembre 2013

Seule contre la loi

Seule contre la loi
The Law and the Lady, 1875
Wilkie Collins
Traduction d'Eric Chédaille



Aaaaaah ce cher Wilkie Collins et ses héroïnes victoriennes étonnantes, ça faisait longtemps! Que nous a-t-il concocté cette fois?

Valeria, en dépit du conseil de ses oncle et tante d'attendre un peu pour mieux le connaître, épouse Eustace Woodville. Quelques jours après le mariage, elle rencontre la mère d'Eustace (qui avait refusé d'assister au mariage) et apprend qu'en fait Eustace ne s'appelle pas Woodville. Bien évidemment elle veut en découvrir la raison, tout en imaginant pas mal de solutions. Eustace la prévient de ne pas chercher à en savoir plus - pour sa tranquillité- mais comme d'habitude elle passe outre et finit par découvrir que son mari a été accusé de l'empoisonnement de sa première épouse.

Sans tenir compte des avis de ses amis (mais ça, c'est une constante chez elle), elle décide de se plonger dans l'étude du procès et de mener sa propre enquête visant à innocenter son mari. Tenace et décidée, on l'aura compris, elle découvrira la vérité, après quelques fausses pistes.

L'enquête en elle-même et ses rebondissements tiennent donc bien la route, pas vraiment de temps morts, car Valeria fait plier à sa volonté son entourage, les visites et les voyages s'organisent en un clin d’œil (heureuse époque aussi où un médecin arrivait à domicile dans les cinq minutes...). Heureusement que le suspense est sans faiblesse, car je me serais bien passée des caractéristiques de Dexter et Ariel et des remarques fréquentes de Valeria sur la gent féminine (et la pauvre chère n'a même pas réalisé qu'elle était enceinte avant que sa belle-mère ne l'éclaire; victorienne, oui, mais tout de même... ^_^)

Les avis de maggie, culturelle (en BD), bouquinbourg,

vendredi 27 septembre 2013

Un bel morir


Un bel morir
Alvaro Mutis
Traduit par Eric Beaumatin



Après l'éblouissant La neige de l'amiral (commencer par celui-là!), me revoici sur les traces du mystérieux Maqroll le gabier, dont le nom réel, les origines, l'âge et la nationalité demeureront aussi obscures. Un passé flou, des activités parfois en limite extrême de la légalité, des amitiés fortes et fidèles, des allusions au fil des pages à d'anciennes amours ou aventures. L'homme n'est pas tout jeune, mais sait s'attacher les femmes, tenté par l'indifférence sans être désabusé.

Comment s'est-il retrouvé au port de la Plata? Alors que rien ne l'y oblige puisqu'il a de quoi vivre pour l'instant, il se laisse convaincre de convoyer en haut de la Cordillère des caisses destinées à un chemin de fer. Mais les travaux n'ont pas commencé. Que contiennent vraiment ces caisses? Ne risque-t-il pas de gros ennuis avec les autorités?
Sa logeuse aveugle, le propriétaire terrien don Anibal, et surtout la belle Amparo Maria obtiennent son respect et sa confiance. Il va transporter les caisses à dos de mules, "lorsqu'ils parvinrent aux caféiers, il éprouva une nouvelle fois la fascination intacte de cette atmosphère tiède, accueillante et pleine de cette végétation soignée aux tons incomparables, qui semblait choisie exprès pour ses effets de beauté naturelle et ordonnée à la fois", mais l'attendent le froid et les précipices.
Lien : http://www.anapiavoyages.fr/nos-destinations/amerique-du-sud/decouverte-de-la-region-cafeiere-de-colombie

La beauté de la langue, les phrases amples, l'atmosphère douce et nostalgique m'ont engluée dans un flot m'interdisant de quitter les pages. Et puis, un type qui lit le soir quoiqu'il arrive, et la vie de Saint François d'Assise...

L'avis de wodka


En fait ce roman fait partie d'un ensemble réunissant les aventures de Maqroll (Grasset, 2007)


Alvaro Mutis "développe à partir de 1985 une série de romans autour d'un personnage, Maqroll el Gaviero (Maqroll le Gabier), aventurier toujours au bord de la misère et marin partout sur le globe, tant sur les mers que sur les fleuves et les rivières, et qui apparaît déjà dans ses poésies à partir du recueil Los elementos del desastre (Les Éléments du désastre) paru en 1953. Il crée autour de ce personnage errant d'autres protagonistes, comme la famille Bashur, des négociants libanais, dont il détaille, roman après roman, les aventures dans le monde trouble des affaires maritimes, des pavillons de complaisance, et des cargaisons douteuses, avec un style contemplatif et désenchanté. Ses œuvres ont rencontré un grand succès tant en Amérique latine qu'en Europe." (wikipedia)
Jean-Marc m'apprend en commentaire qu'il vient de décéder, le 22 septembre, à 90 ans.

Après La neige de l'amiral, se trouve Ilona vient avec la pluie (mais quel titre sublime!), où Maqroll et son amie Ilona ouvrent  une maison de rendez-vous dans l'atmosphère poisseuse et délétère d'une ville panaméenne où Maqroll a échoué lors d'une énième errance sur les mers du globe.

Un bel morir vient ensuite, évoquant un peu les deux précédents, ce qui me convainc qu'il vaut mieux lire dans l'ordre, et ensuite La dernière escale du tramp steamer, où le narrateur (Mutis?), tout au début,  réalise son rêve d'apercevoir Saint Petersbourg des quais d'Helsinki, lors d'une journée claire et glaciale. Merveilleux passage... Il croisera en divers lieux du globe un vieux steamer rafistolé, recueillera une histoire d'amour...

