lundi 29 août 2022

Voyager avec Theroux

 Encore une fois je voyage sur les traces de Paul Theroux. Peu de trains, mais des modes de transport différents.

Les îles heureuses d'Océanie

Le Pacifique à la pagaie

Paul Theroux

Grasset, 1993

L'auteur ne voyage pas toujours en train (sauf là à l'intérieur de l'Australie), et le voilà en kayak (pliable). Non, il ne refait pas les voyages des Polynésiens à travers le Pacifique, peuplant il y a des siècles divers archipels séparés de centaines voire milliers de kilomètres, il se contente de justement arriver sur une île ou un groupe d'îles, par bateau ou avion, et ensuite d'explorer au maximum, campant si possible et usant du kayak.

Une cinquantaine d'îles de tailles diverses, de l'Australie à Hawaï, en passant par Tahiti, les Marquises (les français en prennent pour leur grade!), l'île de Pâques; peu d'archipels lui échappent. Toujours des rencontres, un ton souvent moqueur mais qui sait se faire sérieux. Une lecture idéale pour se dépayser. Le voyage s'est déroulé en 1991, en pleine guerre du Golfe, je le précise car bien des habitants fort éloignés du conflit demandaient des nouvelles!

Un récit fort complet, instructif et agréable à lire. Varié, sans lassitude du lecteur.

Babelio : une critique

Merci wiki pour cette carte fascinante
https://fr.wikipedia.org/wiki/Oc%C3%A9anie

J'ai donc continué  sans enchaîner cependant avec : 


Safari noir

Du Caire au Cap en passant par les terres

Paul Theroux

Grasset, 2004

Traduit par Dominique Peters


Ayant séjourné au Kenya, Ouganda et Malawi dans les années soixante, Paul Theroux, plein de nostalgie, veut y retourner, mais lors d’une grande descente nord sud de toute l'Afrique de l'est, accomplie en 2001. Comme d'habitude, il voyage seul, avec les moyens de transport locaux, felouque, ferry, train, camion, etc., en vêtements usagés, rien de tape-à-l'œil. 

Dès l'Egypte

"J'étais parti des rives de la Méditerranée et, par les Colonnes d'Hercule, peu à peu je pénétrais plus profondément en Afrique. Le voyage est une transition; au mieux, c'est un départ de chez soi et une avancée. Je déteste être parachuté quelque part. J'ai besoin de relier les lieux les uns aux autres. Un des problèmes que je rencontre en voyage, c'est la facilité avec laquelle une personne peut être transportée si vite du familier à l'étrange, avec laquelle, disons, le cadre new-yorkais qui quitte son bureau se retrouve d'un coup d'ailes le lendemain en Afrique pour observer les gorilles. C'est juste un moyen de se sentir étranger. L'autre manière, la lenteur, la traversée des frontières nationales, le frôlement des barbelés, sac sur le dos et passeport à la main est le meilleur moyen de se souvenir qu'il y a une relation entre 'ici' et' là-bas', qu'un récit de voyage, c'est l'histoire de' là-bas' et retour."

Quelque part, sur une route dangereuse, dans un véhicule hors d'âge. Au sujet de voleurs de grands chemins:

"Ils ne veulent pas ta vie, ils veulent tes chaussures. (...). Bien des fois, après cela,  au cours de mes errances africaines, je me suis murmuré ces mots, épitaphe du sous-développement, le désespoir en une simple phrase. A quoi leur sert ta vie? A rien. Mais tes chaussures - ah c'est une autre affaire! Elles valent quelque chose, bien plus que ta montre (ils ont le soleil) ou ton stylo (ils sont illettrés) ou ton sac (ils n'ont rien à mettre dedans). C'étaient des hommes qui avaient besoin de chaussures, parce qu'ils étaient toujours en marche."

L'un des plus beaux chapitres est le 15, le passage intéressant pages 346 et 347, où il revient à l'endroit où des années auparavant il avait enseigné. Las, tout a changé, l'école est délabrée. Une occasion de regarder cet endroit qui a influencé le cours de sa vie, et de mettre le doigt sur l'inutilité (voire pire) de l'aide extérieure) en Afrique.

Son projet était de terminer au Cap, mission accomplie. Après le Zimbabwe, le Mozambique, et l'Afrique du sud bien sûr. Une vision désenchantée de l'Afrique urbaine, avec plus d'espoir pour les campagnes.

A mon avis un des meilleurs opus de l'auteur.

Il a fortement aimé la gare de Maputo (Gustave Eiffel y a mis sa patte) et j'avoue que...

