lundi 31 juillet 2017

La porte

La porte
Az Ajto, 1987
Magda Szabo
Livre de poche, 2017
Traduit par Chantal Philippe



J'ignore jusqu'à quel point cette narration colle à la réalité, quoiqu'il en soit, la narratrice et son mari sont eux aussi écrivains, et elle, primée. Ayant besoin d'une aide pour tenir sa maison, Emerence lui est envoyée. Celle-ci est en fait concierge d'un immeuble voisin, et choisit ses employeurs."Je ne lave pas le linge de n'importe qui." Elle décide des horaires, ne plie pas quand elle a décidé de quelque chose, se révèle la vraie maîtresse du chien du couple, mais sa fidélité et sa bravoure la rendent indispensable. Son franc parler heurte la narratrice, qui finit toujours par rechercher Emerence.

Durant les vingt années de service d'Emerence se créent entre patronne et domestique des rapports fluctuants difficiles à éclaircir, est-ce de l'amitié? , en tout cas la narratrice ne comprend pas toujours, se ronge de culpabilité, en particulier pour la mort d'Emerence (on le sait dès le début).
Emerence est un personnage fascinant, entier, charitable, une figure du quartier. Au fil du livre le lecteur en apprend beaucoup sur sa vie (extrêmement dure, cette vie).
Qu'y a-t-il derrière la porte toujours fermée de l'appartement d'Emerence? Pourquoi est-elle fermée, d'ailleurs? Ouvrir cette porte ne sera pas sans conséquences pour Emerence et la narratrice.

Autant j'ai été épatée par ma précédente lecture magyare (La mélancolie de la résistance ) qui se révèle au fur et à mesure, autant là j'ai été un peu lassée, après un beau départ en fanfare. Et j'en suis désolée, car je sais qu'il s'agit d'un livre fort. Mais en dépit des révélations sur le passé d'Emerence, on retombe sur les mêmes schémas, la narratrice ne comprend pas Emerence, lui tient tête, enfin, essaie,  et finit par céder, sinon en tête à tête, du moins en mâchonnant ses regrets et remords. Dommage, car à bien y réfléchir l'histoire d'Emerence est poignante et belle.

Les avis de Ingannmic, aleslire, le bouquineur,

Lecture commune avec Fanja
Dans Lire le monde chez Tête de lecture.

vendredi 28 juillet 2017

La cote 400 / Rouvrir le roman



La cote 400
Sophie Divry
Les allusifs, 2010


Après La condition pavillonnaire sans histoire palpitante et plutôt susceptible d'abattre le moral (et j'avais adoré!) j'avais fortement envie de lire les autres romans de Sophie Divry.

La cote 400 est celle des langues, selon la classification de Dewey, nommée maintenant classification universelle. Excellent titre pour ce mince volume dans lequel s'exprime tout du long une bibliothécaire responsable du rayon 'géographie', face à un usager retrouvé dormant dans son sous-sol, à deux heures de l'ouverture habituelle de l'établissement. Ce texte sans paragraphes, virevoltant d'une idée à l'autre, y revenant, etc. permet de connaître la vie de cette femme (abandonnée par l'homme suivi dans cette petite ville, dorénavant fascinée par un jeune étudiant, Martin) et son métier (Dewey, tout ça). Plutôt aigrie, déçue par l’existence, ses supérieurs, la voilà qui s'anime un peu plus positivement à évoquer les lecteurs ou futurs lecteurs qu'elle apprécie, finalement, de conduire vers la lecture.

Alors, à lire au premier degré, mis à part la multitude d'informations intéressantes sur les bibliothécaires, y compris au cours de l'histoire, cela ne semble guère intéressant, voire ennuyeux. Mais que nenni! Encore une fois mieux vaut ne pas lire Sophie Divry trop franco, et gratter sous la surface. Ainsi l'on s'amuse fort de cette logorrhée parfois caustique, ces cotes qui reviennent telles des gags, la rumination de la trahison d'Arthur (oui, il se nommait Arthur), ses opinions tranchées sur quasiment tous les sujets. Et l'on aborde quasiment tous les problèmes se posant actuellement aux bibliothèques, face à un certain désamour de la lecture.