Il reste encore trois romans, à garder sous le coude, car Mutis est très addictif et bourlinguer avec lui non pas palpitant forcément mais fascinant en tous les cas.

Des avis sur lecture écriture, un bel morir la neige de l'amiral, Ilona vient avec la pluie

Ce livre aurait pu participer au précédent challenge Lire sous la contrainte de Philippe, mais il pourra tout de même être pris pour la session


mercredi 25 septembre 2013

Pinocchio et Robinson / Ça & 25 centimes

Pinocchio et Robinson
Pour une éthique de la lecture
Alberto Manguel
L'escampette éditions, 2005



Bien sûr Pinocchio apprend à lire à l'école, mais sans atteindre le stade servant à la connaissance de lui-même et du monde qui l'entoure. Apprentissage, selon Manguel, "le plus difficile, le plus dangereux et le plus puissant". Prônant les mérites de la lenteur et de l'effort délibéré, histoire de lire en profondeur, pénétrer dans un livre et l'explorer jusqu'à ses limites, il décortique les richesse du roman de Collodi. Mais comme le disait Eco, "les limites de l'interprétation coïncident avec les limites du bon sens."

Manguel déplore que notre société n'encourage guère ce type de lecture, et cite une expression latine que j'ignorais, mais me réjouit définitivement, per ardua ad astra, par la difficulté atteignons les étoiles.

Ceux qui ont lu le roman de Defoe savant qu'en plus d'outils et autre matériel pratique, Robinson sauve quelques livres (en portugais, donc frustrant sans doute) et trois Bibles (en anglais, ouf pour lui!)
Même si Manguel a écrit ce petit essai, en 2000, lorsque Internet et les liseuses n’avaient pas la place qu’elles ont actuellement, ses réflexions demeurent intéressantes.
Je termine en signalant qu'il rappelle aussi la réjouissante liste des "choses à éviter quand on écrit", établie en 1939 par Borges, Casares et Ocampo. Suivre cette liste, bien sûr, aboutit "à l'absence de toute littérature."

Pour terminer, "Vers une définition du lecteur idéal", rien que ça! Une énumération où on peut picorer, au hasard, d'accord ou pas, ça se discute.

Pour le lecteur idéal, toutes les plaisanteries sont nouvelles.
Le lecteur idéal a une capacité d'oubli illimitée.Il peut chasser de sa conscience tout souvenir du fait que le Dr Jekyll et Mr Hyde sont une seule et même personne, que Julien Sorel aura la tête coupée, que le nom de l’assassin de Roger Ackroyd est Untel.
Le lecteur idéal sait ce dont l'écrivain n'a que l'intuition.
Lorsqu'il ferme son livre, le lecteur idéal sent que s'il ne l'avait pas lu, le monde serait plus pauvre.
Le lecteur idéal ressemble à Joseph Joubert, qui arrachait des livres de sa bibliothèque les pages qui en lui plaisaient pas.
Le lecteur idéal ne compte jamais ses livres.
Le lecteur idéal lit toute littérature comme si elle était anonyme.
Lorsqu'il lit un livre datant de plusieurs siècles, le lecteur idéal se sent immortel.
Le lecteur idéal ne sait pas qu'il est le lecteur idéal avant d'être arrivé à la fin du livre.
Le lecteur idéal, c'est, pour un livre, une promesse de résurrection.
Tout livre, bon ou mauvais, a son lecteur idéal.
Pour le lecteur idéal, tout livre se lit, dans une certaine mesure, comme son autobiographie.
Le lecteur idéal fait du prosélytisme.
Le lecteur idéal est capable de tomber amoureux d'un des personnages du livre.
Il y a trois types de lecteurs: l'un, qui savoure sans juger; un troisième, qui juge sans savourer; et un autre au milieu, qui juge tout en savourant et savoure en jugeant. (Goethe)
Le lecteur idéal souhaite à la fois arriver à la fin du livre et savoir que le livre n'aura pas de fin.
Le lecteur idéal ne se soucie pas des genres.

Les avis de Delittéris,

Histoire de rendre ce billet encore plus long, je recopie un billet paru sur mon ex blog, mais qui n'a pas vieilli, à mon avis. Toujours Manguel, et je lance un appel au peuple lecteur car depuis j'ai acheté Une histoire de la lecture et La bibliothèque, la nuit, qu'il me faudrait bien relire... De l'aide?
http://multimedia.fnac.com/multimedia/images_produits/ZoomPE/6/9/1/9782356080196.jpgÇa & 25 centimes
Conversations d'Alberto Manguel avec un ami
L'Escampette Editions, 2009
 
Quatrième de couverture:
"Ce livre est la transcription méticuleuse d'une série d'entretiens que nous avons menés avec Alberto Manguel au cours de plusieurs rencontres.
Il ne s'agit pas, ici, d'un texte d'Alberto Manguel, fruit de plusieurs années de recherche, de travail, de mise au point. Il s'agit d'une parole qui va son chemin et qui est une leçon de liberté, d'humour, d'impertinence et d'amitié. Il s'agit d'une improvisation nourrie de l'expérience d'une vie, d'une jam-session dan le cadre d'une fabuleuse bibliothèque. Cette parole, il faut l'écouter, elle est vivifiante; parfois elle s'emporte et parfois s'attendrit; parfois elle est nostalgique et parfois iconoclaste; elle joue sur toutes les gammes...
Comme dans toute conversation, des points mériteraient d'être approfondis. Nous avons choisi de tout laisser en l'état, de ne pas quitter la spontanéité pour la construction, persuadés que de nouveaux livres d'Alberto Manguel trouveront leur première graine en ces semailles de plein vent!"
 