(voir le lien)

Babelio : une critique

mardi 23 août 2022

Le Chomor


 Le Chomor

Manuel des joueurs

Martin Mongin

Tusitala, 2022


Comme je n'avais pas oublié ma lecture de Francis Rissin, j'ai sauté en librairie sur Le Chomor (il y a des témoins) et englouti vite fait les 594 pages annoncées.

Comment en parler? Des trucs comme cela, on n'en lit pas tous les jours. Tout démarre avec Val, qui, en vacances avec ses parents sur la côte bretonne, fait connaissance de cousins, des jumelles et Efflamm, et un jour celui-ci disparaît totalement et mystérieusement. L'on passe à Lausanne, étudiante à Rennes, embarquée dans une aventure étrange (un message aux extra-terrestres, vraiment? demander l'aide de Bruce Willis? ) . Puis voici des jumelles cherchant à s'échapper d'un univers inquiétant.  Puis l'on découvre La grande traque, "déconcertant jeu de piste". Un site d'enfouissement de déchets nucléaires (ah le discours du directeur!). Puis un départ vers les étoiles (Elon Musk, oui). Un jeu dont on est le héros, ou plutôt la maire de Rennes, ville vraiment chamboulée. Et toujours de mystérieuses destructions,  un poil d'écoterrorisme? (sortez vos clés à molette!) Et puis ça continue, le lecteur essaie de relier les fils, il s'est quand même bien fait balader, pour son plus grand plaisir.

Une drôle d'expérience, qui m'a fait toucher à des genres que j'évite d'ordinaire. Un poil d'imaginaire, de fantastique même, je dirais plus simplement du 'pas possible' mais entraînant et irrésistible. L'impression d'être dans un autre univers, avec du flou, un changement climatique bien avancé (encore plus avancé, quoi), un mystérieux ennemi, un monstre, des poursuites, un beau final maritime genre film de pirates et île au trésor.

C'est quand même du bonheur, un auteur avec tant d'imagination!

Forcément lu par Nicole

Avis babelio

Challenge pavé de l'été chez Brize

samedi 20 août 2022

Le Grand Monde


 Le Grand Monde

Pierre Lemaître

Calmann Levy, 2022


Ce  roman de la rentrée de janvier, premier d'une trilogie intitulée Les années glorieuses, je savais que je ne mettrais pas la main dessus aisément. Comme j'avais quand même d'autres livres  à lire (pas vous?) je n'ai pas eu à piétiner d'impatience, juste être là quand il était de retour à la bibli. Mon verdict? Mission accomplie pour l'auteur, encore un brave gros roman d'environ 575 pages (j'ai rendu le livre à la bibli, mais ça dépasse largement les 550 pages - 592 pages lis-je sur internet) qui se lit tout seul et me permet d'ajouter un pavé au

Challenge pavé de l'été chez Brize

Départ pour Beyrouth Saïgon Paris en 1948

Avec la famille Pelletier, prenons le père, Louis, propriétaire d'une grosse entreprise de savons à Beyrouth, marié à Angèle, a priori épouse tranquille et dévouée, mais elle réservera des surprises au lecteur.

Les enfants? L'aîné, Jean, surnommé Bouboule, sous la coupe de sa femme Geneviève, elle est un de ces personnages qu'on aime détester et qui en rajoutera toujours une couche dans la mauvaiseté, pour le plus grand plaisir du lecteur, si! Plaindre Bouboule? Pas forcément, car ce type a des secrets.

François, lui, veut percer dans le journalisme, n'hésitant pas à mettre son pied dans l'ouverture de la porte (c'est une image). Etienne, ah Etienne, magnifique, allant s'installer à Saïgon pour retrouver son beau légionnaire Raymond. Et pour terminer Hélène, la petite dernière, vingt ans à peine.

Alors, l'ambiance poisseuse de Saïgon, les horreurs de la guerre avec le Viet-Minh (lecteur, accroche-toi) , les arrangements pour se faire de l'argent sur le dos de l'état, oui, ça tripatouille à fond, quelle galerie de personnages bien croqués.  Sans oublier le chat Joseph (lui va s'en tirer).

Un clin d'oeil rapide quand on croise un personnage de la trilogie précédente... voire plus. Mais chut.