"Quand je vois, à la rentrée, tous ces livres niaiseux qui envahissent les librairies alors qu'ils ne sont, quelques mois plus tard, plus bons qu'à se vendre au kilo. Tous ces bouquins qui vous sautent dessus par centaines, quatre-vingt-dix-neuf pour cent sont juste bons à envelopper les sardines. Pour les bibliothécaires, c'est une calamité. Le pire, ce sont les livres-express, les livres d'actualité: sitôt commandés, sitôt écrits, sitôt imprimés, sitôt télévisés, sitôt achetés, sitôt retirés, sitôt pilonnés. Les éditeurs devraient inscrire à côté du prix la date de péremption, puisque ce sont juste des produits de consommation. Non, vraiment, la rentrée au rayon littérature ce n'est pas ma tasse de thé. (...) Les lecteurs nous assaillent chaque jour pour obtenir le dernier livre dont ils ont entendu parler la veille à la radio. Ils exigent qu'il soit en rayon immédiatement. Il faut résiste, tempérer. Parmi les ouvrages qui sortent en automne, il faut sélectionner la poignée qui s'avèrent dignes d'entrer dans nos rayonnages. C'est un travail de titan. Un travail harassant. Qui n'est plus fait d'ailleurs, plus du tout."(pages 39 et 40, à suivre)

"Empruntez, car autant l'accumulation matérielle appauvrit l'âme, autant l'abondance culturelle l'enrichit.Ma culture ne s'arête pas là où commence celle d'autrui."

Dans la foulée ou presque, je me suis penchée sur

Rouvrir le roman
Essai
Sophie Divry
Notabilia, 2017


200 pages bourrées de marques pages, il y aurait des pages entières à citer, mais pas question. Sophie Divry s'adresse au romanciers, bien sûr, et aussi aux lecteurs. Aux premiers elle propose des pistes à explorer, aux seconds elle permet de réfléchir quand ils ouvrent un roman. Je précise que le tout est parfaitement lisible par quelqu'un qui comme moi n'a pas fait d'études littéraires et n'aime guère voir les phrases parsemées régulièrement de termes techniques. Sophie Divry parle beaucoup du Nouveau Roman, pas forcément pour le défendre à tout crin (à mon avis). Si j'ai bien compris, l'idée qu'on se fait parfois du roman date des classiques du 19ème siècle (et j'en connais d'excellents), mais les Tristram Shandy, Don Quichotte ou La vie de Henry Brulard, "texte autobiographique rempli de plans et de croquis, [qui] ne fut publié que cinquante année après sa mort" prouvent que les explorations expérimentales ne datent pas d'aujourd'hui.

J'ai forcément aimé retrouver quelques auteurs américains, le William Glass du Tunnel (croyez-moi, un truc comme ça, vois n'en lisez pas souvent)." Lire Le Tunnel n'est pas chose aisée, car c'est se confronter physiquement à la phrase de l'auteur américain. On en ressort essoré et ravi.Pour ceux qui cherchent le foisonnement, la défaillance et la métaphore, c'est une fête esthétique. Mais Le Tunnel m'a passionnée tout autant pour son style que pour ce que le héros raconte de son enfance américaine."

Et Proust dans tout ça?
"Chez Proust on est dominé par sa phrase. Soit on refuse la lecture, soit on plie, on cède face à son autorité. Ce qui nous paraissait d'abord obscur devient lumineux, ce qui nous donnait de la peine est source de joie. L'histoire, quasi absente, on est incapable de la raconter. La qualité de l'écriture, la jouissance des mots suffisent à nous procurer le désir d'y retourner. A l'inverse, un mauvais style fera perdre tout intérêt à une histoire, même des plus romanesques (on a tous un jour acheté un roman pour l'histoire qu'il contenait, sans arriver à le finit pour cause d'inanité stylistique).

"Mais attention: s'il n'y a pas d'obligation à écrire un récit, il n'y a pas de honte non plus.
La littérature de recherche a voulu libérer le roman de l'obligation de schéma narratif linéaire, pas le corseter dans une autre obligation. Refuser l'intrigue-histoire n'est pas en soi plus artistique que de l'embrasser. Un romancier est libre de s'ouvrir à la narration quand il le désire, et de s'en débarrasser quand c'est utile. Car, enfin, la narration peut être autre chose que secret-de-famille-enfin-dévoilé, petites-quêtes-convergentes, tous-différents-mais-on-s'accepte, obstacles-nombreux-mais-l'amour-triomphe... (...) on pourrait chercher dans d'autres directions. "(suivent des pistes)p 198

En définitive, je n'ai pas eu envie de me prendre la tête à sortir un joli billet structuré, en sortant de cet essai plutôt tonifiant, fourmillant d'idées, critiquable sans doute mais ayant le mérite de revenir à des écrits 'théoriques' , ce qui pour un romancier est un retour à une tradition semble-t-il délaissée. J'ai trouvé le tout plutôt ouvert et en retiens que le romancier (et le lecteur) ne doivent pas se laisser enfermer et faire usage de leur curiosité.
Mes envies de lecture futures n'en sont pas sorties indemnes, oui, je vais reprendre Tristram Shandy, oui, je vais lire L'arc-en-ciel de la gravité, oui je reprendrai 2666, oui je sortirai le Butor de ma PAL 'historique', oui je veux continuer avec Genette, Pérec, mais je continuerai à lire Balzac et du feel good, na!