 
Soyez sans crainte! Le risque que le lecteur reste extérieur, voire perdu, a été évité par le choix de la présentation chronologique de la vie de Manguel, où il aborde différents thèmes au fil de la conversation, et par la précaution prise d'insérer de façon naturelle les éléments permettant de tout éclairer. Tout en gardant intacte la vivacité des échanges et l'impression de complicité qui unit les amis. Une forme fort agréable, donc!
 
 
Quant au fond, c'est du pur bonheur. Manguel est né en Argentine et a suivi son père, nommé ambassadeur dans le tout nouvel état d'Israël. Jusqu'à l'âge de sept, il ne parlait pas espagnol et donc ne communiquait pas avec ses parents; sa « nurse », Ellin, est chargée du petit Alberto. Mais quelle éducation!
 
« Une chose qu'Ellin m'a donnée est le sentiment que la culture, littéraire, artistique, musicale, n'est pas quelque chose d'extraordinaire mais quelque chose de tous les jours et qu'il n'y a pas de différence entre une littérature considérée populaire et une littérature dite classique. Ce qui compte c'est d'y trouver notre bonheur et un miroir du monde. Ellin lisait les romans de Cronin, Guy des Cars, Alberto Moravia, Erich Maria Remarque, Graham Greene, Mazo de la Roche... Et tout ça avec une connaissance de base, très traditionnelle, de Goethe, Schiller, Shakespeare, etc... »
 
« La littérature policière, dans le sens d'un mystère qui doit être résolu, m'intéresse toujours énormément. Pourquoi tel événement est-il arrivé? Qu'est-ce qu'on peut raconter autour d'une question, d'un mystère? Finalement tout au long de ma vie de lecteur, c'est ce qui m'aura intéressé le plus dans le genre romanesque. Plus que la psychologie, plus que la description, plus que la réflexion philosophique, ce qui m'intéresse, c'est l'enquête, c'est l'écrivain comme enquêteur. La question peut être : comment Julien Sorel réalisera-t-il son ambition? Ou quel est le mystère qui finira par expliquer la mémoire de Swann? C'est toujours la recherche de faits qui construit en secret l'histoire que nous ne connaissons pas et que nous cherchons à connaître. »
 
Signaler juste qu'il existe encore des tas de pages à citer sur les rapports de Manguel avec les livres, la lecture, les auteurs, des anecdotes riches et passionnantes; son parcours, ses rencontres, ses voyages, ses amitiés, sa vision de l'Argentine, du Canada (il est en fait Canadien depuis longtemps); sa bibliothèque de 30 000 livres installée dans un endroit de rêve, près de Poitiers.
 
Et avouer que j'ai maintenant une furieuse envie de relire Une histoire de la lecture et La bibliothèque, la nuit, dont la genèse est évoquée dans ce récit à deux voix que je recommande chaudement!
 
Quant au titre, en parlant de notoriété et succès commercial:
« Il y a un dicton canadien, pour parler de la reconnaissance littéraire, qui dit : 'Ça et 25 centimes te paieront une tasse de café!' »
 
« Les grands écrivains visent à toucher ce qui est le plus difficile à atteindre dans le lecteur, lui laisser son entière liberté tout en lui ouvrant des passages dérobés plutôt que des portes. Tandis que ceux-là [les autres] flattent nos petites mesquineries, nos petites peurs et ouvrent des portes par lesquelles il est très facile de passer.» 

En tant que traducteur:
« J'ai fait beaucoup de traductions dans ma vie; eh bien, les traductions les plus difficiles sont toujours celles des mauvais écrivains. Les grands écrivains sont très faciles à traduire car il y a un squelette qu'on peut démonter et remonter, un squelette très visible. On sait pourquoi tel mot est à telle place.
Traduire c'est la façon la plus minutieuse, la plus approfondie, la plus critique de lire. »
 
Les avis de Le poing et la plume,

Commentaires sur cet article

Cynthia Il y a 3 ans
Ton billet me fait penser que j'ai encore "Une histoire de la lecture" dans ma PAL...

keisha Il y a 3 ans @ Cynthia
La fameuse piqûre de rappel!
Cet auteur est drôlement intéressant et en plus il n'est pas du tout abscons.

Marie Il y a 3 ans
Quel billet enthousiaste ! 
Je me fais toute petite, je le chuchote, tu ne le répètes à personne : Je ne connais pas Alberto Manguel...

keisha Il y a 3 ans @ Marie
Tu as parfaitement le droit! Mais mon billet en dit assez, maintenant tu le connais, et tu sais que ce type est un
dangereux augmenteur de PAL... En fait, ses bouquins sont à avoir à la maison, pas à emprunter en bibli. (même si c'est hélas mon cas)

Pickwick Il y a 3 ans
Ce livre a l'air passionnant ! Les extraits que tu cites donnent déjà énormément envie, alors je n'ose pas imaginer le reste... moi qui me disait stop au grossissement de la PAL, je sens que je
vais craquer :)

keisha Il y a 3 ans @ Pickwick
Ce livre est assez court en fait,et il est passionnant (j'avais déjà lu les deux livres que je cite, et je n'aurais donc pas cru que cela m'intéresserait autant, en fait c'est complémentaire). Je
te recommande chaudement Ça & 25 centimes, et, pour aller plus loin , ses histoires de la lecture et des bibliothèques, du vraiment bien crois moi!
HS : Grâce à toi j'ai emprunté "Sur le route", le rouleau original.

sylire Il y a 3 ans
Voilà un bon moment que je souhaite lire Alberto Mangel. Merci donc pour la piqure de rappel.

keisha Il y a 3 ans @ sylire
Eh bien tu peux démarrer par cet opus ci, assez court et sous forme de conversation. Cela m'étonnerait que tu n'aies pas ensuite envie de découvrir d'autres écrits, plus gros mais tellement
passionnants!