La fin laisse quand même le lecteur avec des réponses, mais pas toutes. Tiens, par exemple, Nine, on aimerait en savoir plus. Et le père du futur enfant, parce que, quand même. L'affaire des piastres est bien réelle, Lemaître l'utilisera-t-il encore ? Y a-t-il des photos intéressantes encore à développer dans l'appareil d'Etienne? Et puis et puis, la famille Pelletier, on veut la suite!!! Bref, voici un bon roman populaire, qui ne révolutionnera pas la littérature mondiale, mais franchement c'est efficace, souvent amusant, ironique, un poil 'de trop', mais on en redemande.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_des_piastres#/media/Fichier:French_Indochina_Piastre_1885.jpg

Beaucoup d'avis, bien sûr... babelio, bibliosurf, la petite liste, delphine olympe, aleslire, brize, eve


lundi 8 août 2022

87ème district Volume 3


 87è District 3

Ed McBain

Omnibus, 2004

(image https://www.leslibraires.fr/livre/755650-87e-district-3-87eme-district-tome-3-ed-mc-bain-omnibus)


Bon, il existe deux sortes de lecteurs, ceux qui ont lu les enquêtes du 87ème ... et les autres. Pour ceux qui en ignorent tout, se reporter à mon billet sur le Volume 2, où j'espérais lire le 3, hum , dans un délai déjà bien dépassé. Pas grave, car  ces enquêtes, c'est comme des bonbons addictifs, mais ne se périmant pas.

J'avoue que depuis j'ai mis la main sur quatre autres volumes (yes!). 

Parlons du 3. Paru chez Omnibus, avec comme traducteurs, Chantal Wourgaft, G. Louedec, Jacques Martinache, Rosine Fitzgrald (et Pierre de Laubie), Jane Fillon, André Bénat,  et comprenant plusieurs titres. J'ai lu les trois premiers il y a un certain temps mais il en restait cinq, donc cela me permettra de participer largement  à la trilogie de l'été chez Philippe

Ces histoires se déroulent au début des années soixante, dans la ville fictive d'Isola, et font la part belle à des enquêtes du 87è district, particulièrement celles aux mains de Steve Carella. Les fans dont je suis les lisent dans l'ordre chronologique, non que McBain ne dévoile trop sur les précédents romans, mais on se sent comme dans une histoire de famille, avec l'évolution des personnages.

Chaque fois je suis épatée par la facilité avec laquelle on entre dans chaque histoire, le ton particulier, l'humour sensible particulièrement dans les dialogues, mais aussi l'émotion qui point, sans parler des informations sur la vie d'une brigade et la loi à respecter.

Allons y pour les détails

Dix plus un

Un tireur posté en hauteur abat des personnes n'ayant absolument rien en commun, un canardeur fou? c'est la crainte de la police. Bien sûr elle va trouver les liens et attrapera de justesse le coupable.

La hache

Sans entrer dans les détails, un crime sanglant et sordide.

Entre deux chaises

Certains n'aiment pas, et j'accepte qu'on soit déconcerté. Les policiers demeurent en retrait, des seconds rôles. Alors qu'un jeune homme hésite tout le long du roman à rencontrer un inspecteur car il a quelque chose à dire, mais toujours quelque chose à faire avant. Mais que veut-il déclarer? Et le fera-t-il?

Cause toujours, ma poupée

Alors là un événement au milieu du roman m'a coupé le souffle, bien sûr que ce n'était pas possible, mais...

80 millions de voyeurs

Un artiste meurt en direct à la télévision, suicide ou assassinat? Une seconde intrigue sans rapport avec la première existe aussi, un type violent faisant une fixation sur une jeune fille (rencontrée dans Dix plus un).

Voyons plus loin, un quatrième volume pourrait être lu en 2023?

lundi 1 août 2022

Fille, femme, autre


 Fille, femme, autre

Bernardine Evaristo

Globe, 2020

Man Booker Prize 2019

Traduit par Françoise Adelstain


C'est la lecture de billets sur Mr Loverman (de la même auteure, plus récemment paru en France) qui m'a poussée à enfin lire Fille, femme, autre... A première vue, un texte que j'aurais dû abandonner fissa, le genre retour fréquent à la ligne, pas de majuscules, pas de points.

Et puis...en un paragraphe j'étais happée là-dedans, tenue par cette énergie se dégageant du texte, non dénuée d'ironie, sachant respecter les personnages.

Les personnages? Quasiment tous féminins, aux origines mélangées, tout comme l'auteure d'ailleurs, en tout cas ce sont douze femmes qui interviennent l'une après l'autre, au fil du temps sans trop de chronologie, liées par leur vie ou à leur insu, des femmes qui ont dû lutter pour se faire entendre et refuser le destin qui leur était promis.

Bref, un chouette roman qui m'a enthousiasmée (comme quoi il ne faut pas se laisser impressionner par une première vision, et donc un jour je lirai peut-être certains romans dont la présentation m'attire peu) et que je vous invite à lire aussi!

Des avis babelio, et beaucoup de billets... motspourmots, eva, pages versicolores, kathel, sylire, antigone, bibliosurf, lanuitjemens