Des avis chez Sandrine,(tu sais, j'aurais dû prendre plus de notes, j'avais déjà oublié ce qu'elle dit de Bergounioux!) , Papillon, Marque-pages,

mercredi 26 juillet 2017

Comme au cinéma / Commis d'office

Comme au cinéma
Petite fable judiciaire
Hannelore Cayre
Métailié, 2012


Après l'excellentissime La Daronne, j'ai englouti Toiles de maître et Ground XO, eu la paresse d'écrire un billet, mais pour Comme au cinéma je me bouge un peu parce qu'après, plus grand chose à l'horizon!

L'auteur est avocate pénaliste et sait de quoi elle parle quand elle conduit son lecteur en plein procès, à Chaumont, tout près de Colombey-les-Deux-Eglises (oui, ce Colombey là), où se déroule un festival de cinéma auquel la star Etienne Marsant a accepté de participer, surtout pour noyer son ennui.
Quel rapport, à part géographique, entre les deux histoires? Justement c'est à découvrir.

Face à l'infect président de cour d'assises, se dresse un avocat désabusé.

"Il n'y pouvait rien, il s'en défendait même, mais il avait de l'admiration pour ce garçon.
Abdelkader Fournier était ce genre de braqueur qui envisageait l'attaque de banques non pas comme un moyen de gagner de l'argent facilement mais comme un défi sportif; l'idée étant de se faire le plus de banques possible dans une espèce de course vers l'irréversible. C'était d'un romantisme torride.
(...)
Le charmant sociopathe avait toujours plein d'histoires rocambolesques à lui raconter alors qu'il trouvait la société de ses enfants (...) ennuyeuse comme une chanson de la nouvelle scène française.
Voici ce qu'il plaiderait dans un monde où les jurés auraient été  tirés au sort parmi des gens intelligents... "

"C'est dans vos écoles qu'on vous apprend à mentir ou vous naissez tous comme ça?"

Bref, c'est caustique, pas politiquement correct, et très drôle (ah le choix des jurés, ou la jeune Sylvie, que de la poésie)
Les avis de kathel, qui vous conduira à  Clara et Yv (aussi sur lecture écriture)

Plus tard...
Le premier volume de la trilogie avec l'avocat Christophe Leibowitz-Berthier, Commis d'office (avant Toiles de maître et Ground XO) s'est matérialisé à la bibliothèque, alors je l'ai englouti! (et maintenant, j'ai tout lu de l'auteur!)

Commis d'office
Hannelore Cayre
Métailié Suires, 2004 et 2017

"J'étais parvenu à atteindre une vitesse de croisière qui ne laissait présager en rien ma situation actuelle : une vie à deux avec un type de cent trente kilos qui ronfle au-dessus de mon oreille, dans une studette de neuf mètres carrés avec barreaux, exposée plein sud avec vue sur promenade - à Fresnes."

Même si tout se passe bien avec Dragan Dostom, son camarade de cellule, proxénète et albanais, qu'il initie aux subtilités des romans de Flaubert, pourquoi et comment l'avocat -commis d'office la plupart du temps- se retrouve-il en prison?

Haaaa c'est toute une histoire, où l'on croise des gens fâchés avec la loi et prêts à toutes les magouilles... Efficace et caustique, toujours.

"Nous étions mardi. Vendredi, je serais millionnaire et en taule."

lundi 24 juillet 2017

Une activité respectable / Le dernier amour d'Attila Kiss

Une activité respectable
Julia Kerninon
la brune au rouergue, 2017


J'avais tellement été épatée par Buvard, et les billets des blogs étaient si enthousiastes que j'ai honte d'avouer que je suis un peu restée à côté (un signe qui ne trompe pas : je n'ai noté aucun passage, rien, pas de marques pages en hérisson) . Étrange pour un récit sur -si j'ai bien compris- la rage de lecture et d'écriture, une rage vitale, croyez-moi! Est-ce le parti pris de l'auteur de distiller les informations au compte goutte, ce qu'elle veut et quand elle veut (et c'est son droit, c'est d'ailleurs virtuose), toujours est-il que j'ai eu du mal à m'attacher, me demandant de quoi vivaient ces gens là (j'ai eu la réponse, des métiers parfaitement ordinaires et honorables) et comment l'auteur s'y prenait pour vivre d'écriture et d'eau fraîche ? (j'ai eu la réponse, et là ça m'a enfin touchée, elle a vraiment ramé dur comme serveuse, mais c'était un peu tard, au point d'avoir pensé lors de son séjour à Budapest, 'elle aurait pu se contenter d'un an en Creuse, ça l'aurait fait aussi')

Inconsciemment -et cela prouve que Julia Kerninon est trop forte- je me suis lancée dans une longue phrase, c'est toujours bon signe quand l'auteur influe sur l'écriture de mon billet. Même si je n'ai pas fignolé l'affaire, hélas, et ne lui arrive pas à la cheville. Juste respect et reconnaissance de la part d'une lectrice vorace que son environnement familial ne poussait absolument pas à la lecture, preuve s'il en est que l'espoir est permis à tous. Un poil jalouse de l'auteur si bien entourée dès l'enfance, si douée, et -ne l'oublions pas - si bosseuse (ce qui n'est pas un reproche, Flaubert aussi était un bosseur).