Manu Il y a 3 ans
Tout comme Cynthia, j'ai "L'histoire de la lecture" dans ma PAL. Je vais commencer par là.

keisha Il y a 3 ans @ Manu
Bonne idée! J'espère que tu en feras ton miel.

Aifelle Il y a 3 ans
Un auteur que je me promets bien de lire un jour. J'ai assisté à une rencontre avec lui, il est très vivant et passionnant à l'oral.

keisha Il y a 3 ans


@ Aifelle Quelle chance tu as! Cette vie et cette passion se retrouvent bien dans ses écrits.

Delphine Il y a 3 ans
Je suis en pleine lecture de "une histoire de lecture", j'aime BEAUCOUP cet homme !

keisha Il y a 3 ans @ Delphine
Moi aussi! La bibliothèque la nuit est tout aussi réjouissant et tonique à lire!

Nadine N. Il y a 3 ans
Je ne connaissais pas du tout, cet auteur.
Amicalement.
keisha Il y a 3 ans @ Nadine N.
Je te le recommande chaudement; à mon avis tu devrais trouver aisément quelques de ses écrits là où tu habites.
Amitiés.

Papillon Il y a 3 ans
Très tentanr ! J'adore cet écrivain que j'ai eu la chance d'entendre une année au festival des étonnants voyageurs et qui a inspiré le nom de mon blog. Et tu me rappelles qu'Une histoire de la
lecture est toujours dans ma PAL...

keisha Il y a 3 ans @ Papillon
Ah, oui, journal d'un lecteur! Je l'ai lu mais il m'a laissé moins de traces que Une histoire de la lecture ou La bibliothèque la nuit. Deux titres incontournables. Et le livre dont je parle
aujourd'hui est une petite friandise idéale comme apéritif à son oeuvre.

Hélène Il y a 3 ans
J'ai lu "Une histoire de la lecture" il y a très longtemps, tu me donnes envie de le relire. "La bibliothèque la nuit" est dans ma LAL, et celui sont tu parles va le rejoindre...

keisha Il y a 3 ans @ Hélène
Allez, disons que les trois sont incontournables! Franchement, cet auteur réussit à être intelligent, faire réfléchir et
à être agréable à lire...

Lou Il y a 3 ans
je trouve le titre et la couverture assez atroces et j'aurais pu ne pas le repérer sans toi... ça a l'air vraiment intéressant, je le note (après la lecture du Manguel de ma PAL)

keisha Il y a 3 ans @ Lou
Je sais, il faut vraiment connaître déjà Manguel (et avoir feuilleté le livre) pour avoir envie de le lire! J'explique le titre dans mon billet d'ailleurs.
C'est intéressant, vraiment, comme celui de ta PAL je n'en doute pas!

A_girl_from_earth Il y a 3 ans
Quel beau billet enthousiaste! Très communicatif... euh mais là je viens d'entamer Anna Karénine et euh... enfin tu vois quoi...

keisha Il y a 3 ans @ A girl from earth
Je vois je vois... Don't disturb, quoi!
Mais pour relâcher la pression tolstoïenne, rien de tel que quelques pages par ci par là de ce genre de livre.


Restling Il y a 3 ans
...ça me dit rien...
*je sors*


keisha Il y a 3 ans @ Restling
En fait c'est un livre qui m'a absolument enchantée, ravie, une petite pépite, et, snif! , je n'ai pas convaincu les lecteurs.

lundi 23 septembre 2013

Cousu main

Cousu main
Skin tight
Carl Hiaasen
Les deux terres, 2012
Traduit par Yves Sarda




"C'est la pire année de ma vie et on est que le 17 janvier"

Mick Stranahan, ex-flic, ("ma vie peut se résumer comme ça: j'ai tué cinq hommes et j'ai épousé cinq femmes), ne demande qu'à vivre tranquillement en Floride dans sa cabane sur pilotis. Hélas l'arrivée de tueurs bien décidés à exécuter un contrat l'oblige à s'occuper d'un crime non élucidé quatre ans plus tôt, et à plonger dans l'univers de la chirurgie esthétique (parfois ratée) et des médias.

Avec Hiaasen, ne pas chercher le romantisme et la dentelle vintage, plutôt une mécanique bien huilée, des événements à cent à l'heure et des personnages quasiment tous un peu allumés. Le côté "défense du bel environnement contre les promoteurs pourris" est moins présent que dans Pêche en eau trouble, mais on sent quand même que Hiaasen s'y intéresse toujours.

L'avis de Hélène

vendredi 20 septembre 2013

L'art du contresens

L'art du contresens
Vincent Eggericx
Verdier, 2010



Message personnel : A Girl, ce livre est absolument pour toi!

Quand en médiathèque on prend en mains un livre uniquement parce qu'il a le dos orange (donc paru chez Verdier), c'est grave docteur? Bien sûr ensuite la quatrième de couverture parlait de Japon, et surtout la lecture de quelques paragraphes m'a prouvé que ça pouvait coller entre nous.
J'adore ces rencontres inattendues.

Résidant pour un temps au Japon, l'auteur décide de s'initier au tir à l'arc japonais. Le chemin sera long.

"Autant qu'une danse, le kyudô est la mise en scène d'un affût, où ce qui est guetté est soi-même- l'invisible que chaque homme porte en lui. On voit s'exprimer dans le tir à l'arc japonais, lorsqu'il est réalisé à un haut niveau, ce quelque chose d'inexprimable qui réside au fond de l'homme- un mystère qui est lié à la beauté, dont le corps qui se meut sur le pas de tir n'est plus qu'un signe, et tout le signe; c'est-à-dire qu'il est le reflet de l'infini, comme l'image de la lune sur l'eau est le simple écho de la lune."

Pas question d'aller trop vite.

"Laisser partir la flèche après avoir répété pendant des mois le geste qui précède cette libération, c'est avoir la sensation d'un infini qui vous éclaire et vous abandonne, pantelant. On éprouve une force immense, à portée de main et démesurément éloignée, de la même façon que le reflet de la lune sur l'eau laisse penser qu'on pourrait la toucher. Si l'on essaie, on se noie dans une mare. Il est inutile de tenter de saisir le reflet de la lune; ce que nous voyons est la manifestation réfléchie d'un ordre caché."

Connaissance de soi-même, des liens de cet art du tir à l'arc avec la littérature.

Mais bien d'autres choses encore dans ce livre (bien écrit et fort agréable à lire!). Reviennent des souvenirs d'adolescence et d'âge mur. Les saisons à Kyoto s'écoulent, hiver glacé, été étouffant. Printemps, ohanami, contemplation des fleurs de cerisier. Automne, momijiogari, chasse aux feuilles d'érable, d'un rouge indescriptible.

Des moments de rêve éveillé où les charmes du Japon agissent insidieusement et aussi des passages pleins d'un humour subtil. L'emménagement avec son amie Yuki dans une nouvelle maison et la pendaison de crémaillère, par exemple.

Juste une description pour terminer:
[Les habitants de Kyoto] "accordent par contre la plus grande importance aux uniformes. De l'écolière au chauffeur de taxi, chaque catégorie dispose de son costume; la devise nationale est Deru kugi wa, itareru, 'le clou qui dépasse, on lui tape dessus'. Cette multiplicité d'uniformes entraîne une forme d'exotisme qui fait l'enthousiasme des visiteurs, et peut provoquer un sentiment d'oppression si l'on oublie de se rappeler la part de comique qu'elle recèle. Je ne veux pas parler de la beauté des kimonos, mais de ces vieillards en costumes de généraux qui règlent avec des solennités de stratèges le stationnement des vélos à l'entrée des supermarchés ... de ces quinquagénaires hagards en habits de playmobil dormant debout en faisant semblant de régler la circulation ... ou de ces chauffeurs de taxi arborant des casquettes de commandants de porte-avions qu'ils font descendre jusqu'au solen vous ouvrant la portière.
Si l'on ajoute à ce théâtre ces grappes de gamines hautes comme trois pommes drapées dans de petits costumes marins, trottinant par les rues, furetant sur les quais du métro, s'assemblant autour du baobab d'un distributeur de boissons, les yeux disparaissant sous les bobs aux allures de casques d'exploratrices, le Japon a l'air d'une innocente bande dessinée, accentué encore par l'aspect carton-pâte des habitations."

Chez l'éditeur, avec extraits et presse

En bonus:
Japon
365 us et coutumes
David Michaud
chêne, 2011


Mille mercis, A Girl, pour ce délicieux petit livre aux 365 pages colorées (voir chez choco pour quelques photos), présentant le Japon en société, à l'école et au travail, au sein de la famille, à la maison et à table. J'ai pu établir des parallèles, des liens, avec L'art du contresens... M'amuser, m'étonner, réfléchir...

Par exemple chiffres et doigts (15 et 16), cadeau reçu, cadeau dû (37), le 53 m'apprend qu'au Japon on paie surtout en liquide(!), on retrouve (79) "Si un clou sort de la planche, il faut l'enfoncer avec le marteau", le 181 fait chaud au cœur : l'utilisation du boulier perdure dans le cursus scolaire, après son abandon en faveur de la calculatrice, car "des experts ont démontré ses bienfaits sur le développement cérébral de l'enfant", 293, la taille d'une pièce ou d'un logement est donnée en nombre de tatamis.

Le blog Le Japon (de David Michaud)
Le billet de choco

Challenge des iles de Géraldine
 

mercredi 18 septembre 2013

La théorie du chaos

La théorie du chaos
All Cry Chaos
Leonard Rosen
Le cherche midi, 2013
Traduit par Hubert Tézenas



Henri Poincaré est l'arrière petit-fils du mathématicien éponyme, mais n'a pas suivi ses traces, quoique son travail à Interpol le conduit à chercher des solutions et résoudre des mystères. Il vient juste d'avoir la satisfaction de voir sous les verrous à La Haye Banivic, un criminel de guerre de l'ex Yougoslavie et à Amsterdam un attentat fait disparaître James Fenster, éminent mathématicien américain qui s'apprêtait à intervenir lors d'un sommet de l'OMC, avec une conférence intitulée "L'inévitabilité mathématique d'une économie mondialisée" (sic). Poincaré est chargé de l'enquête sur la mort de James Fenster, alors que dans de nombreux pays surviennent des attentats attribués aux Soldats de l'enlèvement. Mais il est atteint de plein fouet dans sa propre famille par le désir de vengeance de Banovic.