Les avis de motspourmots, culturelle, les mots de la fin, tu vas t'abîmer les yeux, aifelle Cathulu Cuné Noukette Sandrine Yv (copié collé chez aifelle)

Budapest, donc, où l'on retrouve Attila Kiss

Le dernier amour d'Attila Kiss
Julia Kerninon
la brune au Rouergue, 2016

Je plaisantais avec la Creuse, bien sûr, mais ce roman aurait eu un chic fou à s'y dérouler, au lieu d'une Hongrie demeurée finalement assez vague ( Attila, la grande plaine, Budapest), mais sans rien d'indispensable. Attila Kiss, quinquagénaire ayant laissé derrière lui (quelque part pas loin), femme, maîtresse, enfants, bosse la nuit dans une fabrique de foie gras (et les pages 32 à 35 sont absolument inoubliables), peint dans son appartement, est assis un jour à une terrasse de café; arrive droit sur lui Theodora, viennoise, riche, elle s'assied, et voilà comment débute, non pas le roman, mais le dernier amour d'Attila Kiss.

Je suis vraiment désolée, mais ce roman m'a paru ressembler à la puszta, à savoir manquer d'aspérités. J'ai bien saisi ce qui sépare a priori les personnages, aimé l'évocation de la Hongrie cruellement démembrée au 20ème siècle, l'écriture de Julia Kerninon est admirable, la maîtrise du temps est parfaite, mais je suis passée à côté, légèrement agacée peut-être par le parti pris d'utiliser l’italique pour séparer dialogues et pensées, en dépit de 'pensait-il' et autres 'lui exposa-t-elle' (je pense que j'aurais suivi sans cela, Julia Kerninon, je le répète, se débrouille très bien)

Cela peut se révéler somptueux à lire:
"Dans le lit, avant qu'il éteigne la lumière, elle lui tendait ses boucles d'oreilles et il les regardait un instant, dans sa main en coupe, lourdes, rutilantes, comme les ornements de classe dont elle se défaisait pour coucher avec lui."

Les avis de motspourmots, culturelle, jostein, antigone,beaucoup plus laudateurs, alors faites-vous votre opinion, et n'écoutez pas la grincheuse! Julia Kerninon a un réel talent d'écrivain, pas de souci!

vendredi 21 juillet 2017

L'état des lieux

L'état des lieux
The Lay of the Land
Richard Ford
Editions de l'Olivier, 2008
Traduit par Pierre Guglielmina




Après Un week-end dans le Michigan (quelques avis) paru en 1986, traduit en français en 1999, et Independance, Prix Pulitzer 1996 (quelques avis), L'état des lieux (un avis) sera suivi par En toute franchise en 2015.

Ces quatre romans ont pour personnage principal Frank Bascombe, journaliste sportif puis agent immobilier. Dans Un week end dans le Michigan (techniquement, lui et son amie de l'époque n'y passent pas tout le WE de Pâques, mais c'est le titre français), le lecteur fait sa connaissance; Independance est centré sur la journée du 4 juillet, quelques années plus tard. Pour L'état des lieux, nous sommes en 2000, à l'approche de la fête de Thanksgiving.

Je n'ai pas écrit de billets pour les deux premiers, mais je garantis que la 'série' est plutôt addictive, même si l'on prend son temps et qu'il ne s'y passe rien de vraiment sensationnel. Mais on ne lâche pas. Les événements sont donc encore centrés sur quelques jours, avec des rappels plus ou moins développés de ce qui s'est passé durant les années où on a quitté Frank Bascombe. Cette fois, à cinquante-cinq ans, il doit faire face à un cancer et au départ de sa femme; il a quitté la ville de Haddam, même s'il garde des liens, son associé est un immigré d'origine tibétaine, bref il arrive quand même de l'inattendu, émouvant, tragique ou drôle. Frank Bascombe pose son regard sur le changement de l'Amérique; dans son petit coin, cette Amérique où point la dégringolade de l'immobilier, cette Amérique des traditions mais aussi des centres commerciaux envahissants. Et c'est juste le moment post élections où l'on recompte les voix en Floride.

Richard Ford décide de la vitesse de narration, déroulant les pensées et les souvenirs de Frank, à sa guise. Pas de suspense vraiment, mais un ensemble tellement plaisant que je signe pour le volume 4, En toute franchise. Je signale que c'est tellement bien bidouillé qu'on peut lire dans le désordre, d'ailleurs j'avais commencé par Indépendance...

"laisser la communauté faire ce que les communautés font très bien : supprimer la diversité, décourager l'individualité, punir l'exubérance et trouver le langage adapté pour que ça paraisse bon pour tout le monde - l'Amérique, ce n'est rien d'autre."
"Elle m'a dit que cet avocat avait d''excellentes relations', ce qui veut dire soir la mafia, soit le gouvernement, quelle que puisse être la différence."

Plus de 700 pages, donc éligible pour le Pavé de l'été chez Brize.

mercredi 19 juillet 2017

Ronce-Rose

Ronce-Rose
Eric Chevillard
Les éditions de Minuit, 2017

Ronce-Rose est une petite fille dont le lecteur lit le journal de bord au fur et à mesure.
"J'ai repris ma marche dans la ville, comme si je sortais de mon carnet pour continuer l'histoire en vrai, debout dans une phrase nouvelle qui va je ne sais où et que je ne pourrai écrire que quand je serai arrivée au bout."

Elle vit avec Mâchefer (son père, sans doute), lequel se livre à des activités mystérieuses (pour elle) avec son ami Bruce. Un jour Mâchefer ne revient pas, elle part à sa recherche. Son univers se réduisait à peu, Scorbella la très vieille dame, et un voisin unijambiste, maintenant elle va explorer le monde.

"Quand je marche derrière lui [le voisin]c'est la jambe droite qui lui manque mais quand on se croise, c'est la gauche. Je ne m'en étonne plus. Je pense qu'il a plus de pouvoirs que Scorbella pour danser comme ça d'un pied sur l'autre avec une seule jambe. Ou alors il alterne pour reposer celle qui porte tout son poids, peut-être.
J'aimerais bien savoir comment ça lui est arrivé. (...) Mâchefer me déconseille de le lui demander. Ce serait indiscret, d'après lui. Et si je lui parle alors de la jambe qu'il a encore? Mâchefer hoche la tête pour dire non plus. Pourtant là, je ne vois pas ce qu'il y aurait d'indiscret puisqu'il l'exhibe, franchement, s'il se vexe pour ça! Quand je le rencontre en tout cas, je fais bien attention à ne regarder que la jambe qu'il a encore pour ne pas le mettre mal à l'aise.
En même temps, je sais comment c'est fait, une jambe qu'on a encore, assez vite ça ne m'intéresse plus de la regarder et quand mes yeux se détournent d'elle, inévitablement je tombe dans le trou d'à côté, le trou de la jambe qui manque, je perds pied dedans moi aussi."

Sur 140 pages se déroule la quête de la petite, pleine de fraîcheur et d'imagination, à vue d'enfant, mais toujours claire pour l'adulte lecteur qui, lui, en sait plus. Poétique, tragique, avec ce petit décalage déjà aimé dans l'Autofictif du même auteur.

"Ce n'est pas tellement le problème du jambon, j'ai encore de l'avenir, la truie qui cherche ses neuf petits en couinant comme une truie qui a perdu ses neuf petits les trouvera dans notre congélateur. Ils sont en tranches, je préfère la prévenir. Je ne sais pas comment ça se passe, en cas de découverte brutale, si domine vraiment la joie des retrouvailles."

Bon, c'est Chevillard, vous l'aurez compris... Je me lirais bien un autre Autofictif, maintenant...

lundi 17 juillet 2017

La sonate à Bridgetower

La sonate à Bridgetower
(sonata mulattica)
Emmanuel Dongala
Actes sud, 2017


Quelle excellente idée a eu Emmanuel Dongala de nous offrir cette 'fiction fondée sur des faits réels", qui a dû lui valoir des heures de recherche documentaires, avec pour résultat un livre passionnant.

Il semblerait que George Bridgetower fut le premier dédicataire de la sonate à Kreutzer de Beethoven, rien que ça! Fils d'un noir originaire de la Barbade (ou bien?) et d'une polonaise (ou bien?), c'était un violoniste prodigue qui dès l'âge de 10 ans était connu à Paris puis Londres, poussé par son père qui se la jouait un peu Leopold Mozart, quoi. Paris en 1798, son ambiance culturelle et scientifique, puis Londres et Bath, et pour terminer, Vienne, prennent vie à nos yeux.

Musique, donc, mais on croise aussi le chevalier de Saint-Georges, Alexandre Dumas père, Herschel (et sa scientifique de soeur) , Lavoisier, Condorcet, on lit Laclos, Bernardin de Saint Pierre, on croise Olympe de Gouges, des défenseurs(seuses) de la cause féminine, et l'on découvre mille choses sur la vie des noirs à cette époque. Enfants serviteurs esclaves, en Angleterre, police des Noirs, en France, et des 'inconnus' tels Olaudiah Equiano et d'autres ayant laissé des Mémoires, les horreurs de l'esclavage arabe, le cruel destin post mortem d'Angelo Soliman.

Une lecture hautement recommandable (et élégamment écrite!) qui ouvrira les horizons du lecteur.