J'ai vraiment aimé ce roman fort original où les fractales jouent le rôle de guest star, Henri les voit partout! Des photos parlantes de feuillages, minéraux vus au microscope, de côtes vues de l'espace... pour une théorie de Fenster vraiment troublante.
Même si j'ai un peu deviné avant Henri deux ou trois détails, et si cette histoire de Second enlèvement n'intervient finalement qu'en toile de fond, j'ai pris grand plaisir à le suivre dans sa lutte, ses souffrances, ses recherches tenaces. En plus d'un excellent policier c'est un être extrêmement attachant, surtout dans sa conviction de lutter contre la barbarie, la violence, la vengeance, non pas en les imitant, mais en respectant la justice et le droit.

Un suspense efficace non agressif, un héros sympathique et bien campé, des personnages secondaires rendus vivants en quelques traits, une intrigue originale, voilà qui met fin à une période quelques mois où les polars me tombaient des mains.

Le chou romanesco, un exemple de fractale naturelle (vous ne regardez plus votre bac à légumes du même oeil)


lundi 16 septembre 2013

Le voyage près de chez moi

Le voyage près de chez moi
Jérôme Attal
Stéphane Million Editeur, 2013


Un rendez-vous raté à Châteauroux, réussi à Chanceaux près Loches, voici encore un auteur rencontré avant même toute lecture. Encensé par des copines blogueuses, paraissant chez un éditeur inconnu de mes services mais optant pour des couvertures gaies et pétantes, sympathique au contact, comment résister quand justement la bibliothèque propose son dernier roman?

Jérôme (appelons-le Jérôme, ce sera plus simple), après dix-sept dans le même studio du 16ème, déménage près de chez lui, la rue d'à côté. Pour ce faire, quoi de mieux que de tout transbahuter, livres, disques, DVD, bibelots, etc... dans un  caddie jaune? Et d'en profiter pour apprendre des poèmes, observer le voisinage, et, enfin, enfin, peut être oser aborder la voisine de son futur-ex-en face dont il est amoureux...
Durant ces deux semaines d'hiver 2012 (souvenez-vous, quelques centimètres de neige, tout bloqué) sa vie de parolier, écrivain, scénariste, ... va se poursuivre, les rencontres aussi.

Au début de cette jolie promenade dans Paris, je m'attendais à une comédie romantique pure et dure (mais n'ayez crainte, le romantisme n'est pas mort) et je découvre que Jérôme A. semble avoir beaucoup mis de sa vie, ses amours, ses occupations, ses goûts musicaux, romanesques et cinéphiles, là-dedans. Pas du tout désagréable (mais là je découvre qu'en musique je suis une quiche), sympathique plutôt, il faut juste se laisser prendre par la main et se balader dans des digressions vagabondes. De l'humour léger, parfois désabusé, souvent ironique. J'aurai aussi pas mal appris sur le du travail de parolier...

"J'aimais beaucoup partir en en salons du livre, pour les échanges avec le public, les rencontres ou les retrouvailles avec les autres auteurs, les libraires, et les gracieuses et jolies bénévoles qui ponctuaient les moments de dédicaces. Pour  la raison enfin que c'étaient des voyages qui concernaient et engageaient le voyage suprême : celui de la lecture.
[ RV pris pour Châteauroux 2014, alors?]

"En effet, vivre à Paris dans un  appartement sans parquet, c'est comme séjourner en Amazonie sans avoir jamais vu la forêt, ce qui arrivera peut-être bien un jour, me direz-vous."

"Je sombrais dans une rage folle en découvrant sur Internet, avant même que le livre ne sorte publiquement, deux ou trois salopards planqués derrière des pseudonymes à la con qui proposaient l'ouvrage à la revente."
[oui, je le savais déjà, certains indélicats revendent les SP signés de l'auteur AVANT la sortie en librairie...]

Billet chez Mandor, Lucie, Le petit carré jaune, insatiable charlotte, Myriam Thibault,

vendredi 13 septembre 2013

Le journaliste et l'assassin

Le journaliste et l'assassin
The journalist and the murderer, 1990
Janet Malcolm
Les éditions nouvelles Françis Bourin, 2013
Traduit par Lazare Bitoun



Après lecture de ce récit, j'aurais honte de vouloir tromper mon lecteur : il s'agit de non fiction. Le journaliste et l'assassin est "considéré outre-atlantique comme un classique, et classé parmi les cent plus grands ouvrages de non fiction de la Modern Library". C'est court, dans les 200 pages, absolument passionnant et à découvrir absolument.

Première étape : En 1970, après que sa femme et de ses deux fillettes aient été assassinées, Jeffrey McDonald est lavé de tout soupçon par un jury. Quelques années plus tard, il est à nouveau accusé de ces meurtres, et il demande au journaliste Joe MGinnis de suivre l'affaire et écrire ensuite un livre, après avoir eu accès aux documents de la défense. A l'issue du procès, McDonald est cette fois déclaré coupable, s'ensuit une correspondance amicale entre McDonald - en prison- et McGinnis.

Deuxième étape : Quelques années plus tard, paraît le livre de McGinnis, intitulé Fatal Vision, dans lequel il dépeint McDonald sous les traits d'un coupable. Celui-ci (qui a toujours clamé son innocence) se sent trahi et intente un procès à McGinnis.