En 1800, vers l'âge de 20 ans https://fr.wikipedia.org/wiki/George_Bridgetower
Les avis de Gangoueus, Brize, Hélène, lecture écriture,
Lecture commune avec A Girl (merciiiiiiii): son billet

vendredi 14 juillet 2017

La vie du livre contemporain

La vie du livre contemporain
Etude sur l'édition littéraire 1975-2005
Olivier Bessard-Banquy
Presses Universitaires de Bordeaux & du Lérot, 2009


Promis, ma fixette sur le rayon 070 de la médiathèque en général, et Olivier Bessard-Banquy en particulier va connaître une pause! 325 pages pour ce nouvel opus, toujours excellemment présenté (fluide, clair, élégant, intelligent, intéressant), mais -et ce n'est pas la faute de l'auteur- un poil plus technique que le précédent. La vie éditoriale française se met à devenir aussi glamour que l'économie, et ce ne sont pas toujours des amoureux des livres qui mènent les barques. De gros sous font le printemps, les auteurs continuent à changer de crèmerie, ou pas. Ah on ne peut pas avoir un assassinat d'éditeur à tous les coups (tout de même une fatwa sur les éditeurs de Salman Rushdie), et les situationnistes envoyant des lettres d'injures à Gallimard font un flop, l'éditeur en a vu d'autres. "Les lettres des situationnistes sont des bluettes comparées à celles signées Louis-Ferdinand Céline." Quelques auteurs tels Sagan mettent un peu de fantaisie, mais tout cela paraît fort sérieux.

C'est l'époque d'Apostrophes, sans vraiment de descendance depuis 1990. Je ne connais pas LGL, est-ce prescripteur comme l'émission de Pivot?

"Les professionnels comprennent-ils alors le bien-fondé d'une politique éditoriale intransigeante? Il ne s'agit pas seulement pour l'éditeur littéraire de capitaliser des succès à court, à moyen comme à long terme, il s'agit aussi pour lui de donner envie aux meilleurs auteurs de demain de venir publier dans sa maison. Et surtout de vouloir y rester le jour du succès venu."

Qui se souvient de Sulitzer? Vraiment un phénomène intéressant.
Où l'on voit aussi apparaître l'ancêtre des liseuses. Chère et peu performante.

A lire ce livre (j'ai zappé quelques passages un peu trop techniques sur les achats et ventes) je m'aperçois que bien des 'petites maisons' doivent leur succès à leur spécialisation dans tel ou tel domaine, par exemple Picquier et la littérature asiatique, et qu'il m'arrive souvent de faire confiance à un éditeur pour ses choix que je pressens de qualité (d'autres éditeurs paraissant un peu plus interchangeables dans leurs offres)

mercredi 12 juillet 2017

Vernon Subutex 3

Vernon Subutex 3
Virginie Despentes
Grasset, 2017


Oui, 3, et en dépit d'un utile Index des principaux personnages déjà fréquentés dans les 1 et 2, mieux vaut démarrer par iceux.
Si la rencontre se fait, alors la lecture du 3 devient incontournable.

Autour de Vernon et de ses 'convergences', se retrouve la même bande; il se défend d'être un gourou, mais il se passe 'quelque chose'.
"- Kiko, t'a encore écouté France culture? Arrête. On te l'a déjà dit. Ça se mélange super mal avec la cocaïne. Je suis DJ, je ne suis pas un putain de prophète."

Après l'expédition punitive contre Dopalet (me souviens plus de la raison d'ailleurs, peu importe) Céleste et Aïcha sont à l'abri, mais pour combien de temps? La Hyène veille, mais elle ne peut se trouver partout. Après le décès de Charles, Véro hérite, avec les conséquences que l'on apprendra.

Voilà, c'est toujours bien fichu, bien rythmé sans temps morts, avec cette écriture punchy que je n'oserais dire bien burnée (vous voyez ce que je veux dire), les réflexions et opinions personnelles pas forcément partagées par Despentes et pas forcément politiquement correctes, mais qui vous bougent quelques neurones et les sourcils, le tout dans une France des années 2015 et 2016, et les événements que tous ont en tête. On en ressort la tête à l'envers, après un finale explosif, et un goût amer dans la bouche.

Hautement recommandable.

(suite de la conversation voir la citation plus haut:
J'y ai bien réfléchi, il faut raconter l'histoire. Je pense qu'on devrait contacter uen romancière; J'ai commencé à faire une short-list.
- Arrête France Culture. Tu fatigues tout le monde avec ça.
(...) Il insiste
- Je pense à embaucher une romancière, assez douée pour mettre ça en forme, mais qui n'ait pas non plus trop de succès, sinon elle n'en fera qu'à sa tête et au bout de trois mois elle va nous casser les couilles avec des idées à elle dont on ne voudra pas entendre parler.)

Les avis de Papillon, Eva, sibylline de lecture écriture, Le bouquineur,

lundi 10 juillet 2017

Avant que les ombres s'effacent

Avant que les ombres s'effacent
Louis-Philippe Dalembert
Sabine Wespieser, 2017


"Avant que fraîchisse le jour, que s'effacent les ombres..." Cantique des cantiques, II, 17.

Ayant juste lu rapidement des billets sur ce roman (motspourmots, aifelle) j'avais retenu qu'il s'agissait d'une histoire de juifs réfugiés à Haïti, et que c'était formidable. Donc que je voulais le lire!

"Ces deux dernières années [on est en 1939], Haïti avait accueilli quelques dizaines de Juifs, venus de Pologne et d'Allemagne pour la plupart. Les informations récentes avaient amené le nouveau gouvernement à prendre des décisions radicales, en signe de désaveu officiel de la politique de ce monsieur Adolf. Trois semaines plus tôt, il avait publié un décret-loi permettant à tout Juif qui le souhaitait de bénéficier de la naturalisation in absentia."

Où l'on apprend que l'île n'a pas hésité à accueillir des réfugiés, et, en 1941, son président à déclarer la guerre à l'Allemagne et l'Italie. Ne pas se moquer de cette dernière décision! Alors qu'à cette époque le Saint Louis avait erré à la recherche d'un point de chute, pour revenir en Europe...

Sur la base de faits réels, Louis-Philippe Dalembert imagine les aventures de la famille Schwartzberg, et particulièrement de Ruben, médecin désormais presque centenaire, accueilli dans l'île en 1939. La Pologne, puis Berlin, d'où ils s'échappent par divers moyens. Grâce à Ruben, dont l'enfance a été marquée par De l'égalité des races humaines de Anténor Firmin, l'on fera connaissance de personnages forts dans le Paris joyeux et fêtard des années 30, et de la magie des Caraïbes.

Je préfère ne pas tout raconter, car c'est un vrai bonheur de découvrir cette histoire et surtout, pour moi, l'écriture vive, truculente parfois, poétique ailleurs, vraiment une belle découverte (et je pourrais revenir à cet auteur)

"S'il [Ruben] avait accepté de revenir sur cette histoire, c'était pour les centaines, les millions de réfugiés qui, aujourd'hui encore, arpentent déserts, forêts et océans à la recherche d'une terre d'asile. Sa petite histoire personnelle n'était pas, par moments, sans rappeler la leur. Et puis, pour les Haïtiens aussi. Pour qu'ils sachent, en dépit du manque matériel dont ils avaient de tout temps subi les préjudices, du mépris trop souvent rencontré dans leur propre errance, qu'il restent un grand peuple. pas seulement pour avoir réalisé la plus importante révolution du XIXe siècle, mais aussi pour avoir contribué, au cours de leur histoire, à améliorer la condition humaine. Ils n'ont jamais été pauvres en générosité à l'égard des autres peuples, le sien en particulier; Et cela, personne ne peut le leur enlever."

Un avis de claudia lucia, sandrine, sous la grêle osée,

vendredi 7 juillet 2017

Fendre l'armure / Briser la glace

Fendre l'armure
Anna Gavalda
le dilettante, 2017


J'aime bien Anna Gavalda, j'ai lu quelques romans et recueils de nouvelles. De plus j'ai lu et entendu du bien sur ce dernier opus. J'ai donc foncé, espérant retrouver la Anna Gavalda que j'aime, celle qui m'avait épatée avec des nouvelles, il y a longtemps. Parce que la dame s'en tire bien, rayon nouvelles, et ce n'est pas courant.

J'aurais voulu aimer, en fait j'ai aimé, mais, comment dire? Un poil de too much et de ficelles apparentes, un poil longuet parfois, des métaphores tirées jusqu'à plus soif. Pourtant ces histoires se lisent bien, les différentes voix sont différenciées par le style, il n'y a pas forcément de chute (c'est TB ainsi) et parfois le lecteur doit choisir (et c'est TB). Mais je n'aime pas avoir parfois l'impression de violons sirupeux jouant dans le fond (mon petit coeur est dur)(mais j'ai quand même frémi quand le petit gamin n'avait pas le réflexe koala)(et quand le père comprend ce qu'est avoir du mal à respirer)

"Ho, protestas-tu, je n'en suis qu'au préambule, là. C'est après que ça devient triste.Garde un peu de larmes pour plus tard sinon tu ne vas pas compatir comme il faut et je serai déçue."

"Tu en connais des hommes qui divorcent pour leur maîtresse, toi? Avec des enfants en bas âge? Et un crédit? Et une Audi? Et un chien? Et un lapin nain? Et une culpabilité? Et une maison de famille à la Trinité? Non, bien sûr que non."