Troisième étape : Janet Malcolm se penche sur l'histoire de ce dernier procès et rencontre les différents protagonistes. McDonald, guère échaudé par son expérience avec McGinnis, n'hésite pas à parler et correspondre longuement. En revanche McGinnis coupe vite cours à tout contact : comme une partie de sa défense repose sur le fait qu'il ne pouvait laisser voir toute sa pensée à McDonald de crainte qu'il ne cesse leur collaboration, et comme Janet Malcolm semble lui être non favorable, lui-même dit préférer cesser de la rencontrer.
Très subtil, et ce n'est pas la seule mise en abyme du livre, Janet Malcolm étant accusé plus tard d'avoir écrit ce livre pour se défendre dans une affaire où elle même était accusée par le sujet d'un de ses livres...

Ce livre est plein de notations extrêmement intéressantes, malheureusement impossibles à toutes citer. En particulier la différence entre personnages de roman, et gens de la vraie vie. Hélas McGinnis ne pouvait pas changer McDonald en un personnage différent.

Vous l'avez compris, ce récit fascinant pose le problème de l'éthique du journaliste, et Janet Malcolm essaie dans ses rencontres de ne pas tromper son interlocuteur, y compris lorsque cela lui couperait toute source d'information.

Ne pas rater la postface, passionnante, Où Malcolm reprend l'opposition fiction/non fiction.
"L'écrivain de non fiction hérite d'un monde tout fait."
"L'auteur de livres de fiction est maître de sa maison et peut y faire ce qu'il veut; il peut même la démolir si ça lui chante. Mais l'auteur de livres de non fiction n'est qu'un locataire, et doit se conformer au conditions stipulées sur son bail: il y est dit qu'il doit laisser la maison -en l'occurrence, les faits- dans l'état où il l'a trouvée. Il peut y apporter ses propres meubles, les disposer comme il l'entend, et il a le droit d'écouter la radio sans trop monter le son. Mais il ne doit rien changer à la structure de base de la maison ni à aucune de ses caractéristiques architecturales."

Et l'éditeur offre même à la toute fin une note indiquant ce que sont devenus les "personnages" depuis 1990, date de parution aux Etats Unis.

Le billet de Sandrine,

mercredi 11 septembre 2013

L'inconstance de l'espèce

L'inconstance de l'espèce
Der Hals der Giraffe
Judith Schalansky
Actes Sud, 2013
Traduit par Mathieu Dumont



Curieux et brillant roman où tout est vu par Inge Lohmark, professeur de biologie (et de sport) sous l'angle de la biologie justement.

Voyons par exemple ses élèves entre enfance et adolescence:
"Apathiques, dépassés, exclusivement soucieux d'eux-mêmes. Ils s'abandonnaient sans retenue à leur indolence. L'attraction terrestre semblait agir sur eux avec trois fois plus de force. Toute chose requérait un immense effort. La moindre parcelle d'énergie dont disposaient ces corps était mobilisée pour une métamorphose douloureuse qui n'était pas sans rappeler la laborieuse libération de la chrysalide. Ce n'est qu'en de rares cas, cependant, qu'un papillon en résultait."

Sa vision d'une mère d'élève célibataire :
"Le patrimoine héréditaire comme seul et unique investissement dan le futur. Dans l'espoir que ses propres gènes, recomposés différemment, puissent s'avérer en fin de compte avantageux et afin que le succès de ce mélange distingue, par effet rétroactif, le transmetteur. Surtout lorsque l'autre porteur de l'information génétique s'était fait la malle."

En ex-Allemagne de l'est, les cinquantenaires ont encore des souvenirs précis d'avant la chute du mur. Le mari d'Inge vivote en élevant des autruches. A cause de la dénatalité, moins d'enfants, moins d'élèves, le poste d'Inge est en péril.
Son voisin Hans est un solitaire forcé.
"Hans disait qu'au moins, avant, il y avait eu la Stasi pour s'intéresser à lui. Quand il se sentait particulièrement seul, il relisait son dossier."

Drôle de roman inclassable, avec un regard original et décapant sur le quotidien d'un professeur, qui m'a évidemment enchantée! A prendre souvent au dixième degré, les parents sont prévenus! Avec en prime une vision de l'ex-Allemagne de l'est, à ma connaissance peu courante en roman.

Les avis de cathulu,

lundi 9 septembre 2013

Pour trois couronnes

Pour trois couronnes
François Garde
Gallimard, 2013



François Garde est l'auteur du fort remarqué Ce qui advint du sauvage blanc, et je l'attendais au tournant. Cette fois encore un matelot et une île. Un matelot français devenu un richissime citoyen américain, récemment décédé. Sa veuve fait appel au narrateur, Philippe Zafar (libano-américain) pour trier les documents laissés par son mari. Tel est en effet le métier inventé, avec succès, pas Philippe Zafar : "curateur aux documents privés".

Parmi les papiers, trois feuillets de la main du défunt racontant l'aventure hors du commun qui lui serait arrivée lors d'une escale, où il pourrait avoir engendré un descendant. Et reçu pour ses bons offices trois pièces d'or.

S'ensuit une enquête qui va mener Philippe Zafar dans une île de l'océan indien, Bourg-Tapage, et s'intéresser à une famille locale, sur plusieurs générations du 20ème siècle. Le narrateur devra réfléchir à sa propre histoire de filiation et aux conséquences de ses décisions.

Quel plaisir de se plonger dans se roman que je qualifierais d'aventures. Pas le temps de trop réfléchir, Phlippe Zafar mène son enquête un peu au fil de l'inspiration et des rencontres, les portes s'ouvrent sans trop de difficultés. Révélations, rebondissements, dans une ambiance tropicale bien rendue, font de ce roman à l'écriture fluide un anti-blocage de lecture.