Les avis bien plus positifs et enthousiastes de cathulu, cuné, ludovic chez leiloona,


Aucun rapport avec: Briser la glace (fendre/briser?) mais je veux en parler car là c'est plus mon créneau de lecture, et tant qu'à avoir des avis brefs, on les réunit.

Briser la glace
Julien Blanc-Gras
Paulsen, 2016



Juste quelques impressions : comme j'ai fait un voyage en gros dans le même coin (mais bien moins long) je garantis que Julien Blanc Gras a parfaitement mis en valeur l'ambiance, la beauté, les problèmes, etc.du Groenland, et ceci avec un humour léger comme on aime. Plein de détails vrais.
Je recommande fortement ce récit, et durant ma lecture j'ai eu en mémoire les photos prises en août dernier.

Allez, je donne le lien vers mes billets de voyage, franchement, le Groenland, quel voyage!
ici et  (plein les yeux...)
Les avis de Fanja,

mercredi 5 juillet 2017

Le grand roman des maths

Le grand roman des maths
De la préhistoire à nos jours
Mickaël Launay
Flammarion, 2016


Il ne faut pas abuser des bonnes choses, donc après Alex au pays des chiffres , j'ai volontairement laissé passer quelques mois avant d'aborder un sujet similaire, à savoir l'histoire des mathématiques. Parce que quand même je risquais de retrouver quelques personnages (Pythagore et al-Khwarizmi au hasard!) et de connaître quelques épisodes.Amis lecteurs fâchés avec les maths, ne craignez rien, l'auteur ne désire pas surchauffer vos neurones, juste proposer de belles histoires (vraies) et démolir quelques a priori.

Au point qu'au départ je lisais d'un œil distrait, sans fatiguer, appréciant les incursions culturelles permettant de tourner autour du pot sans perdre le lecteur. Par exemple Bagdad, fondée au 8ème siècle par le calife Al-Mansûr, une ville paraissant fabuleuse (à l'époque...). Appelée la Cité de la Paix, la cité des lumières, la capitale du monde...

Mais ce qui est bien avec les mathématiques, c'est qu'on apprend toujours. J'ai découvert une méthode drôlement bien pour expliquer facilement pourquoi le produit de deux négatifs est positif (problème embêtant beaucoup Stendhal) et d'où tombent ces définitions de trigonométrie.

C'est bourré d'informations reliées à notre quotidien, prouvant l'utilité manifeste des mathématiques même si on ne s'en rend pas compte (enlève les maths, t'as plus de GPS) dans plein de domaines (informatique, statistiques, économie, météorologie...)

Et même, et même... Sachez que l'on peut être sensible à la beauté et à l'élégance en mathématiques (si, si), et je suis restée comme deux ronds de flan devant les photos  de l'ensemble de Mandelbrot (un truc assez simple, sans utilité manifeste, mais beau)(voir ici )

Et ce débat sur la nature des mathématiques : "sont-elles des inventions humaines ou ont-elles une existence indépendante?" (vous avez quatre heures)

Pour terminer, j'ai apprécié énormément que l'auteur cite pas mal de femmes mathématiciennes au cours de l'histoire, il y en a , mais on n'en parle pas souvent, alors merci!

L'auteur propose des videos très sympa sur internet (site micmaths)

Un grand merci à Fanja (son billet)

lundi 3 juillet 2017

Contrepoint

Contrepoint
Contrapunt
Anna Enquist
Actes sud, 2010
Traduit par Isabelle Rosselin


Attention, ami lecteur, ce roman est dangereux! Il m'a conduite à dévaliser le rayon Bach / Variations Goldberg de ma médiathèque. Scott Ross, Gustav Leonhardt ou Glenn Gould? D'après la postface du roman d'Anna Enquist il semble que "Bach accorde une large marge de manœuvre à l'interprète". Clavecin comme Bach ou piano?

Donc, Bach. JSB quoi. The boss. Présent en arrière plan, dans sa vie familiale, sa mort. Une femme s'attaque aux Variations Goldberg au piano, ou plutôt elle s'y remet, car pianiste professionnelle, elle connaît déjà mais a la volonté de tout décortiquer, les arias encadrant les 30 variations, comme autant de chapitres du roman. Sans chronologie, chaque morceau la replonge dans un épisode de la vie de sa fille, enfant, étudiante, en vacances, à l'école; les petits ou grands événements de la famille sont évoqués, en rapport avec la variation musicale. Il semble que je puisse dévoiler que justement sa fille est décédée, et que ce retour vers l'oeuvre de Bach est pour la mère le moyen de supporter l'insupportable.

Ai-je besoin de préciser qu'il s'agit d'un très très beau roman, baignant dans la lumière de la musique de Bach?

Les avis de biblioblog, le nez dans les livres, cathulu,

PS : J'apprends juste qu'une transcription pour quatuor à cordes sera jouée pas loin de chez moi en 2018, de plus par un quatuor de musiciennes. Je veux!