Dommage que je n'aie pas l'auteur sous la main, je lui aurais tout de même posé deux trois questions au sujet de l'intrigue. Mais je ne peux rien dire clairement, tout comme son héros, j'ai ma clause de confidentialité.

Et hop, challenge des îles chez Géraldine!
Les avis de quatrième de couv', biblioblog, papillon,eimelle,Eeguab,

vendredi 6 septembre 2013

Le dilemme du prisonnier

Le dilemme du prisonnier
Richard Powers
le cherche midi, Lot 49, 2013
Traduit par Jean-Yves Pellerin




Septième paru en France, mais deuxième roman de Richard Powers, Le dilemme du prisonnier fait référence à un "jeu" où deux prisonniers séparés se voient offrir une alternative d'aveu/dénonciation du complice menant à des peines différentes (voir ici)

C'est en général au petit déjeuner qu'Eddie Hobson propose à sa famille "une amusette en guise de digestif" dont ce dilemme est un exemple significatif qui courra le long du roman, avec ses applications en politique par exemple. Le père souffre d'une étrange maladie l'obligeant à quitter son poste de professeur et déménager chaque fois plus à l'ouest. Ces sortes de crises augmentent et sa femme obtient enfin qu'il subisse des examens à l'hôpital de Chicago. Par ailleurs Eddie semble passer du temps dans un monde inventé.

A côté de l'histoire de cette drôle de famille apparaissent des aperçus de l'histoire personnelle du père, de l'exposition universelle de New York en 1939 au Nouveau Mexique en 1945, en passant par une rencontre avec Disney (et Mickey).

Bon, le moment de l'aveu : je n'ai pas tout compris! Comme d'habitude avec Powers, mes neurones ont été bien chamboulés, ce qui n'est pas désagréable, mais je n'ai pas saisi tout le pourquoi du comment, oscillant entre de chouettes passages (j'ai adoré Eddie junior et la conversation avec sa petite amie, par exemple) et d'autres semblant plus artificiels.

Dans ce roman paru en 1988 (mais qui n'a absolument pas vieilli, à mon avis), j'ai trouvé des passages fabuleux où chante la famille, préfigurant sans doute Le temps où nous chantions. Très intéressant aussi, Richard Powers a pas mal développé l'envoi en camp des américains d'origine japonaise dans les années 40, thème bien connu maintenant des lecteurs français grâce à Certaines n’avaient jamais vu la mer de Julie Otsuka.

Une lecture en demi-teinte, donc. Powers est grand, mais dans ce roman, fort déconcertant.

Merci à Solène (il me reste à lire Les trois fermiers, à la bibli)

mercredi 4 septembre 2013

Ce sera ma vie parfaite

Ce sera ma vie parfaite
Camille de Villeneuve
Philippe Rey, 2013


Victor des Ulmières a quatre-vingt ans, il va mourir bientôt, il veut mourir, mais  comme et quand il veut, et ce sera aujourd'hui. Dans son château près de Sancerre,  où résident neveux et leurs amis, chanteurs, danseurs, musiciens baroques, où rode la fidèle Félicie, reviennent au cours de cette dernière journée les souvenirs de sa vie, photographe, journaliste, voyageur... Ambigus parfois, avec sa sœur Aimée. Étranges avec Serge, son ex protégé, son fils peut-être?

Ce vieil homme désabusé, égocentrique, aux opinions tranchées, n'a pas levé tous les mystères. Ou alors c'est que je n'ai pas tout saisi, et cette atmosphère vagabonde m'a déconcertée.

Mais j'ai été absolument conquise par l'écriture, magnifique, et la façon maîtrisée d'évoquer une vie. Bien tourné (j'ai cru  croiser quelques imparfaits du subjonctif) , des mots assez rares parfois, l'art de conter.

"Personne n'aura jamais le point de vue que j'ai de ma chambre sur Sancerre. C'est à moi et moi seul. Je renonce à tout, sauf à la vue de Sancerre. Même aveugle, je pourrais continuer de la contempler. Le matin, la ville, toute noire, avec quelques lumières encore, est proche comme une sœur. Elle s'éloigne au fil  des heures, glisse derrière les champs, les chênes, les pelouses. La colline est alors noyée dans une brume et semble à une centaine de kilomètres. Parfois même on dirait une apparition."

lundi 2 septembre 2013

Eugène Bullard

Eugène Bullard
Claude Ribbe
Le cherche midi, 2012



Quelle vie! M'exclamai-je à de nombreuses reprises au cours de ma lecture. Un roman n'aurait pas osé tant de péripéties...

Comme Claude Ribbe le fait très bien, je ne vais pas raconter en détails l'histoire d'Eugène, né à la fin du 19ème siècle à Colombus, Géorgie, pas loin de l'Alabama, de parents anciens esclaves. Racisme, lynchages, Ku Klux Klan : voilà l'ambiance génrale. Eugène quitte sa famille, arrive en France, où il s'engage dans la légion étrangère au début de la première guerre mondiale. C'est l'un des premiers pilotes militaires noirs de l'histoire.Sur son Spad, il avait fait peindre en septembre 1917 la devise Tout sang coule rouge.

Boxeur, directeur de boîte de jazz, il connaîtra la période animée de l'entre deux guerres.
Mais ses aventures ne sont pas terminées!

Toute sa vie il devra lutter contre le racisme de certains américains qui, même établis en France, auront tendance à vouloir exporter leurs lois.

Une biographie efficace, qui m'a beaucoup appris. A découvrir évidemment.
(J'aurais juste aimé une bibliographie)

Les billets de clara et in cold blog   (merci à eux)